CONCLUSION

Vos rapporteurs spéciaux souhaitent, en fin de législature, et à un an du terme de la présente LPM, restituer l'effort accompli dans un double référentiel spatial et temporel et évoquer l'évolution nécessaire des méthodes de budgétisation.

I. LE BUDGET DE LA DÉFENSE FRANÇAIS : CADRAGE SPATIAL ET TEMPOREL

A. L'EFFORT FRANÇAIS EN FAVEUR DE LA DÉFENSE DANS LE CONTEXTE INTERNATIONAL

La France consacre 1,70 % son PIB à ses dépenses militaires (hors gendarmerie).

Cet effort est comparé à celui d'autres grands pays sur le graphique ci-dessous, en valeur absolue (échelle de gauche) et en pourcentage du PIB (échelle de droite).

On constate tout d'abord une énorme disparité d'effort entre les Etats-Unis et l'ensemble consolidé des pays de l'Union Européenne, pourtant une fois et demie plus peuplée. Un certain nombre de grands pays émergents, tels l'Inde et la Chine font un effort de défense supérieur à celui de l'Union Européenne. Le Japon a désormais une flotte d'un tonnage équivalent à celui de la France (mais non nucléarisée). Au sein de l'Union européenne, seul le Royaume-Uni fait un effort supérieur à celui de la France (notamment en fonctionnement).

Cette situation est le fruit d'une évolution récente.

De 1996 à 2001 , les dépenses françaises de défense ont diminué alors que sur la même période, la régression des dépenses de défense du Royaume-Uni était moins importante que celle de la France.

A partir de 2002 , les dépenses françaises ont repris, de façon plus soutenue que les anglaises.

Les dépenses du Royaume-Uni restent supérieures à celles de la France sur la période, mais l'écart se resserre car, tandis que les britanniques n'augmentaient leurs dépenses de défense que de 0,4 %, entre 1996 et 2005, celles de la France progressaient de 1,5 %.

Les dépenses de l'Allemagne ne font en revanche apparaître aucune reprise depuis 1998, son budget de défense ayant diminué globalement de 2,9 % entre 1996 et 2005.

En revanche, l'écart entre les dépenses des grands pays européens et celles des Etats-Unis se creuse. Les Etats-Unis ont augmenté leurs dépenses militaires de 45 % sur la période, avec une très forte accélération, + 38,9 % depuis 2000 .

De son côté, la Russie a augmenté ses dépenses militaires de 20 à 25 % en 2006.

B. LES DÉPENSES D'INVESTISSEMENT DE LA DÉFENSE SONT DÉSORMAIS STABILISÉES

Les changements de périmètre intervenus en 2006 lors de l'entrée en vigueur de la réforme budgétaire expliquent la rupture brutale des courbes retraçant l'évolution des crédits et dépenses de fonctionnement et d'investissement militaires présentés dans les graphiques suivants. Ces graphiques sont établis en millions d'euros constants 2005 .

Trois faits majeurs sont à retenir :

D'abord, les dépenses d'investissement des anciens titres V et VI se sont écroulées de plus d'un tiers (de 19 milliards à 13 milliards) au cours des années 90, avant d'être stabilisées en exécution entre 2000 et 2003. La reprise menée dans le cadre de la présente LPM à partir de 2004 est très loin d'avoir compensé les « coupes » et surtout l'allongement des délais de réalisation des années antérieures. En réalité, les dépenses d'équipements neufs du nouveau titre 5 (version LOLF) sont stabilisées à un niveau proche de 10 milliards d'euros constants.

En deuxième lieu, les dépenses de personnel sont passées d'un peu plus de 20 milliards d'euros en 1991 à près de 25 milliards d'euros en 2005 (en euros constants), en raison de l'effort consenti pour mener à bien la professionnalisation des armées.

