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Avis n° 89 (1996-1997) de M. Michel ALLONCLE , fait au nom de la commission des affaires étrangères, déposé le 29 novembre 1996

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N° 89

SÉNAT

PREMIÈRE SESSION ORDINAIRE DE 1996-1997

Annexe au procès verbal de la séance du 29 novembre 1996

AVIS

PRÉSENTÉ

au nom de la commission des Affaires étrangères, de la défense et des forces armées (1) sur le projet de loi de finances pour 1997 , ADOPTÉ PAR L'ASSEMBLÉE NATIONALE (GENDARMERIE)

TOME V

Par Michel ALLONCLE,

Sénateur.

(1) Cette commission est composée de : MM. Xavier de Villepin, président ; Yvon Bourges, Guy Penne, Jean Clouet, François Abadie, vice-présidents ; Mme Danielle Bidard-Reydet, Michel Alloncle, Jacques Genton, Jean-Luc Mélenchon, secrétaires ; Nicolas About, Jean-Michel Baylet, Jean-Luc Bécart, Mme Monique ben Guiga, MM. Daniel Bernardet, Pierre Biarnès, Didier Borotra, André Boyer, Mme Paulette Brisepierre, MM. Michel Caldaguès, Robert Calmejane, Jean-Paul Chambriard, Charles-Henri de Cossé-Brissac, Pierre Croze, Marcel Debarge, Bertrand Delanoë, Jean-Pierre Demerliat, Xavier Dugoin, André Dulait, Hubert Durand-Chastel, Claude Estier, Hubert Falco, Jean Faure, Jean-Claude Gaudin, Philippe de Gaulle, Daniel Goulet , Yves Guéna, Jacques Habert, Marcel Henry,Roger Husson, Christian de La Malène, Edouard Le Jeune, Maurice Lombard, Philippe Madrelle, Pierre Mauroy, Paul d'Ornano, Charles Pasqua, Alain Peyrefitte, Bernard Plasait, Jean-Pierre Raffarin, Michel Rocard, André Rouvière, Robert-Paul Vigouroux, Serge Vinçon

Voir les numéros :

Assemblée nationale :

Sénat :

Lois de finances.

INTRODUCTION

Mesdames, Messieurs,

Les crédits affectés à la gendarmerie progresseront de 1,7 % dans le projet de loi de finances pour 1997. Cette évolution se compare favorablement à la faible augmentation du budget de la défense dans son ensemble (+ 0,7 % en termes de crédits budgétaires).

Si les effectifs du ministère de la défense se contractent de 4,3 %, les emplois de la gendarmerie s'accroîtront pour leur part de 765 postes budgétaires supplémentaires.

La gendarmerie continuerait-elle ainsi de bénéficier d'une faveur particulière dans un contexte de maîtrise des dépenses publiques ? Le jugement ne résiste pas à l'analyse.

Sans doute aux termes de la loi de programmation militaire, la place de la gendarmerie au sein de notre outil de défense est-elle appelée à se renforcer de façon décisive au cours des années à venir. Pour la gendarmerie, il s'agit d'un défi aux vertus mobilisatrices autant que d'une gageure. En effet, si les orientations fixées par le législateur s'inscrivent dans le prolongement des missions exercées par la gendarmerie et n'engagent pas de mutations comparables à celles que connaissent les autres armes, elles ne requièrent pas moins à court ou moyen terme un effort d'adaptation considérable.

Trop souvent quelques données budgétaires rapidement résumées permettent d'esquiver un débat de fond sur les perspectives offertes à la gendarmerie.

Ainsi, les effectifs augmentent. Certes. Mais cette progression apparaît entièrement imputable aux gendarmes auxiliaires, autrement dit aux volontaires du service national dont rien ne garantit pour le moment qu'ils répondent à l'appel.

L'arme ne gagnera rien à ce que soient occultés les interrogations, voire les doutes actuels. Au contraire, une meilleure prise de conscience des enjeux réels des évolutions à venir permettra de mieux dessiner les voies et les moyens des adaptations nécessaires qui tiennent compte à la fois des nécessités du service de la nation et des aspirations des personnels. C'est cette réflexion que votre rapporteur souhaiterait conduire à travers l'analyse des données budgétaires, des missions, de la situation des personnels et enfin des équipements de la gendarmerie.

*

* *

I. LES GRANDES LIGNES DU PROJET DE BUDGET DE LA GENDARMERIE POUR 1997

Les crédits budgétaires destinés à la gendarmerie progresseront de 1,7 % en 1997 passant de 20.956,9 millions de francs dans le projet de loi de finances initiale pour 1996 à 21.318,6 millions de francs dans le projet de budget soumis aujourd'hui au parlement.

Ces évolutions doivent s'apprécier au regard des perspectives tracées par la loi de programmation militaire 1997-2002.

Sur la durée de la loi de programmation, la gendarmerie bénéficiera de 114,7 milliards de francs (1995) sur le titre III et de 13,3 milliards de francs sur les titres V et VI.

Les données budgétaires pour 1997 permettent de prendre une juste mesure du cadre financier arrêté par la programmation, de ses ouvertures comme de ses contraintes. Au titre III, les dépenses liées au personnel progressent mais les crédits de fonctionnement paraissent calculés au plus juste ; quant aux dotations allouées aux équipements, elles ne laissent guère de marge de manoeuvre.

Autant dire que l'exercice devrait interdire en principe pour l'avenir les pratiques de régulations budgétaires qui ont trop souvent perturbé la gestion des crédits, même si la gendarmerie peut compter, par ailleurs, sur les ressources procurées par les fonds de concours autoroutier.

A. UN BUDGET SOUS CONTRAINTE

La gendarmerie est préservée à un double titre des mesures d'austérité. Par nécessité, parce que la structure de son budget où les dépenses ordinaires représentent près de 90 % de la totalité des crédits (contre 50 % en moyenne pour l'ensemble du budget de la défense) et donnent moins de prise aux économies budgétaires que les dépenses d'équipement. Par choix ensuite : le développement des missions de la gendarmerie n'appelle-t-il pas un renforcement des moyens qui lui sont alloués ? Dans cette perspective, la progression des crédits apparaît plutôt modeste.

1. Une progression ralentie des dépenses ordinaires

Les crédits inscrits au titre III progressent de 2 % entre 1996 et 1997 (3,9 % entre 1995 et 1996) et s'élèvent à 19.159,6 millions de francs. Cette hausse recouvre du reste deux évolutions contrastées : les rémunérations et les charges sociales augmentent de 0,9 % tandis que les crédits de fonctionnement s'accroissent de 7,2 %.

Cet équilibre ne préjuge pas des évolutions attendues à moyen terme. En effet, dans le cadre de la loi de programmation le titre III connaîtra une progression de 5 % sur six ans entièrement imputable aux rémunérations et aux charges sociales, les autres dépenses -et notamment les dépenses de fonctionnement- devant se réduire de 4 %. Ces économies seront obtenues grâce notamment à la rationalisation des emplois de soutien, à la réorganisation de certaines structures administratives ou territoriales, ainsi qu'au développement de procédures logistiques communes au sein de la défense ou avec la police nationale.

Evolution des crédits du titre III (en millions de francs)

Titre III

Crédits 1996

Projet 1997

Variation

31.03 Rémunérations

33.90 Cotisations sociales

33.91 Prestations sociales

34.06 Fonctionnement dont :

13 907,1

953,2

542,7

2921

14 066,9

963,3

504,4

3159,2

1,1 %

1,1 %

- 7,1 %

+ 8,1 %

art. 10 Fonctionnement des formations

art. 20 Locations immobilières

art. 30 Frais généraux du service du Génie

art. 41 Dépenses centralisées de soutien

art. 50 Dépenses informatiques

1507,6

1230

9,1

133,2

41,1

1632,9

1342,9

9,1

133,2

41,1

8,3 %

+ 9,1 %

-

-

-

34.07 Indemnités journalières d'absence temporaire

34.10 Alimentation

264

196,8

266,1

199,7

0,8 %

1,4 %

Total

1 8784,8

19159,6

2 %

a) Les rémunérations et charges sociales : une hausse modérée

Les rémunérations et charges sociales représentent 81 % des ressources du titre III. L'évolution très modérée des dotations peut surprendre au regard de l'accroissement attendu des effectifs de la gendarmerie. Ce paradoxe apparent trouve en fait son explication dans les restructurations que recouvre l'évolution des emplois. Si, par exemple, la création de 565 emplois de sous-officiers au sein du nouveau corps de soutien permet de remplacer nombre pour nombre les 565 emplois de sous-officiers de gendarmerie, la mesure se solde par une économie de 24,2 millions de francs.

L'essentiel de l'augmentation des crédits repose sur les mesures de revalorisation indiciaire (application en année pleine de la dernière tranche d'application du protocole d'accord sur la rénovation de la grille de la fonction publique) et surtout les requalifications d'emploi. Ainsi la création de 209 officiers de gendarmerie entraînera une dépense supplémentaire de 61,5 millions de francs.

b) Les crédits de fonctionnement : un effort certain mais encore insuffisant

La progression prévue de 7,2 % des dépenses de fonctionnement répond au souci, d'une part, de prendre en compte les frais liés à la suppression de la franchise postale (+ 120 millions de francs) et, d'autre part, de réduire l'insuffisance structurelle des crédits dévolus aux loyers.

Comme votre rapporteur l'avait déjà relevé, l'excès des dépenses de loyer sur les ressources allouées (art. 20) a entraîné depuis 1989, un déficit structurel stabilisé cependant à hauteur de 300 millions de francs en 1994 et 1995.

La mesure d'ajustement (171,2 millions de francs) prévue dans le budget 1996, avait déjà contribué à réduire les décalages de paiement au cours des dernières années. En outre un décret d'avance du 26 septembre dernier, a permis de ramener le déficit résiduel pour 1996 à 88 millions de francs.

La mesure d'ajustement prévue pour 1997 (120,9 millions de francs), dont l'effet sera redoublé par la réduction de la dimension du parc de logement liée à la rationalisation des emplois de soutien prévue dans le cadre de la mise en oeuvre de la loi de programmation, suffira-t-elle à apurer ces déséquilibres structurels ? On peut en douter si l'on considère deux nouveaux facteurs d'accroissement des dépenses : d'une part, le paiement de redevances locatives pour l'occupation de certains sites sur lesquels sont implantés les relais du réseau de télécommunications Rubis, d'autre part, la nécessité de prendre à bail temporairement des locations externes pour répondre aux mouvements de personnel consécutifs aux réformes en cours.

L'effort d'économie demeure sensible pour l'achat de carburants dont la dotation diminuée en 1996 reste étale en 1997 : la poursuite de la dieselisation du parc automobile permet d'atténuer l'impact restrictif de cette évolution.

Quant à la dotation prévue pour les dépenses centralisées de soutien liées aux opérations de maintien de l'ordre maintenue à son niveau de 1996, elle risque de ne pas couvrir les reports de charge de l'année 96 sur l'année 97. En effet, les crédits prévus s'élèvent à 133 MF alors que les dépenses prévues pour 1996 dépassent 230 MF.

C'est pour votre rapporteur un grave sujet de préoccupation, alors même que la loi de programmation assigne à la gendarmerie un rôle accru dans la protection du territoire en métropole et outre mer.

2. Les choix rigoureux imposés par l'évolution des dépenses en capital

a) Le cadre fixé par la loi de programmation

Le montant des crédits alloués au titre V sur l'ensemble de la période 1997-2002 s'élève à 13,3 milliards de francs répartis entre les fabrications (56 %) et les infrastructures (44 %). La réduction des crédits, déjà sensible pour 1997, traduit la participation de la gendarmerie à l'effort de rigueur demandé aux armées : seule la dernière année de programmation 2002 bénéficiera d'une dotation légèrement supérieure à l'année 1996 (2,3 milliards de francs contre 2,1 milliards de francs).

La loi de programmation permet de sauvegarder la réalisation du réseau de télécommunications Rubis mais contraint à remettre en cause ou à tout le moins, différer les autres programmes de la gendarmerie.

Les montants inscrits dans le projet de budget pour la gendarmerie aux titres V et VI constituent la première traduction des orientations ainsi tracées.

b) Le programme Rubis : une priorité exclusive

Les crédits de paiement s'élèvent à 2,159 milliards de francs (soit une baisse de 0,6 % par rapport à la loi de finances initiale, mais une hausse de 3,6 % par rapport à la loi de finances rectificative d'avril 1996). Les autorisations de programme se contractent de 0,8 % par rapport à 1996, même si la dotation prévue pour 1997 -2,125 milliards de francs- progresse en fait par rapport aux moyens disponibles de l'année 1996 (+ 3,1 %).

