3. Les comptes spéciaux du Trésor

Les comptes spéciaux du Trésor ont connu en 2003 un solde négatif de 200 millions d'euros. Au titre des opérations à caractère définitif, le solde est négatif de 400 millions d'euros. Au titre des opérations à caractère temporaire, le solde est positif de 200 millions d'euros.

Les opérations à caractère définitif, qui concernent pour 39 %, le compte 902-24 d'affectation des produits de cessions de titres, parts et droits de sociétés, se sont élevées en 2003 à 6,2 milliards d'euros en recettes et à 6,2 milliards d'euros en dépenses. Au titre du compte 902-24, dit compte de « privatisations », les recettes se sont élevées en 2003 à 2,5 milliards d'euros, issues de cession de parts de capital détenues par l'Etat dans diverses entreprises 15 ( * ) et les dépenses, qui correspondent pour l'essentiel à des dotations en capital aux entreprises publiques, à 2,8 milliards d'euros.

En ce qui concerne les opérations à titre temporaire, il convient de mentionner, en 2003, comme les années précédentes, un excédent sur le compte d'avance aux collectivités territoriales, de 0,7 milliard d'euros. Seulement 0,3 milliard d'euros avait été prévu en loi de finances rectificative du 30 décembre 2003. Parmi les autres opérations enregistrées sur les comptes d'avances figure également en 2003 un versement de 5,3 milliards d'euros au titre du refinancement de France Telecom.

Enfin, en ce qui concerne les comptes de commerce, il convient d'évoquer l'excédent de 0,2 milliard d'euros du compte « gestion active de la dette et de la trésorerie de l'Etat ».

Traitement comptable des dotations en capital

Réponse de la Cour des comptes à la question posée par votre commission des finances

Les constatations de la Cour se rapportent au retraitement des dotations en capital financées sur le compte d'affectation spéciale 902-24 « compte d'affectation des produits de cession de titres, parts et droits de sociétés » et, en aucune manière, au traitement des dotations en capital en comptabilité générale qui sont toujours immobilisées mais dont la valorisation varie en fonction de l'existence ou non d'un contrôle exercé par l'Etat.

Le compte 902-24 supporte des opérations qui constituent soit des dotations en capital, soit des transferts en capital.

En comptabilité budgétaire, les dotations en capital versées par l'Etat sont des dépenses budgétaires et pèsent donc sur le résultat d'exécution des lois de finances, alors que les recettes de privatisation ou de cession de participations améliorent ce résultat et viennent réduire les besoins d'emprunt additionnels de l'Etat liés au déficit d'exécution budgétaire.

Il en va différemment en comptabilité nationale où les dotations en capital et les recettes de privatisation ou de cession de participations sont neutralisées.

De manière plus précise, aux termes du système européen de comptes (SEC 95) qui constitue, avec les décisions interprétatives prises par Eurostat, le corps de règles applicables pour la notification à la Commission européenne du déficit et de la dette des administrations publiques, les dotations en capital sont déduites du solde d'exécution budgétaire pour calculer le résultat notifié à Bruxelles, dès lors qu'elles ont pour contrepartie un accroissement de même montant de la participation financière détenue par l'Etat. En vertu du même raisonnement, les recettes de privatisation ou de cession de participations sont neutralisées dans le résultat notifié, alors qu'elles ont amélioré le solde d'exécution budgétaire sous forme de recettes non fiscales.

En revanche, les transferts en capital sont des dépenses effectuées à fonds perdus, qui pèsent sur le résultat notifié comme sur le résultat d'exécution des lois de finances.

La Commission européenne s'est montrée très vigilante sur les retraitements des opérations du compte d'affectation spéciale 902-24 « compte d'affectation des produits de cession de titres, parts et droits de sociétés ».

Dès 1997, elle a considéré que les dotations à l'établissement public de financement de la défaisance du Crédit Lyonnais ne pouvaient venir en déduction du résultat notifié. De même, le versement de 1,8 Md€ fait par l'Etat à l'EPFR en 2002 est venu dégrader le résultat notifié, car il a été considéré comme un transfert.

