TITRE II
DES CONDITIONS D'EXERCICE DES MANDATS LOCAUX
CHAPITRE PREMIER
CONCILIATION DU MANDAT LOCAL AVEC
UNE ACTIVITE PROFESSIONNELLE

Article 16
(art. L. 122-24-1 du code du travail)
Congé pour campagne électorale

Cet article étend à tous les scrutins les dispositions du code du travail accordant aux candidats aux élections législatives et sénatoriales un droit à congé non rémunéré pour participer à la campagne électorale.

L'article L. 122-24-1 du code du travail prévoit en effet que les employeurs sont tenus de laisser à leurs salariés candidats à l'Assemblée nationale ou au Sénat le temps nécessaire pour participer à la campagne électorale dans la limite de vingt jours ouvrables.

Le texte permet au salarié de bénéficier de ce congé « à sa convenance », à la condition que chaque absence soit d'au moins une demi-journée entière et que l'employeur soit prévenu au moins 24 heures avant le début de chaque absence.

Sur demande de l'intéressé, la durée de ces absences est imputée sur celle des congés payés, dans la limite des droits acquis à la date du premier tour de scrutin. Lorsqu'elles ne sont pas imputées sur les congés payés, les absences ne sont pas rémunérées mais « donnent lieu à récupération en accord avec l'employeur ».

L'article L. 122-24-1 du code du travail assimile la durée de ces absences à une période de travail effectif pour la détermination des droits à congés payés et de ceux « liés à l'ancienneté résultant des dispositions législatives, réglementaires et conventionnelles ».

Le projet de loi ne modifierait pas ce régime, mais l'étendrait aux salariés candidats au Parlement européen et aux élections locales (municipales, cantonales, régionales et à l'Assemblée de Corse).

Toutefois, dans sa rédaction initiale, le texte fixait la durée du congé à 10 jours pour les élections locales et européennes, alors que ce congé est dû dans la limite de 20 jours pour les candidats à l'une des assemblées parlementaires nationales.

L'Assemblée nationale a cependant fixé à 20 jours la durée maximale du congé pour campagne électorale, alignant ainsi le droit des candidats aux élections locales (et européennes) sur celui prévu par des textes en vigueur pour les candidats aux élections législatives et sénatoriales . Elle a, à cet effet, adopté un amendement de sa commission des Lois, sur lequel le Gouvernement a émis un avis de sagesse.

L'Assemblée nationale a aussi adopté un amendement de sa commission des Lois, avec l'accord du Gouvernement, pour inscrire dans la loi ce droit à congé au bénéfice des fonctionnaires de l'Etat, territoriaux et hospitaliers.

Un tel congé a déjà été prévu pour les trois fonctions publiques, et ce par circulaires 161 ( * ) . Pour les élections locales, le droit à congé s'élève à 10 jours au maximum, imputés sur les congés annuels ou, à défaut, fait l'objet d'un report d'heures de travail d'une période sur une autre, « dans l'intérêt du service ». Au-delà de 10 jours, une disponibilité pour convenance personnelle peut être accordée (ou un congé non rémunéré pour les agents non titulaires). Le droit à congé est porté à 20 jours pour les élections législatives, sénatoriales, européennes et présidentielles.

Le dispositif applicable aux fonctionnaires est donc actuellement plus favorable que celui en vigueur pour les salariés du secteur privé, puisque les agents publics peuvent, dès maintenant, disposer de ce congé pour campagne électorale, du moins pour les scrutins locaux.

L'article 16 du projet de loi, dans sa rédaction adoptée par l'Assemblée nationale, aurait pour effet d'ouvrir, dans ce domaine, des droits égaux pour tous les salariés, qu'ils soient fonctionnaires ou non. Les dispositions proposées ne pourraient évidemment pas bénéficier aux élus non salariés.

On remarquera que, si le congé pour campagne électorale peut être imputé sur les droits aux congés payés, il ne donne en aucune façon droit à une quelconque rémunération, et ce conformément à l'article L. 52-8 du code électoral faisant interdiction aux personnes morales, à l'exception des partis et groupements politiques, de participer au financement de la campagne électorale d'un candidat. La rémunération d'un congé pour campagne électorale reviendrait en effet à accorder une participation financière à cette campagne en infraction avec l'article L. 52-8 du code précité, hormis le cas ou l'absence rémunérée est imputée sur les droits à congés payés.

Votre commission des Lois, approuvant le principe d'un congé non rémunéré pour les candidats aux élections locales, vous propose cependant par amendement de limiter celui-ci, comme dans le texte initial du Gouvernement, à 10 jours et de ne pas inclure dans le dispositif les candidats aux élections municipales dans les communes de moins de 3.500 habitants.

Elle vous propose d'adopter l'article 16 ainsi modifié .