Dépenses en capital

Ventilation des crédits du projet de budget 1997

(en millions de F)

Chapitres et articles d'imputation budgétaire

Crédits de paiement 1996

Crédits de paiement 1997

Evolution 1996/1997

en %

53-70 FABRICATIONS - GENDARMERIE

53-70/71 Electronique

53-70/72 Transport

53-70/73 Armement, munitions, optique

53-70/74 Matériels techniques

53-70/75 Moyens informatiques

53-70/76 Matériels réalisés par la DCAé

53-70/77 Habillement

53-70/78 Couchage, ameublement

53-70/79 MCO* Rubis

53-70/81 Matériels informatiques=MCO*

368,2

262,7

85

42

78,7

40

86

24

49

50

477

306

47

40

107

26

109

50

34

50

29,5

16,5

- 44,7

- 4,8

35,9

- 35

26,7

108,3

- 30,6

-

SOUS-TOTAL 53-70 GENDARMERIE

1 085,6

1 246

+ 14,8

54-40 INFRASTRUCTURE

54-40/81 Infrastructure

54-40/82 Acquisitions immobilières

980,5

61

878

5

- 10,4

- 90,2

SOUS-TOTAL 54-40 INFRASTRUCTURE

1 041,5

883

- 15,2

TOTAL TITRE V GENDARMERIE

2 127,1

2 129

0,1

66-50 SUBVENTIONS D'INVESTISSEMENT ACCORDÉES PAR L'ETAT

45

30

- 33,3

TOTAL TITRES V et VI GENDARMERIE

2 172,1

2 159

- 0,6

*MCO : maintien en condition opérationnelle

L'effort financier se concentre, conformément aux priorités fixées par la loi de programmation, sur l'achèvement du programme de télécommunication de Rubis.

L'étroitesse des ressources contraint en contrepartie à une rigueur particulière qui se traduit par trois effets rigoureux :

- la remise en cause des autres grands programmes d'équipement parmi lesquels, la commande, devenue impossible à financer, des nouveaux hélicoptères ;

- le renouvellement au plus juste de la plupart des matériels, notamment du parc automobile dont le seuil de réforme -pour les véhicules des brigades- se trouve accru de 10 % (220 000 km) ;

- la baisse des commandes des unités-logement désormais limitées à 856, alors que les livraisons s'élèveront à 950 unités-logement en 1997.

B. L'ÉVOLUTION DES MOYENS DISPONIBLES : L'EXIGENCE DE LA SÉCURITÉ

1. Une pratique budgétaire trop heurtée

a) Une marge de manoeuvre aujourd'hui réduite

Votre rapporteur dénonce régulièrement les gels de crédits, souvent transformés en annulations. Ces pratiques ne remettent pas seulement en cause le pouvoir de décision du législateur, elles emportent des conséquences fâcheuses sur le bon fonctionnement de l'arme.

L'année 1996 a donné de nouveau l'exemple d'annulations de crédits répétées. La régulation a ainsi porté sur 10 % des crédits de paiement (soit 203,6 millions de francs sur 2 172 millions de francs). En outre, les autorisations de programme ont été également réduites de 10 %. Aujourd'hui les limites fixées à l'enveloppe budgétaire allouée à la gendarmerie pour le titre V, ne laissent plus guère de prise à l'annulation de crédits, sauf à risquer de compromettre l'exécution par l'arme, de ses missions.

b) Les conséquences pénalisantes des annulations sur le titre V

Les autorisations de programme du titre V de la gendarmerie ont subi en 1996 des annulations répétées, la première en avril, portant sur 82 millions de francs, la seconde en septembre, pour un montant de 115,5 millions de francs, dont 32 millions de francs au titre de la contribution à la recherche duale (civile et militaire).

Parmi les équipements remis en cause, il convient de signaler plus particulièrement les programmes suivants :

- 30 canots rigides prévus dans le cadre de la gendarmerie départementale pour la surveillance des zones côtières (7 millions de francs) ;

- 135 collections de mobilier de brigade (5 millions de francs) ;

- l'extension et la réhabilitation de la caserne de la gendarmerie départementale de Parthenay (27 millions de francs) ;

- la réhabilitation du casernement pour le Centre d'instruction des gendarmes auxiliaires de Montargis (3,9 millions de francs).

Les annulations de septembre ont entraîné l'abandon de plusieurs programmes, parmi lesquels 95 camionnettes tactiques destinées aux écoles ainsi que la réduction de près de 16 millions des subventions d'investissement accordées aux collectivités territoriales.

2. L'apport nécessaire des fonds de concours alimentés par les sociétés d'autoroute

a) L'extension du réseau autoroutier

Aux termes de la loi d'orientation pour l'aménagement et le développement du territoire, aucune partie du territoire ne devrait, à l'horizon de l'année 2015, se trouver à plus de 50 km ou 45 minutes en voiture, d'une autoroute ou d'une route expresse à deux voies. En conséquence le réseau des autoroutes et des voies rapides s'accroît de 300 km supplémentaires en moyenne par an.

b) Une création de 74 emplois de sous-officier prévue pour 1997

Un fonds de concours permet de faire supporter par le compte d'exploitation des sociétés concessionnaires, une partie des dépenses liées à la surveillance du réseau assurée par la gendarmerie. Au titre du budget 1996, il finance ainsi les deux tiers des effectifs appartenant aux unités spécialisées (soit 2 126 sous-officiers d'active -sur 2 632- et 400 gendarmes auxiliaires -sur 1 139-).

Les ressources dégagées par les fonds de concours ont permis, depuis 1995, de créer des emplois de sous-officiers d'active pour tenir compte des effectifs nécessaires pour la surveillance des nouveaux tronçons ouverts au fil des années. De même en 1996, le fonds de concours a financé l'ouverture de 31 emplois de sous-officiers. En 1997, l'augmentation de la contribution du fonds de concours (+ 3,7 %, soit au total un montant de 554,5 millions de francs) assurera la création de 74 emplois de sous-officiers.

Cette création d'emplois, comme du reste toutes celles que permettra le fonds de concours dans les six années à venir, s'ajoute aux effectifs prévus par la loi de programmation.

II. LES MISSIONS DE LA GENDARMERIE : LA LOI DE PROGRAMMATION OU UNE AMBITION MOBILISATRICE MAIS EXIGEANTE POUR LA GENDARMERIE

Un contexte stratégique mouvant, la montée de nouvelles formes de violence au coeur même du territoire (délinquance, trafics de drogue, menaces terroristes) et, partant, le besoin de sécurité plus vivement ressenti de nos concitoyens, autant d'éléments dont la combinaison devait conduire au renforcement du rôle de la gendarmerie. La loi de programmation a pris acte de ces évolutions et en a tiré les conclusions qui s'imposaient en confiant à la gendarmerie une responsabilité éminente dans le domaine de la sécurité, ordonnée autour de trois pôles : une mission de sécurité intérieure à travers l'exercice des missions traditionnelles de police administrative et judiciaire, la protection du territoire (lutte contre les trafics internationaux, le terrorisme et les violences urbaines), les actions de coopération policière transfrontalière dans le cadre européen.

Certes, la gendarmerie s'est déjà engagée résolument dans ces différentes voies au cours des dernières années mais la loi de programmation, tout en consacrant ces développements, les inscrit dans une perspective à moyen terme ambitieuse et propre à mobiliser l'ensemble des gendarmes.

Cette mobilisation toutefois, impose d'une part une définition plus précise du rôle de la gendarmerie dans le cadre de certaines missions, -votre rapporteur songe principalement aux tâches liées à la protection du territoire- et, d'autre part, la poursuite d'un effort d'adaptation dont il importe de prendre la mesure et le prix.

A. UN GRAND DESSEIN POUR LA GENDARMERIE, INSCRIT DANS LA CONTINUITÉ DES EFFORTS ENGAGÉS DEPUIS PLUSIEURS ANNÉES

Une partie des tâches confiées à la gendarmerie dans le domaine de la protection du territoire par la loi de programmation s'inscrit en fait dans le cadre des missions accomplies par la gendarmerie au titre de son activité de police administrative et judiciaire. Ce n'est d'ailleurs par le moindre mérite de la gendarmerie d'avoir su s'adapter aux exigences toujours évolutives de la sécurité.

Chargée d'assurer seule la surveillance de 95 % du territoire -où vit la moitié de la population- la gendarmerie consacre près de 90 % de son activité à la sécurité des personnes et des biens (33 % pour les actions préventives de sécurité publique, 2 % pour les missions de secours, 17 % pour la police de la route, 38 % pour la police judiciaire). L'essentiel de cette activité se déploie dans le cadre de services extérieurs (soit 69 % de l'activité globale, dont 57 % pour les services de jour et 12 % pour les services de nuit) : la gendarmerie répond ainsi au besoin de sécurité quotidien exprimé par nos concitoyens.

1. La police judiciaire : une adaptation exemplaire aux formes évolutives de la criminalité

Il faut le rappeler, la gendarmerie constate aujourd'hui le tiers des crimes et délits commis en France et peut se prévaloir de la moitié des affaires résolues.

Elle a récemment développé son action dans trois directions : le renforcement des moyens pour lutter contre la petite et la moyenne délinquance, la modernisation des moyens d'investigation, l'adaptation et la formation des personnels pour faire face aux nouvelles formes de délinquance.

a) Le renforcement de la lutte contre la petite et moyenne délinquance

La direction générale de la gendarmerie a mis en oeuvre, à compter du 1er novembre 1995, une importante réforme des unités de recherche spécialisées chargées d'assister les brigades territoriales dans l'exercice des missions judiciaires.

Que recherchait cette réorganisation ? Une meilleure coordination des moyens, sans doute trop dispersés 1 ( * ) , afin de mieux lutter contre la délinquance quotidienne.

Aussi les mesures adoptées se sont-elles traduites par le renforcement des unités de recherche à vocation départementale (celles installées dans l'arrondissement où se trouve également le groupement de gendarmerie) et des unités implantées au siège d'un tribunal de grande instance. Elles ont entraîné en contrepartie la suppression de toutes les autres unités (58 au total) à l'exception de celles dont le maintien se justifie par des circonstances locales -une délinquance importante ou l'isolement géographique-.

Les effectifs ainsi libérés on été redéployés vers les autres unités de recherche.

Catégorie

Nombre

Effectifs

Implantation

Off.

S/Off.

G.A

Section de

recherches

30

60

623

2

Chef-lieu de cour d'appel

Brigade départementale de renseignements judiciaires

91

422

178

Chef-lieu de département (excepté Paris et la petite couronne)

Brigade de recherches

290

8

2.227

Chef-lieu de département : 97

ou d'arrondissement : 124

Equipe de recherches (1)

14

48

Chef-lieu d'arrondissement ou autre commune

Total

68

3.320

180

(1) Ces unités sont appelées à disparaître, soit par transformation en brigade de recherches à l'effectif minimum de 4 sous-officiers, soit par dissolution.

En outre deux autres initiatives ont été prises pour renforcer l'action de la gendarmerie dans le domaine de la police judiciaire. D'une part un officier adjoint supplémentaire chargé de mieux assurer la lutte contre la petite et moyenne délinquance a été affecté auprès du commandant de groupement de gendarmerie dans les cinquante et un départements les plus touchés par la criminalité. D'autre part des groupes d'observation et de surveillance dotés de moyens performants pour recueillir notamment des éléments de preuve ont été mis en place au sein des sections de recherche des circonscriptions de Bordeaux, Versailles, Dijon, Lille, Lyon, Orléans, Marseille, et Rennes. Un organe similaire a été également créé auprès de la légion de gendarmerie mobile d'Ile-de-France.

b) Un effort de modernisation et de formation

. La modernisation des moyens d'investigation

Ces restructurations ont été accompagnées d'un réel effort de modernisation des moyens d'investigation . Il a porté sur deux domaines prioritaires : l'équipement des unités de recherche en matériels permettant d'assurer une surveillance sur le terrain, la mise en place d'une chaîne d'information cohérente entre les différents échelons territoriaux de la gendarmerie.

L'équipement des unités de recherche constitue le premier axe de cette politique de modernisation. Au cours des dernières années l'ensemble des unités de recherche a bénéficié de véhicules banalisés et de cartes spécifiques, permettant, le cas échéant, de recourir à la location de véhicules auprès de sociétés privées.

Par ailleurs les sections de recherche ont reçu un véhicule de surveillance prolongée ainsi qu'une motocyclette afin de faciliter les filatures.

En outre, toutes les brigades de recherche départementales sont désormais dotées d'un fourgon spécialement aménagé et réservé à l'usage exclusif des techniciens en identification criminelle.

Enfin, la direction de la gendarmerie nationale, dans le cadre d'une réflexion globale sur les matériels de police judiciaire, a proposé une série de mesures dont la réalisation s'échelonnera sur cinq ans (de 1995 à 2000). A ce titre chaque brigade territoriale dispose depuis avril 1996 d'une mallette de relevés des empreintes digitales afin d'améliorer la lutte contre la délinquance de proximité.

Ces initiatives prises isolément pourraient paraître ponctuelles ; considérées dans leur ensemble, elles traduisent la portée de l'engagement de la gendarmerie dans la lutte contre la criminalité.

Tout aussi décisif, apparaît l'effort pour constituer, à travers un réseau informatique modernisé , une chaîne d'information cohérente dans le domaine de la police judiciaire. Ainsi la généralisation du système « Judex-Groupement » permettra de décentraliser les informations relatives aux affaires judiciaires et aux auteurs d'infraction au profit des groupements de gendarmerie départementale. Le système sera mis en place progressivement entre 1996 et 1998 à raison de quatre groupements par mois.

. Les progrès de la formation

La gendarmerie s'est enfin efforcée, dans le cadre de ses activités de police judiciaire, d'adapter ses moyens et de former les personnels aux nouveaux types de délinquance apparus au cours des dernières années.

Trois secteurs d'intervention retiennent particulièrement l'attention : le travail clandestin, les atteintes à l'environnement, la toxicomanie.

La lutte contre le travail clandestin constitue un champ d'action privilégié pour la gendarmerie qui constate 70 % des infractions relevées. Depuis 1996, l'ensemble des compagnies de gendarmerie départementale ainsi que les unités de gendarmerie spécialisées comptent en leur sein un sous-officier disposant d'une formation spécifique dans ce domaine (acquis au terme d'un stage d'une durée de cinq jours) chargé de sensibiliser ses collègues aux méthodes et instruments adaptés.

