III. LE BUDGET DE LA SANTÉ : 3,8 MILLIARDS DE FRANCS

Avec 3,85 milliards de francs de moyens de paiement, en baisse de 200 millions de francs par rapport à 2000, le budget de la santé se compose des agrégats relatifs à la santé publique (61 % du budget de la santé, 2,4 % du budget du ministère) et à l'offre de soins (39 % du budget de la santé et 1,6 % du budget du ministère ). Les crédits de la santé sont la principale victime d'un projet de loi de finances initiale qui voit pourtant les crédits augmenter globalement de 4 %, mais ceux de la santé diminuer de 5 %.

A. LES DÉPENSES DE POLITIQUE DE SANTÉ PUBLIQUE : 2,35 MILLIARDS DE FRANCS

Les dépenses consacrées à la politique de santé publique diminuent de 101 millions de francs en raison du transfert à l'assurance maladie de 119 millions de francs de dépenses dans le cadre du projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2001. Elles s'établiront donc en 2001 à un peu plus de 2,35 milliards de francs, consacrés aux établissements nationaux et aux différents programmes de santé publique.

1. Les subventions aux établissements nationaux à caractère sanitaire

Les crédits consacrés aux établissements nationaux à caractère sanitaire (chapitre 36-81) diminuent de 24,3 millions de francs (- 4,9 %) pour atteindre 471 millions de francs en 2001. Les évolutions sont cependant différenciées selon les établissements.

Il convient de noter la création d'un article, doté de 17 millions de francs, destiné à permettre la naissance de la nouvelle agence de sécurité sanitaire de l'environnement (AFSSE) annoncée par le Premier ministre à l'issue des Etats généraux de la santé du 30 juin 1999. Elle cherchera à résoudre les problèmes liés à la dispersion du dispositif français entre plusieurs organismes, dont l'office de protection contre les rayonnements ionisants (OPRI). Cette structure aura deux ans pour se mettre en place et réfléchir à l'avenir de la coordination des actions des organismes existants. Elle devrait fonctionner en 2001, selon le ministère, avec 20 agents et une dotation équivalente du ministère de l'aménagement du territoire et de l'environnement.

Cependant, votre rapporteur spécial s'étonne que dans la réponse faite à son collègue M. Philippe Adnot, rapporteur spécial des crédits de l'environnement, le ministère de l'aménagement du territoire et de l'environnement, évoque la dotation de cet établissement de 35 emplois et ne prévoit que 14 millions de francs de moyens de paiement dont 10 millions au titre du fonctionnement et 4 millions de crédits de paiement pour l'investissement. Il ne peut que s'interroger sur la coordination de l'élaboration du budget de cet organisme et se demande encore quel ministère croire...

Par ailleurs, l'agence française du sang, créée en 1993, disparaîtra en 2001 au profit de l'établissement français du sang né le 1 er janvier 2000. La suppression des crédits en 2001 est la dernière étape d'une réforme qui a vu la transformation de tous les établissements de transfusion sanguine de structures autonomes en services de l'EFS, gardant cependant des conseils d'administration propres avec des délégations de pouvoir de gestion.

Subventions aux établissements nationaux à caractère sanitaire (chapitre 36-81)

(en millions de francs)

2000

PLF 2001

Evolution

Agence française de sécurité sanitaire des produits de santé (AFSSAPS)

174,5

171,7

- 1,6 %

Agence française de sécurité sanitaire des produits de santé - recherche

0,8

1

+ 25 %

Agence française de sécurité sanitaire des aliments (AFSSA)

22,8

27

+ 18%

Agence française de sécurité sanitaire environnementale (AFSSE)

-

17

-

Agence française du sang

29,7

-

-

Office de protection contre les rayonnements ionisants (OPRI)

84,7

84,7

-

Etablissement français des greffes (EFG)

28,1

28,1

-

Institut de veille sanitaire (InVS)

101,1

103,5

+ 2,3 %

Agence nationale d'accréditation et d'évaluation en santé (ANAES)

53,5

38

- 29 %

Total

495,2

471

- 4,9 %

Ainsi, les 24,3 millions de francs d'économie résultent de la suppression de la dotation de l'Agence française du sang, l'établissement français du sang doté par la loi de finances rectificative pour 1999 devant fonctionner sur ressources propres, et de la diminution forte de la dotation à l'ANAES et, dans une moindre mesure, à l'AFSSAPS en raison de la création de ressources propres par les articles 55 et 55 bis rattachés (voir infra ). Par ailleurs En revanche, l'AFSSA et la nouvelle AFSSE font l'objet de mesures nouvelles positives.

