CHAPITRE II
-
Formation médicale continue

Art. 40
(art. L. 4133-1 à L. 4131-9, L. 6155-1 à L. 6155-5 nouveaux
du code de la santé publique)
Institution d'une obligation de formation continue pour les médecins
ainsi que pour les biologistes, odontologistes et pharmaciens
exerçant en établissement de santé

Objet : Cet article vise à instituer un nouveau dispositif obligatoire de formation médicale continue en lieu et place de celui instauré par l'ordonnance du 24 avril 1996.

I - Le dispositif proposé

Le dispositif de formation médicale continue institué par l'ordonnance du 24 avril 1996 n'a jamais été appliqué, ses décrets d'application ayant été annulés par le Conseil d'Etat.

Le présent article tend alors à lui substituer un nouveau dispositif légal s'appliquant aux médecins libéraux et salariés, hospitaliers ou non, ainsi qu'aux biologistes, odontologistes et pharmaciens exerçant leurs fonctions dans des établissements de santé.

Le paragraphe I est relatif à l'obligation de formation médicale continue des médecins, inscrits au tableau de l'ordre, qu'ils soient libéraux ou salariés.

Il précise le contenu et l'organisation de cette formation médicale continue et procède pour cela à une réécriture complète des articles L. 4133-1 à L. 4133-9 du code de la santé publique

Dans sa nouvelle rédaction, l'article L. 4133-1 définit la formation médicale continue (FMC) qui a pour objectifs l'entretien et le perfectionnement des connaissances, y compris dans le domaine des droits de la personne, ainsi que l'amélioration de la prise en charge des priorités de santé publique.

Il prévoit que la formation médicale continue constitue une obligation pour tout médecin tenu, pour exercer sa pratique, de s'inscrire à l'ordre des médecins.

L'obligation de formation peut être satisfaite de trois manières, au choix du médecin : soit en participant à des actions de formation agréées, soit en se soumettant à une procédure d'évaluation des connaissances adaptée à chaque situation, réalisée par un organisme agréé, soit en présentant un dossier attestant de ses efforts en matière de formation. Elle fait l'objet d'une validation.

L'article L. 4133-2 institue deux conseils nationaux de la formation médicale continue : un pour les médecins libéraux et un pour les médecins salariés non hospitaliers.

Il précise les missions de ces conseils nationaux de la formation continue. Ils seront chargés :

- de fixer les orientations nationales de la formation médicale continue ;

- d'agréer les organismes formateurs sur la base des programmes proposés ;

- d'agréer, après avis de l'ANAES, les organismes aptes à effectuer les procédures d'évaluation ;

- d'évaluer la formation médicale continue ;

- de donner un avis au ministre en charge de la Santé sur toutes les questions concernant la formation médicale continue.

L'article L. 4133-3 détermine les règles d'organisation et de fonctionnement de ces conseils.

Le conseil national de la formation médicale continue des médecins libéraux et le conseil national de la formation continue des médecins salariés non hospitaliers sont composés de manière quadripartite. Ils comprennent notamment des représentants de l'ordre des médecins, des unités de formation et de recherche médicale, des syndicats représentatifs des catégories de médecins concernés, des organismes de formation, des personnalités qualifiées ainsi qu'un représentant du ministre chargé de la Santé avec voix consultative.

Les membres de ces conseils sont nommés par le ministre chargé de la Santé, sur proposition des organismes qui les constituent.

Est également créé un comité de coordination de la formation médicale continue composé à parts égales de représentants désignés par chacun de ces conseils nationaux de formation médicale continue mais aussi par le conseil national de formation médicale des praticiens hospitaliers des établissements de santé publics ou privés participant au service public hospitalier créé par le nouvel article L. 6155-2 du code de la santé publique prévu au II du présent article.

L'article L. 4133-4 institue, dans chaque région, des conseils régionaux de la formation médicale continue des médecins libéraux et des médecins salariés non hospitaliers.

Il définit également les missions des conseils régionaux de la formation médicale continue qui seront chargés :

- de déterminer les orientations régionales de la formation médicale continue en cohérence avec celles fixées au plan national ;

- de valider, tous les cinq ans, le respect de l'obligation de formation continue telle que définie à l'article L. 4133-1 ;

- de procéder à une conciliation en cas de manquement à cette obligation de formation continue et de saisir la chambre disciplinaire de l'ordre des médecins en cas d'échec de cette conciliation.

L'article L. 4133-5 précise l'organisation de ces conseils régionaux, qui regroupent des représentants des mêmes catégories que celles composant les conseils nationaux et qui fonctionnent selon des modalités analogues.

L'article L. 4133-6 institue un fonds national de la formation médicale continue, doté de la personnalité morale, et placé auprès du ministre chargé de la Santé.