Un effort comparable de formation a été entrepris dans le domaine de l'environnement. A la fin de l'année 1996, chaque groupement disposera de deux formateurs-relais environnement/écologie chargés notamment de dispenser aux autres militaires un enseignement sur le droit de l'environnement et la méthode de prélèvements. Ces sous-officiers, formés eux-mêmes dans le cadre de stages de trois semaines organisés au centre national de formation de police judiciaire bénéficient en outre, depuis 1996, d'un stage sur les risques majeurs (industriels, chimiques, nucléaires) à l'école de défense nucléaire bactériologique et chimique de l'armée de terre (Bretteville-sur-Odon).

Les actions engagées contre les trafics de stupéfiants constituent un autre domaine d'intervention où la gendarmerie a su engager l'effort nécessaire de formation et d'adaptation des moyens. Du reste elle peut se prévaloir de quelques résultats remarquables comme la saisie de 800 kilos de cocaïne en juin 1996 à Saint-Barthélémy. Comment ne pas voir là le fruit de l'effort de formation entrepris depuis le début de la décennie. Quelque 120 « formateurs relais antidrogue » ont été formés au cours des années 1994 et 1995 et constituent désormais un réseau d'une densité remarquable (deux formateurs en principe par département -cette structure, renforcée pour les régions les plus sensibles en matière de drogue, a été étendue aux gendarmeries spécialisées, et notamment la gendarmerie maritime et la gendarmerie des transports aériens). En outre, parmi les enquêteurs chargés, au sein des unités de recherches, de la lutte contre le trafic des stupéfiants, 314 sous-officiers supplémentaires ont bénéficié (en 1994 et 1995) d'une formation sur les techniques d'observation et de traitement du volet financier des trafics, dans le cadre d'un stage dont la durée a d'ailleurs été portée de deux à trois semaines.

Enfin, le centre interministériel de la formation antidrogue de Fort-de-France, chargé d'accueillir policiers, douaniers et gendarmes, compte deux instructeurs affectés aux Antilles et en Guyane issus de la gendarmerie. Ce centre est d'ailleurs dirigé aujourd'hui par un officier de gendarmerie.

Au chapitre de la modernisation des moyens, il convient de citer la mise en place dans toutes les sections de recherche et les brigades de recherches départementales d'outils informatiques permettant la gestion et la visualisation automatisées sous forme graphique de certaines informations recueillies par les enquêteurs. Ce système, reconnu comme particulièrement efficace dans la lutte contre les réseaux de distribution de drogue, bénéficie d'ailleurs du soutien financier de la mission interministérielle de lutte contre la drogue et la toxicomanie.

Afin de renforcer son efficacité, en particulier dans la lutte contre les stupéfiants, la gendarmerie a cherché de plus en plus à inscrire son action dans le cadre d'une coopération internationale et d'abord européenne. La loi de programmation reconnaît cette dimension décisive de l'activité de la gendarmerie : « la protection du territoire doit, elle aussi, se concevoir à une échelle européenne ».

2. Une action de plus en plus ouverte sur l'étranger

La nécessité d'une coopération s'est imposée du fait même de la multiplication des échanges (près de quatre cents millions de personnes franchissent ainsi dans les deux sens la frontière française), liée à l'intégration européenne et, de façon plus générale, à la « mondialisation » de l'économie.

a) Une présence encore timide au sein des instances de coopération européenne

Dans le cadre européen, la coopération s'ordonne autour de quatre thèmes principaux : le troisième pilier du Traité de Maastricht (coopération dans le domaine de la justice et de la politique intérieure), Europol, l'espace Schengen, la coopération transfrontalière.

La gendarmerie française est représentée au sein des instances de l'Union européenne à travers sa participation aux différents groupes de travail chargés de développer la coopération dans le cadre du titre VI du traité de Maastricht (groupe directeur I sur le droit d'asile et l'immigration, groupe directeur II sur la coopération policière et douanière, groupe directeur III sur la coopération judiciaire).

Il convient de noter par ailleurs l'institution d'un groupe de travail franco-autrichien chargé d'intensifier le dialogue bilatéral dans les domaines relevant du titre VI, dans la perspective notamment de l'élargissement de l'Union européenne aux pays d'Europe centrale et orientale.

La gendarmerie se trouve également représentée dans le cadre d' Europol au sein du groupe chargé d'élaborer les règlements nécessaires à l'entrée en vigueur de la convention Europol du 26 juillet 1995 ainsi que dans le cadre de l'« Unité drogue Europol » créée le 2 juin 1993.

La première année d'application de la convention de Schengen a souligné la valeur des travaux de la cellule opérationnelle du système national d'information Schengen , composée à hauteur du tiers des effectifs, par des militaires de la gendarmerie. De mars 1995 à mars 1996, les informations introduites dans ce système ont permis à la gendarmerie d'interpeller plus d'un millier de personnes et de retrouver quelque 610 véhicules.

Enfin le maintien de la sécurité publique aux frontières est principalement du ressort de la gendarmerie. Plus de 5 000 gendarmes assurent ainsi la surveillance des frontières extérieures de l'espace Schengen. Les frontière intérieures ne requièrent pas un effort moindre : 137 brigades territoriales assument ainsi la responsabilité exclusive de la sécurité publique sur 93 % des 458 kilomètres de frontières communes avec l'Allemagne. A ce titre, la direction générale de la gendarmerie participe au comité de coordination de la politique européenne de sécurité intérieure constitué au sein du SCGI (Secrétariat général du Comité interministériel pour les questions de coopération économique européenne) chargé de veiller à la cohérence et au suivi des conventions relatives à la coopération transfrontalière. Toutefois, votre rapporteur pour avis déplore que la gendarmerie ne soit pas encore suffisamment associée aux instances chargées de préparer et de mettre en oeuvre la coopération policière européenne.

b) Le développement constant des actions de coopération bilatérales ou multilatérales

. La gendarmerie : un modèle attractif pour nos partenaires

La coopération internationale ne permet pas seulement de mieux remplir la mission de sécurité impartie à la gendarmerie, elle s'inscrit également dans une double perspective : assurer le rayonnement et l'exemplarité du modèle français de maintien de l'ordre, favoriser nos intérêts dans les pays concernés.

Au 1er août 1996, près de 980 gendarmes servaient hors de nos frontières. Ce chiffre donne la mesure d'une présence qui revêt en fait trois formes principales : la coopération bilatérale « classique », une coopération dans les pays du champ de la coopération, la participation à des opérations de maintien de la paix sous l'égide d'organisations internationales.

La gendarmerie dispose d'attachés de gendarmerie dans deux ambassades européennes : Rome et Madrid. En effet depuis 1993, la coopération privilégie les relations avec l'Italie et l'Espagne qui disposent de forces dotées d'un statut comparable. Dans ces pays, les attachés de gendarmerie participent aux travaux liés à la mise en oeuvre de la coopération transfrontalière. Ils apportent également leur soutien aux enquêteurs français déplacés hors du territoire national en exécution de commissions rogatoires internationales. Bien que de nombreuses actions aient été conduites au profit des pays d'Europe centrale et orientale adeptes, pour nombre d'entre-eux, aussi d'un système de sécurité militaire (gendarmeries roumaine et polonaise, polices militaires tchèque et slovaque, forces de défense en Lituanie et Lettonie), la gendarmerie n'a guère de représentants, contrainte budgétaire oblige, dans ces différents pays.

Cette absence est d'autant plus regrettable que la présence d'attachés de gendarmerie constitue un atout décisif pour favoriser une coopération régulière garante du rayonnement de l'arme. Les actions des deux attachés de gendarmerie en Turquie et en Argentine en constituent la meilleure illustration.

Ainsi, en Turquie, un cours de langue française a été ouvert au commandement des écoles de la gendarmerie turque, tandis qu'une dizaine de militaires de la gendarmerie suivent une formation à l'institut d'études françaises d'Ankara (onze stages sont programmés pour l'année 1997).

La présence d'un attaché de gendarmerie en Argentine, accrédité également au Chili (deux pays qui partagent le concept français de force de sécurité de statut militaire) a permis d'une part de souligner les compétences acquises par l'arme française dans une région préoccupée par les problèmes de narcotrafic, et d'autre part de promouvoir certains équipements de la gendarmerie, comme le réseau de transmission Rubis pour lequel les carabiniers du Chili viennent de confirmer leur plus vif intérêt.

La gendarmerie assume par ailleurs un rôle croissant dans les pays du champ de la coopération soucieux, notamment en Afrique, de mettre en place des forces de sécurité intérieures dont le rôle s'accorde bien au processus de construction, encore fragile, d'un Etat de droit.

Cette présence s'inscrit dans le cadre de l'assistance militaire technique sous une forme permanente ou temporaire (60 officiers et 99 sous-officiers). D'intéressantes perspectives de coopération s'ouvriront bientôt en Haïti où la gendarmerie, au terme de la mission d'appui des Nations Unies (MINUHA) -novembre 1996- où elle est largement engagée, a vocation à prendre une part décisive dans le développement futur des forces de sécurité intérieure.

Dans la péninsule indochinoise, la gendarmerie, après avoir encadré la montée en puissance de la gendarmerie khmère, forte aujourd'hui de 4 000 hommes, pourrait participer à une mission d'évaluation interarmées susceptible de se rendre au Vietnam.

Enfin l'intérêt que les pays du Moyen-Orient manifestent de façon ponctuelle pour le savoir-faire français dans la lutte antiterroriste et la protection rapprochée des hautes personnalités, ouvre, pour la gendarmerie, un champ d'action encore largement inexploré. Une mission d'évaluation pourrait ainsi se rendre à l'automne 1996 au Koweit désireux de développer sa garde nationale, chargée notamment de missions de maintien de l'ordre.

Enfin la gendarmerie se trouve engagée dans plusieurs opérations de maintien de la paix .

. La contribution de la gendarmerie aux opérations de maintien de la paix

Les missions conduites sous l'égide de l'ONU comptent 57 militaires de la gendarmerie regroupés, rappelons-le, au sein de trois composantes : les prévôts attachés aux bataillons français et chargés de faire respecter les lois et règlements français au sein de ces unités, les membres de la police militaire internationale (UNMP) responsable du respect des règlements de l'ONU au sein de l'ensemble des forces, les contrôleurs de police (CIVPOL) chargés de veiller au respect des droits de l'homme par les polices locales en particulier en matière d'incarcération.

La gendarmerie est ainsi représentée par deux prévôts et trois membres de la police militaire internationale au Liban dans le cadre de la FINUL (Force intérimaire des Nations-Unies au Liban) et par 52 contrôleurs de police en Haïti dans le cadre de la MINUHA dont le mandat expire le 30 novembre 1996.

Hors opérations des Nations Unies, la gendarmerie se trouve également impliquée (à travers la présence de 9 officiers et 171 sous-officiers) au sein de l'IFOR (Force de mise en oeuvre des accords de paix) en Bosnie-Herzégovine, dans des brigades prévôtales classiques mais aussi dans deux unités nouvelles créées pour participer à des actions civilo-militaires : les pelotons de gendarmerie de surveillance et d'intervention, la brigade de gendarmerie d'investigations. A ce titre les gendarmes contribuent à la sécurité publique générale sur la zone de déploiement de la division française et assurent les relations avec les autorités de police locales et les unités de police militaire alliées.

Enfin, dans le cadre de l'Union de l'Europe occidentale, la gendarmerie, après avoir participé à la mission de contrôle de l'embargo sur le Danube, achevée en juin 1996, a contribué à l'opération destinée, à Mostar, à mettre sur pied une force de police croato-musulmane.

Si les missions assignées par la loi de programmation s'inscrivent ainsi dans le prolongement d'activités traditionnelles ou, à tout le moins, d'évolutions initiées de longue date, les inflexions qu'elle commande, l'importance du rôle dont elle investit la gendarmerie dans certains domaines présentent des incertitudes et des contraintes dont il faut prendre la juste mesure pour favoriser une adaptation équilibrée de l'arme.

B. LES ADAPTATIONS À VENIR : LEURS INCERTITUDES ET LEURS EXIGENCES

1. Les contours d'un avenir encore à préciser

a) Les incertitudes liées à la protection du territoire

Aux termes de la loi de programmation, la gendarmerie se trouve investie d'un rôle éminent pour veiller à la protection du territoire. Le livre blanc sur la défense l'a mis en lumière : si la France n'est plus immédiatement exposée à ses frontières, à une menace militaire, elle reste exposée aux risques liés au terrorisme, aux extrémismes religieux ou nationalistes, aux trafics de drogue et à certaines dérives mafieuses. Dans cette perspective, la gendarmerie devra conduire la lutte contre toutes les actions insidieuses et opérations hostiles pouvant porter atteinte à la sécurité du territoire et des populations. C'est moins le principe même de cette mission, conforme à la vocation traditionnelle de la gendarmerie, que l'étendue et la systématisation des activités confiées ainsi à la gendarmerie, qui font question.

La gendarmerie est toujours plus sollicitée pour assurer la sécurité du territoire.

Un plus large recours à la gendarmerie, notamment dans la situation de crise, sans développement concomitant de ses moyens, conduirait, selon votre rapporteur, à soumettre l'arme à des tensions excessives.

