-CHAPITRE IV
-
Prévention et promotion de la santé

« La prévention est le parent pauvre de la santé » . Cette constatation, comme le rappelle un expert autorisé 26 ( * ) , fait partie des lieux communs. Entre la médecine curative et la médecine préventive, le dialogue reste inégal : « d'un côté une action qualitative sur les comportements, des recommandations aux effets incertains, de l'autre l'application de protocoles thérapeutiques éprouvés, des ordonnances aux prescriptions rassurantes » .

Pourtant, la prévention a été le socle des premières politiques de santé, l'objectif étant, à défaut de guérir, d'éviter la maladie : les législations du XIX ème siècle et du début du XX ème siècle fixent des règles d'isolement, de quarantaine ou d'interdiction de déplacement afin de prévenir les épidémies ou d'en limiter les conséquences, puis prévoient l'établissement de règlements sanitaires afin de faire cesser les maladies transmissibles, posent le principe de la déclaration obligatoire de certaines maladies et généralisent l'obligation de la vaccination antivariolique.

Les progrès de la médecine curative et la disparition des grandes épidémies vont éclipser l'action préventive au cours du XX ème siècle.

Mais ce désintérêt s'explique aussi en raison de la difficulté de procéder à une évaluation, entre autres financière, de la politique de prévention. Une politique de prévention ne peut produire ses effets que des années après qu'une disposition a été prise : le « temps » de la prévention s'accorde mal au « temps » d'urgence médiatique qui caractérise souvent nos sociétés démocratiques.

Le chapitre IV du titre II du projet de loi présente pour ambition de réformer en profondeur l'organisation de la prévention. Pourtant, il est symptomatique que ces dispositions n'aient pas été rattachées, dans l'architecture du texte, au chapitre V du titre I, relatif aux orientations de la politique de santé : la politique de prévention resterait-elle reléguée au second plan ?

Votre rapporteur observe en outre que ce chapitre ne modifie en rien les compétences -particulièrement enchevêtrées- des différents acteurs de la prévention :

- le pouvoir de police sanitaire relève des maires (loi de 1902), des préfets notamment « en cas d'épidémies ou d'un autre danger imminent pour la santé publique » (article L. 1311-4 du code de la santé publique) et du Gouvernement ;

- en vertu de l'article L. 1423-1 du code de la santé publique, le département est responsable de la protection sanitaire de la famille et de l'enfance, de la lutte contre la tuberculose, de la lutte contre le cancer, de la lutte contre la lèpre et enfin de la prophylaxie et du traitement des maladies vénériennes ;

- les caisses d'assurance maladie sont investies d'une mission générale de prévention et d'information. Le Fonds national de prévention, de l'éducation et de l'information sanitaire, doté pour 2001 de près de 290 millions d'euros, rassemble l'essentiel des crédits dédiés aux actions de prévention de l'assurance maladie. Il finance des actions de communication, d'éducation pour la santé, des campagnes de vaccination ou de dépistage, un programme de prévention bucco-dentaire, ainsi que les centres d'examens de santé ;

- l'Etat dispose de compétences de prévention sanitaire au niveau central : lutte contre le SIDA, maladies mentales, tabagisme, alcoolisme, toxicomanies ; au niveau déconcentré, les directions départementales des affaires sanitaires et sociales exercent un certain nombre de missions ;

- des services ministériels ont un rôle directement préventif : la médecine scolaire placée sous l'égide du ministère de l'éducation, la médecine du travail sous celle du ministère de l'emploi, etc.

Il n'en demeure pas moins que ce chapitre constitue la première tentative de définir la prévention : en effet, le droit positif est aujourd'hui muet sur cette question.

Des travaux conduits notamment sous l'égide de l'Organisation mondiale de la santé (OMS) ont permis de définir le champ de la prévention et la nature des actions et programmes qu'elle recouvre.

Selon une définition désormais traditionnelle, la prévention apparaît ainsi comme l'ensemble des actions tendant à éviter l'apparition, le développement ou la complication d'une maladie ou la survenue d'un accident. L'OMS distingue la prévention individuelle, qui vise à modifier les comportements par des obligations (vaccination obligatoire, interdiction de fumer, ...) ou des incitations (dépistage, vaccination recommandée, éducation pour la santé, ...) et la prévention collective, qui tend à réduire les facteurs de risque liés à l'environnement (mesures de sécurité sanitaire concernant l'eau, l'air, les rayonnements ionisants, ...).

