Avis n° 40 (2020-2021) de M. Jean-Pierre MOGA , fait au nom de la commission des affaires économiques, déposé le 13 octobre 2020

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N° 40

SÉNAT

SESSION ORDINAIRE DE 2020-2021

Enregistré à la Présidence du Sénat le 13 octobre 2020

AVIS

PRÉSENTÉ

au nom de la commission des affaires économiques (1) sur le projet de loi de programmation , adopté par l'Assemblée nationale après engagement de la procédure accélérée, de la recherche pour les années 2021 à 2030 et portant diverses dispositions relatives à la recherche et à l' enseignement supérieur ,

Par M. Jean-Pierre MOGA,

Sénateur

(1) Cette commission est composée de : Mme Sophie Primas , présidente ; M. Alain Chatillon, Mme Dominique Estrosi Sassone, M. Patrick Chaize, Mme Viviane Artigalas, M. Franck Montaugé, Mme Anne-Catherine Loisier, MM. Jean-Pierre Moga, Bernard Buis, Fabien Gay, Henri Cabanel, Franck Menonville, Joël Labbé , vice-présidents ; MM. Laurent Duplomb, Daniel Laurent, Mme Sylviane Noël, MM. Rémi Cardon, Pierre Louault , secrétaires ; M. Serge Babary, Mme Martine Berthet, M. Jean-Baptiste Blanc, Mme Florence Blatrix Contat, MM. Michel Bonnus, Denis Bouad, Yves Bouloux, Jean-Marc Boyer, Alain Cadec, Mme Anne Chain-Larché, M. Patrick Chauvet, Mme Marie-Christine Chauvin, M. Pierre Cuypers, Mmes Françoise Férat, Catherine Fournier, M. Daniel Gremillet, Mme Micheline Jacques, MM. Jean-Marie Janssens, Jean-Baptiste Lemoyne, Mmes Valérie Létard, Marie-Noëlle Lienemann, MM. Claude Malhuret, Serge Merillou, Jean-Jacques Michau, Mme Guylène Pantel, MM. Sebastien Pla, Christian Redon-Sarrazy, Mme Évelyne Renaud-Garabedian, MM. Olivier Rietmann, Daniel Salmon, Mme Patricia Schillinger, MM. Laurent Somon, Jean-Claude Tissot .

Voir les numéros :

Assemblée nationale ( 15 ème législ.) :

3234 , 3339 et T.A. 478

Sénat :

722 (2019-2020) et 32 (2020-2021)

L'ESSENTIEL

Réunie le mardi 13 octobre 2020, sous la présidence de Mme Sophie PRIMAS, la commission des affaires économiques a examiné le rapport de M. Jean-Pierre MOGA sur les articles dont elle s'est saisie pour avis simple 1 ( * ) du projet de loi de programmation de la recherche pour les années 2021 à 2030 et portant diverses dispositions relatives à la recherche et à l'enseignement supérieur, adopté par l'Assemblée nationale le 23 septembre après engagement de la procédure accélérée.

Attendu depuis longtemps, le projet de loi de programmation de la recherche apparaît comme une occasion manquée. Son ambition était de donner un nouveau souffle à la recherche en France. Il s'agit, en réalité, d'un texte programmatique se concentrant sur la recherche publique, peu contraignant dans sa trajectoire financière et comprenant quelques mesures d'ajustement bienvenues mais non structurelles. Il est dommage que le Gouvernement n'en profite pas pour expliciter une stratégie de recherche claire permettant de déterminer des priorités. Néanmoins, le Gouvernement fait un pas essentiel vers l'absolue nécessité de revaloriser la recherche publique en proposant une trajectoire budgétaire pluriannuelle.

C'est également un projet de loi « fourre-tout », qui aborde des problématiques relatives aux secteurs agricole et spatial, qui relèvent de la compétence de la commission des affaires économiques.

Sous réserve de l'adoption des amendements qu'elle propose, la commission a émis un avis favorable à l'adoption des articles du projet de loi dont elle s'est saisie pour avis.

Les amendements seront examinés par la commission de la culture, de l'éducation et de la communication du Sénat lors de sa réunion du mercredi 14 octobre 2020.

I. LA RECHERCHE, PILIER CHANCELANT DE NOTRE ÉCONOMIE FACE À UNE CONCURRENCE TOUS AZIMUTS

Comme le précise très justement l'exposé des motifs du projet de loi de programmation de la recherche, la recherche scientifique et technologique 2 ( * ) est « un pilier de notre souveraineté nationale » parce qu'elle « produit les connaissances nécessaires au progrès économique et social » et « garantit la capacité de notre économie à croître sur le fondement de savoirs nouveaux ». La R&D favorise la croissance de notre économie à travers les gains de productivité et le renforcement de la compétitivité hors-prix des produits. Elle est aussi le moyen de répondre aux grands défis qui se posent à notre économie, notamment celui de la transition environnementale.

Notre pays demeure une grande puissance scientifique : au-delà des grandes réussites individuelles se traduisant par des récompenses internationales, quelques indicateurs le démontrent : notre pays se classe 6 e en termes de publications internationales 3 ( * ) et nos universités sont de plus en plus présentes dans le classement de Shangaï 4 ( * ) . Pourtant, ce pilier de notre économie et de notre souveraineté est de plus en plus chancelant .

Ainsi, comme notre commission le rappelle à chaque budget, l'effort de recherche et développement 5 ( * ) stagne, dans notre pays, depuis les années 1990 , autour de 2,25 % de notre produit intérieur brut ( voir graphique ci-dessus ), en deçà de la moyenne des pays de l'OCDE. Pire, entre 2014 et 2017, notre effort de recherche a diminué, en passant de 2,28 % à 2,19 % du PIB. En conséquence, nous sommes passés de la quatrième à la douzième place des pays de l'OCDE sur cet indicateur entre le début des années 1990 et aujourd'hui. De nombreux pays ont déjà atteint l'objectif fixé au niveau européen dans les années 2000 de 3 % du PIB : en Europe, il en va notamment ainsi de l'Allemagne, de la Suède, de la Finlande, de l'Autriche ou de la Suisse ; au-delà de notre continent, la Corée du Sud, Israël et le Japon sont également au-dessus de la barre des 3 %. Si l'on se compare à l'Allemagne, celle-ci ambitionne déjà de parvenir bientôt à 3,5 % du PIB et, en valeur en parité de pouvoir d'achat, la dépense intérieure de R&D française est deux fois inférieure à celle de l'Allemagne ( voir graphique ci-dessus ) !

Cette diminution de notre effort de recherche et l'une des explications du positionnement encore perfectible de la France en matière d'innovation, tant par le faible nombre de « licornes » 6 ( * ) que dans les classements internationaux relatifs à l'innovation : la France n'est que 12 e au classement mondial établi par l'Organisation mondiale de la propriété intellectuelle 7 ( * ) et 10 e au classement européen établi par la Commission européenne 8 ( * ) .

Or, la bataille économique se joue, aujourd'hui plus que jamais, sur le terrain scientifique et technologique . Qu'il s'agisse des technologies numériques - calcul quantique, cybersécurité, intelligence artificielle, internet des objets, 5G, blockchain , robotisation... - ou des technologies propres - propulsion électrique ou hydrogène... - les puissances mondiales sont engagées dans une course à la technologie pour sécuriser leur place sur les marchés de demain. Pour garder sa place au sein des grandes puissances, la France doit donc être au meilleur niveau de la recherche mondiale, et au meilleur niveau de valorisation de cette recherche.

Si l'article 1 er du projet de loi se fixe pour objectif d'atteindre, à terme, un effort de recherche de 3 % du PIB , le Gouvernement propose un texte qui est centré sur 37 % de l'effort de recherche en France, c'est-à-dire la recherche publique.

II. RENOUER AVEC L'AMBITION INITIALE DU PROJET DE LOI

La commission regrette que le projet de loi soit centré uniquement sur les établissements de recherche rattachés au ministère de la recherche (A). Elle plaide pour un renforcement de l'ambition budgétaire portée par cette loi (B).

A. LE GOUVERNEMENT RENONCE À PRÉSENTER UNE STRATÉGIE GLOBALE ET COHÉRENTE N'ABORDANT PAS UN GRAND NOMBRE DE DISPOSITIFS PUBLICS DE FINANCEMENT DE LA R&D EN FRANCE

De nombreux éléments de financement public de la R&D ne sont pas abordés, de telle sorte qu'il ne s'agit pas de la loi « recherche et innovation » du quinquennat, mais bien de la loi « recherche » du ministère de l'enseignement supérieur, de la recherche et de l'innovation. Il n'y a donc aucune vision globale du pourtant nécessaire continuum entre recherche fondamentale et innovation.

Le Gouvernement manque ici une occasion d'impulser un grand chantier pour en finir avec le morcellement des politiques de recherche et développement. Il fournit une information lacunaire au Parlement, aux citoyens et aux principaux destinataires de la loi, qui sont contraints à un jeu d'addition de l'ensemble des dispositifs et se heurtent à une complexité accrue du fait de leur portage par des instances différentes et de leur pilotage selon des modalités diverses.

1. Le plan de relance, alibi de l'attrition des crédits budgétaires affectés à la R&D soutenue par le ministère de l'économie, des finances et de la relance et par le ministère de la transition écologique ?

Le projet de loi a été élaboré et est porté par le ministère de l'enseignement supérieur, de la recherche et de l'innovation. C'est pourquoi la trajectoire budgétaire qu'il propose en son article 2 ne porte que sur les programmes budgétaires qui lui sont confiés (programmes n° 150, 172 et 193 au sein de la mission budgétaire interministérielle « recherche et enseignement supérieur » (ci-après « Mires »)), et qui financent l'essentiel de l'écosystème de la recherche publique civile, à savoir le ministère de l'enseignement supérieur, de la recherche et de l'innovation, l'Agence nationale de la recherche (ANR), la recherche universitaire, les organismes de recherche qui lui sont rattachés et le budget de la politique spatiale civile 9 ( * ) , pour un total, en 2020, de l'ordre de 12,5 milliards d'euros.