Faut-il rappeler ici, à titre d'exemple, la charge qui incombe à la gendarmerie mobile ? L'augmentation continue du nombre moyen de jours de déplacement des unités (171 en 1990, 193 en 1994 et 208 en 1995...) n'a pu se faire qu'aux dépens d'une part du concours apporté par la gendarmerie mobile aux unités départementales, pour renforcer en particulier la sécurité des quartiers difficiles situés hors zone de police d'Etat, et d'autre part du temps consacré par les unités à la formation.

En effet, chaque escadron bénéficie en principe de quatre semaines de neutralisation pour la formation à la résidence ou en camps entre mi-septembre et fin mai, tandis qu'un tiers des unités effectue un stage de recylage de maintien de l'ordre à Saint-Astier, d'une durée de quinze jours, l'importance et la fréquence des déplacements peuvent entraver la nécessaire continuité de l'instruction.

Le plan Vigipirate mis en place en 1995, a requis, au moment de son application renforcée, près de 15 000 gendarmes. L'effort consenti apparaît considérable et la gendarmerie mobile, principalement sollicitée dans ce cadre, mérite une considération particulière pour la disponibilité et la compétence dont elle a su faire preuve.

Cet effort a des limites, et comme l'a d'ailleurs lui-même indiqué M. Bernard Prévost, « la gendarmerie ne sera toutefois pas en mesure d'augmenter sa contribution à la mise en oeuvre des différents plans de sécurité générale, la recherche du renseignement, la protection et la défense des points sensibles » 2 ( * ) .

La mise en oeuvre d'une réserve rénovée devrait sans doute, à terme, permettre à la gendarmerie de prendre toute sa part dans la mission de protection du territoire, mais ici encore, plusieurs incertitudes demeurent.

b) les nouvelles réserves : un avenir à préciser

La loi de programmation a prévu de resserrer les effectifs des réservistes de 504 600 aujourd'hui à 100 000. Ce volume se partagera pour moitié entre la gendarmerie d'un côté et les trois armées de l'autre. Ramenés ainsi de 130 000 à 50 000, les réservistes de la gendarmerie se verront assigner un rôle renouvelé afin de fournir aux unités d'active dès le temps de paix ou de crise, le renfort en effectifs nécessaires à l'exécution des missions traditionnelles.

Selon un schéma, encore à l'étude, l'organisation de la réserve de 50 000 hommes pourrait reposer sur deux niveaux :

- au premier niveau, une réserve principale de 13 000 hommes assurant d'une part le renforcement des unités d'active (9 000 hommes) et d'autre part la formation, la gestion et la mise sur pied des unités de réserve (4 000 hommes)

- au second niveau, une réserve complémentaire de 37 000 hommes permettant également le renforcement des formations d'active (4 000 hommes) et l'institution d'unités d'active dont l'emploi s'avérerait nécessaire en cas de crise (33 000 hommes).

En outre la loi de programmation prévoit une réserve complémentaire composée des réservistes qui, s'ils ne satisfont plus les conditions de compétence ou de disponibilité pour appartenir à la première réserve, pourraient constituer une ressource de précaution et « contribuer sous des formes nouvelles et adaptées, au maintien du lien Armées-Nation ».

Il reviendra en temps de crise aux groupements de gendarmerie départementale et aux circonscriptions, de prélever sur cette réserve complémentaire les effectifs nécessaires pour l'exécution des missions traditionnelles de la gendarmerie.

Le recentrage des missions sur le temps de paix ou de crise, impose de revoir l'équipement des réserves frappé d'ailleurs dans son ensemble, d'obsolescence . Il importera en effet de réduire les matériels voués à la défense opérationnelle du territoire au profit de matériel d'usage courant.

L'équipement des réserves dont les déficiences suscitent de longue date l'inquiétude de votre rapporteur, a fait l'objet, au cours d'une période récente, de quelques mesures favorables : constitution du réseau diamant pour assurer la liaison avec les points sensibles et l'interopérabilité avec l'armée de terre (soit 850 stations fixes, 1 875 stations mobiles et 805 stations portatives), réalisation de 600 collections de paquetage au profit de la réserve sélectionnée en 1996. Certes, la réserve bénéficie d'anciens matériels des unités d'active, en cours de renouvellement (véhicules et MAS 49-56). Mais, compte tenu de la lenteur du rajeunissement des équipements pour les militaires d'active et l'état des matériels transférés, l'effort en faveur des réserves demeure encore notoirement insuffisant.

2. les contraintes d'une plus grande disponibilité

Le rôle imparti à la gendarmerie dans l'exercice de ses missions de sécurité intérieures requiert un effort d'adaptation, sans doute déjà largement engagé, mais appelé à s'intensifier encore davantage dans un contexte où, pour faire face au besoin de sécurité, la coordination avec les forces de police apparaît comme un impératif.

a) Un effort de rationalisation et ses conséquences pour les personnels

La gendarmerie, toujours plus sollicitée par le besoin de sécurité exprimé par la population, a engagé d'importantes réformes destinées à lui permettre de mieux assurer ses missions. Mais les évolutions nécessaires sous leur double forme -le redéploiement des structures et la réorganisation du service- requièrent des militaires un effort d'adaptation dont il importe de prendre la juste mesure.

les redéploiements

L'essentiel des redéploiements est aujourd'hui commandé par le souci de renforcer la sécurité dans les banlieues où la gendarmerie se trouve exclusivement compétente. Cette évolution suppose la suppression de certaines brigades situées en zones de police d'Etat où la police nationale exerce une compétence exclusive en matière de sécurité publique. Sur les trois années à venir une centaine d'unités situées en zones de police d'Etat pourraient disparaître. La police nationale ne risque-t-elle pas cependant de se trouver débordée par l'ampleur de la tâche dans le domaine de la police judiciaire, dévolu en partie à la gendarmerie ? Pour conjurer ce risque, la Direction générale envisage, dès 1997, la mise en place de pelotons de surveillance et d'intervention (PSIG) renforcés ainsi que de brigades de prévention de la délinquance juvénile dans les départements sensibles au regard des problèmes de délinquance et de violence des jeunes.

Pour votre rapporteur, le développement de zones de non-droit dans certaines banlieues impose une mobilisation de l'ensemble des moyens disponibles. Tout effort de rationalisation qui sert cet objectif lui paraît opportun. La gendarmerie assure une présence constante dans les zones péri-urbaines où elle exerce son activité. Cette proximité avec la population qu'elle côtoie au quotidien, assure une excellente connaissance des réalités du terrain et lui permet ainsi d'assurer un rôle de prévention très utile. Il faut rendre hommage à cette action conduite dans des conditions souvent difficiles et espérer qu'elle puisse prendre une plus grande ampleur dans les années à venir.

Les restructurations doivent porter principalement sur la présence en zone de police d'Etat mais ne pas entamer le maillage territorial en zones rurales. La présence de la gendarmerie constitue un facteur clef de l'aménagement du territoire : elle décide souvent du maintien d'autres services publics, au premier rang desquels l'existence d'une école.

Le renforcement prioritaire des formations territoriales implantées en zone périurbaine inspire également la réorganisation de deux gendarmeries spécialisées.

Ainsi la restructuration de la gendarmerie des transports aériens s'est traduite par la dissolution des quatre groupes de commandement de groupement, de onze brigades, d'une brigade de recherche, de deux brigades motorisées et d'un groupe de gendarmes auxiliaires. Parallèlement, trois compagnies ont été créées. Ces différentes opérations auront permis de dégager trente-cinq sous-officiers et vingt gendarmes.

De même, plusieurs transformations ont affecté en 1996 la gendarmerie de l'armement : dissolution du groupement de commandement Compagnie de Biscarosse et de la brigade de Captieux, réduction sensible des effectifs de plusieurs brigades -au sein notamment de la compagnie de Biscarosse. Les quelque 50 sous-officiers et 18 gendarmes auxiliaires ainsi libérés permettront de renforcer également les formations de la gendarmerie départementale implantées en zones périurbaines.

L'accroissement du trafic autoroutier et le développement des liaisons assurant la continuité du réseau autoroutier (LACRA), supposent un renforcement notable des effectifs. La gendarmerie a dû procéder en 1996 au redéploiement de 60 postes de sous-officiers à partir d'unités existantes afin d'autoriser la création d'unités nouvelles et renouvellera sans doute une procédure comparable au cours de l'année prochaine.Les ressources procurées par les fonds de concours autoroutiers ont permis, au cours des années, de satisfaire une partie des besoins. Suffiront-elles, dans l'avenir, compte tenu de l'accroissement des charges ?

En outre, afin d'améliorer l'efficacité des personnels servant dans les formations d'autoroutes, la gendarmerie a pris l'initiative de procéder à partir de janvier 1997, à la départementalisation des unités, en étroite association avec les partenaires intéressés et notamment les responsables des sociétés d'autoroutes. Conduite d'abord, à titre expérimental, dans les circonscriptions d'Orléans et de Dijon, la réforme, tout en préservant la vocation spécifique des pelotons d'autoroutes, permettra de placer ces unités sous l'autorité administrative du commandant du groupement de gendarmerie départementale, interlocuteur unique de l'autorité administrative pour toutes les questions touchant à l'ordre public sur l'ensemble du secteur relevant de la compétence de la gendarmerie.

Outre ces mesures de réorganisation, il convient de citer également les opérations relatives à la gendarmerie maritime et à la gendarmerie de l'air, liées aux restructurations de la Marine et de l'armée de l'Air. Trois brigades de gendarmerie de l'Air ont ainsi été supprimées ou sont en passe de l'être (à Cenon et Nîmes -été 1996- à Limoges en août 1997).

La disponibilité de la gendarmerie

Ces redéploiements sollicitent beaucoup le sens de l'adaptation de la gendarmerie. C'est pourquoi l'organisation du service, elle-même, doit rester gouvernée par l'équilibre entre les nécessités du service et les contraintes supportées par les personnels.

La nouvelle organisation du service , entreprise dans le cadre de la circulaire ministérielle du 30 mai 1991, visait à réduire de moitié les astreintes supportées par les militaires de la gendarmerie. Une nouvelle circulaire du 1er mars 1994 a corrigé ce que cette rationalisation des modes d'intervention de la gendarmerie pouvait présenter d'excessif au regard notamment de l'indispensable proximité du gendarme et de la population. Quatre aménagements principaux ont permis d'instaurer un réel équilibre :

- maintien d'un planton dans toutes les brigades territoriales 24 h sur 24, afin d'assurer l'accueil de toute personne en difficulté, mais aussi de permettre une première intervention en cas de nécessité urgente à proximité de l'unité ;

- suppression de la notion de « brigade de veille » afin que toutes les unités puissent intervenir, chaque nuit, dans une zone adaptée à leurs effectifs disponibles ;

- assouplissement des règles de renvoi vers les centres opérationnels de gendarmerie (COG) et modulation des horaires d'ouverture des bureaux pour mieux répondre aux besoins des usagers ;

- appel à la patrouille la plus proche du lieu où l'intervention de la gendarmerie est requise quelle que soit par ailleurs la compétence territoriale de l'unité.

Les charges résultant de l'instauration d'une permanence nocturne dans chaque brigade ont été partiellement compensées par la création de 36 groupes de 10 gendarmes auxiliaires (6 en 1995 et 5 en 1996) au profit des groupements qui comptent le plus grand nombre d'unités à effectif réduit. Cependant l'objectif d'accorder cinq quartiers libres par quinzaine en moyenne, à chaque militaire -au lieu de quatre aujourd'hui- demeure encore, votre rapporteur le regrette, hors de portée.

L'efficacité des mesures adoptées ne fait pas de doute : les délais entre l'heure de l'appel reçu au COG et l'heure d'arrivée de la patrouille sur les lieux ne dépassent pas en moyenne 30 minutes.

L'équilibre relatif entre l'intérêt du service et les charges du personnel est-il aujourd'hui remis en cause par l'obligation de mobilité dont le principe a été mis en avant au cours de l'été 1996 ? La protestation orchestrée par les femmes de gendarmes manifeste le malaise suscité par le projet de la direction générale.

Aux termes du nouveau projet, la mutation dans l'intérêt du service sera prononcée au bout de dix ans de résidence. Entre trois et cinq ans une demande de mutation pour convenances personnelles, sera cependant recevable. Ces dispositions ne prendront effet qu'en vertu d'un décret prévu en 1998.

Il est normal que les militaires de la gendarmerie changent de conditions de travail, de lieux de résidence. Ce sens de l'adaptation constitue l'une des conditions requises pour l'exercice des missions de la gendarmerie. A ce titre l'obligation de mobilité paraît légitime. C'est donc moins le principe, déjà d'ailleurs largement admis dans le corps des officiers, que le moment choisi pour le rappeler, qui peut susciter la perplexité. A l'heure en effet, où les redéploiements d'unités, les incertitudes sur le devenir du volontariat soulèvent doutes et inquiétudes, était-il vraiment opportun de soulever un problème au retentissement immédiat par les conséquences immédiates qu'il emporte sur la vie quotidienne des militaires, alors même que le décret ne prendra pas effet avant 1998 ? En outre, la réforme affectera en priorité les personnels ayant plus de vingt ans de résidence, se trouvant à plus de sept ans de la limite d'âge. Parmi ces personnels, il faut le rappeler, certains se sont vu refuser des demandes de mutation au moment où la mobilité était entravée par la difficulté de pourvoir certains postes dans des endroits reculés ou réputés difficiles.

Votre rapporteur pour avis souhaite en conséquence que chaque cas individuel puisse faire l'objet d'une attention particulière, tout en se réjouissant par ailleurs que la clause de mobilité soit désormais inscrite dans le contrat d'engagement du militaire.

