B. L'EFFORT PUBLIC GLOBAL CONSACRÉ À LA VILLE ENREGISTRE L'EFFET DU NOUVEAU CYCLE DES CONTRATS DE VILLE

Le " jaune budgétaire " récapitule l'ensemble de l'effort public consacré à la ville : celui-ci devrait passer de 31,5 à 35 milliards de francs en 2000, soit une hausse de 10 % comparable à celle du budget ville (hors transfert).

1. Les trois catégories de dépenses du " jaune budgétaire "

Schématiquement, trois blocs peuvent être distingués en matière de financement global de la politique de la ville : l'Etat, les collectivités territoriales et les autres partenaires.

a) Les dépenses de l'Etat

Les dépenses du budget de l'Etat recensées au titre de la politique de la ville s'articulent autour de quatre actions.

- Les crédits dont la gestion relève directement de la Délégation elle-même et qui, soit sont inscrits sur le bleu budgétaire du ministère des affaires sociales, soit transitent en gestion par le fonds d'intervention pour la ville (FIV).

Ces crédits s'élèvent à 1,75 milliard de francs en 1999.

- Les crédits des différents ministères afférents aux contrats de plan et aux contrats de ville représentent 2,3 milliards de francs en 2000 par rapport à 1998.

Ils comprennent à la fois des crédits qui ont fait l'objet d'un engagement contractualisé dans les contrats de ville (1.856 millions de francs), tels que les investissements du ministère du logement affectés à la réhabilitation des logements HLM, et les dépenses ordinaires des ministères qui viennent financer les actions inscrites aux programmes d'action des contrats de ville sans faire l'objet d'engagements pluriannuels (993 millions de francs).

- Les crédits des différents ministères qui concourent indirectement à la politique de développement social urbain mais qui ne sont pas consommés dans le cadre des contrats de ville, comme les crédits consacrés par le ministère du travail aux emplois-jeunes. Ces crédits ne font pas l'objet d'engagements pluriannuels.

Ces crédits sont assez stables et passent de 10,1 milliards de francs en 1997 à 10,8 milliards de francs en 2000 .

- Le manque à gagner en recettes de l'Etat au titre des dépenses fiscales et sociales et de leur compensation versée aux collectivités locales, ou aux régimes de sécurité sociale, s'élève en estimation à 3,3 milliards de francs .

Il est important de souligner que, pour 1998, alors que les estimations initiales portaient sur 2,5 milliards de francs, le coût définitif s'est établi à 3,08 milliards de francs.

A dessein, votre rapporteur ne reprend pas au titre des dépenses de l'Etat, les dotations de solidarité urbaine (DSU) qui relèvent de la solidarité entre collectivités locales.

Au total, les dépenses budgétaires fiscales et sociales de l'Etat s'élèvent donc à 18,2 milliards de francs pour 2000 contre 15,4 milliards de francs en 1999.

b) Les engagements des collectivités territoriales

Comme l'année dernière, le jaune budgétaire fait apparaître la contribution budgétaire des collectivités territoriales. Il s'agit d'une estimation dans la mesure où cette donnée est établie à partir des annexes des contrats de ville, lesquels sont encore en cours de préparation concernant la période 2000-2006. Cette contribution est évaluée à 3,8 milliards de francs pour 2000, contre 31,5 en 1999.

Le jaune budgétaire présente également les données d'exécution des contrats de plan et des contrats de ville. Pour 1998, avant-dernière année du XIe plan, il apparaît une progression de la participation des régions aux contrats de plan Etat-régions (CPER), celle-ci s'établissant à 401 millions de francs contre 300 millions de francs environ l'année précédente.

Concernant les dépenses des contrats de ville en 1998, si l'on agrège les dépenses de fonctionnement et celles d'investissement, la participation des communes s'élève à 1,6 milliard de francs, celle des régions à 541 millions de francs et celle des départements à 332 millions de francs.