En revanche, les programmes de R&D des établissements d'enseignement supérieur et de recherche principalement rattachés au ministère de l'économie, des finances et de la relance 10 ( * ) , au ministère de la transition écologique 11 ( * ) et au ministère de l'agriculture et de l'alimentation 12 ( * ) ne sont pas concernés par la trajectoire définie par la loi. Au sein de la mission « recherche et enseignement supérieur », c'est ainsi environ 2,5 milliards d'euros qui sont écartés, auxquels il faudrait ajouter le milliard d'euros de R&D financée sur la mission « défense », la R&D de défense 13 ( * ) n'étant pas concernée par le projet de loi, tout comme la R&D duale pourtant rattachée à la Mires.

Le rapporteur s'interroge sur les motifs - autres que le manque de coordination entre ministères - justifiant une telle différence de traitement au sein des programmes budgétaires soutenant la R&D . Il est ainsi contradictoire d'afficher des priorités dans le plan de relance - en faveur de la transition environnementale, en faveur de l'innovation industrielle et des relocalisations - et de ne pas les inscrire dans le temps long, dans une trajectoire de crédits budgétaires , au sein des crédits des programmes 190 et 192.

Le projet de loi ne précise pas son articulation avec les programmes d'investissements d'avenir, le plan de relance, les appels à projets lancés dans le cadre du conseil de l'innovation et financés par le fonds pour l'innovation et l'industrie, les appels à projets des ministères ou d'autres agences publiques, telle que l'Agence de l'environnement et de la maîtrise de l'énergie.

Lors des auditions, il a souvent été répondu qu'il fallait additionner les crédits du plan de relance aux crédits de la loi de programmation. Or, le plan de relance et les programmes d'investissements d'avenir n'ont pas vocation à prendre le relais de crédits pérennes .

Les dispositions du plan de relance intéressant la recherche et l'innovation

Le plan de relance contient les deux premières années d'un quatrième programme d'investissements d'avenir (« PIA 4 »), qui aura vocation à :

- sur la recherche amont , au sein d'une enveloppe de 2,95 milliards d'euros également utilisée pour d'autres actions :

* financer des projets de recherche de grande ampleur et répondant à des défis sociétaux majeurs (l'action « programmes prioritaires de recherche » sera donc amplifiée), et augmenter les moyens de l'ANR (à hauteur de 400 millions d'euros) ;

* renforcer la valorisation de la recherche publique en poursuivant le financement des sociétés d'accélération du transfert de technologies (ou « SATT » structures publiques créées dans le cadre des programmes d'investissements d'avenir pour insuffler la culture de la valorisation dans les organismes et universités) ;

* poursuivre le financement de structures de recherche partenariale (IRT - instituts de recherche technologique - et ITE - instituts pour la transition énergétique) ;

- sur la R&D d'aval :

* financer les stratégies sectorielles portant sur des technologies clés (cybersécurité, technologies quantiques...), pour un montant de 2,6 milliards d'euros ;

* soutenir les entreprises innovantes à travers les aides à l'innovation de BPIfrance, les concours d'innovation et le « soutien aux projets structurants de R&D » pour un montant de 1,9 milliard d'euros.

Le plan de relance contient également des mesures visant à « préserver l'emploi dans la R&D » (soutien du maintien dans l'emploi en permettant une mise à disposition de chercheurs privés auprès des laboratoires publics, soutien aux jeunes diplômés ou docteurs par subvention). Une enveloppe de 300 millions d'euros serait mobilisée.

Au-delà du plan de relance, le secrétaire général pour l'investissement estime que, sur les 20 milliards d'euros du PIA 4, 7,5 milliards d'euros ont vocation à alimenter l'enseignement supérieur et la recherche et 12,5 milliards d'euros seront utilisés pour « financer des investissements exceptionnels sur quelques enjeux de transformation économique ».

Source : dossier de presse du plan de relance ;
interview du secrétaire général pour l'investissement à AEF, 9 octobre 2020.

2. L'absence de stratégie claire sur les dépenses fiscales en soutien à la R&D privée s'explique par un nouveau coup de rabot sur le crédit d'impôt recherche en projet de loi de finances pour 2021

L'effort de recherche privé représente les deux tiers de l'effort de recherche de notre pays . Nous comptons de nombreuses entreprises très impliquées en R&D, comme le montre notre 3 e place au classement des 100 premiers innovateurs mondiaux de Thomson Reuters, avec cinq entreprises listées. Cet effort privé est fortement soutenu par les pouvoirs publics : il existe en France un grand nombre de dispositifs destinés à soutenir la R&D et l'innovation privée, à tel point que la France est le deuxième État à financer le plus la recherche privée au sein de l'OCDE, avec environ 10 milliards d'euros de dépenses publiques en ce sens chaque année. Malgré cet effort public notable, les dépenses de R&D des entreprises ne représentent que 1,44 % du PIB, contre près de 2 % en Allemagne.

Pourtant, le Gouvernement a fait le choix de présenter un texte qui se focalise avant tout sur la recherche publique, le rapport annexé se contentant de lister les quelques mesures contenues dans la loi considérées comme de nature à créer un « effet de levier » - qui reste hypothétique et n'est pas documenté - sur les dépenses intérieures de R&D. Ainsi, contrairement à la loi de 2006, le Gouvernement refuse de s'engager sur les dépenses fiscales en faveur de la R&D 14 ( * ) .

À cet égard, le rapporteur relève l'écart existant entre la parole publique d'un Gouvernement s'engageant à sanctuariser le crédit d'impôt recherche et ses actes , consistant à le raboter chaque année, comme en témoigne à nouveau le projet de loi de finances pour 2021, dans son article 8.

Il convient en revanche de saluer les mesures tenant à la souveraineté technologique et aux relocalisations industrielles insérées dans le plan de relance, de nature à renforcer le poids de l'industrie dans notre économie et donc les dépenses de recherche privées. En effet, l'écart de performance entre la France et l'Allemagne quant à l'effort privé de recherche est généralement expliqué par la différence de structure entre les économies de nos deux pays (la part de l'industrie étant moins importante dans notre pays qu'en Allemagne 15 ( * ) ), et non par la faible intensité en R&D de nos entreprises : il est estimé qu'à structure constante, l'effort de recherche privé atteindrait 2,7 % du PIB, soit, ajouté à l'effort de recherche public, près de 3,5 % du PIB.

3. À la recherche d'une stratégie commune avec les collectivités territoriales

Les collectivités territoriales , qui financent la R&D à hauteur d'environ 900 millions d'euros par an, financement principalement assumé par les régions - dont le sénateur Jean-François Rapin a montré 16 ( * ) l'importance dans l'écosystème de la recherche et de l'innovation -, ne sont évoquées qu'à la marge et aucune stratégie commune État-régions ne semble avoir été définie dans le cadre de la préparation de la loi . Il importe, en conséquence, que la nouvelle génération de contrat de plan État-régions en cours de définition accorde toute sa place à une politique coordonnée en faveur de la R&D 17 ( * ) .

B. REHAUSSER L'AMBITION D'UNE TRAJECTOIRE PEU CRÉDIBLE REPOUSSANT L'ATTEINTE DE L'OBJECTIF D'UN EFFORT PUBLIC DE RECHERCHE À 1 % DU PIB À LA DÉCENNIE 2030

1. Poursuivre rapidement l'objectif d'un effort public de recherche à 1 % du PIB

La principale ambition du projet de loi est de revaloriser les moyens dédiés à la recherche publique . Les maux de la recherche publique qui justifient cette ambition sont bien connus : les chercheurs publics sont moins bien payés (en 2013, le salaire d'entrée d'un chercheur était inférieur de 37 % par rapport à la moyenne observable dans les pays de l'OCDE en parité de pouvoir d'achat 18 ( * ) ) ; ils sont soumis à de plus en plus de tâches administratives si bien qu'ils ont le sentiment de passer leur temps à rédiger des dossiers administratifs pour répondre à des appels à projets - issus de l'Agence nationale de la recherche, de l'Agence nationale de l'environnement et de la maîtrise de l'énergie, des appels à projets du fonds pour l'innovation et l'industrie, de BPIfrance, des appels à projets des ministères, des appels à projets européens, des appels à projets des régions... -, sans pouvoir se concentrer sur leur métier. Cela génère une perte d'attractivité se traduisant, entre autres, par une fuite de nombreux chercheurs à l'étranger et par une diminution du nombre de jeunes se tournant vers les carrières de la recherche.

Pour autant, la recherche publique française reste particulièrement performante, comme le montre le nombre de publications de haut niveau déjà évoqué. Cette performance est d'autant plus remarquable que l'effort public de recherche a baissé entre les années 1990 et aujourd'hui : il est passé de près de 1 % du PIB à moins de 0,8 % sur la période. Si ce chiffre reste plus élevé que la moyenne de l'OCDE (à 0,6 % du PIB), on observe :

- comme le souligne le rapport annexé, une nette tendance à la hausse de la part publique de l'effort de recherche entre 2000 et 2016 aux États-Unis, en Chine, en Corée du Sud, en Espagne et, plus largement, au sein de l'OCDE et de l'Union européenne, et ce à un rythme bien plus soutenu qu'en France ;

- plus près de nous, en Allemagne, la part publique de l'effort de recherche est de près de 1 % (0,93 %), et la Commission européenne vient de demander aux États membres de porter leur effort public de R&D à 1,25 % du PIB 19 ( * ) .

Comme évoqué dans l'avis budgétaire de la commission sur le projet de loi de finances pour 2020, il apparaît nécessaire - même si cet indicateur dépend en partie de la conjoncture économique - , pour se hisser au meilleur niveau, de fixer un objectif de financement public de la recherche 20 ( * ) à hauteur d'1 % du PIB atteignable rapidement . L' article 1 er du projet de loi, tel que modifié par l'Assemblée nationale 21 ( * ) , fait sien l'objectif de parvenir à un effort public de recherche à 1 % du PIB. Mais le projet de loi repousse son atteinte à la décennie 2030-2040 et ne démontre pas en quoi cet objectif pourrait être atteint.