Au moment où les exigences de sécurité intérieure connaissent une singulière acuité, la complémentarité et la coordination des services compétents dans ce domaine de l'Etat apparaissent comme une priorité.

b) Les progrès encore trop lents de la coopération entre la gendarmerie et la police

Le directeur général de la gendarmerie évoquait dans cette perspective la mise en place d'un véritable partenariat .

Cette concertation s'est d'abord instaurée à l'échelon local avec la mise en place du plan départemental de sécurité publique sous l'autorité du préfet et du procureur de la République. Le commandant de groupement de gendarmerie départementale coopère avec le directeur départemental de la sécurité publique au sein des cellules techniques de coordination opérationnelle. Aux termes des conclusions de la mission interministérielle d'évaluation des plans départementaux de sécurité rendues en 1996, le rôle du commandant devrait se trouver renforcé. En outre la mission interministérielle a formulé des propositions de rédaction pour une nouvelle circulaire interministérielle complémentaire de celle du 9 septembre 1993.

La clarification des compétences territoriales entre la gendarmerie et la police a progressé plus vite sur le papier toutefois que sur le terrain.

Le cadre réglementaire a notablement évolué au cours des derniers mois.

En effet, les décrets d'application de la loi d'orientation et de programmation du 21 janvier 1995 relative à la sécurité, qui se faisaient attendre, ont commencé d'être publiés ou sont en voie de l'être. Un décret du 18 septembre 1996 ouvre la possibilité d'instituer un régime de police d'Etat dans les communes de plus de 20.000 habitants (compte tenu de la population saisonnière) où la délinquance revêt des traits comparables à celles des zones urbaines. Le nouveau régime est fixé par arrêté signé notamment par les ministres de la défense et de l'intérieur.

Un second décret adopté le 19 septembre 1996 précise les attributions et l'organisation de la coopération entre la police et la gendarmerie. En premier lieu, la responsabilité en matière de police administrative incombe à la police nationale en zone de police d'Etat et à la gendarmerie ailleurs même si un arrêté peut modifier cette répartition dans les ports, les aéroports, les gares ferroviaires ou routières, les voies autoroutières et de dégagement. En outre, le préfet peut décider lorsqu'un événement grave et l'urgence le requièrent, la mise à la disposition des autorités concernées des renforts de police ou de gendarmerie nécessaires. Par ailleurs, il revient au préfet de département de coordonner, assisté des conseils du directeur départemental de la sécurité publique et du commandant de groupement de la gendarmerie, les actions de la police et de la gendarmerie dans le domaine de la police administrative. Enfin, un conseil de l'équipement et de la logistique conjoint police-gendarmerie permettra d'harmoniser les équipements et les matériels.

Votre rapporteur se félicite également que les articles D 21 à D 8-2 et D 12 du code de procédure pénale aient été enfin modifiés par le décret n° 96-74 du 25 janvier 1996 afin d'améliorer notamment l'information des services qui concourent à la police judiciaire.

Cet effort de clarification a toutefois du mal à se traduire dans la pratique.

En premier lieu la commission mixte police-gendarmerie « sécurité publique », instituée en janvier 1990, a étudié le cas de 80 communes concernées par les opérations d'étatisation (au nombre de 33) ou de désétatisation (au nombre de 47).

Ces évolutions restent conditionnées par la possibilité pour la police nationale de supprimer ses plus petites ciconscriptions de sécurité publique pour redéployer ses effectifs dans le cadre des procédures d'étatisation.

Votre rapporteur évoquera enfin un sujet de satisfaction, le concept du dualisme équitable , avancé par le contrôleur général des armées Sandras, au terme d'une réflexion conduite en juin 1995 dans le cadre d'un groupe de travail, a commencé de se concrétiser. Le principe d'une requalification des emplois de la gendarmerie a bénéficié d'une provision de 20 millions de francs inscrits dès 1995 dans le projet de loi de finances pour 1996. L'effort sera poursuivi en 1997.

Demeure l'épineux problème des grades, source de confusion depuis que la police a repris des désignations identiques à celles de la gendarmerie pour des responsabilités qui ne se recoupent d'ailleurs pas. A ce jour, et malgré les propos rassurants du ministre de la défense, aucune mesure tendant à une clarification n'a pu être adoptée.

*

* *

III. LES PERSONNELS DE LA GENDARMERIE : ESPOIRS ET INCERTITUDES

La loi de programmation ouvre de nouvelles perspectives pour les personnels de la gendarmerie.

Trois grandes orientations méritent d'être soulignées :

- L'augmentation des effectifs de 93.669 en 1996 à 97.884 en 2002, soit une progression de 4,5 % imputable principalement aux personnels civils (de 1258 à 2260, soit + 79,65 %) et surtout aux volontaires du service national (de 12.017 à 16.232, soit + 35 %) :

- l'amélioration du taux d'encadrement par les officiers dont le nombre progressera de 52 % (de 2666 à 4055) alors que les effectifs de sous-officiers de gendarmerie se contracteront de 7,5 % (de 77.079 à 71.302) ;

- la création de nombreux emplois militaires à caractère administratif et technique destinés à intégrer des personnels par voie de changement d'arme (les sous-officiers en substitution des personnels d'active de la gendarmerie atteindraient un effectif de 4035 en 2002) ;

La voie tracée répond à une double préoccupation mais soulève aussi deux incertitudes. D'une part, en effet, l'augmentation des effectifs permet de redéployer les gendarmes sur des postes opérationnels tandis que l'accroissement du nombre d'officiers ouvre des perspectives plus favorables pour les carrières qu'entravaient depuis une décennie certains blocages.

D'autre part, cependant, l'intégration des sous-officiers des autres armes, mais surtout le recrutement des gendarmes auxiliaires volontaires appelés à accomplir un service de deux ans soulèvent encore nombre d'interrogations.

A. UNE DOUBLE DYNAMIQUE FAVORABLE

1. L'augmentation des effectifs

Les effectifs s'accroîtront de 765 emplois en 1997.

EVOLUTION DES EFFECTIFS MILITAIRES

OFFICIERS

Grades

Effectifs

1996

Emplois

créés

Emplois supprimés

Solde

Effectifs

1997

Officiers de gendarmerie

Général de division

7

7

Général de brigade

16

16

Colonel

182

10

10

192

Lieutenant colonel

et chef d'escadron

870

73

73

943

Capitaine, lieutenant et sous-lieutenant

1 591

126

- 4

122

1 713

Total

2.666

209

-4

205

2.871

Officiers du corps militaire de soutien

Lieutenant-colonel et chef d'escadron

7

7

7

Capitaine, lieutenant et sous-lieutenant

14

14

14

Total

21

21

21

Appelés

Sous-lieutenant

20

20

Total

2 686

230

- 4

226

2.912

SOUS-OFFICIERS

Grades

Effectifs 1996

Emplois créés

Emplois supprimés

Solde

Effectifs 1997

Sous-officiers de gendarmerie

Aspirant

55

15

15

70

Major

1 524

111

- 130

- 19

1 505

Adjudant-chef

3 159

376

- 62

314

3 473

Adjudant

8 482

362

- 315

47

8 529

Maréchal des logis chef

7 387

924

- 46

878

8 265

Gendarme

56 472

55

- 1 781

- 1 726

54 746

Total

77 079

1 843

- 2 334

- 491

76 588

Sous-officiers du corps militaire de soutien

Major

6

12

12

18

Adjudant-chef

44

80

80

124

Adjudant

74

107

107

181

Sergent-chef

165

139

139

304

Sergent

360

227

227

587

Total

649

565

565

1 214

Sous-officiers du contingent

Aspirant

153

153

Gendarme auxiliaire MDL

423

8

8

431

Total

576

8

8

584

Total sous-officiers

78 304

2 416

- 2 334

82

78 386

MILITAIRES DU RANG DU CONTINGENT

GA brigadier chef

760

13

13

773

GA auxiliaire brigadier

1 532

25

25

1 557

GA auxiliaire 1ère classe

1 259

15

15

1 274

GA auxiliaire

7 870

133

133

8 003

Total

11 421

186

186

11 607

Total général

92 411

2 832

2 338

494

92 905

a) La création d'emplois militaires

La création d'emplois militaires résulte d'un triple processus :

- la création de 230 emplois d'officier, parmi lesquels 209 officiers de gendarmerie dans le cadre du plan de requalification des emplois (10 colonels, 73 lieutenants-colonels et chefs d'escadron, 126 capitaines, lieutenants et sous-lieutenants) et 21 officiers du « corps de soutien » dont le statut reste encore à arrêter ;

- l'ouverture de 194 emplois de gendarmes auxiliaires ;

- la création de 74 postes de sous-officiers sur un financement reposant sur le fonds de concours autoroutier.

La suppression de 565 emplois de sous-officiers de la gendarmerie se trouve compensée, nombre pour nombre, par la création de 565 emplois de sous-officiers du nouveau corps de soutien.

b) L'ouverture d'emplois civils supplémentaires annonce une évolution majeure de la loi de programmation

La gendarmerie bénéficiera de la création de 271 emplois de civils pourvus par des transferts des autres armées.

Sur la durée de la loi de programmation, 1 002 emplois de sous-officiers de la gendarmerie seront transformés en personnels civils dont l'effectif budgétaire sera ainsi quasiment doublé pour atteindre 2 260 personnels.

Les 1 002 emplois civils nouveaux devraient se répartir de la façon suivante :

Administratifs

Techniques

Ouvriers

Total

NI (1)

NII

NIII

Total

NI

NII

Total

Circonscriptions

7

7

9

9

48

64

Légions

24

48

165

237

18

255

Groupements

87

87

25

112

Ecoles

2

21

54

77

20

97

Organismes centaux

2

8

130

140

2

75

77

90

307

Divers

73

73

7

7

87

167

Total

28

77

516

621

2

91

93

288

1 002

(1) niveau 1.

2. Un programme de requalification et de revalorisation des carrières

a) Les mesures de repydamidage : un nécessaire appel d'air dans des carrières ralenties

La progression des carrières s'est singulièrement ralentie en une décennie. Le taux de sélection pour l'avancement au grade de colonel est ainsi passé de 46 % en 1982 à 12 % en 1993 (244 pour un tableau de 31 proposables pour un tableau de 28) à 10 % en 1996. Parmi les sous-officiers, les blocages se concentrent surtout au niveau du grade des maréchaux des logis chefs auquel n'accèdent plus que 14,4 % des postulants en 1995 contre 55 % en 1990.

Plusieurs facteurs conspirent à susciter ces blocages et au premier rang, sans doute, la crise économique responsable du net ralentissement constaté des départs anticipés à la retraite malgré les mesures d'incitations (art. 5 et 6 de la loi 75-1000).

Départs à la retraite pour les sous-officiers

1990

1991

1992

1993

1994

1995

Départs annuels

3 057

2 871

2 512

2 298

2 162

2 112

Départs à la retraite

2 432

2 294

1 850

1 677

1 577

1 526

dont avant la limite d'âge

1 502

1 417

1 256

1 095

1 028

965

Pour les officiers, la politique entreprise pour rajeunir les cadres, certes bénéfique à l'amélioration de la qualité du corps dans son ensemble, n'est pas étrangère naturellement à la constitution des goulets d'étranglement dans les perspectives de carrière.

Pour les sous-officiers, plusieurs éléments ont également joué. Ainsi, du fait de l'ouverture plus large des cursus formations aux candidats, le nombre de sous-officiers réunissant les conditions de diplôme pour postuler à l'avancement s'est notablement accru. En outre, les taux de réussite aux examens (notamment pour les officiers de police judiciaire) fixés selon une logique d'emploi nécessaire à l'intérêt du service a augmenté et partant, par un pur effet mécanique, le nombre des admis en attente d'une promotion au grade supérieur s'est accru. Enfin, certains verrous dans la gestion des carrières ont été levés : il n'est plus nécessaire ni d'appartenir à la première moitié de la liste d'ancienneté, ni d'avoir satisfait aux travaux de préparation au grade supérieur pour concourir.

L'allongement du temps passé dans les différents grades tant chez les officiers que chez les sous-officiers donne la mesure des difficultés rencontrées.

Temps moyen passé dans chaque grade pour les sous-officiers

ANNEE DE PROMOTION

ADC

ADJ

MDC

GND

1988

GD

GM

5 a 3 m

6 a 3 m

5 a 6 m

7 a 10 m

8 a 3 m

7 a 10 m

11 a 9

9 a 00 m

1989

GD

GM

5 a 3 m

6 a 2 m

5 a 4 m

6 a 10 m

8 a 1 m

8 a 1 m

11 a 9 m

8 a 11 m

1990

GD

GM

4 a 9 m

6 à 0 m

5 a 3 m

7 a 0 m

8 a 0 m

7 a 8 m

11 a 10 m

9 a 4 m

1991

GD

GM

4 a 2 m

5 a 7 m

4 a 9 m

6 a 2 m

7 a 10 m

7 a 2 m

11 a 5 m

9 a 3 m

1992

GD

GM

3 a 10 m

5 a 3 m

4 a 5 m

7 a 4 m

7 a 1 m

6 a 10 m

11 a 11 m

9 a 10 m

1993

GD

GM

3 a 10 m

4 a 8 m

4 a 9 m

7 a 2 m

7 a 8 m

10 a 11 m

12 a 1 m

9 a 10 m

1994

GD

GM

4 a 4 m

5 a 7 m

5 a 1 m

7 a 2 m

6 a 3 m

8 a 8 m

12 a 9 m

10 a 5 m

1995

GD

GM

4 a 6 m

5 a 0 m

4 a 11 m

6 a 8 m

5 a 10 m

7 a 2 m

12 a 9 m

11 a 1 m

GD : Gendarmerie départementale

GM : Gendarmerie mobile

ADC : Adjudant-chef

ADj : Adjudant

MCD : Maréchal des logis-chef

GND : Gendarme

Votre rapporteur reste toujours préoccupé par le nombre excessif de capitaines et de lieutenants colonels "hors créneau d'avancement" qui ont dépassé la limite supérieure du grade pour être proposables. En outre il déplore que l'exercice d'importantes responsabilités n'a pas toujours pour contrepartie le grade correspondant : le commandement de groupements de gendarmerie revient ainsi souvent à des lieutenants-colonels, parfaitement expérimentés, mais dont l'indice reste très en deçà de son "alter ego" au sein de la police, le directeur départemental de la sécurité publique.