Article 17
(art. L. 2123-2, L. 3123-2 et L. 4135-2
du code général des collectivités territoriales)
Crédit d'heures

Afin de faciliter la conciliation d'une activité professionnelle avec l'exercice d'un mandat, le code général des collectivités territoriales comporte des dispositions permettant à l'élu salarié de s'absenter pour se rendre et participer aux séances plénières et aux réunions de commission de l'assemblée dont il est membre 162 ( * ) .

Il en est de même pour sa participation aux réunions des organismes où il a été désigné pour représenter sa collectivité.

Ces dispositions, applicables à tous les élus sans seuil de population, qu'ils perçoivent ou non une indemnité de fonction, ne seraient pas modifiées par le présent projet de loi.

Toutefois, le régime de compensation des pertes de revenu du fait de la participation à ces réunions, applicable aux seuls élus non indemnisés, serait aménagé (voir commentaire de l'article 18 ci-après) et l'assimilation du temps passé aux réunions à une durée de travail effective pour la détermination des droits sociaux serait précisée (voir commentaire des articles 34 et 35 ci-après).

Une deuxième disposition destinée à favoriser l'exercice d'une activité professionnelle avec un mandat est limitée à certains élus, selon un barème prévu par la loi. Il s'agit du crédit d'heures.

Les élus bénéficiaires du crédit d'heures sont les maires et les maires-adjoints de toutes les communes, les conseillers généraux et régionaux ainsi que les conseillers municipaux des communes d'au moins 3.500 habitants.

Peuvent également bénéficier des dispositions sur les crédits d'heures les présidents, vice-présidents et membres des établissements publics de coopération intercommunale dans les conditions applicables respectivement aux maires, aux adjoints et aux conseillers municipaux, soit d'une commune dont la population est égale à celle de l'ensemble des communes de l'établissement public (communautés), soit de la commune la plus peuplée de cet établissement (syndicats).

Le crédit d'heures est déterminé selon un barème prenant en compte la durée hebdomadaire légale du travail, le mandat exercé et la population de la collectivité territoriale concernée.

Le crédit d'heures, que l'employeur est tenu d'accorder, n'est pas rémunéré par l'entreprise et ne donne pas droit à compensation de revenu de la part de la collectivité, ce point étant cependant modifié par le présent projet de loi (voir commentaire de l'article 18 ci-après).

En d'autres termes, une amélioration du barème de crédit d'heures peut permettre à l'élu de consacrer plus de temps à son mandat mais, s'il utilise ce crédit supplémentaire, ses revenus décroissent en conséquence.

Toutefois, les absences des élus à ce titre sont assimilées par la loi à des périodes de travail pour la détermination des droits sociaux, mais en des termes imprécis qui ont soulevé certaines difficultés. Les articles 34 et 35 ci-après tendent à préciser et aménager ce point important.

Le présent article, adopté sans modification par l'Assemblée nationale, a pour objet de réviser le barème de crédit d'heures, tandis que l'article 18 prévoit une compensation des pertes de revenu résultant de l'utilisation de crédit d'heures.

Les dispositions proposées s'inspirent très largement de celles adoptées par chacune des deux assemblées lors de l'examen, au cours de la dernière session, de propositions de loi concernant le « statut de l'élu ».

Un tableau récapitule, en annexe 3, le barème proposé, en le comparant aux dispositions en vigueur et aux propositions adoptées par le Sénat en janvier et février derniers.

Le texte proposé par l'Assemblée nationale étendrait le bénéfice du crédit d'heures à tous les conseillers municipaux (ce droit n'est pas ouvert aux conseillers élus dans les communes de moins de 3.500 habitants). Le rapport de la commission pour l'avenir de la décentralisation, présidée par M. Pierre Mauroy, préconisait aussi l'extension du crédit d'heures à tous les élus municipaux proposant 5 heures pour les conseillers des communes de moins de 3.500 habitants (10 heures 30 selon le projet de loi).

Le présent article revalorise les droits en la matière pour toutes les catégories d'élus et simplifie le barème applicable aux adjoints, en supprimant une strate démographique.

Le texte prévoit aussi que l'adjoint ou le conseiller suppléant le maire bénéficie, pendant la durée de la suppléance, du crédit d'heures auquel le maire a droit. De même, les conseillers municipaux ayant reçu une délégation du maire auraient droit au crédit d'heures des maires-adjoints de la commune considérée.

Par ailleurs, l'article 17 majorerait aussi les droits des élus départementaux et régionaux : les membres des assemblées concernées verraient leurs droits portés de 52 heures 30 à 70 heures (105 heures dans le texte du Sénat). Les présidents et vice-présidents disposeraient de 140 heures comme dans le texte du Sénat (au lieu de 105 heures).

Le barème, adopté par l'Assemblée nationale, rejoint, pour les conseillers municipaux, celui retenu par le Sénat lors de la dernière session, sauf pour ceux des communes de moins de 3.500 habitants pour lesquels le Sénat n'avait pas prévu de nouveaux droits.

Le barème retenu pour les maires par les députés est strictement identique à celui adopté par les sénateurs.