Enfin, il convient d'inclure dans l'effort des collectivités territoriales, les fractions des dotations inscrites au budget qui relèvent de la mise en oeuvre de la solidarité financière entre les communes . Celles-ci devraient représenter 4,6 milliards de francs en 2000.

Deux dotations doivent ainsi être réintégrées dans la contribution des collectivités locales à la politique de la ville : tout d'abord, le Fonds de solidarité des communes de la région d'Ile-de-France (FSCRIF) qui représente 722 millions de francs en 2000 et qui est constitué des contributions prélevées sur les communes de la région. A cet égard, M. Jean-Pierre Sueur rappelle dans son rapport 4( * ) que la Cour des comptes considère que les crédits du fonds en question ne font que transiter par le budget de l'Etat et qu'il est donc abusif de les retenir au titre de l'effort financier de l'Etat.

Concernant la DSU, M. Jean-Pierre Sueur remarque que, si cette dotation fait l'objet d'une inscription budgétaire, il s'agit d'une fraction de la dotation globale de fonctionnement (DGF) de toute façon à la charge de l'Etat. La DSU, qui n'est pas uniquement versée aux communes de la géographie prioritaire de la politique de la ville, correspond à un financement de solidarité des communes entre elles, au sein d'une dotation que l'Etat est tenu, en tout état de cause, de verser à celles-ci indépendamment des règles de répartition.

La seule nuance à apporter tient à la majoration exceptionnelle de 500 millions de francs de la DSU financée par un apport spécial du budget de l'Etat. Sur un montant estimé de 3,8 milliards de francs de DSU en 2000, la part relevant strictement de la solidarité entre collectivités locales s'élève donc à 3,3 milliards de francs.

La contribution totale des collectivités locales s'élève donc pour votre rapporteur, globalement à 7,9 milliards de francs .

c) Les autres partenaires de la politique de la ville

Il s'agit en premier lieu de la Caisse des Dépôts et Consignations à travers notamment les " prêts projets urbains " (PPU) destinés à financer des investissements sur les sites en contrat de ville. Au total, l'intervention de la CDC représente 6,8 milliards de francs . Il convient néanmoins de rappeler que, même si ces prêts sont consentis à des taux avantageux, les emprunteurs sont à 82 % des collectivités locales et à 16 % des bailleurs sociaux et des sociétés d'économie mixte.

Le second concours important est assuré par les Fonds structurels européens qui représenteront, en principe, un apport de 1,4 milliard de francs en 2000.

Les quatre " pôles " de l'effort public " ville "

2. Les observations de votre commission

Votre commission a émis deux observations sur le " jaune budgétaire ".

a) L'effet porteur de la mise en oeuvre des nouveaux contrats de ville

Tout d'abord, le maintien à bon niveau de ce budget prend en compte la montée en puissance des nouveaux contrats de ville (2000-2006) au niveau tant des dépenses de l'Etat que de celles des collectivités territoriales.

Si l'on globalise les engagements de l'Etat et des collectivités locales, on constate que l'ensemble passe de 24,1 milliards de francs en 1999 à 26,6 milliards de francs en 2000, soit une progression de 2,4 milliards de francs. Plus de la moitié de cette hausse est due à la hausse des crédits contractualisés dans le cadre des contrats de ville , que ce soit pour l'Etat (+ 647 millions de francs) ou pour les collectivités locales (740 millions de francs).

Les précédents contrats de ville conclus initialement sur la période (1994-1998), puis prorogés jusqu'en 1999, avaient été mis en place au second semestre de 1993 lorsque Mme Simone Veil était ministre des affaires sociales de la santé et de la ville. Six ans après, la signature d'une nouvelle génération de contrats de ville donne lieu naturellement à une revalorisation significative des engagements pour les sept prochaines années (2000-2006).

La mise en place des nouveaux contrats de ville joue donc comme un stimulant réel sur l'évolution de l'effort public de la ville.

b) Le caractère imprécis des dépenses non contractualisées des ministères

Les crédits relevant de divers ministères concourant à la politique de la ville sont évalués au total à 10,7 milliards de francs dans le jaune budgétaire et progressent de 666 millions de francs par rapport à l'année précédente.