Quels peuvent être les moyens de favoriser un retour à un rythme normal de déroulement de carrière ? Deux voies ont été jusqu'à présent suivies avec des succès inégaux : les incitations au départ, d'une part, les mesures de repyramidage, d'autre part. La loi de programmation militaire, sans remettre en cause ces solutions traditionnelles, les inscrit dans un nouveau cadre qui en modifie singulièrement la portée et qu'il importe maintenant de mieux préciser.

Aujourd'hui, parmi les incitations au départ, l'avancement conditionnel demeure l'un des plus prisés. D'abord réservé aux officiers puis étendu progressivement aux sous-officiers depuis 1984, il permet une promotion au grade supérieur en contrepartie de l'engagement à partir à la retraite dans les six mois qui suivent cet avancement. L'attrait de cette mesure ne joue guère cependant pour les gendarmes souhaitant accéder au grade de maréchal des logis-chef dont l'indice est inférieur, en fait, comme votre rapporteur a souvent eu l'occasion de le rappeler pour le regretter, à l'indice terminal de gendarme classé à l'échelon exceptionnel.

Le projet de loi sur la professionnalisation , conformément aux orientations tracées par la loi de programmation, pose le principe d'un pécule, non imposable, versé dans certaines conditions aux militaires qui choisissent de quitter les armes à partir de dix ans avant la limite d'âge de leur grade. Bien que destinée principalement à l'armée de terre, à l'armée de l'air et à la marine, toutes trois soumises à la déflation de leurs effectifs, cette mesure pourra également concerner à la gendarmerie.

Toutefois le bénéfice de cette mesure restera subordonnée à l'intérêt du service. Dans la mesure où le rôle de la gendarmerie est appelé à se développer, il apparaît peu probable que soit fixé au profit de l'arme un contingent particulier de "droits au départ".

A vrai dire, la loi de programmation privilégie pour la gendarmerie la requalification des emplois.

Elle prévoit, on le sait, une réduction du nombre des sous-officiers et une progression des effectifs d'officiers. Cette évolution passera principalement par la transformation d'emploi d'un grade donné dans le grade supérieur. La loi de programmation consacre ainsi le programme de requalification proposé par le groupe de travail réuni au cours de l'été 1995 sous la présidence du contrôleur général Sandras, et les inscrit dans une perspective plus large. Ces mesures bénéficieront aux militaires de la gendarmerie mais aussi aux militaires des autres armées.

La création d'emplois d'officiers au sein de la gendarmerie s'apprécie notamment au regard de la déflation qui affecte l'ensemble des effectifs du ministère de la défense : la gendarmerie accueillera ainsi sur la période de programmation, chaque année, 80 officiers venus des autres armées (60 recrutés par concours parmi les officiers d'active des grades de lieutenant ou de capitaine, 20 par voie de changement d'armée et destinés à s'intégrer au nouveau corps technique et administratif).

Le plan de requalification des militaires de la gendarmerie trouvera sa première traduction en 1997. Le projet de budget prévoit, en effet, les moyens nécessaires aux mesures suivantes :

- transformation de 205 emplois de sous-officiers en autant d'emplois d'officiers ;

- transformation de 804 emplois de gendarme en 60 emplois de major, 123 emplois d'adjudant-chef, 356 emplois d'adjudant, 265 emplois de maréchal des logis-chef.

En outre, les dotations de la loi de finances initiale permettront de poursuivre la mise en place d'un dispositif mis en place dès 1996 sur la base d'une provision de 20 MF et comprenant notamment trois types de repyramidage :

- transformation de 122 emplois de major en 122 emplois d'officier ;

- transformation de 250 emplois d'adjudant en 250 emplois d'adjudant-chef ;

- transformation de 650 emplois de gendarme en 650 emplois de maréchal des logis-chef.

Enfin, l'année 1997 verra également la mise en oeuvre de la dernière tranche du plan de repyramidage lié à la transposition aux militaires des dispositions du protocole du 9 février 1990 sur la rénovation de la grille de classification et des rémunérations des fonctionnaires (protocole Durafour), avec la transformation de 8 emplois d'adjudant et de 42 emplois d'adjudant-chef en 50 emplois de major.

L'ensemble des transformations d'emploi bénéficieront principalement aux sous-officiers (soit à travers les repyramidages au sein de cette catégorie, soit à travers la promotion dans le corps des officiers).

Le dispositif aussi nécessaire soit-il pour redonner au déroulement des carrières un rythme satisfaisant ne permet toutefois pas de lever les deux objections que suscitent le repyramidage.

En premier lieu, les mesures de repyramidage ne font parfois que déplacer les difficultés d'un grade à l'autre en gonflant à l'excès les effectifs dans le grade immédiatement supérieur, "bénéficiaire" de la transformation. Surtout, comme votre rapporteur l'avait déjà souligné dans ses rapports antérieurs, la logique du repyramidage ne saurait tenir lieu de principe de gestion des carrières et ignore les mérites et les compétences. C'est d'ailleurs pourquoi la gendarmerie a entrepris un effort considérable de formation destiné à accompagner le programme de requalification.

b) La mise en oeuvre des propositions du groupe Sandras : une relève assurée du protocole Durafour ?

Il convient de rappeler, en guise de préambule, que les militaires de la gendarmerie en activité perçoivent, à l'instar des autres militaires, la solde de base, l'indemnité de résidence, le supplément familial de solde lié aux charges de famille, l'indemnité pour charges militaires et, le cas échéant, une prime de service et une prime de qualification. Les gendarmes bénéficient en outre de l'indemnité de sujétion spéciale de police.

En 1997, les militaires de la gendarmerie bénéficieront d'une revalorisation générale de l'indemnité pour charges militaires de 1,36 %.

Au cours des six dernières années la revalorisation de la situation matérielle des gendarmes a largement procédé de la transposition aux militaires des dispositions du "protocole Durafour".

Ce protocole comporte trois volets distincts : une revalorisation indiciaire, une nouvelle bonification indiciaire et enfin des mesures de repyramidage dont la teneur a été évoquée plus haut.

Ces mesures applicables jusqu'en 1996, continueront de produire leurs effets en 1997 du fait de l'extension en année pleine de la tranche 1996. Au sein des sous-officiers de gendarmerie : les adjudants promus au grade d'adjudant chef ont ainsi bénéficié de 2 échelons supplémentaires, l'un après 25 ans de service (indice majoré 462), l'autre exceptionnel pour un contingent de 15 % des effectifs du grade (indice majoré 472).

Pour les officiers, la création d'un deuxième échelon spécial permettra aux lieutenants-colonels d'accéder à l'indice majoré 780 (soit un gain indiciaire de 27 points).

En outre, les officiers bénéficieront en 1997 d'une revalorisation de leur prime de qualification (13 % de la solde de base au lieu de 11,5 %).

Outre les mesures liées à l'application du "protocole Durafour", l'amélioration de la situation matérielle des gendarmes résultera également des mesures suivantes inscrites au projet de budget 1997 :

* Mesures d'ajustement technique

- aménagement des rémunérations à l'étranger : 0,233 MF,

- revalorisation de l'indemnité pour charges militaires : 12,349 MF.

* Mesures de transfert :

- création du 5ème échelon pour le grade de capitaine : 2,210 MF

- augmentation du contingent de primes de qualification des officiers brevetés à 23 % (+ 9 primes) : 0,235 MF

- augmentation du contingent de primes de qualification des sous-officiers à 10 % (+ 91 primes) : 1,230 MF

Les mesures prises au titre des propositions du groupe de réflexion présidé par le contrôleur général Sandras permettront-elles de prolonger la dynamique imprimée par la transposition du protocole indiciaire de la fonction publique du 9 février 1990 ?

Votre rapporteur souhaite que l'effort, indéniable, consenti en faveur des gendarmes en 1997, puisse se poursuivre les années suivantes en dépit des vicissitudes budgétaires.

Les mesures de revalorisation inscrites dans le budget bénéficieront aux retraités de la gendarmerie en application des articles L.15 et L.16 du Code des pensions civiles et militaires. Les personnels retraités pourront ainsi prétendre, le cas échéant, à la revalorisation indiciaire liée à la création de l'échelon "après 25 ans de service" pour les adjudants chefs, mais non cependant à l'"échelon exceptionnel" dans la mesure où ils ne l'auront pas détenu en activité.

En outre, l'intégration de l'indemnité de sujétions spéciales de police dans la base servant au calcul de la pension de retraite se poursuit. Elle correspond à la quatorzième année d'un processus d'intégration progressif prévue sur quinze ans. Dès lors, la revendication d'un raccourcissement de la durée de l'ISSP, sans doute justifiée par un souci d'équité avec la police (qui avait obtenu une mesure d'intégration sur une période de 10 ans) a perdu de son actualité.

B. UN DOUBLE DÉFI

1. La rationalisation des emplois de soutien et ses inconnues

La rationalisation de la structure des effectifs de la gendarmerie prévue dans le cadre de la loi de programmation militaire obéit à un principe simple en apparence : les militaires de la gendarmerie ont vocation à occuper des emplois opérationnels de « terrain ». Près de 4 500 postes occupés aujourd'hui par des sous-officiers de la gendarmerie sont ainsi appelés d'ici 2002 à être pourvus par des militaires régis par un autre statut et des personnels civils présentant un coût moindre pour le budget de l'Etat.

Si le principe d'une réforme paraît difficilement contestable, ses modalités d'application suscitent nombre d'interrogations.

a) Les paradoxes d'une réforme

Les emplois de soutien sont aujourd'hui occupés par des militaires de la gendarmerie et par les civils. La réforme à venir ne concernera que les premiers. Les tâches concernées sont d'une grande variété : les spécialités peuvent être ténues ou présenter au contraire un haut degré de technicité. Au niveau de la circonscription de région, on compte par exemple quelque 847 sous-officiers affectés à des tâches administratives, 853 autres chargés de l'entretien des auto-engins blindés et un millier, enfin, spécialistes des télécommunications et de l'informatique.

Les redéploiements envisagés posent trois types de problème.

D'une part, la gendarmerie sera privée d'un savoir-faire et d'une expérience répondant à des besoins précis sans garantie de bénéficier en contrepartie, dans les postes libérés, des qualifications requises. A cet égard, le départ de sous-officiers informaticiens préoccupe davantage que le redéploiement logique des gendarmes « administratifs ».

D'autre part, la carrière des militaires de la gendarmerie attachés à des emplois de soutien ne les dispose pas spécialement à assumer des emplois de terrain. La gendarmerie ne risque-t-elle pas de perdre sur les deux tableaux ?

Enfin, il convient de prendre aussi la mesure des problèmes présentés par chaque cas individuel : changement de travail, de résidence, de conditions de vie.

b) Les incertitudes de l'avenir

Sans doute, il faut le répéter, ces préoccupations ne valent que pour la période de transition. Pour l'avenir, il conviendra toutefois de préciser les conditions de recrutement des nouveaux personnels et, pour les militaires, les contours du nouveau statut.

Les emplois de soutien seront désormais occupés d'une part par des militaires régis par un nouveau statut et, d'autre part, comme c'est déjà le cas aujourd'hui, mais avec une ampleur accrue, par des civils.

Militaires et civils seront principalement recrutés parmi les personnels correspondants des autres armées. Ainsi, parmi trois modes de recrutement des personnels civils -le concours (pour les fonctionnaires), l'essai professionnel (pour les ouvriers), les mutations internes au ministère de la défense -c'est ce dernier procédé qui paraît appelé à prévaloir désormais. Il semble aujourd'hui acquis que ce recrutement ne sera pas soumis à un concours. Il en sera de même d'ailleurs pour les militaires provenant des autres armées. Alors même que leur insertion au sein du corps des officiers de la gendarmerie reste subordonnée au passage d'un concours aménagé, cette condition n'est pas requise pour les militaires intégrant le nouveau corps de soutien.

Il ne s'agit pas ici de remettre en cause la compétence professionnelle des personnels appelés à quitter les autres armées mais de s'interroger sur l'adéquation entre leurs qualifications et celles requises par la gendarmerie.

C'est pourquoi il est impératif de dresser un bilan complet des caractéristiques des emplois de soutien au sein de la gendarmerie et des qualifications des personnels spécialisés susceptibles de quitter leurs armées afin d'accorder les besoins aux compétences dans le cadre d'une vision planifiée.

Le nouveau statut du corps de soutien n'a pas encore été fixé mais il s'inspirera sans doute du régime applicable aux corps de soutien existants.

Les créations d'emplois prévues en 1997 se feront dans le cadre du statut actuel des emplois administratifs et d'état-major provisoirement conservés.