S'agissant des activités de prévention, une distinction communément admise a été établie par l'OMS : la prévention primaire désigne l'action portant sur les facteurs de risque des maladies avant leur survenue (prévention de la transmission ou de l'infection), la prévention secondaire vise à dépister les maladies et à éviter l'apparition des symptômes cliniques ou biologiques et la prévention tertiaire qui a pour vocation de limiter les complications et séquelles d'une maladie.

Cependant, l'évolution de la définition de la santé, proposée par l'OMS, présente pour conséquence une évolution du concept de prévention, devenu « prévention et promotion de la santé ». Ayant déserté la politique de prévention, la France semble avoir également perdu la bataille du vocabulaire, une telle expression appelant de multiples interrogations sur son sens exact.

La définition de la santé proposée par l'OMS

« État de bien-être complet sur le plan physique, mental et social, et non simplement l'absence de maladie ou d'infirmité » .

L'emploi généralisé de cette définition démontre clairement que la perception de la santé dépasse le modèle médical qui a prévalu pendant la majeure partie du siècle. La notion de santé est passée de « l'absence de maladie » à un concept beaucoup plus vaste.

La définition proposée par l'OMS suggère que :

- la santé est multidimensionnelle -elle est liée au bien-être physique, mental et social ;

- la santé est tributaire de nombreux déterminants -elle est influencée par un grand nombre de facteurs, dont les pratiques et convictions spirituelles, le soutien social, les rapports avec la paix, la justice, l'économie, le revenu, l'environnement, les politiques, la participation des citoyens au processus décisionnel ;

- la santé est dynamique -elle change librement et souvent ;

- la santé est subjective -les expériences liées à la santé varient grandement d'une personne à l'autre, même quand les « données extérieures » semblent les mêmes.

Même si la majorité des intervenants en promotion de la santé s'accordent pour dire que la santé est bien plus que l'absence de maladie, on peut facilement comprendre que certaines personnes aient critiqué le manque de rigueur. L'inclusion dans la définition de la notion de bien-être mental et social accorde en effet aux intervenants une latitude presque illimitée quant aux options de prévention et de traitement de la « mauvaise santé ».

Source : Réseau canadien de la santé, http://www.canadian-health-network.ca/

L'OMS a proposé ainsi une définition de la « promotion de la santé » : « processus qui consiste à habiliter les personnes à accroître leur contrôle sur leur santé et à améliorer celle-ci » .

« L'essence » et « la forme » de la promotion de la santé

La promotion de la santé peut être représentée par trois cercles concentriques.

1. Le cercle le plus à l'intérieur est le modèle médical. Le rôle de ce modèle dans la promotion de la santé est d'identifier clairement la maladie, puis de mettre en place les mesures appropriées pour la gérer.

2. Le cercle du milieu est le mode de vie ou l'approche comportementale. Cette approche porte sur la gestion des pratiques liées au mode de vie qui peuvent représenter des facteurs de risques pour la santé, par exemple : l'alimentation, l'activité physique, le stress, la consommation d'alcool, le tabagisme.

3. Le cercle extérieur, qui englobe les deux autres, est le modèle du milieu physique et social. Ce modèle intègre les grands déterminants de la santé, tels le milieu physique et l'isolement.

Chacun, selon son point de vue, ses objectifs et ses ressources, peut considérer l'un ou l'autre de ces domaines, ou tous ces domaines, comme le lieu où survient la « véritable » promotion de la santé.

La « forme » que prend la promotion de la santé se rapporte à la dimension de contrôle ou d'habilitation mentionnée plus haut.

Certaines activités sont entreprises à grande échelle et font parfois appel au modèle « descendant », c'est-à-dire qu'elles partent du haut et vont vers le bas. Dans ce modèle, les collectivités et les citoyens ordinaires participent peu à la prise de décisions.

D'autres activités utilisent plutôt le modèle « ascendant ». Dans ce cas, les collectivités et les citoyens ordinaires, qui sont directement concernés, décident eux-mêmes de la façon d'aborder le problème ou de saisir l'occasion.

Bien entendu, il existe un large éventail de variantes entre ces deux pôles.

Source : Réseau canadien de la santé, http://www.canadian-health-network.ca/

Selon l'OMS, « la promotion de la santé » consiste à encourager les particuliers et les collectivités à faire des choix de modes de vie sains, tandis que la définition de la prévention, entendue au sens strict, serait de prévenir les maladies et les blessures.