Ce fonds reçoit des « dotations publiques » et participe au financement des conseils nationaux et régionaux et des actions de formation. Il est composé de délégués des trois conseils nationaux de formation médicale continue, et en nombre égal de représentants de l'Etat. Il est présidé par un représentant du ministre chargé de la Santé.

L'article L. 4133-7 prévoit que les employeurs publics et privés de médecins salariés sont tenus de prendre les dispositions permettant à ces médecins d'assumer leur obligation de formation.

Pour ce qui est des employeurs visés à l'article L. 950-1 du code du travail, c'est-à-dire tout employeur à l'exception de l'Etat, des collectivités locales et de leurs établissements publics à caractère administratif, les actions de formation sont financées dans le cadre des dispositions de droit commun.

Pour ce qui est des agents sous contrat de droit public ou titulaires des fonctions publiques d'Etat territoriale et hospitalière, les actions sont financées dans le cadre de la formation professionnelle selon les dispositions législatives et réglementaires en vigueur.

L'article L. 4133-8 renvoie à un décret en Conseil d'Etat le soin de fixer les modalités d'application des articles précédents, notamment la composition des conseils nationaux et des conseils régionaux de la formation médicale continue, les modalités d'organisation de la validation de l'obligation ainsi que les modalités du contrôle de l'Etat sur le fonds national de la formation médicale continue.

Le paragraphe II , qui insère de nouveaux articles L. 6155-1 à L. 6155-5 dans le code de la santé publique, procède à la même adaptation pour les praticiens des établissements de santé publics ou privés participant au service public hospitalier.

L'article L. 6155-1 pose une obligation de formation continue identique à celle des médecins non hospitaliers.

Les articles L. 6155-2 et L. 6155-3 créent des conseils nationaux et régionaux de formation continue pour ces professionnels dont les missions, l'organisation et la composition sont similaires à celles des conseils des médecins non hospitaliers.

L'article L. 6155-4 précise les conditions de financement de cette formation continue par les établissements. Leur participation ne peut être inférieure à un pourcentage de la masse salariale qui sera fixé par décret. Les établissements sont en outre autorisés à s'associer pour financer les actions de formation continue.

L'article L. 6155-5 renvoie à un décret en Conseil d'Etat le soin de fixer les modalités d'application des articles précédents.

II - Les modifications adoptées par l'Assemblée nationale

Outre trois amendements rédactionnels, l'Assemblée nationale a adopté trois amendements avec l'accord du Gouvernement.

Le premier, présenté par M. Bernard Charles, rapporteur, tend à préciser les conditions de réalisation de l'obligation de formation lorsque le médecin choisit de présenter un dossier au conseil régional. Il introduit à ce titre l'obligation d'une audition du médecin par le Conseil.

Le deuxième, présenté par M. Bernard Charles, rapporteur, et M. Jean-Michel Dubernard, autorise toute personne morale de droit public ou privé à caractère lucratif ou non (on songe notamment aux entreprises de santé) à obtenir un agrément pour leur action de formation continue.

Le troisième, présenté par MM. Bernard Charles, Jean Le Garrec et Jean-Pierre Foucher, vise à rendre applicable aux pharmaciens autres que ceux exerçant dans un établissement de santé l'obligation de formation continue. Dans ce but, il complète le présent article par un paragraphe III introduisant deux nouveaux articles L. 4236-1 et L. 4236-2 dans le code de la santé publique.

III - La position de votre commission

Votre commission ne peut qu'être favorable à l'économie générale de ce nouveau dispositif de formation médicale continue qu'elle appelait de ses voeux depuis longtemps.

Ainsi, elle observe avec satisfaction que le dispositif proposé est très proche de celui qu'elle avait souhaité inclure, au printemps dernier, dans le projet de loi de modernisation sociale à l'initiative de M. Claude Huriet, rapporteur du volet sanitaire de ce texte.

Elle se félicite également que ce dispositif, élaboré après une large concertation avec les différentes parties prenantes à la formation, reste fidèle dans ses grandes lignes à l'architecture générale du système de formation continue de l'ordonnance du 24 avril 1996, tout en y apportant, dans un souci de pragmatisme, trois améliorations de nature à assurer sa mise en oeuvre dans les meilleures conditions.

La première amélioration tient dans la plus grande souplesse de fonctionnement du dispositif, même si on peut regretter le relatif éparpillement du système entre quatre conseils nationaux distincts.

La deuxième amélioration tient au champ plus large d'application du dispositif puisqu'il dépasse les seuls médecins pour concerner également les autres praticiens hospitaliers et les pharmaciens.

La dernière amélioration consiste en la création d'un fonds national de la formation médicale continue qui constitue une condition sine qua non de bon fonctionnement du dispositif en garantissant son financement, qu'il s'agisse du financement des différents conseils ou des actions de formation.