L'enjeu de la mise en oeuvre d'un nouveau statut n'est pas mince : le nouveau corps comptera en effet quelque 4 000 emplois en 2002 -alors que les effectifs des EAEM ne dépassent pas aujourd'hui 649.

2. Les gendarmes auxiliaires : un avenir encore incertain

Aujourd'hui au nombre de 12.017, les effectifs des militaires du contingent devraient passer à 16.232 au terme de la durée de la loi de programmation. Mais dans le même temps où leur rôle est appelé à se développer, les conditions de leur recrutement, avec la suppression de l'obligation du service national, se présentent sous des auspices incertaines.

a) Une ressource désormais indispensable

La pertinence de l'orientation fixée par la loi de programmation ne saurait faire de doute à la lumière de l'expérience présente. En effet, les gendarmes auxiliaires constituent bien davantage qu'un appoint utile pour l'armée, ils en sont désormais une composante essentielle : 90 % d'entre eux servent dans la gendarmerie départementale et 72 % sont affectés à des unités opérationnelles. S'ils ne peuvent exercer de responsabilités en matière de police judiciaire ou de police administrative et n'accomplissent pas de missions de maintien de l'ordre, ils participent pleinement aux tâches liées à la police de la circulation, aux opérations de sécurité publique, de surveillance générale, d'assistance et de secours. Du reste, ils portent en service leur arme de dotation, ils logent sur les lieux d'emploi et sont tenus aux mêmes astreintes de disponibilité. Dans l'exercice de leur mission, ils sont comme les militaires d'active exposés aux mêmes risques. Ainsi, depuis leur création en 1971, les gendarmes auxiliaires déplorent dans leurs rangs 22 décès et 1500 blessés en service.

L'excellente intégration des gendarmes auxiliaires apparaît le fruit d'un recrutement sélectif, d'une part, et d'une formation de qualité, d'autre part.

En 1995, 11.714 candidatures de gendarmes auxiliaires ont été agréées parmi les 22.658 dossiers proposés. Bien que le nombre de candidatures ait légèrement diminué par rapport à l'année passée (- 17 %), le niveau général des recrues n'en a pas été affecté : 95,7 % des gendarmes auxiliaires ont le niveau du baccalauréat (contre 94,5 % en 1995).

Après leur recrutement, les appelés suivent une formation dans les centres d'instruction de gendarmes auxiliaires (CIGA) d'Auxerre, de Saint-Astier/Bergerac, de Tulle et Montargis. Par la suite, ils participent aux séances d'instruction collective mensuelles organisées à l'échelon de la compagnie. Enfin, ils reçoivent un complément spécifique de formation de 12 jours dont 9 sont consacrés à la formation professionnelle et 3 à la formation militaire.

Les officiers de réserve suivent quant à eux une formation de quatre mois au sein de l'école des officiers de la gendarmerie nationale de Melun.

Outre le rôle très utile joué pendant la durée de leur service par les appelés, ces derniers constituent un gisement privilégié pour le recrutement des gendarmes d'active. Près de la moitié des gendarmes auxiliaires en service en 1995 ont déposé une candidature à un emploi de sous-officier de la gendarmerie. Un tiers d'entre eux a été agréé. Au total près de 17 % des gendarmes auxiliaires ont ainsi pu poursuivre leur carrière dans la gendarmerie qui recrute de la sorte 2 019 de ses sous-officiers.

Telles sont les données de la situation présente sur lesquelles la mise en oeuvre du volontariat dans le cadre de la professionnalisation des armées fait peser de lourdes inconnues. Comment assurer les besoins de l'arme en gendarmes auxiliaires dans un contexte où l'obligation aura disparu mais aussi où les chances de poursuivre une carrière dans la gendarmerie - motivation importante pour des volontaires - se seront raréfiées (du fait de la diminution des effectifs des militaires d'active) ? En supposant que les flux attendus se confirment, les qualifications des personnels recrutés répondront-elles aux critères requis par l'arme ? La question paraît d'autant plus préoccupante que les gendarmes auxiliaires seront appelés à jouer un rôle croissant aux côtés des militaires d'active.

b) Une formule sans doute plus adaptée : un engagement de deux ans

L'incitation au volontariat apparaît au coeur de ces préoccupations et constitue la clef du succès de la réforme. C'est dire l'importance des mesures qui seront adoptées dans ce domaine. Deux éléments sont décisifs : la rémunération, d'une part, l'acquisition d'une formation, d'autre part. Sur ce dernier point, la période de deux ans, retenue pour le volontariat, permettrait d'offrir une formation plus poussée.

A cet égard, la signature, le ler mars 1996, d'une convention entre l'Union fédérale des industries et services de sécurité et la gendarmerie constitue une piste intéressante. L'accord permettra, en effet, l'insertion prioritaire dans les professions de sécurité des gendarmes auxiliaires (volontaires du service long) ayant suivi une préparation spéciale et obtenu à l'issue de celle-ci un certificat d'agent de sécurité. Toutefois, s'agissant de la rémunération, le schéma finalement retenu dans l'avant-projet relatif au code du service national paraît assez éloigné des montants considérés lors de la préparation de la loi de programmation : les quelque 5 000 francs envisagés se sont réduits à 2 000 francs ...

Or, le volontariat au sein de la gendarmerie ne peut se comparer au volontariat inspiré par des motifs purement humanitaires ou sociaux.

Dans ces conditions, la Direction générale de la gendarmerie envisage une autre formule privilégiant un engagement de deux ans -durée suffisamment courte pour éviter toute confusion avec les militaires d'active- bénéficiant d'une rémunération de l'ordre de 5 000 francs mensuels. Sans que soit exclu le volontariat, le principe de l'engagement prévaudrait largement. D'après les informations recueillies par votre rapporteur, le coût des engagés est couvert par les dotations prévues par la loi de programmation (calculées sur le principe d'une rémunération plus importante du volontariat que celle finalement retenue). Le format des 16 232 gendarmes auxiliaires ne pourrait être atteint mais la valeur opérationnelle des personnels engagés compenserait cet écart par rapport à l'objectif de la programmation.

En effet, les engagés pourront bénéficier d'une formation dans la perspective de l'acquisition d'une qualification juridique correspondant à celle d'agent de police judiciaire adjoint.

Votre rapporteur partage entièrement les préoccupations de la Direction générale sur la possibilité de couvrir les besoins en gendarmes auxiliaires dans le cadre du volontariat tel qu'il apparaît aujourd'hui. Sous réserve de modifications qui pourraient être apportées au projet de loi sur le service national, l'hypothèse d'un engagement court constitue dès lors une alternative convaincante et réaliste.

IV. L'ÉQUIPEMENT DE LA GENDARMERIE SOUS CONTRAINTE

A. UN CADRE BUDGÉTAIRE ÉTROIT

1. Le programme Rubis poursuivi

La contraction budgétaire des crédits d'équipement a contraint la gendarmerie à concentrer ses efforts sur le programme Rubis au risque parfois d'entamer sa capacité d'intervention dans des secteurs faute de modernisation de ces équipements.

a) L'échéance 2000 respectée

La mise en oeuvre du réseau Rubis s'est imposée comme une priorité liée, d'une part, à la nécessité de préserver la sûreté des communications et, d'autre part, d'accroître les capacités de transmissions.

Le système conçu sous la maîtrise d'oeuvre de Matra Communication repose sur la numérisation des signaux, technologie adaptée pour un réseau de radiotéléphonie cellulaire de sécurité pouvant transporter les voix et les données.

Après les expériences concluantes conduites en Seine-Maritime entre 1992 et 1994, la production et le déploiement des matériels devaient s'étaler jusqu'en l'an 2000 au rythme moyen de 16 groupements équipés chaque année.

La mise en oeuvre du programme était évaluée à 2.576 millions de francs. Or ces prévisions se sont trouvé démenties. A la fin 1996, 28 groupements auront été installés. En outre, le coût du programme s'élève dès aujourd'hui à 2.776 millions de francs, auquel il convient d'ajouter les dépenses liées aux travaux d'ingénierie et d'infrastructure des sites effectués par la gendarmerie elle-même (soit 314,6 millions de francs) ainsi que la livraison de 10.700 terminaux portatifs (soit 207,1 millions de francs).

Ces retards ne sont pas imputables aux industriels. Les difficultés d'installation rencontrées en 1994 avec les propriétaires de sites ont conduit à différer d'un an les premiers déploiements.

En outre, annulations de crédit et autres gels budgétaires ont provoqué un délai supplémentaire de 6 mois. Toutefois, si le calendrier prévisionnel des livraisons est respecté, les dernières mises en service opérationnel pourront avoir lieu à la fin de l'année 2000, conformément à l'échéancier initial grâce à un aménagement des dotations (100 millions de francs en 1997 et 1998) sous forme d'impôt remboursable en 1999 et 2000.

b) D'intéressantes perspectives de commercialisation

La technologie novatrice, à l'époque où elle fut choisie, de la numérisation s'est depuis imposée sur le marché mondial et a ouvert d'importantes perspectives de commercialisation pour le réseau Rubis : un dérivé du système a été vendu à la Catalogne pour un réseau (NEXUS) qui couvre la ville de Barcelone et la province, un réseau destiné aux forces de sécurité de la République tchèque a été mis en service dans le courant de l'année 1995.

En outre, deux contrats ont été signés au cours de cette même année ; le premier avec l'autorité palestinienne porte sur un réseau utilisé par les forces de sécurité, le second avec l'aéroport de Francfort concerne les forces de surveillance de la plate-forme. En 1996, deux contrats ont été annoncés avec les garde-côtes de Singapour et de la Thaïlande.

2. Un nombre excessif de programmes menacés

a) L'effort en faveur de l'informatique poursuivi

Le développement de l'informatique a fait l'objet d'un effort continu au sein de la gendarmerie, tant au niveau des moyens destinés à améliorer les performances de la gendarmerie dans l'exercice de ses missions, qu'au niveau de la simple bureautique.

Au chapitre de l'informatique de service , trois orientations auront marqué l'année 1996 :

- La poursuite de l'étude de la migration des grands fichiers administratifs sur des systèmes ouverts dans le cadre de la refonte des systèmes centraux ;

- Le début du déploiement à l'échelon départemental des projets expérimentés en 1995 (judex-groupement, statistiques de la délinquance) et mise en place du tableau de bord des commandants de groupement ;

- Le développement de la partie "Objets" du système européen Schengen.

Ce vaste chantier reste toutefois suspendu au renouvellement des équipements de la gendarmerie. C'est notamment le cas pour la modernisation du système informatique des centres opérationnels de gendarmerie (COG), et de la refonte générale de la statistique de service.

Les autres domaines d'application de l'informatique connaissent une fortune contrastée : le déploiement du système de gestion décentralisée Géaude (mini-ordinateurs, réseaux locaux, micro-ordinateurs et imprimantes) achevé en 1995 dans les légions de gendarmerie départementale a été complété en 1996 par la mise en place de 300 micro-ordinateurs et de 435 imprimantes pour les unités des niveaux légion et compagnie. A ces matériels s'ajouteront, en 1997, 600 nouvelles configurations.

S'agissant de la bureautique, les matériels mis en place en 1991 dans le cadre du programme d'équipement ne pourront être remplacés qu'à hauteur de 65 %, compte tenu de la restriction des crédits, d'une part, et de la priorité accordée aux matériels installés outre-mer (frappés par l'usure plus rapide de certains composants et par les difficultés rencontrées dans les opérations de maintenance), d'autre part.

b) Plusieurs remises en cause préoccupantes

Les véhicules blindés

La gendarmerie peut aujourd'hui compter sur un parc de 304 véhicules (155 véhicules blindés à roues de la gendarmerie - VBRG - dont 37 en place outre-mer, 12 automitrailleuses légères Panhard, 28 véhicules blindés Caron VBC90).

La loi de programmation retient l'option d'un engin unique polyvalent capable d'assurer les missions de défense opérationnelle du territoire et de maintien de l'ordre pour se substituer à ce dispositif. A ce titre, elle prévoit d'inscrire les premiers crédits d'étude correspondant à ce projet à partir de 1999. A l'échéance 2002, 30 véhicules de la nouvelle génération devraient compléter un parc réduit à 280 véhicules et à l'horizon 2015, la planification prévoit un parc total de 145 véhicules de nouvelle génération.

Le renouvellement pose toutefois deux questions : il repose tout entier sur un véhicule dont la polyvalence, recherchée, doit être confirmée sur le plan technique; il laisse par ailleurs en suspens la situation du parc de véhicules dans l'intervalle. L'équipement du groupement de la gendarmerie mobile de Satory reste pour votre rapporteur un sujet de préoccupation : la mise hors service des 33 véhicules de transport de troupes chenillées (VTT AMX13) a nécessité une réponse immédiate sous la forme d'un redéploiement du parc de VBRG (matériels de maintien de l'ordre et non comme le VTT AMX13, engins destinés à des engagements dans des combats militaires).

Les camionnettes tactiques

D'autres incertitudes pèsent sur le parc automobile de la gendarmerie. Ainsi, si le parc des camionnettes tactiques (véhicules utilitaires tous chemins de moins de deux tonnes) a pu être renouvelé dans l'ensemble des pelotons mobiles de la gendarmerie d'outre-mer et des escadrons de gendarmerie mobilisés dans ces départements ou territoires, le reliquat du parc métropolitain (SAVIEM TP3) restera en l'état, faute de dotations suffisantes inscrites dans la loi de programmation.