Afin de tenter de dépasser le degré conceptuel, trois exemples montrent rapidement les « limites » de la distinction entre « prévention » et « promotion » :

- encourager la position dorsale a permis de réduire considérablement le risque de mort subite du nourrisson : il s'agit ainsi de « prévention » ;

- lutter contre l'alcoolisme et le tabagisme est une politique de « prévention », puisque cette politique vise à prévenir l'apparition à long terme d'un grand nombre de maladies imputables à ces deux fléaux : mais il s'agit, pour un public jeune et qui se sent peu concerné, d'une politique de « promotion » ;

- favoriser la consommation de fruits et légumes, afin de lutter à long terme sur notamment les cancers du côlon, est aujourd'hui une politique de « promotion », puisqu'elle s'adresse à tous : mais on peut considérer que si elle est couronnée de succès, elle aura été une politique de « prévention ».

Aussi votre rapporteur, sans nier tout l'intérêt des travaux menés par l'OMS sur la promotion de la santé, préfère-t-il entendre la « prévention » au sens large, et intituler le chapitre IV « Politique de prévention ». Dans son esprit, la « promotion de la santé » fait partie de cette politique.

Votre commission vous propose d'adopter cet intitulé ainsi amendé.

Art. 54
(art. L. 1417-1 à L. 1417-9 nouveaux du code de la santé publique)
Prévention et promotion de la santé

I - Le dispositif proposé

Le I de cet article insère au titre I er du livre IV de la première partie du code de la santé publique, un chapitre VII intitulé « Prévention et promotion de la santé », comprenant neuf articles.

Art. L. 1417-1 du code de la santé publique
Définition de la prévention et de la promotion de la santé

Cet article s'attache à définir la politique de prévention (premier alinéa) et la promotion de la santé (second alinéa). En effet, aucune définition de la prévention ne figure aujourd'hui dans le droit positif.

Il décrit ensuite les « actions individuelles et collectives » à travers lesquelles s'exerce la politique de prévention et de promotion de la santé.

Art. L. 1417-2 du code de la santé publique
Détermination des priorités de santé publique

Cet article précise que « les objectifs et programmes prioritaires nationaux de prévention et de promotion de la santé sont fixés par l'Etat après consultation des caisses nationales d'assurance maladie et de la Conférence nationale de santé » .

Art. L. 1417-3 du code de la santé publique
Comité technique national de prévention

Cet article crée un « comité technique national de prévention », présidé par le ministre de la santé, qui a pour objet d'assurer la coordination des actions de prévention et de leur financement. Ce comité réunit des représentants des ministères concernés (santé, sécurité sociale, jeunesse et sports, travail, environnement, équipement) , des différentes agences (Agence française de sécurité sanitaire des aliments, Institut de veille sanitaire, Agence nationale d'accréditation et d'évaluation en santé, Institut national de prévention et de promotion de la santé créé par l'article L. 1417-4, Agence française de sécurité sanitaire des produits de santé) , de l'assurance maladie, des collectivités territoriales et des personnalités qualifiées.

Art. L. 1417-4 du code de la santé publique
Institut national de prévention et de promotion de la santé

Cet article a pour objet de créer un établissement public administratif, dénommé « Institut national de prévention et de promotion de la santé » (INPSS), qui a pour mission de promouvoir des comportements et des habitudes de vie favorables à la santé. Doté d'une fonction d'expertise et de conseil, il est également chargé d'assurer le développement de l'éducation pour la santé et de mettre en oeuvre « les programmes et actions de prévention et de promotion de la santé » , dans le cadre des programmes prioritaires prévus par l'article L. 1417-2. Il s'appuie sur un réseau national de prévention et de promotion de la santé, constitué par ses correspondants publics et privés.

L'INPPS remplacerait le Comité français d'éducation pour la santé (CFES), créé en 1952 sous le nom de « Comité national d'éducation sanitaire et sociale » sous la forme d'une association régie par la loi de 1901, et qui gère un budget de 350 millions de francs en 2001, ce qui apparaît un montant aujourd'hui incompatible avec le maintien d'un statut associatif, même si le CFES est curieusement placé « sous le haut patronage du ministère de la santé » et soumis à un certain nombre de contrôles.