C'est pourquoi la commission a adopté, sur proposition du rapporteur, un amendement ( COM-95 ) visant à fixer l'année 2027 comme horizon de l'atteinte des objectifs de 3 % du PIB pour l'effort de recherche et de 1 % du PIB pour l'effort public de recherche .

2. Fixer une trajectoire à horizon 2027 plutôt que 2030

Le projet de loi prévoit, au I de l'article 2 , une trajectoire de crédits allant jusqu'à 5 milliards d'euros supplémentaires par an en 2030 en vue de financer diverses mesures (voir encadré) 22 ( * ) .

Les mesures financées par la trajectoire budgétaire

La ventilation de l'augmentation des crédits n'est pas clairement détaillée par le texte. Selon les rapporteurs de l'Assemblée nationale, la hausse du programme 172 serait notamment répartie entre :

- l'Agence nationale de la recherche (à raison d'environ 140 millions d'euros se rajoutant chaque année de 2021 à 2027 pour atteindre un supplément annuel de 1 milliard d'euros ; voir ci-dessous) ;

- les financements de base des laboratoires de recherche publique rattachés au ministère de la recherche (qui augmenteraient dès 2021 de 80 millions d'euros par an en moyenne) ;

- les crédits alloués aux organisations scientifiques internationales (qui progresseraient à partir de 2021 d'en moyenne 20 millions d'euros par an) et aux très grandes infrastructures de recherche (dont la progression est incluse dans la subvention versée aux organismes de rattachement de ces infrastructures) ;

- les actions du ministère relatives au pilotage de la recherche et de l'innovation qui seraient renforcées à partir de 2021 de 25 millions d'euros supplémentaires, en moyenne, chaque année.

S'agissant du personnel , les nouveaux moyens permettraient :

- d'augmenter de 20 % le nombre de contrats doctoraux ;

- d'augmenter de 5 200 d'ici à 2030 le nombre d'emplois sous plafond des établissements de recherche rattachés au ministère de la recherche ;

- de recruter 15 000 contractuels hors plafond ;

- de revaloriser tous les métiers de la recherche, dont une hausse de 30 % de la rémunération des nouveaux contrats doctoraux entre 2021 et 2023, et la garantie qu'aucun jeune scientifique recruté comme chargé de recherche ou maître de conférences ne perçoive une rémunération inférieure au double du salaire minimum de croissance (Smic).

Au total, selon la ministre de l'enseignement supérieur, de la recherche et de l'innovation, « sept tranches cumulatives de 92 millions d'euros chaque année - soit 644 millions par an en 2027 - sont prévues afin de mettre un terme aux différences indemnitaires entre les corps du ministère, puis d'engager une phase de convergence qui permettra enfin aux personnels qui font vivre la recherche d'être traités avec la même considération que les autres agents de l'État à l'horizon 2030 ».

La trajectoire du programme 150 ne fait, selon le Gouvernement, que traduire les répercussions des mesures portées par la loi, à savoir la réforme des régimes indemnitaires, la revalorisation de la rémunération des nouveaux maîtres de conférences, l'accroissement des contrats doctoraux, la création des chaires de professeur junior etc.

Enfin, la trajectoire du programme 193 permettra une croissance des crédits affectés aux Cnes de l'ordre de 20 millions d'euros par an. La décroissance en 2021 est due à une moindre contribution à l'Agence spatiale européenne, conformément aux engagements pris par la France envers l'organisation internationale.

Sources : rapport de Mme Danièle Hérin, rapporteur général, Philippe Berta,
Valérie Gomez-Bassac et Pierre-Alan Raphan, députés,
au nom de la commission des affaires culturelles et de l'éducation sur le projet de loi ;
intervention de la ministre lors de la discussion générale du projet de loi
en séance publique à l'Assemblée nationale, le 21 septembre 2020.

Cette trajectoire présente plusieurs limites :

- elle ne permettra pas d'atteindre l'objectif de 1 % du PIB : la hausse annuelle de + 5 milliards d'euros par an en 2030 permettrait à peine d'atteindre cet objectif en prenant pour référence le PIB de l'année 2019 23 ( * ) ;

- elle ne distingue pas ce qui découle des mesures nouvelles et des dépenses contraintes , comme le « glissement-vieillesse-technicité » (GVT) des personnels des établissements de recherche employant des fonctionnaires - dont la prise en compte par la trajectoire n'est pas clairement établie, alors qu'il a eu par le passé un impact important ;

- elle présente l'évolution des budgets en écart annuel cumulé par rapport à la loi de finances initiale pour 2020 , ce qui, comme l'a relevé le Conseil d'État, « ne fait pas apparaître en lecture directe les moyens supplémentaires ou totaux alloués chaque année et leur évolution dans le temps » ;

- elle est libellée en euros courants, c'est-à-dire sans prise en compte de l'inflation ;

- enfin, une trajectoire budgétaire figurant dans une loi de programmation n'a pas de portée contraignante pour le Gouvernement.

Surtout, elle apparaît peu ambitieuse et peu crédible . Le Gouvernement communique sur la hausse de 26 milliards d'euros en 2030 par rapport en 2020. Mais il ne précise pas que 50 % de cette somme se cumule sur les trois dernières années 24 ( * ) . Surtout, le cumul des hausses annuelles par rapport à 2020 permet d'éluder le fait que l'augmentation proposée par le Gouvernement est en réalité assez régulière sur la période, sans véritable coup d'accélérateur durant les premières années , alors même que celles-ci sont les plus « contraignantes » pour le Gouvernement 25 ( * ) : les trois dernières années prévoient une hausse annuelle de l'ordre de 600 millions d'euros, quand les deux premières années prévoient une hausse moyenne de 450 millions d'euros.

Par ailleurs, l'horizon de dix ans mine la crédibilité de la programmation , dans la mesure où il s'étale sur trois législatures différentes. C'est, du reste, ce qu'avait soulevé le Conseil d'État, qui a remarqué qu'« avec un tel horizon, la portée de la programmation des crédits budgétaires ne peut être que limitée, spécialement en fin de période ».

C'est pourquoi, comme les rapporteurs de la commission de la culture, de l'éducation et de la communication et de la commission des finances, le rapporteur a proposé une trajectoire budgétaire s'étalant sur sept ans , cohérente avec les échéances du programme européen Horizon Europe et des contrats de plan État-régions ( amendement COM-96 ). De cette façon, les moyens attribués aux laboratoires augmenteront concomitamment à ceux attribués à l'ANR pour le financement de la recherche sur projets, avec une hausse des crédits de un milliard d'euros les deux premières années .

Le rapporteur appelle également à supprimer les règles prudentielles excessives provenant de la comptabilité publique et pesant sur la trésorerie des opérateurs, privant la recherche de centaines de millions d'euros de financements .

3. Le renforcement attendu des moyens de l'ANR

À travers une trajectoire dédiée définie au II de l'article 2 , le Gouvernement engage un renforcement bienvenu des moyens de l'ANR. Il était en effet nécessaire de mettre fin au manque de moyens attribués à l'ANR, qui se traduisait par l'impossibilité de financer d'excellents projets (le taux de succès est descendu à 11 % en 2014) et décourageait les chercheurs, alors même que la recherche sur projets est, à condition d'être suffisamment dotée, un moyen efficace d'allouer les financements. C'est pourquoi, à l'occasion de chaque projet de loi de finances, les rapporteurs budgétaires de la commission des affaires économiques plaidaient en ce sens.

La commission accueille donc favorablement l'orientation du Gouvernement de porter à un milliard d'euros dès 2022, et à 1,7 milliard d'euros en 2027 (soit une hausse d'1 milliard d'euros par an à compter de 2027), les crédits de l'ANR en vue d'augmenter le taux de succès du financement de la recherche sur projets (taux cible de 30 %) et la couverture des coûts des laboratoires à travers la hausse du préciput reversé (l'objectif est de le faire passer de 11 à 40 % de l'aide attribuée). La hausse des crédits dès 2021 annoncée dans le plan de relance est également bienvenue, et permet d'accélérer la trajectoire inscrite dans la loi de programmation.

L'augmentation du financement de la recherche sur projets et le fait de rendre des moyens de base aux laboratoires pour leur permettre de mener une politique scientifique sont en effet deux impératifs complémentaires.

III. LE RAPPROCHEMENT BIENVENU DE LA RECHERCHE PUBLIQUE ET DES ENTREPRISES RESTE À CONFIRMER DANS LES CHOIX BUDGÉTAIRES

C'est probablement sur les liens entre la recherche publique et les entreprises que la marge de progrès de notre pays est la plus importante. Les indicateurs sur ce point apparaissent en effet particulièrement mauvais :

Le rapport annexé au projet de loi confirme que la densification des relations de la recherche publique avec les entreprises « reste une priorité majeure du Gouvernement ». On trouve en effet plusieurs mesures bienvenues dans le dispositif et dans le rapport annexé, qui s'inspirent assez largement du rapport du troisième groupe de travail préparatoire à la loi.