Les fourgons cars

Quant aux fourgons-cars de maintien de l'ordre, le remplacement des derniers véhicules Cruisair PR2 encore en service dans 26 escadrons de gendarmerie mobile s'imposait comme un priorité. La livraison des premiers fourgons-cars (sur une commande de 78 véhicules) -mis au point par la société LOHR- ne pourra intervenir qu'en 1997 et non en 1966 comme prévu.

Les hélicoptères

La précédente programmation avait prévu le renouvellement progressif des 12 hélicoptères Alouette III de la gendarmerie de plus de 25 ans d'âge, utilisées principalement pour le sauvetage et l'intervention en zones de montagne. La loi de programmation 1997-2002 laisse la question en attente et ne prévoit aucune dotation pour satisfaire un besoin évalué, par la gendarmerie sous une forme minimale, à 8 appareils - soit un coût de 250 millions de francs sur la base de 30 millions environ l'unité, si l'option du BK117 hélicoptère biturbines fabriqué par Eurocopter avait été retenue.

Le parc disponible a encore été réduit à la suite de 3 accidents. La gendarmerie est aujourd'hui obligée de se tourner vers l'armée de l'air pour obtenir, sous une forme qui reste à déterminer, trois Alouette III.

Un maillon essentiel de la surveillance du territoire se trouve ainsi aujourd'hui menacé.

L'arme future de la gendarmerie départementale

La mise en oeuvre de l'arme future de la gendarmerie départementale apparaît également hypothéquée par la restriction des crédits.

L'appel d'offre lancé en 1995 visait à remplacer l'ancien pistolet mitrailleur MAT 49 par une arme de neutralisation et d'interception destinée à la gendarmerie départementale. Cette arme de la nouvelle génération devait offrir une puissance d'impact supérieure à celle d'une arme de poing sans les inconvénients liés à une arme de type "fusil d'assaut" incompatible avec une utilisation dans le cadre des missions de sécurité publique. Les premières commandes prévues pour l'année 1997 sont reportées sine die.

Les ethylotests

Autre conséquence fâcheuse des restrictions budgétaires, le remplacement des appareils de dépistage de l'alcoolisme de type "ballon" à usage civique (ethylotest A) par un appareil électronique à usage répété (ethylotest B) ne pourra pas se dérouler au rythme prévu - même si 1.025 appareils de ce type ont pu être installés en 1996 grâce au concours de la délégation interministérielle à la sécurité routière.

B. ÉVOLUTION CONTRASTÉE DES INFRASTRUCTURES

Les infrastructures et les acquisitions immobilières bénéficieront en 1997 de 788 millions de francs. d'autorisations de programme et 883 millions de francs de crédits de paiement (soit une baisse de 15 % par rapport aux crédits de paiement de 1996).

En outre, l'entretien des casernements (gros-oeuvre, entretien courant et entretien ménager) recevra une dotation de 254,5 millions de F.

1. les besoins partiellement satisfaits

a) Un niveau satisfaisant de livraisons

La dotation budgétaire devrait permettre de livrer 954 équivalents unités-logements en 1997. Les principales opérations sont présentées dans le tableau suivant :

Saint Claude (39)

Construction d'un casernement pour une compagnie de gendarmerie

départementale :

Luçon (85)

Construction d'un casernement pour un escadron de gendarmerie mobile

(2ème tranche)

Maisons-Alfort (94), quartier Mohier

Réhabilitation du casernement (3e tranche)

Châtellerault (86)

Construction d'un casernement de gendarmerie mobile (2ème tranche)

Paris (75), caserne Nouvelle France

Réhabilitation et casernement (lère tranche)

Dugny (93)

Construction d'un casernement au profit de la garde républicaine

(3ème tranche)

Melun (77)

Réhabilitation de l'école des officiers de la gendarmerie nationale (lère tranche)

Parthenay (79)

Construction d'un casernement de gendarmerie départementale

Le Robert (Martinique)

Extension du casernement

30,00 MF

73,00 MF

54,00 MF

110,00 MF

75,00 MF

141,00 MF

50,00 MF

27,00 MF

14,00 MF

b) Des perspectives incertaines pour les commandes

La réduction des crédits intervient au moment où les commandes de logement par les collectivités locales reprennent après un long mouvement de baisse au cours des dernières années.

Cette inversion de tendance repose en partie sur un cadre réglementaire plus favorable : le décret 94-1158 du 27 décembre 1994 a permis en effet de réévaluer les coûts-plafonds servant de base au calcul du loyer et de la subvention versée par l'Etat. L'effet incitatif s'est traduit par une augmentation des dossiers "phase préalable" (800 à ce jour) proposés à l'agrément de la Direction Générale de la Gendarmerie depuis le ler janvier 1996. L'Etat n'est malheureusement pas en mesure de prendre le relais puisque la capacité du titre VI relatif aux opérations conduites par les collectivités territoriales limité, au terme de la loi de programmation à une moyenne de 30 MF par an, ne permet pas que soient mis en chantier plus de 200 unités-logements par an alors même que le rythme des constructions réalisées par les collectivités territoriales avait paru se stabiliser à environ 300 unités-logements par an.

- Equivalents-unités-logements (mis en chantier).

ANNEE

ETAT

COLLECTIVITES TERRITORIALES

TOTAL

1994

1995

1996

1997 (prévisions)

922

910

800

856

380

300

333

350

1 302

1 210

1 133 (1)

1 206

(1) Compte tenu des annulations intervenues en gestion 1996, soit 93,5 MF d'autorisations de programme. Il convient de noter à cet égard que les mesures de régulation prises en 1995 (annulation de 281 millions d'autorisations de programme correspondant à la non-réalisation de 305 EUL) ont produit leurs effets en 1995 et 1996.

- Equivalents-unités-logements (livrés).

La livraison intervient dans un délai moyen de dix-huit mois à deux ans selon la taille de l'opération.

ANNEE

ETAT

COLLECTIVITES TERRORIALES

TOTAL

1994

944

417

1361

1995

1138

378

1413

1996

944 (1)

400

1344

1997 (prévisions)

954

350

1304

(1) Suite à l'annulation de 44.869 MF.

On peut considérer que le nombre de 800 unités équivalent logement mis en chantier annuellement vers lequel on s'achemine - constitue désormais un seuil minimal. Au total, les besoins pour la gendarmerie peuvent être évalués à 1500 unités logement.

2. Une revalorisation poursuivie

a) Reconduction des crédits

La revalorisation du patrimoine de la gendarmerie se poursuit à travers les vicissitudes budgétaires. Le montant des crédits alloués pour l'entretien des casernements pour 1996 (soit 254,5 MF) sera reconduit l'an prochain.

b) Un effort particulier en faveur de la Garde républicaine

Il convient de souligner l'effort particulier consacré depuis plusieurs années aux casernements de la Garde républicaine. Aux travaux de construction de 128 logements de la Caserne Schonnberg (130 millions de francs) commencés en février 1996, se sont ajoutés d'importants chantiers de revalorisation notamment dans la caserne Nouvelle-France à Paris - avec la réhabilitation de 250 logements à partir de 1997 dont le marché de maîtrise d'ouvrage a d'ores et déjà été financé (235 MF) en 1993. L'état vétuste de nombre de logements ne permet pas que soit différé trop longtemps une remise à neuf devenue indispensable.

*

* *

CONCLUSION

La Gendarmerie a déjà su prendre la mesure des mutations que connaît notre société : dans des domaines différents, la restructuration des unités spécialisées dans la police judiciaire ou le développement de la coopération européenne, en ont apporté des témoignages. La loi de programmation de ce point de vue et le budget qui en est la première traduction, s'inscrivent dans une certaine continuité.

Votre rapporteur croit l'avoir montré, c'est la façon dont seront conduites les réorganisations au sein des personnels qui constitue l'enjeu des années à venir. Il est important, dans cette perspective, de préserver l'équilibre actuel entre les nécessités du service de la nation et les aspirations légitimes des femmes et des hommes de la gendarmerie. Le sens de l'adaptation des militaires sera beaucoup sollicité. Cette vertu ne leur a pas fait défaut dans le passé. L'obligation de mobilité en rappelle toute l'actualité même si le choix du moment pour relancer ce principe -nécessaire- peut faire question. Dans ces conditions, la situation matérielle des gendarmes ne doit pas être ignorée. Le processus de revalorisation initié par le protocole Durafour est arrivé à son terme, le programme de requalification des emplois adopté à la suite des recommandations du contrôleur général des armées Sandras doit pouvoir aujourd'hui prendre durablement la relève.

Il faut dans une période d'intenses changements s'attacher à rassurer et s'obliger au devoir d'explication. L'adhésion des personnels constitue une des clefs du succès d'une réforme où se jouera la sécurité de notre pays.

*

* *

EXAMEN EN COMMISSION

Votre commission des Affaires étrangères, de la Défense et des Forces armées a examiné le présent rapport lors de sa réunion du mercredi 6 novembre 1996.

A l'issue de l'exposé du rapporteur, M. Philippe de Gaulle s'est interrogé sur les attributions respectives de la gendarmerie mobile et de la gendarmerie départementale. Il a souhaité en outre que le rapporteur pour avis précise les conditions dans lesquelles seraient renouvelés les blindés de la gendarmerie. Il s'est enfin inquiété du rôle attribué à la gendarmerie en matière de recensement dans le nouveau cadre que poserait la réforme du service national.

M. Michel Alloncle, rapporteur , a indiqué que la gendarmerie mobile avait été de plus en plus sollicitée au cours des dernières années et que le nombre de jours de déplacements était passé de 170 à plus de 200 entre 1990 et 1995.

M. Charles Pasqua a précisé à cet égard que les forces de la gendarmerie mobile étaient utilisées en fonction des besoins en dehors même des zones de compétences de la gendarmerie départementale, comme l'avait d'ailleurs montré le plan Vigipirate. Il a souligné que les exigences d'une disponibilité croissante concernaient également les compagnies républicaines de sécurité.

M. Michel Alloncle , revenant sur le problème des véhicules de la gendarmerie, a rappelé les incertitudes que présentait encore la conception d'un blindé polyvalent et a insisté en particulier sur l'inadaptation des équipements destinés aux réserves. MM. Philippe de Gaulle et Charles Pasqua ont souligné l'importance des blindés dans l'exercice des missions de la gendarmerie, qu'il s'agisse de la protection du territoire ou du maintien de l'ordre.

M. Xavier de Villepin, président, s'est demandé si l'augmentation de la population prévue dans les zones relevant de la gendarmerie s'inscrivait dans le cadre des orientations arrêtées en matière d'aménagement du territoire. M. Charles-Henri de Cossé-Brissac a insisté sur la nécessité de maintenir la pérennité du maillage territorial de la gendarmerie. Il a souhaité par ailleurs savoir si la suppression d'unités en zone rurale était prévue pour 1997.

M. Michel Alloncle a rappelé que la réorganisation des unités de la gendarmerie était commandée principalement par le souci de lutter contre la délinquance dans les banlieues. Il a indiqué que la présence de la gendarmerie en zone rurale serait préservée.

M. André Rouvière a souligné que la nouvelle organisation du service décidée en 1991 demeurait mal comprise par la population. M. Michel Alloncle a précisé que cette réforme avait été revue en 1994 et que quatre aménagements lui avaient été apportés : le maintien d'un planton dans toutes les brigades territoriales, 24 h sur 24, la suppression de la notion de « brigade de veille », l'assouplissement des règles de renvoi vers les centres opérationnels de gendarmerie, enfin l'appel à la patrouille la plus proche du lieu où l'intervention est requise, quelle que soit par ailleurs la compétence territoriale de l'unité.

M. Charles Pasqua a souligné l'utilité et l'efficacité des modifications ainsi décidées. Il est convenu avec MM. Michel Alloncle, rapporteur pour avis, André Rouvière et Charles-Henri de Cossé-Brissac , que cette réforme, encore trop ignorée par nos concitoyens, méritait d'être mieux connue.

M. Daniel Goulet , après avoir souligné l'exigence de disponibilité qui s'imposait aux gendarmes, a souhaité que soient prises en compte les nécessités d'une existence familiale. Il a souligné à cet égard l'importance de l'habitat et regretté le désengagement de l'Etat dans ce domaine sans qu'un transfert de ressources au profit des collectivités locales puisse s'opérer.

M. Michel Alloncle , après avoir relevé que ces inquiétudes avaient été exprimées par des épouses des militaires de la gendarmerie, a évoqué les principaux programmes d'infrastructure envisagés pour l'année 1997, en soulignant toutefois qu'ils ne répondraient pas pleinement aux besoins prévisibles.

M. Xavier de Villepin, président, a enfin regretté que les contraintes de la maîtrise des dépenses publiques ne permettent pas de prendre la juste mesure du renouvellement indispensable du parc d'hélicoptères de la gendarmerie. Il a rappelé que l'avis global de la commission sur l'ensemble des crédits militaires ferait l'objet d'une décision ultérieure.

La commission a ensuite émis un avis favorable à l'adoption de l'ensemble des crédits du ministère de la Défense pour 1997, au cours de sa réunion du mercredi 27 novembre 1996.

* 1 Le dispositif antérieur à la réforme présentait l'architecture suivante : 30 sections de recherche rattachées au niveau des régions, 16 équipes de recherche et 306 brigades de recherche au sein des compagnies au niveau de l'arrondissement.

* 2 Bernard Prévost, La sécurité des Français au coeur de la réforme de la gendarmerie nationale, in Revue de défense nationale , 14 juillet 1996.

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