Art. L. 1417-5 du code de la santé publique
Missions de l'institut

Cet article énumère les missions de l'institut, qui sont très diverses :

- constituer un réseau national documentaire spécialisé sur les théories et pratiques relatives aux domaines de la prévention et de la promotion de la santé ;

- établir des critères de qualité pour les actions, les outils pédagogiques et les formations d'éducation thérapeutique et d'éducation pour la santé, développer, valider et diffuser des référentiels de bonnes pratiques dans ces domaines ;

- émettre un avis à la demande du Gouvernement sur tout outil et programme de prévention et de promotion de la santé ;

- concevoir et produire les différents supports des programmes nationaux de prévention, d'éducation thérapeutique et d'éducation pour la santé ;

- identifier, soutenir, effectuer ou participer à des formations, études, recherches et évaluations en rapport avec ses missions ;

- favoriser et soutenir le développement de réseaux locaux de prévention et de promotion de la santé, ainsi que celui des associations ;

- participer à l'action européenne et internationale de la France.

Art. L. 1417-6 du code de la santé publique
Organisation de l'institut

Cet article prévoit que l'établissement public est doté d'un conseil d'administration, comprenant, outre son président, des représentants de l'Etat, de l'assurance maladie, d'organismes ou personnalités qualifiées dans les domaines de compétence de l'institut, des représentants d'usagers et des représentants du personnel, et est dirigé par un directeur général.

Le président du conseil d'administration et le directeur général de l'institut sont nommés par décret sur proposition du ministre chargé de la santé.

L'Institut est également doté d'un conseil scientifique, dont le président est désigné par le ministre chargé de la santé. Ce conseil scientifique veille à la cohérence de la politique scientifique de l'institut.

Art. L. 1417-7 du code de la santé publique
Statut des agents de l'institut

Cet article prévoit, de manière classique, que l'établissement public peut employer des agents des trois fonctions publiques, des agents contractuels de droit public et des agents contractuels de droit privé.

Art. L. 1417-8 du code de la santé publique
Ressources de l'institut

Cet article énumère les ressources de l'institut, dont les principales seront :

- une subvention de l'Etat ;

- une dotation des régimes d'assurance maladie ;

- des subventions de collectivités publiques, de leurs établissements publics, des organismes d'assurance maladie, des organismes mutualistes, de la Communauté européenne ou des organisations internationales.

Art. L. 1417-9 du code de la santé publique
Modalités d'application

Cet article renvoie à un décret en Conseil d'Etat les modalités d'application des articles L. 1417-1 à L. 1417-8.

II - Les modifications adoptées par l'Assemblée nationale

A l'initiative de M. Bernard Charles, rapporteur, et de plusieurs de ses collègues membres du groupe socialiste, l'Assemblée nationale a souhaité préciser, à l'article L. 1417-1 du code de la santé publique, que les actions d'information et d'éducation pour la santé comprenaient notamment « des actions de prévention et de dépistage des maladies sexuellement transmissibles et du sida, d'information à la contraception et à l'interruption volontaire de grossesse » .

L'Assemblée nationale, à l'initiative de M. Georges Colombier et de plusieurs de ses collègues, a également adopté un amendement procédant à une rédaction globale de l'article L. 1417-4 du code de la santé publique, et visant notamment à préciser que cet institut disposerait de délégations régionales.

A l'initiative de MM. Marc Laffineur et Georges Colombier, l'Assemblée nationale, malgré un avis de sagesse du Gouvernement, a adopté un amendement prévoyant que l'institut accréditerait les organismes de prévention et de promotion de la santé, publics ou privés, qui en feraient la demande sur la base d'un cahier des charges rendu public (6° de l'article L. 1417-5 du code de la santé publique).

Enfin, un amendement rédactionnel de M. Bernard Charles, rapporteur de la commission des Affaires culturelles, familiales et sociales de l'Assemblée nationale a été adopté au troisième alinéa (2°) de l'article L. 1417-8 du code de la santé publique.

III - La position de votre commission

Dans le cadre des auditions organisées le 9 janvier par votre commission des Affaires sociales 27 ( * ) , plusieurs interlocuteurs ont insisté sur le caractère inachevé, à la fois sur la forme et sur le fond, de cet article.

Si les orientations générales ne sont pas en cause, les responsabilités des différents organismes ainsi que le sens des concepts utilisés sont marqués parfois par une grande confusion.

