EXAMEN EN COMMISSION

Réunie le mercredi 29 octobre 2003, sous la présidence de M. Jean Arthuis, président, la commission des finances a procédé à l'examen du rapport de M. Claude Belot, rapporteur spécial, sur les crédits de la communication audiovisuelle pour 2004.

S'agissant des crédits de la communication audiovisuelle, M. Claude Belot, rapporteur spécial , a tout d'abord souligné qu'il avait pu constater le redressement financier de France Télévisions en l'espace de six ans, soit depuis qu'il avait été nommé rapporteur spécial des crédits de la communication. Cet assainissement résultait d'un retour à une certaine orthodoxie financière, dans le cadre notamment du respect des engagements des contrats d'objectifs et de moyens.

Il s'est félicité de l'intégration de Réseau France Outre-mer (RFO) à France Télévisions afin de développer des synergies entre les différents opérateurs et dans la perspective d'une meilleure gestion financière de RFO.

Il a regretté que certaines sociétés publiques ne bénéficient que d'une augmentation de dotations a minima dans le budget 2004, particulièrement en ce qui concernait Radio France et l'Institut national de l'audiovisuel (INA) dont la numérisation des archives devait constituer une priorité. Il a précisé que l'ensemble des archives de l'ORTF antérieures à 1976 était stocké par l'INA et qu'elles étaient menacées d'une détérioration rapide.

Il a estimé qu'un autre sujet restait traité avec ambiguïté, estimant que Radio France Internationale (RFI) jouait, certes, un rôle considérable dans la présence française internationale mais que la question de sa tutelle restait posée, du fait notamment des dotations qu'elle recevait du ministère des affaires étrangères. Il a jugé qu'il convenait d'accorder pleinement à RFI les moyens d'accomplir ses missions.

Il a ensuite présenté les projets retenus concernant la future chaîne française d'information internationale : elle serait constituée sous forme d'une société dont la moitié des parts serait détenue par TF1 et l'autre moitié par les sociétés de l'audiovisuel public, au premier rang desquelles France Télévisions. Cette coopération nécessitait une confiance réciproque entre TF1 et France Télévisions, ce dont le rapporteur spécial avait pu s'assurer auprès de leurs dirigeants.

Il a observé qu'il convenait toutefois d'associer également l'AFP, TV5, RFI, Euronews et tous ceux qui participaient à la diffusion internationale de la pensée française. Il a relevé que cet objectif serait difficile à atteindre et exigeait la conjugaison de tous les moyens que la France accordait à l'action de communication audiovisuelle extérieure. A cet égard, il a rappelé que, selon la Cour des comptes, ces sommes étaient équivalentes à celles inscrites au budget de BBC World mais qu'en France, elles étaient dispersées entre un trop grand nombre d'opérateurs. Evoquant une situation qu'il avait pu constater lui-même, il a regretté l'insuffisante implication de certains attachés audiovisuels des ambassades afin d'assurer le rayonnement de la communication audiovisuelle extérieure de la France.

Concernant la chaîne française d'information internationale, il a souligné qu'aucune dotation de crédits n'était prévue dans le projet de loi de finances pour 2004. Il a évoqué les divergences qui s'étaient fait jour à l'Assemblée nationale. En effet, une mission commune d'information avait proposé que les opérateurs publics occupent une place majoritaire au sein de la future chaîne. Or une mission parlementaire avait été confiée à M. Bernard Brochand, par ailleurs membre de la mission commune d'information, dont les propositions d'un partenariat entre les secteurs public et privé avaient été reprises par le Premier ministre. Il a noté que la mission commune d'information avait, alors, décidé de mettre fin à ses travaux.

Il a évoqué les débats tenus en séance publique à l'Assemblée nationale concernant la redevance audiovisuelle, taxe parafiscale, dont le projet de loi de finances pour 2004 prévoyait son remplacement par une « imposition de toute nature ».

Il a indiqué que la croissance attendue des recettes de l'audiovisuel public liées à la redevance était principalement fondée sur une intensification des contrôles, et notamment l'utilisation des fichiers d'abonnés aux services de télévision payants. Il a ajouté que le rejet par l'Assemblée nationale de ces dispositions, dont il était attendu un accroissement des recettes de 22 millions d'euros, posait la question des moyens pour atteindre l'objectif de recettes fixé. En effet, il a noté que l'alignement du taux de la redevance pour les télévisions noir et blanc sur le taux applicable aux télévisions couleur ne concernait que des situations résiduelles.