L'étude d'impact évalue en effet le coût annuel global de fonctionnement du dispositif à environ 130 millions d'euros, soit un montant deux fois supérieur aux sources de financement actuellement existantes.

Dès lors, il importe que ce fonds national soit suffisamment abondé chaque année afin de veiller au bon fonctionnement du dispositif. Votre commission y accordera une vigilance toute particulière.

Elle constate toutefois que le présent article reste particulièrement ambigu sur les sources d'alimentation de ce fonds, se contentant d'évoquer des « dotations publiques » dont la nature exacte n'est pas précisée. Or, le financement de ce fonds, dont la mission s'inscrit dans une logique de santé publique, ne doit pas être à la charge de la sécurité sociale et exige à l'évidence des dotations budgétaires de l'Etat.

Elle observe également que le financement du nouveau dispositif de formation continue apparaît parfois flou, notamment dans son articulation avec les dispositifs actuels de financement de la formation prévus par le code du travail ou de la formation hospitalière.

Ainsi, et en particulier pour les salariés, les formations continueront à être prises en charge par les dispositifs actuels, le fonds national n'ayant visiblement vocation qu'à intervenir en complément. Dans ces conditions, il est à craindre que la mise en place du fonds ne se traduise par une révision à la baisse de l'effort de formation des établissements et des employeurs et que la coexistence de différents statuts n'entrave en partie l'objectif d'un égal accès à la formation.

En ce sens, votre commission aurait souhaité que le projet de loi précise plus en détail les conditions d'intervention du fonds afin de prévenir certaines dérives éventuelles.

Elle souligne également que l'alignement du dispositif de formation continue des pharmaciens sur celui des médecins introduit à l'Assemblée nationale apparaît quelque peu précipité et aurait, à l'évidence, nécessité une concertation préalable plus approfondie.

Le dispositif proposé apparaît en effet largement inapplicable, son organisation étant inaboutie en l'absence de structuration territoriale et son fonctionnement étant fragilisé par l'absence de toute procédure de validation des formations et de toute possibilité de conciliation.

En outre, il est à craindre que ce dispositif ne prenne que très imparfaitement en compte la spécificité de la profession de pharmacien par rapport à celle de médecin (plus de la moitié des pharmaciens sont aujourd'hui en effet des salariés) et les réflexions déjà menées par cette profession depuis le début des années 1990, notamment au travers de la commission paritaire nationale de l'emploi de la pharmacie d'officine.

Pour autant, et à ce stade de la navette parlementaire, votre commission ne peut bien évidemment que s'associer au principe de mise en place d'une telle obligation de formation continue des pharmaciens, même si ses modalités d'application seront sans doute à préciser.

Au-delà de ces observations, votre commission, tout en souscrivant aux grandes lignes du dispositif adopté à l'Assemblée nationale, vous propose d'adopter, outre quelques amendements rédactionnels, plusieurs amendements visant à améliorer le fonctionnement du dispositif.

Un premier amendement vise à préciser la portée de l'obligation de formation, en soulignant que la méconnaissance de cette obligation est passible de sanction disciplinaire, en cas d'échec de la procédure de conciliation prévue au présent article.

Une telle disposition, qui reprend d'ailleurs le texte de l'article introduit par le Sénat dans le projet de loi de modernisation sociale à l'initiative de notre collègue Claude Huriet, devrait garantir au mieux l'application de l'obligation de formation. On rappellera qu'une telle sanction est déjà prévue par la législation existante ( art. L. 4133-1 du code de la santé publique ), et apparaît conforme au code de déontologie médicale qui pose, à son article 11, une obligation de formation médicale continue.

Cinq autres amendements visent à améliorer l'information disponible sur la réalisation de l'obligation de formation continue. Ils prévoient que les quatre conseils nationaux de formation continue et les conseils régionaux publient chaque année un rapport qui est rendu public.

Là encore, ces amendements reprennent une des propositions qu'avait formulées M. Claude Huriet à l'occasion de l'examen du projet de loi de modernisation sociale, qui constitue une élémentaire exigence de transparence.

Un autre amendement tend à préciser les conditions de financement du fonds national de formation médicale continue. Il prévoit que les « dotations publiques » que recevra le fonds seront versées directement par l'Etat.

Un amendement vise à instituer des conseils régionaux de la formation continue pour les pharmaciens non hospitaliers, dans la mesure où l'Assemblée nationale a étendu l'obligation de formation continue pour cette profession. Il importe en effet d'assurer la cohérence de l'architecture du nouveau dispositif pour garantir son application.