Dans le corps du texte, quelques dispositifs s'inscrivent dans cette orientation :

- l' article 4 crée un « contrat doctoral » à durée déterminée pour le recrutement de doctorants dans le secteur privé , qui se substitue aux différents types de contrats à durée déterminée aujourd'hui utilisés en vue de mieux adapter le cadre contractuel à la situation des doctorants ;

- l' article 13 renforce, dans l'esprit du rapport dit Beylat-Tambourin 26 ( * ) , les dispositifs dérogatoires au droit de la fonction publique créés par la loi dite « Allègre » de 1999 27 ( * ) afin de permettre aux personnels de la recherche publique d'être plus facilement associés aux opérations industrielles et commerciales de valorisation des innovations. Ainsi, d'une part, pour créer une entreprise ou apporter son concours scientifique à une entreprise, il ne sera plus nécessaire que l'objet de l'entreprise soit de valoriser les travaux de recherche réalisés par le chercheur en question - il sera, en revanche, toujours nécessaire que la création de l'entreprise s'effectue dans le cadre d'un contrat de valorisation conclu entre l'entreprise et l'employeur public du chercheur ; d'autre part, l'article ouvre la possibilité de participer en tant qu'associé ou dirigeant à une entreprise existante dont l'objet est d'assurer, en exécution d'un contrat conclu avec l'employeur public du chercheur, la valorisation de travaux de recherche et d'enseignement ;

- l' article 14 étend, pour les personnels de recherche comme pour les enseignants-chercheurs, les possibilités de cumul d'activités à temps partiel, de mise à disposition et de perception d'un complément de rémunération au titre de ces mises à disposition en vue de faciliter la mobilité public-privé ;

- l' article 14 bis introduit par les députés en commission réintroduit un congé d'un an bénéficiant aux salariés du privé souhaitant enseigner ou participer à une activité de recherche. Ce dispositif avait été créé par une ordonnance de 2007 et supprimé, semble-t-il par erreur, dans une ordonnance de 2018 ;

Afin de sécuriser le dispositif et de s'assurer de sa bonne application sur le terrain, la commission a adopté un amendement visant à mieux aligner le régime de ce congé sur celui du congé pour création ou reprise d'entreprise et renvoyer davantage d'éléments à la négociation collective ( COM-97 ).

- l' article 15 , enfin, crée un dispositif d'intéressement qui, selon l'exposé des motifs du projet de loi, est créé pour « valoriser les personnels qui s'impliquent dans des missions de recherche partenariale ».

Le rapport annexé au projet de loi précise également que les moyens nouveaux dégagés avec la trajectoire financière permettront de :

a) « créer 500 start-ups de haute technologie par an à partir de 2030, à comparer à environ 170 aujourd'hui » ;

b) labelliser 15 « pôles universitaires d'innovation » (PUI) valorisant les actions de transfert de connaissances et de technologies des universités vers les entreprises, qui s'ajoutent aux SATT ;

c) financer une hausse de 50 % des conventions industrielles de formation par la recherche (ou « CIFRE », dispositif subventionnant l'emploi de doctorants en entreprise pour effectuer des travaux de recherche en lien avec leurs thèses) d'ici à 2027 ;

d) financer la création de convention industrielle de mobilité en entreprise des chercheurs (ou « CIMEC »), équivalent des conventions Cifre mais pour les chercheurs ;

e) doubler les financements consacrés par l'ANR aux différents dispositifs de recherche partenariale (public/privé) : « chaires industrielles » (subventions versées à des projets de R&D du secteur privé en lien avec les laboratoires publics), « Labcom » (subvention versée pour la création de laboratoires communs entre un laboratoire public et une PME ou une ETI) et instituts labellisés Carnot (mécanisme de subvention aux laboratoires publics permettant aux laboratoires très impliqués dans la recherche partenariale avec les entreprises d'obtenir un financement supplémentaire, qui sera « plus que doublé »). Ces dispositifs s'ajoutent aux structures de recherche partenariale créées par le PIA (IRT et ITE) et dont le financement est poursuivi dans le cadre du PIA 4.

Enfin, le rapport annexé évoque « une réflexion [qui] sera [...] engagée en vue de renforcer de façon sélective, en lien avec les régions, les plateformes technologiques publiques et de développer leurs liens avec les PME et les ETI ». Il conviendrait de conforter cette orientation, l'exemple des plateformes régionales de transfert technologique lancées par le CEA ayant fait ses preuves.

Pour le rapporteur, si cet effort est tout à fait bienvenu, il appelle néanmoins deux remarques :

- la priorité affichée au rapprochement entre la recherche publique et les entreprises se heurte à une mesure figurant au projet de loi de finances pour 2021 et consistant à supprimer le doublement d'assiette pour les dépenses sous-traitées par des entreprises à des laboratoires publics dans le cadre du crédit d'impôt recherche ;

- de nombreux interlocuteurs ont attiré l'attention du rapporteur sur la nécessité de rehausser l'ambition poursuivie par le Gouvernement sur le renforcement des moyens octroyés aux conventions Cifre et aux Instituts Carnot . Il apparaît en effet que les premières font face à une demande importante qui ne peut actuellement pas être financée, pour un besoin financier relativement limité - de l'ordre de 3 à 4 millions d'euros dès 2021. Les seconds font face à une diminution croissante du taux moyen de l'abondement versé par l'ANR, qui était de 30 % en 2006 et est descendu à 11,8 % en 2019, en raison de l'augmentation du nombre d'instituts Carnot à enveloppe quasi-constante. Le label Carnot est un moyen vertueux d'inciter la recherche publique à se rapprocher des entreprises : il faut les doter à la hauteur des besoins.

IV. DES DISPOSITIONS DIVERSES... DIVERSEMENT OPPORTUNES

A. CERTAINES DISPOSITIONS EN MATIÈRE AGRICOLE QUI VONT BIEN AU-DELÀ DE QUESTIONS ESSENTIELLEMENT « TECHNIQUES », CE QUI JUSTIFIE UN REFUS DE CERTAINES HABILITATIONS À LÉGIFÉRER PAR ORDONNANCE

À l' article 22 , le Gouvernement sollicite deux habilitations à prendre par ordonnance des mesures relevant du domaine de la loi afin d'aménager techniquement et de compléter le cadre juridique relatif aux organismes génétiquement modifiés.

Elles entendent, en pratique, tirer les conclusions de l'arrêt du 7 juillet 2020 du Conseil d'État sur les organismes obtenus par mutagenèse, qui a conclu que les nouvelles techniques de mutagenèse doivent être regardées comme étant soumises aux obligations imposées aux organismes génétiquement modifiés.

L'arrêt du Conseil d'État du 7 février 2020 sur les organismes obtenus par mutagenèse

Interrogée par le Conseil d'État sur le statut des nouvelles techniques de mutagenèse dirigée vis-à-vis de la directive 2001/18/CE, la Cour de justice de l'Union européenne (CJUE) a conclu dans son arrêt du 25 juillet 2018 que tous les organismes obtenus par mutagenèse sont des organismes génétiquement modifiés (OGM) et que seuls sont exclus du champ d'application de la directive ceux qui sont issus de techniques de mutagenèse qui ont été traditionnellement utilisées pour diverses applications et dont la sécurité est avérée depuis longtemps .

Le Conseil d'État, dans son arrêt du 7 janvier 2020, en a déduit plusieurs conséquences :

- tant les techniques ou méthodes dites « dirigées » ou « d'édition du génome » que les techniques de mutagenèse aléatoire in vitro soumettant des cellules de plantes à des agents mutagènes chimiques ou physiques, doivent être regardées comme étant soumises aux obligations imposées aux organismes génétiquement modifiés ;

- le Gouvernement doit, en conséquence, fixer par décret la liste limitative des techniques ou méthodes de mutagenèse traditionnellement utilisées pour diverses applications et dont la sécurité est avérée depuis longtemps. Elles ne seront pas soumises au cadre réglementaire des OGM ;

- le Gouvernement doit identifier, au sein au sein du catalogue commun des variétés des espèces de plantes agricoles, les variétés issues de mutagenèse, en particulier parmi les variétés rendues tolérantes aux herbicides (VRTH), qui y auraient été inscrites sans que soit conduite l'évaluation à laquelle elles auraient dû être soumises et d'apprécier, s'agissant des variétés ainsi identifiées, s'il y a lieu de suspendre, de consigner ou de détruire les produits concernés ;

- le Gouvernement doit prendre les mesures nécessaires afin de répondre aux lacunes de données actuellement disponibles sur les variétés rendues tolérantes aux herbicides (VRTH) dues à l'absence de traçabilité de ces données, comme le recommande l'Anses dans un avis ;

- le Gouvernement doit prescrire des conditions de culture appropriées pour les VRTH issues de la mutagenèse utilisées en France.

Deux habilitations inscrites à l'article 22 entendent tirer les conclusions de ces injonctions du Conseil d'État :

- afin de faire face à l'afflux de dossiers induit par l'élargissement des organismes entrant dans le champ des organismes génétiquement modifiés, le 2° du I entend adapter la procédure de déclaration des utilisations en milieu confiné, uniquement pour les organismes génétiquement modifiés qui ne sont pas susceptibles de provoquer des maladies chez l'Homme ou des effets négatifs sur l'environnement (groupe 1), tout en maintenant l'ensemble des garanties exigées par le droit européen. Aujourd'hui, un utilisateur est obligé de déclarer aux services administratifs toutes les utilisations en milieu confiné de risque nul ou négligeable et reçoit en échange un récépissé. Or la directive européenne régissant le cadre européen de ces recherches ne l'exige pas, ces utilisations à faible risque, devant plutôt être tracées dans un dossier pouvant être présenté, sur demande, à l'autorité compétente. L'ordonnance entend reprendre le cadre européen pour l'appliquer en France et supprimer, ainsi, cette surtransposition française ;

- le 4° du I habilite le Gouvernement à répondre à l'injonction du Conseil d'État afin de prévoir par ordonnance les modalités de traçabilité et les conditions d'utilisation des semences des variétés rendues tolérantes aux herbicides et des produits issus. Cela se traduira par des obligations nouvelles en matière déclarative pour les utilisateurs. À cet égard, dans son avis du 26 novembre 2019 sur la question, l'Anses a estimé qu'il était nécessaire de « générer une connaissance exhaustive et continue dans le temps des successions culturales et des pratiques culturales associées ». L'agence a été saisie par les ministres chargés de l'environnement et de l'agriculture en juin dernier afin d'identifier et de cartographier les cultures actuelles de variétés tolérantes aux herbicides, de bâtir un programme d'études de suivi des variétés tolérantes aux herbicides et, partant, de recueillir des données permettant d'évaluer les risques sanitaires et environnementaux liés à l'utilisation de variétés tolérantes aux herbicides.

Le Gouvernement entend s'appuyer sur ses conclusions pour mettre en oeuvre le cadre requis par le Conseil d'État, pouvant aller jusqu'à la mise en place d'un régime de déclaration obligatoire pour ces espèces. Déjà en retard par rapport aux délais fixés par le juge administratif, le Gouvernement sollicite du Parlement une habilitation à légiférer par ordonnance.