Afin de financer les besoins de l'INA, de RFI et de la chaîne française d'information internationale, alors même que les prévisions de recettes étaient exclusivement fondées sur la diminution d'un phénomène de fraudes dont l'étendue restait aléatoire, M. Claude Belot, rapporteur spécial , a proposé de porter le taux de la redevance pour l'année 2004 à 118 euros, soit une augmentation de 1,50 euro, alors que le gouvernement proposait de maintenir inchangé ce niveau à 116,50 euros, comme en 2002 et en 2003. Il a estimé que cette augmentation des recettes permettrait de traiter « sérieusement » la question des moyens de l'audiovisuel public, soulignant que le rapporteur pour avis de la communication audiovisuelle au nom de la commission affaires culturelles, M. Louis de Broissia, partageait son analyse. En outre, il a rappelé que la redevance était de l'ordre de 190 euros en Allemagne et qu'elle dépassait ce niveau en Grande-Bretagne.

Tout en rappelant qu'il avait pu constater l'efficacité du service de la redevance lors d'un contrôle sur pièces et sur place au siège du service central en 2002, il a observé que la croissance naturelle de la redevance depuis 1996 provenait d'une initiative prise par le Sénat consistant à opérer un croisement avec les fichiers de la taxe d'habitation, mais que cette dynamique s'essoufflait, évoquant à ce titre les moyens utilisés par d'aucuns pour justifier de l'absence de cotisations de redevance pour la plupart des résidences secondaires.

Un large débat s'est alors instauré.

M. Jean-Pierre Demerliat a déclaré partager le point de vue du rapporteur spécial en ce qui concerne les besoins réels de la chaîne française d'information internationale. Il a cependant regretté que les opérateurs publics ne soient pas majoritaires, ce qu'aurait notamment permis une association entre RFI, RFO et France Télévisions. Il a ajouté que la « voix de la France » ne devait pas être, selon lui, celle des intérêts privés. Il a précisé d'autant plus regretter le choix retenu qu'il excluait ceux qui avaient, selon lui, une « vraie connaissance » de cette question, à savoir TV5 et RFI.

M. Claude Belot, rapporteur spécial , a relevé que TF1 disposait de moyens plus importants que France Télévisions dans le domaine international et qu'il convenait de prendre en compte l'existant afin de tenir compte du dynamisme des investissements des opérateurs privés.

M. Jean-Philippe Lachenaud a évoqué le cas d'un projet de télévision locale en Ile-de-France pour relever les propositions qui étaient faites afin d'améliorer la viabilité financière des télévisions locales, notamment par la création d'un fonds de soutien aux chaînes associatives et des possibilités étendues de financement par les collectivités locales.

M. Claude Belot, rapporteur spécial , a observé qu'il s'agissait là encore de propositions qui figuraient dans le rapport complémentaire de M. Michel Boyon remis en février 2003 sur la télévision numérique terrestre et qu'il convenait d'associer, dans la mise en place des télévisions locales, tous ceux qui pouvaient être intéressés par ces projets.

M. Jacques Oudin a souligné qu'il avait pu constater, lors de ses déplacements à l'étranger, l'attente d'une chaîne française d'intervention internationale, alors que la France ne disposait actuellement que des créneaux limités de TV5. Il a indiqué que cette préoccupation devait d'autant plus être portée par le Sénat qu'il représentait les Français de l'étranger. Concernant la redevance, il a rappelé qu'il était un « partisan de longue date » de la modification du système de perception et préconisait donc son intégration systématique à la taxe d'habitation. Il a précisé que, selon lui, les services du ministère de l'économie et des finances semblaient montrer une forte hostilité, en raison des champs différents d'exonération à la redevance et à la taxe d'habitation, mais que cette proposition serait emblématique d'une réforme fiscale de plus large envergure.

M. Claude Belot, rapporteur spécial , a indiqué partager les observations ainsi faites concernant la chaîne française d'information internationale. Il s'est déclaré plus circonspect concernant l'adossement de la redevance à la taxe d'habitation dans le souci d'éviter une confusion des deux impositions, dès lors qu'existaient de très nombreux dégrèvements qu'il ne fallait pas démultiplier et que la redevance audiovisuelle était la contrepartie d'une prestation de service public. Il a précisé que les services de la redevance employaient 1.430 agents.