Aussi votre rapporteur vous propose-t-il une série d'amendements tendant essentiellement à clarifier le texte de l'article L. 1417-1 :

- ce ne sont pas les comportements individuels et collectifs, en tant que tels, qui doivent être favorisés, mais l'apprentissage des comportements individuels et collectifs qui peuvent contribuer à réduire le risque de maladie ou d'accident ; cet apprentissage des comportements peut contribuer à réduire non seulement le risque de maladie, mais également d'accident (premier alinéa) ;

- « la politique de promotion de la santé » , qui correspond de fait à l'éducation pour la santé, fait partie intégrante de la politique de prévention et n'a donc pas à en être isolée (premier alinéa) ;

- les handicaps ou les facteurs de risques ne font pas l'objet de programmes de dépistage et ne sauraient être confondus dans le même alinéa avec les actions de prophylaxie (3°, sixième alinéa) ;

- il est préférable (5°, huitième alinéa) de ne pas chercher à écrire dans la loi toutes les actions d'information et d'éducation pour la santé possibles les actions de prévention et de dépistage des maladies sexuellement transmissibles et du SIDA sont naturellement essentielles : se limiter à cette référence apparaît incomplet.

A l'article L. 1417-2 , votre rapporteur propose un amendement procédant à une rédaction globale.

Son objet principal est d'articuler les outils nécessaires à la politique de prévention (objectifs et programmes prioritaires nationaux) avec les orientations de la politique de santé adoptées dans le cadre pluriannuel évoqué à l'article 24 (article L. 1411-1) , et donc de relier la politique de prévention à la politique de santé. Ces programmes prioritaires nationaux pourraient être d'ailleurs adoptés dans le cadre de lois pluriannuelles de santé publique, appelées de ses voeux par la commission des Affaires sociales du Sénat. L'amendement vise également à prévoir la consultation du Haut conseil de la santé pour déterminer les objectifs et programmes prioritaires nationaux de prévention, ainsi que l'information, dans l'attente de lois pluriannuelles, des commissions chargées des Affaires sociales des deux assemblées.

A l'article L. 1417-4 , votre rapporteur propose d'adopter un amendement substituant à la dénomination « Institut national de prévention et de promotion de la santé » celle d' « Institut national d'éducation pour la santé » , cette formulation étant compréhensible par tous et n'entraînant pas de bouleversement par rapport à celle existante pour le CFES.

Par ailleurs, afin de s'assurer de la cohérence de la « politique scientifique » de l'institut, il est souhaitable de le placer sous l'autorité scientifique du Haut conseil de la santé : ainsi, un lien organique est créé entre le monde de l'expertise de la santé publique et celui de l'expertise de la prévention.

En revanche, il convient d'exclure toute mission qui donnerait un caractère par trop général, ou « autonome » à cet institut, qui n'est qu'un « outil technique ».

Enfin, il est préférable de se contenter de la formule souple de « délégués régionaux » , retenue par le projet de loi initial, plutôt que de créer des « délégations régionales » qui risqueraient de représenter une charge lourde, dans le cadre de la transformation de cette association en établissement public administratif.

A l'article L. 1417-6 , votre rapporteur propose d'adopter deux amendements de conséquence : la présidence de cet institut serait confiée au président du Haut conseil de santé, tandis que son conseil scientifique serait composé de membres désignés de cet organisme.

Votre commission vous propose d'adopter cet article ainsi amendé.

Art. 55
(art. L. 321-1, L. 221-1 et L. 322-3 du code de la santé publique)
Prise en charge des actes et traitements liés à la prévention

Objet : Cet article bascule sur le « risque » le financement des actes et traitements liés à la prévention.

I - Le dispositif proposé

Le 1° du I de cet article modifie le 6° de l'article L. 321-1 du code de la sécurité sociale, jusqu'alors limité aux frais afférents d'examen prénuptial, afin d'y inclure les frais relatifs aux actes réalisés dans le cadre des programmes prioritaires de prévention définis en application du nouvel article L. 1417-2 du code de la santé publique (cf. article 54) . Il en simplifie par ailleurs la rédaction, en regroupant dans le même alinéa, la couverture des frais de vaccination et des examens de dépistage effectués dans le cadre des programmes arrêtés en application des dispositions de l'article L. 1411-2, jusqu'alors prévus aux 7° et au 8°.

En conséquence, ces frais relatifs aux actes réalisés dans le cadre des programmes prioritaires de prévention seront pris en charge par l'assurance maladie.

Le 2° du I supprime par cohérence les 7° et 8° de l'article L. 321-1 du code de la sécurité sociale.

Le II de cet article précise à l'article L. 221-1 du code de la sécurité sociale que l'action de la CNAMTS en matière de prévention tient compte des programmes prioritaires nationaux et du programme fixé par la convention d'objectifs et de gestion conclue entre l'Etat et la CNAMTS en vertu de l'article L. 227-1 du code de la sécurité sociale.