En entendant répondre directement et rapidement aux injonctions émises par le juge administratif, ces deux demandes d'habilitation, au caractère technique, semblent justifiées.

Ce n'est pas le cas de l'habilitation prévue au 3° du I du même article 22. En entendant redéfinir les modalités selon lesquelles les avis et recommandations relatifs aux biotechnologies sont élaborés, l'habilitation permet au Gouvernement de modifier profondément l'équilibre de la loi n° 2008-595 du 25 juin 2008 relative aux organismes génétiquement modifiés, sans contrôle suffisant du Parlement sur ces questions essentielles.

Depuis 2009, le Haut conseil des biotechnologies est la pierre angulaire du dispositif d'avis sur ces questions, ces derniers comportant une expertise scientifique enrichie d'un avis économique, éthique et social. Il est indéniable que cette structure a montré des difficultés importantes à fonctionner, ce qu'illustrent les nombreuses démissions des membres des comités. Une réforme de la structure ou, plus probablement, l'émergence d'un nouveau système est nécessaire. Dans cette réorganisation, il apparaît essentiel d'éclairer les débats complexes relatifs aux sujets des biotechnologies en sollicitant un débat public ou en recueillant les opinions éthiques ou économiques auprès d'organisations spécialisées, sans toutefois que ces procédures ne viennent remettre en cause la crédibilité d'une analyse scientifique assise sur l'expertise d'une institution indépendante. Il convient de placer la science au coeur de ces débats difficiles, permettant de garantir une évaluation des risques environnementaux rigoureuse.

Si l'habilitation du Gouvernement semble aller dans ce sens, le Parlement ne saurait signer un « chèque en blanc » sur des sujets aussi sensibles, sans avoir une connaissance plus détaillée de l'architecture imaginée. Ces questions complexes méritent un débat dont le Gouvernement ne saurait priver le Parlement.

C'est pourquoi la commission a adopté, sur proposition du rapporteur, un amendement de suppression de cette habilitation à légiférer par ordonnance pour redéfinir les modalités selon lesquelles les avis et recommandations relatifs aux biotechnologies sont élaborés ( COM-98 ).

L' article 23 est une mesure de simplification, retirant le statut d'établissement public de coopération à Agreenium, source de lourdeurs administratives, pour le transformer en « Alliance Agreenium », appuyée sur une convention de coordination territoriale entre différents établissements d'enseignement supérieur et de recherche agronomiques, sous l'égide de l'Inrae.

B. LA RÉFORME DE LA LOI SUR LES OPÉRATIONS SPATIALES DE 2008 DOIT FAIRE L'OBJET D'UN DÉBAT AU PARLEMENT

En commission, les députés ont inséré par amendement un II bis à l' article 22 visant à habiliter pendant dix-huit mois le Gouvernement à légiférer pour « moderniser le régime applicable aux opérations et activités spatiales, afin notamment de favoriser la recherche et le développement en matière spatiale, de tenir compte des évolutions technologiques, d'adapter les règles de recueil et de diffusion des données d'origine spatiale, de définir les conditions dans lesquelles l'État peut agir en qualité d'opérateur spatial et de garantir les intérêts de la défense nationale ». Il s'agit, en somme, d'adapter le régime issu de la loi n°2008-518 du 3 juin 2008 relative aux opérations spatiales aux nombreuses évolutions rencontrées par le secteur spatial dans la dernière décennie.

La loi n° 2008-518 du 3 juin 2008 relative aux opérations spatiales

Entrée en vigueur en 2010, cette loi vise à encadrer et à superviser les activités spatiales pour lesquelles la France est susceptible de voir sa responsabilité internationale engagée en application du droit international (en particulier en application du traité de 1967 sur les principes régissant les activités des États en matière d'exploration et d'utilisation de l'espace extra-atmosphérique, y compris la Lune et les autres corps célestes), afin de garantir la sécurité des opérations spatiales vis-à-vis des personnes, des biens, de la santé et de préserver l'environnement tant terrestre que spatial.

Elle met en place un régime d'autorisation préalable pour certaines opérations spatiales (procéder ou faire procéder au lancement d'un objet spatial, assurer la maîtrise d'un objet spatial pendant son séjour dans l'espace et lors de son éventuel retour, transférer la maîtrise de l'objet spatial) et un régime de déclaration préalable pour l'exploitation de données d'origine spatiale . Elle est complétée par quatre décrets d'application et un arrêté concernant la réglementation technique. Les activités de lancement et de guidage pour les besoins de la défense nationale et l'exploitation, par le ministère de la défense, de données d'origine spatiale sont exclues du champ d'application de la loi, tout comme les opérations relevant d'une mission publique confiée au Cnes.

À titre d'exemple, en 2019, neuf autorisations de lancements du Centre Spatial Guyanais ont été délivrées, sept autorisations d'opérer de nouveaux satellites et une licence valant autorisation pour une série de plateformes ont été délivrées au bénéfice de cinq opérateurs de satellites, cinq attestations de conformité préliminaires ont été données, les opérations de 60 satellites autorisés ont été surveillées, une opération de « fin de vie » de satellite a été autorisée, une autorisation pour un changement de position orbitale d'un satellite géostationnaire a été donnée et le Cnes a réalisé des contrôles de conformité sur deux satellites exclus du champ d'application du régime d'autorisation.

Le Gouvernement se contente de passer par une habilitation à légiférer par ordonnance insérée lors des débats parlementaires, sans étude d'impact . À l'Assemblée nationale, l'amendement n'a fait l'objet d' aucun débat , en commission comme en séance publique.

Que sait-on de ce projet d'ordonnance ? Une réforme de la loi de 2008 avait été annoncée dans le cadre de la stratégie spatiale de défense présentée en juillet 2019. Lors de son allocution de présentation de la stratégie spatiale de défense, la ministre des armées affirmait notamment souhaiter que le ministère des armées puisse être considéré comme opérateur spatial au sens de la loi. La stratégie spatiale de défense met également en avant le besoin de créer un dispositif de déclaration et de contrôle sur des segments autres que l'observation de la Terre.

S'agissant du volet civil, le ministère de la recherche indique que la révision de la loi doit « servir la compétitivité du secteur spatial français » et permettre à la France, « tant à l'échelle internationale que sur la scène européenne, de réaffirmer son soutien au multilatéralisme et son exemplarité dans le respect du droit international ».Selon les informations transmises par le Gouvernement au rapporteur, un groupe de travail co-piloté par les ministères de la recherche et des armées a été installé en mai 2019 avec pour mandat de proposer un avant-projet de nature législative modifiant la loi sur les opérations spatiales ainsi que les pistes associées d'adaptation du cadre réglementaire . Composé de représentants de ces deux ministères, il comprenait également des représentants du ministère de l'Europe et des affaires étrangères, du ministère de la transition écologique et solidaire, et du Cnes. Des représentants du secteur public et du secteur privé impliqués dans des activités spatiales pouvaient être consultés en cas de besoin. Les travaux du groupe ont été organisés autour des 14 thématiques suivantes : immatriculation des objets lancés dans l'espace extra-atmosphérique, contrôle et sanctions, régimes spécifiques applicables aux opérateurs publics, notion d'opérateur spatial, ports spatiaux, retour des objets après lancement, véhicules suborbitaux et lanceurs aéroportés, avions spatiaux, méga-constellations, nano-satellites, emport de sources d'énergie nucléaire, service en orbite, activités industrielles dans l'espace (cas de l'exploitation des ressources spatiales), diffusion des données d'origine spatiale.

Ces travaux ont donné lieu à la rédaction d'un rapport comportant 47 recommandations, qui poursuivent trois objectifs : améliorer le suivi par l'État des activités spatiales, clarifier les responsabilités des différents acteurs et accompagner l'innovation. Il devrait être soumis pour approbation au Premier ministre avant qu'une consultation publique soit organisée afin de recueillir les avis de toutes les parties intéressées. L'objectif serait de déposer un premier projet de texte au Conseil d'État à l'été 2021. Le groupe de travail préparerait ensuite les révisions subséquentes des décrets et arrêtés relatifs à la réglementation technique et au contrôle des données d'origine spatiale.

Ces éléments restent insuffisamment précis, de telle sorte que l'adoption d'une habilitation s'apparenterait à un blanc-seing sur un sujet qui n'est pas exclusivement technique et s'apparente à une refonte globale du cadre juridique applicable aux opérations spatiales en France . Le cas des méga-constellations concerne en effet tout un chacun : les images de la constellation Starlink lancée par Elon Musk ont fait le tour du monde, et l'on parle déjà de pollution du ciel, alors que les activités d'observation de l'espace sur le sol terrestre pourraient également en pâtir. Il est légitime que le Parlement se prononce sur l'encadrement de ces constellations. De même, la question du traitement des activités industrielles dans l'espace ne saurait être soustraite au débat démocratique : elle oppose les tenants d'un espace comme bien commun de l'humanité à celle d'un espace propice aux activités économiques. Les États-Unis et le Luxembourg ont déjà tranché en faveur de la seconde option. La France reste à ce jour au milieu du gué. Il s'agit donc d'autant de sujets à propos desquels il est parfaitement légitime que le Parlement se prononce en toute connaissance de cause .

De plus, l'urgence n'apparaît pas caractérisée dans la mesure où la stratégie spatiale de défense elle-même annonçait des travaux interministériels jusqu'en 2025.

Enfin, la loi sur les opérations spatiales n'a pas été révisée depuis douze ans : à raison d'un texte tous les dix ans, il apparaît légitime que le Gouvernement prenne le temps de consulter le Parlement en bonne et due forme, comme cela avait été fait en 2008. Du reste, la loi de 2008 avait fait l'objet d'un important travail préparatoire débuté en 1999 sous l'égide du ministère de la recherche, et avait donné lieu à de nombreux rapports ( rapport ministériel en 2003, rapport du Conseil d'État en 2006) et fait l'objet de consultations auprès de nos partenaires européens et internationaux et de la Commission européenne, qui s'était également prononcée sur la conformité du dispositif aux règles en matière d'aide d'État 28 ( * ) .