M. Jean Arthuis, président , a fait état des difficultés liées à certaines formes de corporatisme, au sein du secteur de la communication. Il a observé que l'adossement de la redevance à la taxe d'habitation soulevait des problèmes techniques qui en entravaient la mise en oeuvre, à l'instar de la mise en place d'une retenue à la source de l'impôt sur le revenu dont il a rappelé qu'elle constituait, de son point de vue, une « fausse-bonne solution ».

Il s'est interrogé quant à la porté du récent avis de la commission nationale de l'informatique et des libertés (CNIL) concernant l'utilisation des fichiers de services de télévisions payantes, estimant qu'il y voyait un risque de voir les fraudeurs « encouragés ».

M. Aymeri de Montesquiou a souhaité que le rapporteur spécial dissipe les rumeurs persistantes quant au coût de la collecte, lequel serait selon certains supérieurs au produit de la redevance, tout en déplorant que l'avis de la CNIL puisse permettre que 2 millions de fraudeurs soient « impunis ».

Il s'est par ailleurs interrogé quant à de possibles divergences d'intérêts entre les différentes entités appelées à participer à la constitution de la chaîne d'information internationale.

M. Claude Belot, rapporteur spécial , a précisé que les frais de gestion de la redevance audiovisuelle, dont le produit s'élevait à 2,2 milliards d'euros (non compris 0,4 milliard d'euros d'exonérations remboursées par l'Etat), ne représentaient que 3,3 % des sommes collectées.

Concernant l'association de TF1 et de France Télévisions à la mise en place de la chaîne d'information internationale, il a observé que ce projet traduisait une implication du Chef de l'Etat et que la solution retenue reflétait le souci de TF1 de ne pas être minoritaire dans le capital de la future chaîne, même si France Télévisions apparaissait comme la plus soucieuse de participer à ce projet.

Il a estimé que la « désinformation » à laquelle s'était livrée CNN notamment lors de la couverture du conflit irakien rendait particulièrement nécessaire que « la voix de la France » puisse se faire entendre, et cela au moment même où l'opinion publique américaine commençait à « découvrir la vérité » et souhaitait, à ce titre, disposer d'autres sources d'information.

M. Adrien Gouteyron a salué l'initiative du rapporteur spécial visant, selon lui, à augmenter la redevance dans des proportions qui restaient modestes, car il fallait, selon lui, rappeler que la télévision publique avait un coût. Il a souhaité par ailleurs disposer de précisions sur la mise en place de la télévision numérique terrestre (TNT) ainsi que sur les incertitudes tenant à son mode de financement.

M. Claude Belot, rapporteur spécial , a fait part de ses interrogations concernant l'opportunité du développement de la TNT, alors que les Etats-Unis avaient fait le choix du développement des chaînes satellitaires et que l'essor du câble permettrait, à court terme, un accès aux chaînes du monde entier grâce au réseau Internet à haut débit. Il a par ailleurs fait état de l'échec de la TNT en Grande-Bretagne et en Espagne.

Evoquant le rapport de M. Michel Boyon sur ce sujet, il a ajouté que la TNT permettrait d'élargir fortement l'offre télévisuelle à partir de 2004 et de 2005 mais que les zones à forte concentration urbaine seraient les premières desservies. Il a noté que France Télévisions était particulièrement demandeur, alors que le développement de la TNT induirait un « tassement » de l'audience des principales chaînes et que cette évolution affecterait donc leur part de marché publicitaire.

M. Yves Fréville a déclaré approuver le rapporteur spécial lorsqu'il préconisait une hausse limitée de la redevance. Il a exprimé ses réticences quant à un adossement à la taxe d'habitation si les deux impositions devaient figurer sur le même avis, alors qu'un tiers des foyers bénéficiaient d'exonération ou de dégrèvement de la taxe d'habitation. Aussi a-t-il souhaité disposer de précisions quant à l'utilisation du fichier de la taxe d'habitation.