En mars 2003, elle a demandé que soient reclassées en transferts en capital ayant un impact sur le résultat notifié de l'année 2002 et des années antérieures les dotations en capital faites à Réseau ferré de France (RFF), établissement public à caractère industriel et commercial, et à GIAT-Industries, société anonyme, tous deux appartenant pourtant au secteur marchand. Le caractère répétitif des dotations en capital montrait qu'il s'agissait d'investissements à fonds perdus.

A cause des versements à RFF, le déficit des administrations publiques a donc été aggravé de 1 362 M€ en 2002 (respectivement 762,5 M€ en avril et 600 M€ en période complémentaire). Les dotations à GIAT-Industries ont, pour leur part, conduit à majorer le déficit de 305 M€ en 2001 et de 286,6 M€ en 2003.

C'est pour une autre raison que les dotations en capital aux Charbonnages de France ont aggravé le résultat notifié. Tant que cette entreprise publique a été considérée comme appartenant au secteur marchand, les dotations que lui versait l'Etat étaient soustraites du solde d'exécution budgétaire pour calculer le résultat notifié, et la dette de l'entreprise n'était pas incluse dans la dette des administrations publiques. Mais lors de la notification du résultat 2002 en mars 2003, l'INSEE a constaté que la société holding des Charbonnages de France et les Houillères de bassin ne pouvaient plus appartenir au secteur marchand et devaient être reclassées en ODAC de manière rétroactive à compter de 2001, car le produit des ventes du groupe représentait désormais moins de 50 % de ses coûts de production. La dette publique s'est trouvée ainsi accrue de 5,3 Md€ en 2001 et de 5,0 Md€ en 2002, et le déficit des administrations publiques a été aggravé de 700 M€ en 2001 et de 300 M€ en 2002. En 2003, les deux dotations en capital versées par l'Etat ont aggravé le déficit des administrations publiques de 1 408 M€, tandis que la dette de Charbonnages de France était portée de 5,0 Md€ à 5,8 Md€.

La Cour a constaté que d'autres dotations du compte 902-24 avaient été assimilées à tort à des dotations en capital, alors qu'elles constituaient des transferts en capital.

Dans le rapport sur les résultats et la gestion, elle a mentionné le fonds pour l'équipement informatique des établissements scolaires. Il convient de rappeler à cet égard que l'Etat a versé en 1998, à partir du compte 902.24, une avance sans intérêt de 38,1 M€ afin de doter ce fonds dont la gestion a été confiée à la Caisse des dépôts et consignations. A l'origine, cet apport a été traité comme une opération financière. Le solde à rembourser s'élevait au 31 décembre 2003 à 29,8 M€. Cette avance sans intérêt, qui aurait dû dès l'origine être financée sur des crédits du budget général, ne pouvait être traitée en comptabilité nationale comme une dotation en capital dont l'Etat était susceptible d'attendre un retour sur investissement.

Les autres dotations du compte 902-24 qui auraient dû être traitées comme des transferts en capital compte tenu des perspectives très réduites de retour sur investissement concernent les différents fonds de capital-risque que la Caisse des dépôts et consignations gère pour le compte de l'Etat 16 ( * ) ainsi qu'une avance d'actionnaires de 4,8 M€ à GIAT-Industries par cohérence avec le traitement des dotations en capital versées à cette société.

La Cour recommande donc qu'à défaut de réserver les crédits du compte 902-24 aux dotations en capital qui ont un retour sur investissement apprécié de manière prudente, la présentation du compte en exécution budgétaire distingue les opérations qui sont assimilables au sens du SEC 95 à de véritables dotations en capital et celles qui sont de simples transferts en capital.

* 15 Cession pour 1,3 milliard d'euros d'actions détenues dans Renault et pour 0,6 milliard d'euros de titres Dassault Système.

* 16 Cela concerne le fonds public pour le capital-risque, le fonds de promotion pour le capital-risque 2000 et le fonds de co-investissement pour les jeunes entreprises.

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