C'est pour ces raisons que la commission a, sur proposition du rapporteur, adopté un amendement de suppression de cette habilitation visant à réformer la loi sur les opérations spatiales ( COM-99 ).

Le Gouvernement maîtrise l'essentiel de l'agenda parlementaire : il lui reviendra de déposer un projet de loi en bonne et due forme. Le recours aux ordonnances n'est pas un bon mode de gouvernement au regard des impératifs du débat démocratique. Sur la période 2012 à 2018, le nombre d'ordonnances a dépassé celui des lois adoptées selon la procédure ordinaire : 350 ordonnances ont été publiées, alors que seules 346 lois ont été votées par le Parlement. Or, le délai moyen pour prendre l'ordonnance, une fois la loi donnant l'habilitation promulguée, est de 455 jours, contre, sur la session 2017-2018, 177 jours pour le vote d'une loi par la voie parlementaire.

Du reste, il convient de noter que le lien avec le texte déposé - au sens de l'article 45 de la Constitution du 4 octobre 1958 - apparaît particulièrement distant : il n'est assuré que par l'item « favoriser la recherche et le développement en matière spatiale », dont on ne voit pas très bien l'utilité au vu des projets du Gouvernement, sauf à créer artificiellement un tel lien. On peut donc s'interroger sur la question de savoir si le Gouvernement n'a pas entendu camoufler un cavalier législatif par un rattachement purement théorique de l'amendement aux dispositions du texte déposé .

EXAMEN EN COMMISSION

Réunie le mardi 13 octobre 2020, la commission a examiné le rapport pour avis de M. Jean-Pierre Moga sur le projet de loi n° 722 (2019-2020) adopté par l'Assemblée nationale, de programmation de la recherche pour les années 2021 à 2030 et portant diverses dispositions relatives à la recherche et à l'enseignement supérieur.

M. Jean-Pierre Moga , rapporteur . - Il y a quelques jours, nous nous sommes tous réjouis qu'une Française obtienne le prix Nobel de chimie. Mais on oublie de dire qu'elle a fait l'essentiel de sa carrière hors de France, faute de moyens ! C'est une très bonne illustration de la nécessité, pour notre pays, de redonner des moyens à la recherche publique. C'est pourquoi le projet de loi que nous examinons est essentiel.

La situation est grave. L'effort de recherche et développement dans notre pays stagne autour de 2,2 % du PIB depuis les années 1990. Or, l'objectif fixé au niveau européen depuis les années 2000 s'élève à 3 % du PIB ! Nous en sommes bien loin, alors que d'autres pays, comme l'Allemagne par exemple, y sont déjà. La recherche et développement (R&D) publique n'atteint pas les 0,8 % du PIB, quand elle devrait être à 1 %. Dans la recherche publique, nos chercheurs sont payés 37 % de moins que les chercheurs des pays comparables.

Bref, le constat est très largement partagé qu'il convient de passer à la vitesse supérieure. Et ce d'autant plus que la concurrence est rude ! Résultat, nous ne sommes classés que dixième en Europe pour l'innovation, et douzième au niveau mondial, loin de notre place dans le monde au regard du PIB !

Voici pour le constat global. J'en viens maintenant au projet de loi. Je souhaite débuter mon propos par ce qu'il n'y a pas, ou pas assez, dans ce projet de loi.

Ce projet de loi, et en particulier sa trajectoire budgétaire, est centré sur la recherche publique rattachée au ministère de la recherche. Aucune trajectoire n'est prévue pour la recherche rattachée à d'autres ministères. Rien donc pour la recherche industrielle et la recherche environnementale, alors qu'il s'agit pourtant, nous dit-on, des priorités du plan de relance ! Rien non plus pour la recherche privée : le Gouvernement ne donne pas de trajectoire sur les dépenses fiscales. Rien non plus, enfin, sur les liens avec les collectivités territoriales.

Aucune articulation n'est garantie avec le plan de relance et les autres guichets publics de soutien à la R&D. En somme, le Gouvernement manque ici une occasion d'impulser un grand chantier pour en finir avec le morcellement des politiques de recherche et développement. Il fournit une information lacunaire au Parlement, aux citoyens et aux principaux destinataires de la loi, qui sont contraints à un jeu d'addition de l'ensemble des dispositifs et se heurtent à une complexité accrue du fait de leur portage par des instances différentes et de leur pilotage selon des modalités diverses.

Le premier apport de ce projet de loi, c'est une trajectoire budgétaire pluriannuelle, pour mettre fin au sous-financement de la recherche publique et lui donner de la visibilité, pour atteindre une augmentation de 5 milliards d'euros par an en 2030. De cette façon, les laboratoires pourront à nouveau mener une véritable politique scientifique et l'Agence nationale de la recherche (ANR) pourra à nouveau financer les projets.

De nombreux acteurs considèrent que cette trajectoire est trop longue, et donc peu crédible, et insuffisante dans les premières années. C'est pourquoi je vous proposerai, en lien avec mes collègues rapporteurs de la commission de la culture et de la commission des finances, de raccourcir l'horizon de la trajectoire à 2027, avec deux premières marches pour les années 2021 et 2022 à plus d'un milliard d'euros d'augmentation. De cette façon, nous serons en mesure de poursuivre l'objectif de 1 % du PIB consacré à la recherche publique d'ici à 2027.

Un point me semble particulièrement choquant : les opérateurs de recherche sont contraints d'appliquer une norme comptable inadaptée, les obligeant à garder en trésorerie des centaines de millions d'euros : autant d'argent qui n'est pas fléché vers les laboratoires ! J'ai interpellé la ministre sur le sujet. Elle en a conscience et regarde si elle peut faire évoluer les choses. J'y serai vigilant.

Le projet de loi s'intéresse également au rapprochement des liens entre la recherche publique et les entreprises. On trouve ainsi plusieurs dispositifs d'ordre technique et qui sont bienvenus en ce sens, notamment aux articles 13 et 14.

L'article 14 bis ressuscite un congé pour enseignement ou recherche qui avait été créé en 2007 et supprimé en 2018, apparemment par erreur. L'objectif est bienvenu : il s'agit de permettre aux chercheurs du privé de faire une mobilité dans le public. Mais le dispositif est trop contraignant et, en l'état, pas assez souple pour les entreprises : un salarié pourrait prendre un congé d'un an après n'avoir passé qu'un an dans les effectifs de l'entreprise. Il faut laisser plus de place à la négociation, c'est le sens d'un amendement que je vous soumettrai.

En ce qui concerne les liens avec les entreprises, le Gouvernement envoie deux messages absolument contradictoires. D'un côté, on souhaite inciter les laboratoires à développer des relations avec les entreprises. De l'autre, on ôte le principal outil d'incitation des entreprises à se tourner vers la recherche publique, à savoir le doublement d'assiette du crédit d'impôt recherche (CIR) en cas de recours à un laboratoire public. Cette mesure, qui figure en projet de loi de finances pour 2021, risque d'anéantir les efforts du Gouvernement en la matière. Je serai vigilant sur ce point lors de l'examen du projet de loi de finances.

J'en viens aux dispositions diverses de ce texte. Je pense aux articles 22 et 23, qui portent sur des secteurs qui relèvent de notre commission, à savoir l'agriculture et le spatial.

S'agissant des aspects agricoles, le Gouvernement sollicite du Parlement trois habilitations à légiférer par ordonnance sur les sujets de biotechnologies. C'est la conséquence des arrêts successifs de la Cour de justice de l'Union européenne (CJUE) et du Conseil d'État de 2018 et 2020, qui assimilent les nouvelles techniques de mutagenèse à des organismes génétiquement modifiés (OGM). Dès lors qu'ils sont considérés comme des OGM, les procédures d'autorisation et de contrôle applicables aux OGM deviennent applicables également aux organismes issus d'une mutagenèse.

Je veux le dire franchement : cette décision nourrira, j'en suis sûr, un débat politique et philosophique ici comme en séance publique, sur l'articulation complexe à trouver entre principe de précaution et principe d'innovation. Toutefois, ces jurisprudences relatives à des textes européens sont directement applicables. Le Parlement ne dispose donc pas de marges de manoeuvre en ce qui concerne ces textes européens. La décision de la CJUE s'applique à la France et le Gouvernement est enjoint par le Conseil d'État à mettre en oeuvre le cadre européen sur le sujet.

Si des précisions doivent être apportées, elles doivent l'être au niveau européen. J'en appelle, à cet égard, à l'édiction d'une réglementation européenne claire et adaptée sur le sujet des biotechnologies : les techniques évoluent et il convient d'adapter la réglementation à l'évolution du monde. Mais il n'est pas en notre pouvoir de prendre des dispositions législatives contraires au droit européen.

Je vous propose donc d'accepter les ordonnances techniques sur ces volets tant qu'elles entendent tirer uniquement les conséquences des arrêts susmentionnés. C'est le cas des ordonnances sur les procédures de déclaration des utilisations d'OGM aux risques faibles et sur la traçabilité et les conditions d'utilisation des variétés rendues tolérantes aux herbicides.

Ce n'est pas le cas, en revanche, de l'ordonnance prévoyant une redéfinition des procédures d'édiction d'avis relatifs aux biotechnologies. L'habilitation est très large et donne un chèque en blanc au Gouvernement en la matière. Le Haut Conseil des biotechnologies, chargé de cette mission depuis 2008, a fait preuve, il est vrai, de dysfonctionnements, compte tenu des tensions entre le comité scientifique et le comité éthique. Il faut y remédier en présentant une nouvelle architecture, le Gouvernement allant même jusqu'à envisager la suppression de ce conseil. Mais par quoi le remplacer ? Comment s'assurer que la rigueur scientifique demeure la garantie d'un débat apaisé sur ces sujets difficiles ? Comment prendre en compte les réflexions éthiques des parties prenantes ? Qui devra rendre ces avis ? L'Agence nationale de sécurité sanitaire de l'alimentation, de l'environnement et du travail (Anses) ? Le Ministère ? Le Conseil économique, social et environnemental (CESE) ? Un nouveau comité ? Nous avons eu le droit à une loi bioéthique qui est toujours en discussion sur des sujets similaires. Pourquoi passer ici par ordonnance et éviter tout pouvoir de contrôle du Parlement sur le sujet ? À défaut d'informations supplémentaires sur le contenu de l'ordonnance, je vous propose de la supprimer du texte, attendant des éclaircissements du Gouvernement en séance publique.

