II. OBSERVATIONS

A. UNE ANNÉE GRISE POUR LA MODERNISATION DU MINISTÈRE DE L'ÉCONOMIE ET DES FINANCES

Les efforts de modernisation du ministère comportaient d'abord une unification des services de l'industrie et du secrétariat d'Etat aux PME, commerce et artisanat . Elle se traduit par le regroupement des moyens budgétaires de ces départements ministériels.

Le regroupement des moyens ne paraît pas jusqu'alors avoir eu d'incidence importante sur leur niveau, si bien que, budgétairement, l'on peut évoquer plutôt une superposition qu'une rationalisation.

Une vision étroitement budgétaire ne rend sans doute pas compte de la totalité des effets attendus d'une plus grande intégration des services. Mais il faudra néanmoins veiller à l'impact budgétaire d'une optimisation des moyens qu'elle rend possible.

La réforme du ministère s'est également traduite dans la logique d'un rapport demandé à l'été 1997 77 ( * ) afin de parvenir à de plus grandes synergies entre les différentes composantes du ministère au niveau central et dans les services déconcentrés, par plusieurs réaménagements de structures avec :

- la création d'une direction des affaires juridiques qui regroupe le service juridique et de l'agence judiciaire du Trésor, le secrétariat général de la commission centrale des marchés et les bureaux "juridiques" de la direction générale de l'administration et des finances du secrétariat d'Etat à l'industrie ;

- la création de la direction du personnel, de la modernisation et de l'administration qui regroupe les directions transversales du "pôle finances" et du "pôle industrie" ;

- la création d'une direction des relations avec les publics et de la communication ;

- la réintégration du service de la législation fiscale à la mouvance de la direction générale des impôts ;

- les réformes de la direction de la comptabilité publique et de la direction générale de la concurrence, de la consommation et de la répression des fraudes.

Ces aménagements étaient supposés déboucher sur une amélioration de la gestion des moyens. Cet objectif devait déboucher sur des gains d'efficacité à effets budgétaires. Il serait utile de les mesurer.

Mais, la modernisation du ministère comportait surtout un projet visant à créer un service public fiscal de meilleure qualité. Il s'agissait, dans le prolongement des réformes de management des services qui avaient débouché sur la conclusion d'un contrat d'objectifs et de moyens entre la direction générale des impôts et la direction du budget, d'opérer des regroupements de structures destinés à promouvoir un interlocuteur fiscal unique et à décloisonner les administrations chargées de la gestion de l'impôt.

Dans son rapport d'information sous-titré " Pour une modernisation du service public de l'impôt ", votre rapporteur spécial vous avait proposé de vous rallier au principe d'une réforme indispensable et devant déboucher sur l'instauration d'une administration fiscale unique.

Constatant que les missions fiscales de la DGI étaient partagées dans des conditions créant des duplications et des cloisonnements peu propices à davantage d'efficacité et d'efficience et remarquant que, malgré de réels efforts pour améliorer l'animation de son réseau la DGI, à l'image de nombreuses administrations françaises, peinait à démontrer sa capacité à s'adapter aux légitimes demandes des administrés, il avait formulé un schéma de réforme pour progresser vers une administration fiscale unique.

Il réitère ses propositions qui consisteraient à unifier la DGI et la DGCP en procédant l'intégration dans une même administration des services de la DGI et du Trésor Public pour supprimer les cloisonnements et les superpositions actuelles.

Elle engendrerait une unité d'animation et de gestion au niveau national et au niveau local.

La dualité des réseaux de recouvrement n'a pas de justification et doit être supprimée, le réseau de la DGI adhérant progressivement au nouveau réseau comptable ou aux services chargés d'établir l'impôt.

L'unification des services doit déboucher sur une unification des systèmes informatiques et, plus généralement, sur une intégration des systèmes d'information.

Une fusion complète de la DGI et de la DGCP s'impose. Elle doit respecter quelques principes.

L'unification des réseaux et la fluidité qui en résultera entre des services aux fonctions interdépendantes ne doit pas signifier la banalisation de chaque fonction et, en particulier, le mélange des fonctions d'établissement et de recouvrement de l'impôt. Cette perspective relève d'une étape ultérieure des réformes dont tous les termes devront être rigoureusement envisagés. En l'état actuel des choses, cette appréciation manque de maturité et, d'ailleurs, le maintien de l'identité de la fonction comptable en dépenses, dont la remise en cause n'est pas envisagée, appelle naturellement une même solution en recettes.

Pour que les gains attendus de l'unification de la DGI et de la DGCP soient maximaux, il convient de promouvoir les modalités d'intégration les plus simples.

