LA PROPOSITION DE LOI DU SÉNAT : RENFORCER LA SÉCURITÉ JURIDIQUE DES ACTES DES COLLECTIVITÉS LOCALES ET AMÉLIORER LES PROCÉDURES APPLICABLES DEVANT LES CHAMBRES RÉGIONALES DES COMPTES

Lors de la séance publique du 11 mai 2000, le Sénat a adopté la proposition de loi de MM. Jacques Oudin, Jean-Paul Amoudry, Philippe Marini, Patrice Gélard, Joël Bourdin, Paul Girod et Yann Gaillard, tendant à améliorer les conditions d'exercice des compétences locales et les procédures applicables devant les chambres régionales des comptes 9 ( * ) .

Cette proposition de loi vise à donner une traduction législative aux recommandations formulées par le rapport d'information établi par M. Jacques Oudin au nom du groupe de travail, présidé par
M. Jean-Paul Amoudry, commun à la commission des Finances et à la commission des Lois 10 ( * ) du Sénat.

Rappelant que l'existence d'un contrôle financier était la contrepartie de l'autonomie et des responsabilités des collectivités locales, le groupe de travail a formulé des recommandations tendant à rénover les conditions d'exercice de l'examen de la gestion et à renforcer la sécurité juridique des actes des collectivités territoriales.

La rénovation des conditions de l'examen de la gestion par les chambres régionales des comptes

La proposition de loi adoptée par le Sénat tend à définir dans la loi l'objet de l'examen de la gestion par les chambres régionales des comptes.

Celui-ci devrait porter sur la régularité des actes de gestion et sur l'économie des moyens mis en oeuvre par rapport aux objectifs fixés par l'assemblée délibérante ou par l'organe délibérant, sans que ces objectifs, dont la définition relève de la responsabilité exclusive des élus ou des délégués intercommunaux, puissent eux-mêmes faire l'objet d'observations.

Les observations que la chambre régionale des comptes formulerait à cette occasion devraient mentionner les dispositions législatives ou réglementaires dont elle constaterait la méconnaissance et prendre en compte expressément les résultats de la procédure contradictoire avec l'ordonnateur ou le dirigeant ou toute autre personne nominativement ou explicitement mise en cause. Les observations devraient être hiérarchisées selon leur importance relative ( article 1 er ).

La proposition de loi tend aussi à imposer aux chambres régionales des comptes de recenser les difficultés auxquelles les collectivités territoriales ou établissements publics auraient été confrontés dans l'application des dispositions législatives ou réglementaires. Ces constatations seraient insérées dans le rapport public annuel de la Cour des comptes ( article 2 ).

Par ailleurs, la procédure de l'apurement administratif serait étendue , la " ligne de crête " entre l'apurement administratif par les comptables supérieurs du Trésor et le contrôle juridictionnel des comptes par les chambres régionales étant révisée. Désormais, les communes de moins de 2 500 habitants et les groupements de moins de 10 000 habitants dont le montant des recettes ordinaires n'excéderait pas sept millions de francs (contre deux millions de francs actuellement) relèveraient de la procédure d'apurement administratif ( article 4 ).

L'amélioration des procédures applicables devant les chambres régionales des comptes

Il s'agit tout d'abord de renforcer le rôle de la Cour des comptes, au titre de sa fonction permanente d'inspection des chambres régionales des comptes, afin d' homogénéiser les procédures mises en oeuvre par les différentes chambres régionales en matière de contrôle de gestion ( article 3 ).

La règle de non-communication , déjà en vigueur pour les documents provisoires de la Cour des comptes, serait étendue à ceux des chambres régionales des comptes : mesures d'instruction, rapports et communications provisoires ( article 5 ).

Dans le cadre de la procédure de gestion de fait, l'assemblée délibérante de la collectivité concernée serait appelée à statuer sur l'utilité publique des dépenses litigieuses, par une délibération motivée ( article 5 ter ).

La présentation de ses conclusions par le ministère public avant l'arrêt par la chambre régionale des comptes des observations définitives sur la gestion serait systématisée. Le ministère public apprécierait notamment la légalité de la procédure suivie au cours de l'examen de la gestion ( article 6 ).

L'ordonnateur mis en cause dans une lettre d'observations définitives devrait être en mesure de présenter une réponse écrite ; il disposerait d'un délai d'un mois pour ce faire. Cette réponse serait annexée aux observations définitives de la chambre régionale des comptes ( article 7 ). Une mesure comparable figure à l'article 32 du texte adopté par l'Assemblée nationale.

La proposition de loi tend à suspendre la publication et la communication des observations définitives sur la gestion dans la période de six mois précédant des élections, dite " délai de neutralité " ( article 7 ).

Les dirigeants des personnes morales contrôlées et toute autre personne nominativement ou explicitement mise en cause pourraient demander la rectification d'observations définitives sur la gestion par une chambre régionale des comptes (article 8 ).

Enfin, la loi reconnaîtrait aux observations définitives sur la gestion le caractère d'actes faisant grief, susceptibles d'être déférés devant la juridiction administrative ( article 9 ).

L'aménagement du régime de la gestion de fait

La proposition de loi adoptée par le Sénat prévoit de modifier le régime des inéligibilités afin de supprimer la démission d'office de l'élu déclaré gestionnaire de fait ( articles 10 à 14 ).

L'ordonnateur déclaré comptable de fait et ayant obtenu de la part de l'organe délibérant de la collectivité la reconnaissance du caractère d'utilité publique sur les comptes présentés ne pourrait être mis en débet à titre personnel en l'absence de malversation, de détournement ou d'enrichissement personnel ( article 15 ).

L'action en déclaration de gestion de fait se prescrirait par cinq ans à compter du dernier acte constitutif de ladite gestion (article 4 bis).

Une déclaration de gestion de fait ne pourrait être prononcée sur les exercices ayant déjà fait l'objet d'un apurement définitif de la chambre régionale des comptes avec décharge donnée au comptable (article 4 ter).

* 9 Rapport n° 325 (Sénat, 1999-2000) de M. Jean-Paul Amoudry au nom de la commission des Lois.

* 10 " Chambres régionales des comptes et élus locaux, un dialogue indispensable au service de la démocratie locale " (Sénat, n° 520, 1997-1998).

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