M. Claude Belot, rapporteur spécial , a souligné que le fichier de la taxe d'habitation avait déjà été fortement sollicité pour identifier les redevables potentiels et élargir le champ de l'imposition. Il a proposé « d'inverser la charge de la preuve » en optant pour l'envoi d'avis d'imposition à tous les redevables potentiels à la redevance, lesquels devraient, ensuite, prouver ne pas disposer d'un poste de réception ou bénéficier des conditions d'exonération.

M. Yves Fréville a ajouté que le taux d'évasion fiscale atteignait près de 30 % pour les seules résidences principales dans certaines communes, si l'on comparait les fichiers des redevables à la taxe d'habitation et ceux de la redevance.

M. Jean Arthuis, président , a souligné que la fixation du taux de la redevance relevait désormais de la compétence du législateur et que ces dispositions seraient abordées lors de l'examen de l'article 20 du projet de loi de finances pour 2004, dont la présentation en commission serait faite par le rapporteur général le mercredi 12 novembre au matin.

Il s'est déclaré pour sa part insatisfait de la gestion du service public de l'audiovisuel, et en particulier de France 3, en raison notamment de la désorganisation que la mise en place des mesures d'aménagement et de réduction du temps de travail y avait suscitée. Il a exprimé son scepticisme quant à une augmentation continue de la redevance pour financer des sociétés « incapables de se réformer ».

Il a dit partager le point de vue de ses collègues sur la nécessité d'une prise de conscience de l'importance des enjeux qu'impliquait la constitution de la chaîne française d'information internationale. Il s'est inquiété de la complexité que pourrait présenter l'association d'opérateurs publics et privés dans ce domaine.

M. Claude Belot, rapporteur spécial , a relevé que le projet de chaîne française d'information internationale avait marqué une « vraie avancée » au cours des douze derniers mois et estimé qu'il serait logique que le Sénat soit associé aux travaux menés en ce domaine par l'Assemblée nationale.

Il a souligné que l'augmentation proposée de la redevance devait, selon lui, bénéficier non à France Télévisions, mais à la numérisation des archives de l'INA, à une augmentation de la dotation de RFI en 2004 dans les mêmes proportions que les autres sociétés de l'audiovisuel public et à la prise en compte du besoin de financement de la chaîne française d'information internationale.

Il a observé qu'une augmentation de 1,5 euro de la redevance audiovisuelle permettrait de dégager 30 millions d'euros de crédits supplémentaires pour ces différents projets.

M. Jean Arthuis, président , a indiqué avoir interrogé le directeur général de France 2 quant aux raisons ayant présidé au choix de Vilnius pour le tournage du téléfilm « Colette » et précisé que la réponse qui lui avait été adressée, faisant état de l'adaptation du cadre de Vilnius à celui de l'époque du film et des gains escomptés en termes de coûts de production, reflétait, effectivement, les inquiétudes qui étaient celles du ministre de la culture et de la communication quant au risque de délocalisation de la production cinématographique française. A ce titre, il a estimé que la question de l'utilisation des ressources publiques se posait avec une acuité certaine.

Après que la commission eût, à l'unanimité, manifesté son souhait de proposer au Sénat d'adopter les crédits de la communication audiovisuelle, elle a décidé de réserver sa position jusqu'à l'examen des crédits des services généraux du premier ministre .

A l'issue de leur adoption, la commission, sous la présidence de M. Jean Arthuis, président , a décidé de proposer au Sénat l'adoption des crédits de la communication audiovisuelle pour 2004 .

Elle a confirmé cette position lors de sa réunion du jeudi 20 novembre 2003, après avoir pris acte des modifications apportées par l'Assemblée nationale et elle a adopté l'article 59 bis rattaché.

Réunie le mercredi 29 octobre 2003 , sous la présidence de M. Jean Arthuis, président, la commission des finances a procédé à l' examen du rapport de M. Claude Belot, rapporteur spécial, sur les crédits de la communication audiovisuelle pour 2004 .

A l'occasion de l'adoption d'ensemble des crédits des services généraux du Premier ministre, la commission a décidé de proposer au Sénat l'adoption des crédits de la communication audiovisuelle pour 2004 .

Elle a confirmé cette position lors de sa réunion du jeudi 20 novembre 2003, après avoir pris acte des modifications apportées par l'Assemblée nationale et elle a adopté l'article 59 bis rattaché.

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