Votre rapporteur spécial n'est pas convaincu que le souci d'indépendance budgétaire recherché par la substitution à une subvention de l'Etat de ressources affectées soit nécessairement un bienfait pour les agences puisque ces dernières deviennent ainsi dépendante de l'activité de ceux qu'elle doit contrôler (fabricants de médicaments, de dispositifs médicaux, hôpitaux, etc.). Le juste équilibre serait certainement de se fixer une sorte de clef de répartition des ressources et de s'y tenir autant que possible. Or aujourd'hui, si on rapporte le total des subventions budgétaires aux budgets des établissements, la part de l'Etat dans les dépenses des établissements est en dessous de 30 %, avec de fortes variations entre établissements.

Ces agences constituent désormais un dispositif très important et richement doté, notamment en personnel : avec l'établissement français du sang, le budget des agences est 2,5 fois plus élevé que l'ensemble des sommes consacrées par l'Etat à la santé publique. Si on enlève l'établissement français du sang qui ne bénéficie plus de transferts de l'Etat, le budget des agences atteint de 1,8 milliards de francs, soit le budget que l'Etat consacre à la santé publique hors subventions aux dites agences.

Les moyens des agences en 2000

Budgets (*)
(en millions de francs)

Emplois propres

Mises à disposition

AFSSAPS

541,04

828

5

AFSSA

455,49

575

134

EFS

4.102,44

5.800

2.800

OPRI

153,8

225

-

EFG

88,35

85

38

InVS

145,44

140

-

ANAES

163,88

146

29

ENSP

258,02

262

-

Total

5.908,46

8.061

3.006

Total hors EFS

1.806,02

2.261

206

(*) après décisions modificatives

2. Les programmes de lutte contre les fléaux sanitaires

Les crédits inscrits aux différents chapitres pour les programmes de santé publique diminuent de 78 millions de francs pour d'établir à 1,88 milliard de francs (- 4 %). Cette évolution recouvre deux mouvements contradictoires :

• 119 millions de francs de transferts de crédits vers l'assurance maladie 3 ( * ) ;

• 20 millions supplémentaires affectés à la mission interministérielle de lutte contre la drogue et la toxicomanie (MILDT) ;

• 23,6 millions de francs supplémentaires affectés à la prévention et à la promotion de la santé.

a) Programmes de santé publique, dispositifs de prévention et de promotion de la santé (47-11)

Les dépenses en faveur des programmes de santé publique augmenteront en 2001 de 23,6 millions de francs pour s'élever à 275,3 millions de francs (hausse de 9,4 %) afin principalement de financer des actions déconcentrées (196,7 millions de francs, en hausse de 10,8 %), de renforcer les moyens des observatoires régionaux de santé (21,6 millions de francs en hausse de 16,1 %) et les actions menées au plan national (57 millions de francs, en hausse de 2,7 %).

La hausse des moyens nationaux se justifie pour rechercher des financements complémentaires au plan de lutte contre le cancer annoncé au printemps 2000. Les crédits supplémentaires déconcentrés serviront pour 9,8 millions de francs au programmes régionaux d'accès à la prévention et aux soins (PRAPS), pour 7 millions de francs aux contrats de plan Etat-région, pour 4 millions de francs à la mise en place de programmes régionaux de santé et pour 2,3 millions de francs à l'extension du dispositif de dépistage.

Les dépenses non déconcentrées (article 10) sont nombreuses : financement de la conférence nationale de santé, subventions à des organismes oeuvrant dans le domaine de la santé publique comme le comité français d'éducation pour la santé (24 millions de francs en 2000), le Haut comité de la santé publique (340.000 francs en 2000) et l'Union internationale de promotion et d'éducation pour la santé (380.000 francs en 2000). Sont également financées sur cet article 10 des interventions sanitaires ciblées : jeunes (6,7 millions de francs en 2000), contraception et interruption volontaire de grossesse 570.000 francs en 2000), santé en prison (350.000 francs), santé des enfants (970.000 francs), santé maternelle et périnatale, etc. Ces crédits servent aussi pour les services d'aide médicale d'urgence, des subventions aux associations de malades, des actions de santé publique contre le cancer (7.7 millions de francs) et le plan triennal de lutte contre la douleur.

Les dépenses déconcentrées de l'article 20, elles, servent au financement des centres d'éducation pour la santé, au développement des programmes régionaux de santé destinés à donner suite à la fixation de les priorités régionales de santé (à terme, chaque région devra avoir fixé trois programmes pluriannuels en fonction des priorités ayant émergé dans les conférences régionales de santé 4 ( * ) ). Ces crédits servent aussi pour les PRAPS, pour la prévention de l'hépatite B dans les prisons, pour le relais des campagnes nationales et pour des actions locales de lutte contre le cancer.

b) Evaluation et gestion des risques sanitaires liés à l'environnement et aux milieux de vie (47-12)

Les crédits consacrés à l'évaluation et à la gestion des risques sanitaires liés à l'environnement augmenteront en 2001 de 6 millions de francs à 42,3 millions de francs (+ 16,5 %). Ils sont réorientés en priorité vers des actions déconcentrées (8 millions supplémentaires à 31,7 millions contre une réduction de 2 millions de francs des crédits destinés aux actions nationales à 10,6 millions).