En revanche, le barème adopté par les députés pour les adjoints est différent de celui retenu par le Sénat, puisque les adjoints des communes de moins de 20.000 habitants auraient droit à un crédit de 70 heures (au lieu de 52 heures 30 jusqu'à 10.000 habitants et de 105 heures entre 10.000 et 20.000 habitants, dans le texte du Sénat).

Au-delà de 20.000 habitants, les députés ont prévu un crédit de 140 heures pour les adjoints (au lieu de 105 heures entre 20.000 et 30.000 habitants dans le texte du Sénat qui prévoit cependant pour les plus grandes villes le même crédit de 140 heures).

Votre commission des Lois vous propose un amendement pour rétablir le barème de crédit d'heures retenu par le Sénat au cours de la dernière session et d'adopter l'article 17 ainsi modifié .

Article 18
(art. L. 2123-3 du code général des collectivités territoriales)
Compensation des pertes de revenu
des conseillers municipaux non indemnisés

Votre rapporteur a exposé à l'article précédent que les autorisations d'absence accordées par l'employeur pour participer aux réunions (séances plénières et réunions de commissions de l'assemblée dont le salarié est membre ; réunion des organismes au sein desquels il représente la collectivité ès qualité) et l'utilisation de crédits d'heures n'étaient pas rémunérées par l'employeur.

La perte de revenus qui en résulte est sensible pour les élus qui ne disposent pas d'indemnités de fonction.

Aussi l'article L. 2123-2 du code général des collectivités territoriales prévoit-il pour les élus municipaux non indemnisés un droit à compensation des pertes de revenus du fait de la participation aux réunions. La compensation est versée par la commune ou par l'organisme, dans la limite de 24 heures par élu et par an, chaque heure ne pouvant être compensée à un montant supérieur à une fois et demie la valeur du SMIC. Ce droit à compensation, ouvert aux élus ne bénéficiant pas d'indemnités de fonction, est donc actuellement plafonné à 230,50 euros (1.512 francs). Cette compensation ne porte pas, en revanche, sur l'utilisation des crédits d'heures.

En outre, la rédaction de l'article L. 2123-2 du code général des collectivités territoriales a été interprété comme inapplicable aux non salariés.

L'Assemblée nationale a donc décidé :

- d'étendre le champ de la compensation à la durée d'exercice du crédit d'heures ;

- d'élargir le bénéfice de ces dispositions aux élus exerçant une activité professionnelle non salariée , à raison « du temps qu'ils consacrent à l'administration de cette commune ou de cet organisme et à la préparation des réunions des instances où ils siègent ». Le ministère de l'Intérieur a indiqué à votre rapporteur que la durée de travail des non salariés utilisée pour l'exercice du mandat serait établie sur la base de leur déclaration, et que la compensation serait due dans la limite du crédit d'heures des salariés;

- de porter la durée maximale de la compensation, au titre de la participation aux réunions, de 24 à 72 heures par an, toujours dans la limite de une fois et demie la valeur horaire du SMIC. La compensation maximale serait donc triplée, passant de 1.512 francs à 4.536 francs (de 230,50 euros à 691,50 euros). La compensation au titre de l'utilisation du crédit d'heures serait plafonnée de la même manière.

Selon l'étude d'impact sur ce projet de loi, élaborée par le ministère de l'Intérieur, le coût de cette mesure est évalué à 53,36 millions d'euros (350 millions de francs) à la charge des collectivités territoriales concernées.

Votre commission des Lois, qui a approuvé ce dispositif, vous propose par amendement , d'une part d'apporter une précision rédactionnelle concernant la compensation des pertes de revenus pour les non salariés (plafonnement au montant du crédit d'heures dû aux salariés) et, d'autre part, de compléter le présent article afin de reprendre une disposition déjà adoptée par le Sénat lors de la dernière session.

Il s'agirait d'ouvrir un droit à compensation des pertes de revenus subies par un élu du fait de sa participation à des réunions à la demande du préfet ou d'une collectivité territoriale dont il n'est pas l'élu. Le bénéfice de cette disposition serait réservé aux élus municipaux ne percevant pas d'indemnités de fonction. La prise en charge de cette compensation par l'Etat ou la collectivité ayant sollicité l'élu se ferait dans les mêmes conditions que celles prévues pour les pertes de revenus consécutives à la participation à une réunion directement liée à l'exercice du mandat municipal.

Votre commission des Lois vous propose d'adopter l'article 18 ainsi modifié .

* 161 Fonction publique de l'Etat : circulaire FP n° 1918 du 10 février 1998.

Fonction publique territoriale : circulaire n° 1811 du 24 février 1998.

Fonction publique hospitalière : circulaire DH/FH1/98-152 du 6 mars 1998.

* 162 Pour les élus municipaux, départementaux et régionaux, il s'agit respectivement des articles L. 2123-1, 3123-1 et 4135-1 du code général des collectivités territoriales.

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