Enfin, l'article 23 propose de réformer Agreenium, organisme créé en 2014 pour favoriser la coopération entre établissements de recherche et établissements d'enseignement, par exemple en créant une plateforme de cours en ligne, des Mooc. Il est vrai que son statut d'établissement public alourdit les procédures : le projet de loi propose de lui retirer ce statut pour transformer Agreenium en « Alliance Agreenium », appuyée sur une convention de coordination territoriale entre différents établissements d'enseignement supérieur et de recherche agronomiques, sous l'égide de l'Institut national de recherche pour l'agriculture, l'alimentation et l'environnement, l'Inrae. Les emplois seront conservés voire renforcés au sein de cette Alliance, le budget de l'Inrae faisant effet levier. Je crois que c'est une bonne mesure.

Quant au volet spatial, le Gouvernement a introduit par un amendement, et donc sans étude d'impact, une habilitation à légiférer par ordonnance pour réformer la loi sur les opérations spatiales de 2008. C'est la seule loi existante sur le sujet depuis l'existence des programmes spatiaux en France. Elle a déjà douze ans, il faut manifestement la réformer. Mais ce ne sont pas de petits sujets : comment encadrer les mégaconstellations de satellites ? Comment traiter des questions d'industrie dans l'espace ? Ces sujets sont loin d'être techniques. Nous avons demandé davantage d'informations au Gouvernement, nous n'avons pas obtenu grand-chose. C'est pourquoi il est proposé de supprimer cette habilitation.

En conclusion, ce projet de loi envoie un signal positif en ce qu'il rehausse le niveau des moyens affectés à la recherche. Nous proposons de le muscler. Je vous proposerai donc d'émettre un avis favorable sous réserve de l'adoption de nos amendements.

M. Alain Chatillon . - Je suis surpris que ce texte n'évoque pas les pôles de compétitivité, qui existent pourtant depuis plusieurs années, comme Aerospace Valley, dans le Sud-Ouest, ou Agri Sud-Ouest Innovation, que j'ai créé en 2007 et qui comporte plus de 400 entreprises et 60 pôles de recherche en Midi-Pyrénées et en Aquitaine : pourquoi ne pas associer ces structures ?

Voilà quatorze mois que l'Assemblée nationale a voté le Comprehensive Economic and Trade Agreement (CETA), mais nous n'avons toujours pas eu à l'examiner. Pourtant, on importe des produits d'Amérique du Nord qui contiennent des OGM et font une concurrence aux productions de nos agriculteurs. Il n'est pas normal qu'une loi qui n'a pas été votée par le Sénat soit appliquée !

M. Franck Montaugé . - Nous sommes surpris par la présentation insolite de cette programmation, où n'apparaissent pas des chiffres globaux mais des variations de crédits d'une année sur l'autre, ce qui est inédit. L'accent est mis sur la contractualisation, avec pourtant une certaine précarisation des contrats de recherche. Nous serons vigilants sur ce point en séance.

Mme Sophie Primas , présidente . - Je suis très favorable à l'amendement qui supprime l'habilitation à légiférer par ordonnance sur les opérations spatiales. Celle-ci a été introduite par voie d'amendement, entre deux discussions : c'est un peu désinvolte à l'égard du Parlement, alors même que nous n'avons pas eu de grand débat sur ce sujet depuis douze ans.

M. Jean-Pierre Moga , rapporteur . - Je partage la remarque de M. Chatillon : le problème est que cette loi concerne uniquement le ministère de la recherche et que les autres, comme le ministère de l'économie, ne sont pas concernés.

Examen des amendements

Article 1 er

M. Jean-Pierre Moga , rapporteur . - Les amendements AFFECO-1 et AFFECO-2 vont ensemble, quoiqu'ils portent respectivement sur l'article 1 er et sur l'article 2 ; je vous propose donc de les présenter ensemble. L'amendement AFFECO-1 fixe à la Nation l'objectif d'atteindre un effort de recherche de 3 % du PIB et un effort de recherche publique de 1 % du PIB d'ici à 2027. Ce sont des objectifs fixés au niveau européen depuis les années 2000 !

Pour ce faire, l'amendement AFFECO-2 réduit la durée de la trajectoire budgétaire, en fixant 2027 comme horizon. La programmation ne s'étendra que sur deux quinquennats, elle sera donc plus crédible, et 2027 est également l'échéance du programme-cadre de R&D européen et des contrats de plan État-région. Surtout, ce raccourcissement permet de lancer un signal fort en faveur de la revalorisation des salaires et des moyens mis à disposition des chercheurs dès 2021 et 2022. L'effort budgétaire serait ainsi de plus d'1 milliard d'euros par an sur ces deux années, alors que le projet de loi prévoit respectivement un effort de 350 et de 550 millions. Mes collègues rapporteurs de la commission de la culture et de la commission des finances sont d'accord pour réduire la durée de la trajectoire et fixer l'échéance à 2027.

M. Fabien Gay . - Je ne sais pas si 2027 est la bonne échéance, mais nous sommes d'accord pour réduire la durée. En l'état, ce texte est une mascarade. Il affiche un effort de 25 milliards d'euros, mais l'effort est surtout concentré entre 2027 et 2030. Le calcul est simple : on espère enchaîner deux quinquennats, et après, advienne que pourra ! C'est la même logique avec le Ségur de la santé, dans la mesure où les professionnels de santé seront augmentés de 180 euros par mois, mais en deux fois, ou avec la hausse des salaires des enseignants étalée sur dix ans. Il faut donc réduire et aller fort ! De plus, 25 milliards, c'est peu. L'Office parlementaire d'évaluation des choix scientifiques et technologiques évalue les besoins entre 3,5 et 5 milliards par an. On en est loin !

Il ne faut pas oublier non plus l'industrie. Pendant la discussion de la loi Pacte, M. Le Maire nous a expliqué à l'envi qu'il fallait investir sur les industries du futur - la 5G, l'automobile connectée, etc. - justifiant ainsi la nécessité de vendre les parts de l'État dans Aéroports de Paris, Engie ou la Française des Jeux pour pouvoir créer un grand fonds pour l'innovation de rupture. Ce fonds a été créé et est doté de plusieurs centaines de millions d'euros. Mais que produit-il ? Mme Pannier-Runacher avait promis, lors du budget, un investissement de 150 millions cet été en faveur de l'innovation technologique. Comment cet argent a-t-il été investi ? Nous interpellerons le Gouvernement sur ce sujet. Et je n'évoque pas le démantèlement de Nokia, preuve que nous sommes en retard sur la 5G...

M. Franck Montaugé . - Oui, il faut réduire ce calendrier : on ne peut pas attendre 2027. Le numérique, et en particulier la nécessité de former des data scientists , me paraissent insuffisamment pris en compte, alors que l'économie se fait à partir de la donnée, ce qui nécessite davantage de recherche que ce que nous faisons actuellement - comme l'avait souligné la commission d'enquête sur la souveraineté numérique il y a moins d'un an. Pour rattraper le temps perdu, il faut engager rapidement les moyens nécessaires.

M. Jean-Pierre Moga , rapporteur . - Avec l'amendement, nous raccourcissons l'horizon, donc 25 milliards d'euros seront injectés en sept ans, avec deux marches budgétaires d'un milliard d'euros par an dès 2021 et 2022.

La recherche industrielle est renvoyée au plan de relance et au fonds d'innovation pour l'industrie. Le Gouvernement a perdu une occasion de clarifier son action.

Par ailleurs, il n'y a pas de priorités dans cette loi, qui refuse la hiérarchisation stratégique, ce que je trouve assez contestable.

Les amendements AFFECO-1 et AFFECO-2 sont adoptés.

Article 14 bis

M. Jean-Pierre Moga , rapporteur . - L'amendement AFFECO-3 porte sur le congé pour enseignement ou recherche, réintroduit par les députés, alors qu'il avait été supprimé - par erreur, semble-t-il - en 2018. C'est une bonne mesure, qui permet de favoriser la mobilité du privé vers le public, comme d'autres dispositions du projet de loi permettent de favoriser la mobilité du public vers le privé. Mais les modalités proposées par le projet de loi apparaissent trop contraignantes pour les entreprises, surtout compte tenu du contexte économique auquel nous faisons face. Quelle que soit la taille de l'entreprise, le salarié aurait droit à ce congé au bout d'un an d'ancienneté seulement. Aucune place n'est laissée à la négociation collective. Et l'employeur n'a pas de moyen de refuser le départ, quand bien même cela nuirait à la bonne marche de l'entreprise. C'est pourquoi je propose d'aligner davantage le dispositif prévu sur celui applicable aux congés pour création ou reprise d'entreprise. Dans les entreprises de moins de 300 salariés, l'employeur pourrait s'opposer au congé si cela compromet la bonne marche de l'entreprise. La durée d'ancienneté requise, ainsi que d'autres conditions d'application du dispositif, seraient renvoyées à des accords de branche.

M. Laurent Duplomb . - Voulez-vous dire que le délai passerait de un à deux ans ?

M. Jean-Pierre Moga , rapporteur . - Tout dépendrait de l'accord de branche. Dans une grande entreprise, cela ne pose pas de problème. Il n'en va pas de même d'une PME qui aurait embauché et formé un ingénieur, et verrait celui-ci solliciter ce congé... Il ne faut pas pénaliser les entreprises, surtout dans le contexte actuel.

Mme Sophie Primas , présidente . - Cet amendement préfère les accords de branche à un dispositif imposé depuis le ministère...

L'amendement AFFECO-3 est adopté.