Dans cette perspective, il faut tenir compte des réalités suivantes :

- les regroupements sur sites qui étaient envisagés supposaient des difficultés majeures (le nombre des agents concernés était considérable - 17.000 agents pour la seule DGCP ; les désimplantations-réimplantations qui devaient s'ensuivre posaient des problèmes de coûts mal maîtrisés ; la dualité " hôtels des impôts des entreprises " - " hôtels des impôts des particuliers " réinstaurait des cloisonnements qu'on souhaitait éviter...) ;

- pour des avantages mineurs : l'intérêt d'une fusion de la DGCP et de la DGI est de supprimer des duplications et des cloisonnements coûteux en instaurant une administration atteignant la masse critique et dotée d'une animation unique et cohérente ; le regroupement sur site ne s'impose pas à l'heure des technologies modernes de communication et peut s'avérer contreproductif en termes d'accessibilité pour les administrés puisqu'il supposera un éloignement des services fiscaux.

Enfin, votre rapporteur spécial persiste à considérer qu'il convient de mettre à l'étude un élargissement des missions de l'administration nouvelle ainsi créée qui pourrait être chargée du recouvrement des droits de douane et des cotisations sociales.

Il a pris acte de l'abandon du projet de réforme défendu par le précédent ministre de l'économie, des finances et de l'industrie ainsi que des décisions présentées au comité technique paritaire ministériel du 28 avril 2000.

Il rappelle que, selon le communiqué à la presse publié alors, ce qui est désormais dénommé " réforme-modernisation du ministère " consiste à promouvoir cinq axes de réforme : la simplification, la transparence, l'adaptation-formation aux nouvelles technologies, le dialogue et l'expérimentation. Des décisions concrètes ont été annoncées, par exemple l'utilisation d'une déclaration rapide préremplie pour l'impôt sur le revenu, un accueil meilleur et simplifié pour répondre aux demandes des usagers, l'expérimentation de maisons locales de services publics économiques et financiers, la création d'un interlocuteur fiscal unique des particuliers et d'un interlocuteur économique unique des entreprises afin de faciliter leur activité... Des priorités d'action ont été retenues et, notamment, un " grand " effort d'utilisation de l'informatique et de formation aux nouvelles technologies. Enfin, depuis, un secrétaire général du ministère chargé d'assurer notamment la coordination et le suivi de cette " réforme-modernisation " a été nommé.

Des expérimentations sont en cours. En matière d'interlocuteur fiscal unique, des sites participeront à plusieurs expérimentations qui concerneront l'accueil des contribuables, commun aux services du Trésor public et des impôts, la mise en oeuvre d'un réseau intranet reliant plusieurs services des impôts et du Trésor public, un rapprochement entre un centre des impôts et la recettes des impôts correspondante.

En outre, le ministère indique avoir " largement " engagé la création d'une direction des grandes entreprises au sein de la Direction générale des impôts, lieu unique de déclaration et de paiement pour les très grandes entreprises (17.000 entreprises aux chiffres d'affaires supérieur à 4 milliards de francs) ainsi que la mise au point d'une nouvelle informatique fiscale centrée sur la création d'un compte fiscal unique du contribuable.

L'on peut certes se féliciter qu'une démarche plus pragmatique prévale mais il convient d'en suivre les résultats concrets. Votre rapporteur spécial s'y attachera. Mais d'ores et déjà, il ne peut que constater :

- la suspension du projet de déclaration des revenus pré-remplie par les services de la direction générale des impôts, la " déclaration express ", qui, visant à améliorer le service rendu aux contribuables, aurait permis de dégager des gains d'efficacité chiffrés à plus de 600 emplois ;

- la suspension du " contrat d'objectifs et de moyens de la DGI " qui devait notamment se traduire par une réduction nette des emplois de 440 unités en 2001 ;

- malgré la création d'un chapitre nouveau (37-92-91-31) regroupant les crédits nécessaires à la mise en place d'un nouveau système d'information des administrations fiscales doté de 265 millions de francs de crédits, un effort budgétaire consacré à la mise à niveau de l'informatique du ministère qui paraît encore très éloigné de besoins, dont la définition ne pourra d'ailleurs, intervenir que très progressivement en raison des incertitudes sur l'organisation finale des services.

Votre rapporteur spécial souhaiterait qu'un rapport annuel, réellement informatif, soit adressé au Parlement afin de faire le bilan, en continu, de la " réforme-modernisation " du ministère.

* 77 Rapport de M. Boisson et de M. Milleron.

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