Le III procède à une modification du 16° de l'article L. 322-3 du code de la sécurité sociale, relatif à l'exonération du ticket modérateur, par cohérence avec celle introduite à l'article L. 321-1 du même code.

Le IV précise que les dispositions du présent article entreront en vigueur le 1 er janvier 2003. En dehors d'une telle disposition, cet article, ayant des conséquences sur les comptes de l'assurance maladie, n'aurait pas été recevable dans le cadre d'une loi ordinaire, mais aurait nécessité son adoption dans le cadre d'une loi de financement de la sécurité sociale. Par ailleurs, il convient que l'Etat et la CNAMTS puissent modifier la convention d'objectifs et de gestion, par l'intermédiaire d'un avenant, pour déterminer les programmes prioritaires nationaux pris en compte.

L'Assemblée nationale a adopté cet article sans modification.

II - La position de votre commission

Un article apparemment technique peut cacher une grande innovation : les actes de prévention réalisés dans le cadre des programmes prioritaires seront soumis au même régime de financement que les actes de soins. Cette prise en charge ne sera plus assurée dans le cadre des crédits limitatifs d'un fonds, mais sur l'ensemble des consultations et prescriptions remboursées par la Sécurité sociale.

Et un « observateur » enthousiaste de conclure 28 ( * ) : « La symétrie établie, pour la première fois, entre le financement de la prévention et celui des soins pourrait induire un rééquilibrage progressif de l'organisation du système de santé. C'est en tout cas le voeu que l'on peut former après l'adoption de ces dispositions » .

Votre rapporteur estime, pour sa part, que la question du financement est inextricable de celle de l'enchevêtrement des compétences : Etat, départements, assurance maladie, etc. Seules des clarifications nécessaires, absentes du projet de loi, permettront d'induire ce « rééquilibrage progressif » de l'organisation du système de santé.

Dans cette attente, il se borne à proposer un amendement rédactionnel au II de cet article : ce sont les programmes prioritaires nationaux qui détermineront l'action de prévention menée par la CNAMTS, et non la convention d'objectifs et de gestion, qui ne fera qu'en décliner les conséquences.

Votre commission vous propose d'adopter cet article ainsi amendé.

Art. 56
(art. L. 1411-2 du code de la santé publique)
Encadrement du dépistage

Objet : Cet article a pour objet d'encadrer les pratiques de dépistage.

Cet article tend à revoir la rédaction du cinquième alinéa de l'article L. 1411-2 du code de la santé publique, qui dispose aujourd'hui qu'un « décret fixe la liste des examens et tests de dépistage qui ne peuvent être réalisés que par des professionnels et des organismes ayant souscrit à la convention-type mentionnée au troisième alinéa » , en précisant que les examens et tests de dépistage effectués dans le cadre d'une démarche individuelle de recours au soins sont également concernés.

Cette modification est justifié selon l'exposé des motifs du projet de loi par le niveau d'exigence dans le cadre des examens de dépistage. En fait, il s'agit de « redonner vie » à une disposition du code de la santé publique déjà existante, et de pouvoir fixer par décret les dispositions du troisième alinéa, resté inchangé :

« Les professionnels et organismes qui souhaitent participer à la réalisation des programmes susmentionnés s'engagent contractuellement auprès des organismes d'assurance maladie, sur la base d'une convention-type fixée par arrêté interministériel pris après avis de la Caisse nationale de l'assurance maladie des travailleurs salariés, à respecter les conditions de mise en oeuvre de ces programmes. Celles-ci concernent notamment l'information du patient, la qualité des examens, des actes et soins complémentaires, le suivi des personnes et la transmission des informations nécessaires à l'évaluation des programmes de dépistage dans le respect des dispositions de la loi n° 78-17 du 6 janvier 1978 relative à l'informatique, aux fichiers et aux libertés » .

Ainsi, la nécessité de cet article n'est pas très claire : s'agit-il seulement d'une disposition d'affichage ?

Sous le bénéfice de ces observations, votre commission vous propose d'adopter cet article sans modification.

* 26 Didier Tabuteau, conseiller d'Etat, maître de conférences à l'Ecole polytechnique, professeur à l'Institut d'études politiques de Paris, in « Les nouvelles ambitions de la politique de prévention », Droit social, n°12, décembre 2001, p. 1085-1089.

* 27 Voir tome III (annexes) du présent rapport.

* 28 Droit social, décembre 2001, op. cit., p. 1089.

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