Les crédits de ce chapitre sont utilisés dans plusieurs directions. L'amiante devait être une priorité, mais des retards dans l'élaboration du décret réformant le dispositif français de protection contre l'amiante a entraîné une sous-consommation des crédits prévus à ce titre (2,5 millions de francs).

Par ailleurs, le chapitre 47-12 sert à financer les centres antipoison, les actions de normalisation dans le domaine de l'eau, des études sur ce qui ne relève pas de la sécurité sanitaire (pollution atmosphérique, amiante et fibres de substitution, bruit, substances chimiques, déchets, rayonnements ionisants), et à participer à certains programmes de l'Organisation mondiale de la santé. Au titre des actions déconcentrées figurent par les exemple les programmes d'action en santé environnement, le soutien aux initiatives locales comme la prévention du saturnisme et une participation au financement des services d'assistance technique aux exploitants de stations d'épuration.

c) Programmes et dispositifs de lutte contre les pratiques addictives (47-15)

Les dépenses de ce chapitre diminuent fortement de 82,1 millions de francs (- 9,4 %) en raison du transfert de la prise en charge des consultations d'alcoologie menées dans les CHRS à l'assurance maladie pour 89 millions de francs.

A structure constante, les crédits augmentent de 8,8 millions de francs et sont orientés à titre principal (777,4 millions de francs sur un total de 784,9) au financement d'actions déconcentrées.

Depuis le transfert à la mission interministérielle de lutte contre la drogue et la toxicomanie (MILDT) de certaines responsabilités en matière de lutte contre le tabagisme et l'alcoolisme, les responsabilités de l'Etat peuvent paraître résiduelles en la matière. Ainsi, on peut vraiment regretter que les crédits du chapitre 47-15 ne soient pas détaillés de manière à pouvoir isoler l'effort consenti sur ces sujets importants.

En effet, la direction générale de la santé mène plusieurs programmes de lutte contre le tabagisme et l'alcoolisme. Le plan national de lutte contre le tabagisme de mai 1999 a été repris dans le plan gouvernemental de lutte contre la drogue et la prévention des dépendances de juin 1999 et dans le programme national de prévention du cancer de février 2000. Elles se déclinent autour des actions suivantes : sensibilisation et communication, financement d'actions de formation, de la veille judiciaire, de l'évaluation de la mise en vente libre des substituts nicotiniques, d'actions destinées à la protection des non-fumeurs, et d'actions destinées à promouvoir la recherche par l'attribution de bourses de recherche à de jeunes chercheurs.

Dans le domaine de la lutte contre l'alcoolisme, la DGS finance des actions de prévention et aide à la création des réseaux. Elle aide aussi les associations nationales (pour 4,65 millions de francs).

Par ailleurs, la direction générale de la santé finance en propre plusieurs actions dans le domaine de la toxicomanie, en dehors de celles financées sur crédits transférés par la MILDT. C'est ainsi le cas de 78 points écoute jeunes et de points écoute parents, d'actions de formation, d'actions sociales et de réinsertion (par exemple les 4 sleep-in , ou sleep-off, centres d'hébergement de nuit en urgence pour toxicomanes actifs en situation de grande précarité), les équipes mobiles de proximité, 25 ateliers d'aide à l'insertion, ou 8 quartiers intermédiaires sortants créés pour prévenir la récidive et la rechute dans la toxicomanie des toxicomanes sortant de prison. La DGS finance aussi l'achat de méthadone, ainsi que le dispositif spécialisé de soins aux personnes toxicomanes (190 centres spécialisés de soins aux toxicomanes (CSST) en ambulatoire et 56 permanences d'accueil dont 137 développent une activité de prise en charge avec traitement par la méthadone, 50 CSST avec hébergement collectif, 16 CSST intervenant en milieu pénitentiaire, 65 réseaux d'appartements thérapeutiques-relais, 17 structures d'hébergement de transition ou d'urgence, 27 réseaux de familles d'accueil). La DGS a aussi en charge les deux bus dispensateurs de méthadone mis en place à Paris et Marseille, des interventions sanitaires dans les milieux festifs (soirées rave ), etc.

d) Action interministérielle de lutte contre la toxicomanie (47-16)

Les crédits gérés par la MILDT augmenteront en 2001 de 20 millions de francs à 298,2 millions de francs. Elles sont orientées dans trois directions : subventions directement accordées par la MILDT, subventions déconcentrées à des chefs de projet départementaux, et crédits répartis entre les ministères.

