2. La difficulté d'évaluer les performances économiques et financières de la mission « Défense »

Les objectifs qui sont assignés aux armées sont basés sur les contrats opérationnels définis par le modèle d'armée 2015 et déclinés dans la LPM. Leur réalisation repose sur une politique de moyens et de capacités 18 ( * ) , la LPM décline d'ailleurs de manière très précise la liste des programmes d'armement majeurs, le nombre de personnels militaires et civils, et les montants de crédits nécessaires à sa réalisation. L'évaluation d'une performance militaire en termes financiers et économiques vient donc en complément de la LPM.

Vos rapporteurs spéciaux considèrent donc que l'évaluation de la performance des armées présente une double dimension, l'une de nature économique et financière voulue par la LOLF, l'autre de nature plus militaire. Sans référence à des indicateurs d'activité, d'un type plus « militaro militaire », il est difficile de lire les objectifs et indicateurs de performance qui sont retenus dans le projet annuel de performance.

Par exemple, le taux de disponibilité technique opérationnelle (DTO) des équipements des armées, fixé à 80 %, a-t-il un sens en tant que tel ? Cet objectif a été fixé dans l'immédiat après guerre froide, sans référence possible. Est-il raisonnable, d'un point de vue militaire et d'un point de vue financier ? Permet-il de mesurer la performance des armées ? Vos rapporteurs spéciaux estiment que, pour prendre tout son sens, cet objectif devrait être mis en regard de données d'activité telles que :

- l'obsolescence des parcs ;

- le coût de l'entretien des matériels neufs très sophistiqués ;

- la disponibilité de près de 100 % des équipements utilisés en OPEX ;

- la sur-utilisation des matériels en raison de l'accroissement des interventions extérieures et de l'allongement de leur durée ;

- mais aussi la capacité des armées et du tissu industriel à restaurer une disponibilité technique opérationnelle satisfaisante en un laps de temps très réduit en cas d'accroissement des risques ;

- et enfin, la consommation annuelle de « points de DTO ». Un matériel non utilisé peut avoir une disponibilité technique excellente sans que cela soit signe de performance. A l'inverse, un matériel sur-utilisé, remis en état de fonctionnement à de multiples reprises en cours d'année et dont la disponibilité technique annuelle moyenne serait inférieure à l'objectif visé ne serait pas signe de contre performance.

D'une manière générale, vos rapporteurs spéciaux constatent qu'il serait dangereux d'évaluer l'efficacité de l'armée en se limitant aux seuls critères de la LOLF. La construction de la Ligne Maginot aurait sans doute été jugée performante, en termes d'efficacité financière, de respect des délais, etc. Son utilité finale s'est révélée faible !

Vos rapporteurs spéciaux sont parfaitement conscients des grandes difficultés que soulève la comparaison de « coûts » économiques et financiers à des « avantages » évalués en termes d'efficacité militaire et non seulement de respect de normes administratives intermédiaires, en l'absence heureuse de conflits. Un tel type d'analyse « cost-benefit » devrait cependant être progressivement expérimenté pour que la LOLF prenne tout son sens au sein de la mission « Défense ».

Sous ces réserves, vos rapporteurs spéciaux considèrent que le ministère de la défense s'est engagé avec détermination dans une politique de mesure de la performance, en particulier dans le domaine du maintien en condition opérationnelle ( cf. analyse du programme « Préparation et emploi des forces » ).

* 18 Cf. annexe 1.

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