Comme l'avait fait remarquer la Cour des comptes dans son rapport de 1995, il est toujours très difficile de savoir si les critères à partir desquels certains crédits sont réputés servir la politique de la ville sont pertinents .

Ainsi par exemple, s'agissant de la justice, le dispositif semble agréger diverses dépenses relatives aux conseils départementaux d'accès au droit ou aux crédits d'aide aux victimes. Ces dispositifs ne sont pas réservés exclusivement aux quartiers en difficulté.

L'Education nationale, qui représente 3 milliards de francs de crédits non contractualisés, détermine le niveau de ses dépenses " ville " en tenant compte des majorations de crédits pédagogiques et des indemnités de sujétion des enseignants dans les zones d'éducation prioritaire (ZEP).

Or, la délimitation de ces dernières excède le " territoire " des zones urbaines sensibles, et a fortiori les 175 établissements sensibles répartis dans vingt académies " où les phénomènes de violence et d'insécurité ont entraîné une dégradation des conditions de travail et compromettent la scolarité des élèves ainsi que l'action éducative des étudiants " comme le rappelle le jaune budgétaire.

Une approche méthodologique plus rigoureuse doit présider au recensement des crédits non contractualisés des ministères consacrés à la politique de la ville : cette dernière notion ne doit pas être entendue de manière trop extensive faute de quoi les crédits recensés seraient trop extensifs et l'indicateur statistique serait faussé.

Afin de permettre une meilleure information, votre rapporteur ne verrait que des avantages à ce que le jaune budgétaire fournisse des explications plus précises sur les chapitres budgétaires qui sont utilisées pour calculer les crédits non contractualisés ainsi que les coefficients de ventilation forfaitaire éventuellement utilisés .

Un autre point sujet à caution est celui de la prise en compte des emplois-jeunes qui ont largement contribué à améliorer le niveau des crédits non contractualisés depuis deux ans. Comme les années précédentes, le Gouvernement considère que 20 % du montant total des crédits du programme " nouveaux services - nouveaux emplois ", qui s'élève à 21,25 milliards de francs, bénéficient aux jeunes issus des quartiers de la politique de la ville. En réalité, le jaune budgétaire estime qu'au 30 juin 1999 la proportion des jeunes en question serait de 15 %.

Même si le résultat obtenu est loin d'être négligeable il faut là encore être prudent sur l'analyse des crédits non contractualisés.

c) L'ampleur des dépenses réelles des collectivités locales est sous-estimée

Le montant des dépenses des collectivités locales, qui sont destinées aux quartiers sensibles mais qui ne sont pas individualisées dans les contrats de ville, telles que par exemple les dépenses induites par les opérations Ville-Vie-Vacances, ne sont pas prises en compte dans le montant de l'intervention des collectivités locales inscrite dans le jaune budgétaire.

S'agissant des emplois-jeunes, il est important de souligner que même si l'Etat prend en charge, pendant cinq ans, 80 % du coût de la rémunération de l'emploi-jeune, par référence au SMIC, le solde demeure à la charge des employeurs et notamment des collectivités locales concernées.

Ainsi, dans le cadre des contrats locaux de sécurité, les communes sont appelées à financer le recrutement des agents locaux de médiation qui sont souvent appelés à intervenir dans les quartiers sensibles.

Les dépenses réelles des collectivités locales consacrées aux zones urbaines sensibles sont donc plus élevées que ne le retrace le strict bilan des annexes des contrats de ville.

Pour réaliser une parfaite symétrie avec la présentation de l'effort du budget de l'Etat, il conviendrait, en pratique, de faire apparaître les dépenses des collectivités locales qui contribuent à la politique de la ville même si elles ne sont pas contractualisées . Bien entendu, cette donnée ne pourrait qu'être estimée à partir d'un échantillon représentatif afin de ne pas alourdir les charges statistiques des communes.

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