Au cours de l'année 2000, la MILDT a poursuivi la mise en oeuvre du plan triennal de lutte contre la drogue et de prévention des dépendances de juin 1999. Cette action s'est orientée autour des principaux axes suivants : la connaissance du phénomène, la politique d'information et de communication (lancement en 2000 du livre d'information sur les drogues et les dépendances : " Savoir plus, risquer moins " diffusé à environ 1,5 million d'exemplaires), la politique de prévention 5 ( * ) " plus en prise avec la réalité des pratiques de consommation " , c'est à dire " non seulement à éviter ou retarder les premières consommations mais également, lorsque cette consommation existe, éviter le passage d'un usage occasionnel ou expérimental à un usage nocif pour l'usager lui-même ou pour son entourage ", la prise en charge plus précoce des usagers excessifs de drogues, d'alcool, de tabac, de médicaments ou de produits dopants, une meilleure articulation des politiques pénales et des politiques sanitaires et sociales, et une meilleure coordination de la coopération internationale. La MILDT s'attache aussi à créer une " culture commune à tous les professionnels spécialisés ou non spécialisés ".

Un contrôle budgétaire est actuellement en cours sur l'utilisation de ces crédits.

e) Lutte contre le SIDA et les maladies transmissibles (47-18)

Les crédits inscrits à ce chapitre diminuent de 44 millions de francs en raison :

• du transfert à l'assurance maladie de la prise en charge des appartements de coordination thérapeutiques (ACT) pour 29 millions de francs sur l'article 20 ;

• du transfert à l'article 42-01 des dépenses liées à la contribution de la France à l'initiative de solidarité thérapeutique internationale pour 21 millions de francs ;

• de l'augmentation de 6 millions de francs des dépenses non déconcentrées de lutte contre le SIDA afin de financer la tranche 2001 du plan quadriennal de lutte contre l'hépatite C.

Au total, le chapitre 47-18 sera doté en 2001 de 480,9 millions de francs dont 146,7 millions pour les dépenses non déconcentrées (article 10), 318,8 millions pour les dépenses déconcentrées (article 20) et 15,4 millions pour les centres de référence (article 40).

Évolution des crédits du chapitre 47-18 en MF

Lutte contre le sida

Lutte contre le VIH le VHC et les autres maladies transmissibles

1994

1995

1996

1997

1998

1999

2000

Variation

art. 10

177

161,6

185,2

160,2

133

art. 10

144,7

140,6

-4,1

art. 20

72,5

212,3

244,2

290,1

316,1

art. 20

343,2

347,7

+4,5

art. 30

18,1

18,1

20,6

23,6

23,6

art. 30

26,6

0

-26,6

art. 40

14

15,4

+1,4

art. 50

21

+21

Total

267,7

392,1

450,1

474

472,8

Total

528,6

524,8

-3,8

Champ 2000 (hors CDAG)

502

524,8

+22,8

Source : Direction générale de la santé

Il y avait à la fin de 1998 48.453 malades du SIDA, entre 34.500 et 37.500 personnes étant décédées de cette maladie à cette date en France. On note une diminution des nouveaux cas de SIDA grâce aux progrès des nouvelles thérapeutiques. En 2000, il y a aurait 120.000 personnes séropositives en France.

Les crédits sont utilisés principalement pour la prévention (185 millions de francs en 2000). Il s'agit par exemple de soutenir des réseaux associatifs nationaux, de financer des réseaux ville-hôpital, des dispositifs d'aide à domicile. La prise en charge des malades (174 millions de francs en 2000) a un coût croissant (de 32 à 37 % du budget total de 1994 à 2000). En 2001, devraient être amplifiés certains programmes de prévention et d'accès au dépistage et aux soins de populations ciblées (femmes, migrants, jeunes en difficulté). Les crédits seront recentrés sur la lutte contre l'épidémie proprement dite. Pour la communication, en 2001 le point central sera, outre la prévention, le dépistage, avec l'objectif de réduire le stock des personnes contaminées non dépistées et de réduire les retards au diagnostic dans la population hétérosexuelle, en particulier chez les personnes migrantes.

* 3 Cette somme était à l'origine de 164 millions de francs mais lors de la discussion à l'Assemblée nationale le gouvernement est revenu sur une partie du transfert, pour 45 millions de francs correspondants aux frais d'hébergement en appartements de coordination thérapeutique.

* 4 A la fin de l'année 2000, 70 programmes étaient en place.

* 5 Réponse au questionnaire de votre rapporteur spécial.

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