Dans la même logique, deux amendements visent à préciser les conditions de fonctionnement du nouveau dispositif de formation pharmaceutique continue. Le premier institue un fonds national de la formation pharmaceutique continue, financé par crédits budgétaires et chargé de financer le conseil national et les conseils régionaux, mais pas les actions de formation continue. Un second amendement renvoie alors à un décret en Conseil d'Etat le soin de préciser les modalités de financement des actions de formation continue des pharmaciens. Votre commission considère néanmoins que ce fonds national, à l'image de celui des médecins, doit avoir vocation à l'avenir à participer au financement des actions de formation, même si c'est sans doute pour l'instant prématuré.

Votre commission vous propose d'adopter cet article ainsi amendé .

Art. 41
(art. L. 162-5 du code de sécurité sociale)
Abrogation de dispositions issues de l'ordonnance n° 96-345 du 24 avril 1996 relatives à la formation médicale continue

Objet : Cet article tend à abroger les dispositions du code de la sécurité sociale relatives au financement conventionnel de la formation médicale continue.

I - Le dispositif proposé

Cet article tend à abroger le 3° de l'article L. 162-5 du code de la sécurité sociale, issu de l'article 17 de l'ordonnance du 24 avril 1996.

La disposition en question prévoit que les conventions conclues entre les organismes d'assurance maladie et les médecins déterminent :

- les conditions d'indemnisation des médecins participant à des actions de formation médicale continue en application de l'article L. 4133-1 du code de la santé publique ;

- le montant de la contribution annuelle versée par les organismes d'assurance maladie au fonds d'assurance formation des médecins libéraux.

En clair, l'obligation de formation médicale continue était financée par la sécurité sociale au travers des conventions.

II - La position de votre commission

Les dispositions du code de la sécurité sociale que le présent article tend à supprimer apparaissent aujourd'hui sans objet.

D'une part, l'article 40 du présent projet de loi institue un nouveau dispositif de financement de la formation médicale continue.

D'autre part, l'article 56 de la loi du 27 juillet 1999 a légalisé la possibilité d'organiser des actions de formation distinctes de la formation médicale continue telle que prévue par le code de la santé publique, en autorisant la convention à déterminer une politique de formation professionnelle conventionnelle.

Dès lors, selon l'exposé des motifs du projet de loi, « cette disposition répond au souci de clarification consistant en la séparation des formations continues conventionnelles et de la formation continue obligatoire, conformément aux recommandations de la Cour des comptes ».

Il est vrai que la Cour des comptes a été particulièrement sévère sur les difficultés d'articulation entre formation médicale continue et formation conventionnelle, comme en témoigne cet extrait de son rapport sur la sécurité sociale de septembre 2000 :

« La Cour a montré, dans son rapport de septembre 1999 sur l'application de la loi de financement, les critiques qu'appelle la formation continue des médecins, organisée par la loi et les conventions. Un an après, ses recommandations n'ont pas été mises en oeuvre et la situation ne s'est pas clarifiée. La loi du 27 juillet 1999 a certes légalisé la possibilité pour les partenaires conventionnels d'organiser des actions de formation, indépendamment de la formation médicale continue (FMC) mise en place sur la base de l'ordonnance de 1996. Mais la coexistence de deux systèmes risque d'être complexe et de poser des problèmes d'articulation si le dispositif de FMC, toujours bloqué, venait à être relancé et si celui de formation professionnelle conventionnelle, dont les textes d'application ne sont pas sortis, était effectivement mis en place ».

Pour sa part, votre commission était également très critique sur la coexistence de ces deux systèmes légalisée par la loi du 27 juillet 1999.

Ainsi, dans son rapport sur ce texte au nom de votre commission, notre collègue Claude Huriet observait alors qu'« en instituant un second dispositif de formation médicale continue parallèle à celui prévu aux articles L. 367-2 et suivants du code de la santé publique, cet article risque de nuire à la cohérence de l'ensemble de la politique de formation dans la mesure où aucune coordination entre les deux dispositifs n'est prévue. » 18 ( * )

Dans ces conditions, votre commission ne peut qu'être favorable aux dispositions du présent article qui apportent une certaine clarification sur la place respective de la formation médicale continue et de la formation conventionnelle, tout en observant qu'il est loin de lever toutes les ambiguïtés qui subsistent.

Sous réserve de ces observations, votre commission vous propose d'adopter cet article sans modification.

Art. 42
(art. L. 11 de la loi n° 89-474 du 10 juillet 1989)
Mesure de codification

Objet : Cet article de codification est de coordination.

L'article 40 du présent projet a codifié, au nouvel article L. 6155-4 du code de la santé publique les dispositions de l'article 11 de la loi du 10 juillet 1989 sur la participation financière des établissements publics de santé à la formation médicale continue de leur personnel.

Dès lors, il convient d'abroger l'article 11 en question, abrogation que prévoit le présent article.

Votre commission vous propose d'adopter cet article sans modification.

* 18 Rapport n° 376, Tome II, 1998-1999, p. 63.

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