Article 22

M. Jean-Pierre Moga , rapporteur . - L'amendement AFFECO-4 est le premier de deux amendements visant à supprimer des habilitations à légiférer par ordonnances. Il supprime l'habilitation à « redéfinir les modalités selon lesquelles les avis et recommandations relatifs aux biotechnologies sont élaborés », car une telle habilitation permet au Gouvernement de modifier profondément l'équilibre de la loi de 2008 sur les OGM, sans contrôle suffisant du Parlement sur ces questions essentielles. Au Sénat, nous n'aimons guère les ordonnances...

Mme Sophie Primas , présidente . - Ce Haut conseil ne fonctionne pas bien, certes, mais de là à le supprimer sans débat...

L'amendement AFFECO-4 est adopté.

M. Jean-Pierre Moga , rapporteur . - L'amendement AFFECO-5 supprime l'habilitation à légiférer par ordonnance pour modifier la loi relative aux opérations spatiales. C'est encore un sujet à propos duquel nous ne pouvons pas nous permettre de donner un blanc-seing au Gouvernement. J'ai interrogé la ministre à ce propos, par oral et par écrit, sans recevoir à ce jour de réponse satisfaisante.

M. Fabien Gay . - Oui, il faut un débat, et au Parlement ! Chaque groupe politique doit pouvoir exprimer son avis. La concurrence entre Arianespace et SpaceX est faussée par les abondantes subventions octroyées par le Gouvernement américain. Puis, la nouvelle course à l'espace, avec l'abondance des nanosatellites, posera de vrais problèmes. Enfin, notre pas de tir, à Kourou, est menacé : il y a quelques années, nous y faisions dix à douze tirs par an, et ce chiffre a diminué de moitié. Si cela continue, nous pourrions perdre notre souveraineté européenne dans ce domaine. Le Sénat avait un groupe d'études sur ce thème, qu'il faudrait réactiver. Quant à l'habilitation à légiférer par ordonnances, vous savez que j'y suis opposé !

Mme Sophie Primas , présidente . - Le groupe de travail faisait suite à la dissolution du groupe des parlementaires de l'espace (GPE), qui a disparu après la loi Sapin. Vous avez raison : le dernier débat sur l'espace remonte à douze ans... On ne sait si ces dispositions viennent de Mme Vidal ou de Mme Parly, mais nous voudrions en débattre.

L'amendement AFFECO-5 est adopté.

Mme Sophie Primas , présidente . - Compte tenu de l'adoption des amendements du rapporteur, je vous propose d'entériner son avis favorable.

Il en est ainsi décidé.

LISTE DES PERSONNES ENTENDUES

- Direction générale de la recherche et de l'innovation : M. Bernard LARROUTUROU , directeur général.

- CNRS : MM. Antoine PETIT , président-directeur général et Thomas BOREL , chargé des relations avec le Parlement.

- Union française des semenciers : M. Franck BERGER , vice-président, Mme Rachel BLUMEL , directrice générale.

- Commissariat à l'énergie atomique et aux énergies alternatives : M. François JACQ , Administrateur général.

- M. Jacques LEWINER , professeur d'université, directeur scientifique honoraire à l'ESPCI.

- Institut national de recherche pour l'agriculture, l'alimentation et l'environnement : MM. Philippe MAUGUIN , président-directeur général, Fabrice MARTY , directeur général délégué à l'appui à la recherche, Louis-Augustin JULIEN , directeur du financement et des achats et Marc GAUCHÉE , conseiller du P-DG pour les relations parlementaires et institutionnelles.

- French institutes of technology : M. Claude ARNAUD , vice-président.

- Association des Instituts Carnot : MM. Philippe VERON , président, Alexis GENIN , vice-président et Alain DUPREY , directeur général.

- Confédération des petites et moyennes entreprises : MM. Amir REZA-TOFIGHI , président de la commission innovation, Jérôme NORMAND , économiste et Adrien DUFOUR , chargé de mission affaires publiques et organisation.

- Inria : M. Bruno SPORTISSE , président-directeur général.

- IFP Énergies nouvelles : M. Pierre-Franck CHEVET , président, Mme Catherine RIVIÈRE , directrice générale adjointe.

- Association nationale de la recherche et de la technologie : Mme Clarisse ANGELIER , déléguée générale, M. Pierre BITARD , directeur de projet.

- Agence nationale de la recherche : M. Thierry DAMERVAL , président directeur général.

- Mouvement des entreprises de France : MM. Laurent GOUZENES , membre du bureau de la commission innovation et Patrick SCHMITT , directeur recherche innovation, Mme Fadoua QACHRI , chargée de mission à la direction des affaires publiques.

- Cabinet de la ministre de l'enseignement supérieur, de la recherche et de l'innovation : M. Jean-Philippe BOURGOIN , conseiller auprès de la ministre, Mme Blanche LERIDON , conseillère en charge des relations parlementaires.

LA LOI EN CONSTRUCTION

Pour naviguer dans les rédactions successives du texte, visualiser les apports de chaque assemblée, comprendre les impacts sur le droit en vigueur, le tableau synoptique de la loi en construction est disponible sur le site du Sénat à l'adresse suivante :

http://www.senat.fr/dossier-legislatif/pjl19-722.html


* 1 Articles 1, 2, 4, 13, 14, 14 bis, 15, 22 et 23.

* 2 Ces termes sont, dans le présent avis, considérés comme synonyme des termes de « recherche et développement » ou R&D, définis par l'Insee comme « les activités créatives et systématiques entreprises en vue d'accroître la somme des connaissances et de concevoir de nouvelles applications à partir des connaissances disponibles. Elle englobe la recherche fondamentale, la recherche appliquée et le développement expérimental . »

* 3 L'état de l'Enseignement supérieur, de la Recherche et de l'Innovation en France (n° 13 - Mai 2020).

* 4 Même si celui-ci est décrié, la tendance est intéressante.

* 5 Mesuré par la dépense intérieure de recherche et développement (ou DIRD), qui comprend, selon l'Insee, « les moyens financiers (nationaux et étrangers) mobilisés pour l'exécution des travaux de recherche et développement (R&D) sur le territoire national par le secteur des administrations (DIRDA) et par le secteur des entreprises (DIRDE) ». Cet indicateur se distingue de la dépense nationale de recherche et développement (ou DNRD), qui correspond, selon l'Insee, « à la somme des financements mobilisés par le secteur des entreprises (DNRDE) et par le secteur des administrations (DNRDA) situées sur le territoire national pour des travaux de recherche réalisés en France ou à l'étranger ». Comme le précise l'Insee, « l'écart entre le montant de la dépense intérieure de recherche et développement expérimental (DIRD) et celui de la DNRD représente le solde des échanges en matière de recherche et développement entre la France et l'étranger ».

* 6 Notre pays posséderait environ 13 licornes sur les environ 300 dans le monde.

* 7 OMPI, indice mondial de l'innovation, 2020.

* 8 Commission européenne, European innovation scoreboard, 2020.

* 9 Cependant, depuis le remaniement ministériel de l'été 2020, les programmes spatiaux civils ne dépendent plus du ministère de l'enseignement supérieur, de la recherche et de l'innovation mais du ministère de l'économie.

* 10 Groupement des écoles nationales d'économie et de statistique, groupe Mines Télécoms, laboratoire national de métrologie et d'essais.

* 11 IFP-Énergies nouvelles, Institut de radioprotection et de sûreté nucléaire.

* 12 Écoles d'enseignement supérieur agricole et vétérinaire, associations de coordination technique agricole et des industries agroalimentaires.

* 13 Qui font l'objet de lois de programmation militaire.

* 14 Le crédit d'impôt recherche est la principale dépense fiscale : il correspond, depuis 2008, à 30 % des dépenses de R&D jusqu'à 100 millions d'euros de dépenses, le taux étant de 5 % au-delà. Le dispositif « jeunes entreprises innovantes », créé en 2004, est également un instrument important du soutien aux jeunes PME à fort potentiel d'innovation, de croissance et de création de richesse, à travers des allègements sociaux et fiscaux, estimés à 238 millions d'euros en 2020.

* 15 Le secteur industriel réalise en effet 72 % de la dépense intérieure de R&D des entreprises, mais son poids dans le PIB français est insuffisant pour atteindre la dépense constatée en Allemagne.

* 16 Jean-François Rapin, au nom de la commission des finances du Sénat, Les régions, acteurs d'avenir de la recherche en France, 2019.

* 17 L'« accord de méthode » conclu fin juillet entre Régions de France et le Gouvernement ne mentionne la recherche et l'innovation qu'à la marge.

* 18 Source : projet de loi.

* 19 Commission européenne, A new ERA for Research and Innovation, communication, 30 septembre 2020.

* 20 Il s'agit de l'indicateur de dépenses de recherche et développement des administrations (Dirda).

* 21 L'article 1 er du projet de loi ne mentionnait, dans sa version déposée à l'Assemblée nationale, que l'objectif global de 3 %. En commission, les députés ont précisé le sous-objectif de 1 % du PIB pour la DIRDA.

* 22 De +357M€ en 2021 par rapport à 2020 à +5Mds€ en 2030.

* 23 Selon l'Insee, le PIB de 2019 s'élevait à 2 425,7 milliards d'euros. Si l'on ajoute la somme de 5 milliards d'euros (soit 0,2 % du PIB de 2019) à l'effort public de recherche actuel (soit environ 0,8 %), on obtient un peu moins d'1 % du PIB de 2019.

* 24 3,9 milliards d'euros en 2028, 4,5 milliards d'euros en 2029 et 5,1 milliards d'euros en 2030.

* 25 Du reste, s'agissant de 2022, les années d'élection présidentielle et législative sont propices aux lois de finances rectificatives qui modifient assez largement les équilibres.

* 26 Jean-Luc Beylat et Pierre Tambourin, Propositions de modernisation de la loi Allègre et de simplification de l'intéressement, 2017.

* 27 Loi N° 99-587 du 12 juillet 1999 sur l'innovation et la recherche.

* 28 Commission européenne, avis du 23 octobre 2007, C(2007) 5093 final.

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