Enfin, la professionnalisation des armées a conduit le ministère de la défense à réaliser des arbitrages au détriment des dépenses de fonctionnement matériel, dans un contexte budgétaire qui lui était particulièrement défavorable . Les crédits de fonctionnement, en particulier d'entretien programmé du matériel ont très nettement diminué dans la décennie 90 . Ils sont passés de 5,544 milliards d'euros constants en 1991 à 4,073 milliards d'euros en 2001, soit une diminution de 26,5 %. A partir de 2002, les dépenses d'entretien de matériel comprises dans les dépenses de fonctionnement militaire ont fait l'objet d'un effort soutenu : elles ont alors augmenté de 4,4 % pour s'établir à 4,254 milliards d'euros en 2006.

La LPM en cours d'exécution a permis de stabiliser un niveau de dépenses en capital, en titre 5 et de dépenses d'entretien programmé du matériel permettant aux forces armées de remplir leur contrat opérationnel. La gestion de ces crédits se fait toutefois en flux tendus, et le passage de commande de certains matériels est parfois décalé par rapport aux prévisions initiales.

II. UN SYSTÈME PLUS ÉVOLUTIF DE PLANIFICATION, PROGRAMMATION ET BUDGÉTISATION (PPBS)

Les grandes options de la prochaine LPM, en particulier le niveau de la dépense globale en terme de PIB dépendant à l'évidence des choix résultant des prochaines échéances électorales, vos rapporteurs spéciaux se borneront à présenter quelques remarques sur le cadre dans lequel elles devront s'inscrire.

S'agissant de la planification , celle-ci doit définir une approche capacitaire des forces à long terme et la définition d'objectifs cohérentes avec l'évolution des risques. C'est ce qui a été fait avec le livre blanc de 1994 et la définition du modèle « Armées 2015 ». Le problème est qu'il n'a pas été défini de procédure claire permettant de faire évoluer ce modèle d'armée, forgé dans un contexte situé immédiatement après la fin de la guerre froide, alors qu'émergeaient de nouvelles menaces et se développait l'instabilité stratégique induite par la chute du mur, la montée de nouvelles puissances, le développement du terrorisme, l'indispensable sécurisation du commerce maritime, etc.

Certes ce modèle fait l'objet de mises à jour régulières par le Conseil de défense ; mais il conviendrait que le Parlement en soit informé et puisse le cas échéant en débattre lorsque des inflexions importantes s'avèrent nécessaires dans l'évolution relative des forces de projection, de dissuasion etc. Il n'est pas possible de faire l'économie de ces questionnements capacitaires, qui détermineront la place de l'armée française dans un contexte d'interdépendances accrues.

La programmation à 6 ans qui sera mise en place par la prochaine LPM devra prévoir le financement des engagements fermes déjà pris, soit, à ce jour, 35 milliards d'euros après 2007, la poursuite des tranches suivantes des programmes mis en route et l'ouverture d'autorisations d'engagement suffisantes pour faire face aux nouveaux défis stratégiques que sont la communication et l'espace notamment.

La programmation est ajustée par la variation annuelle du référentiel (VAR) définie par le Conseil de défense, cette programmation « glissante » pourrait être prévue dans la LPM initiale. Il pourrait être envisagé de définir une programmation ferme sur les trois premières années de la période considérée pour donner notamment une visibilité suffisante à l'industrie, puis une programmation plus souple sur les trois dernières années, sur le modèle britannique.

Enfin, dans la mesure où la présente LPM a été très strictement respectée, il convient de redéfinir son lien avec la budgétisation . Programmer ne varietur le montant de chaque annualité budgétaire réduit les marges de manoeuvres économiques dont pourrait disposer le gouvernement. Si un engagement ferme est pris sur le contenu de la programmation, il devrait être loisible de modifier les annuités afin de prendre en compte le cycle économique, les avancées des programmes d'armement, la montée en puissance d'un industriel donné, etc.

La budgétisation (compatible avec un financement sur emprunt des dépenses d'équipement dans le respect de la « règle d'or » préconisé par votre commission des finances) permet de donner une certaine souplesse à la réalisation de la LPM, le seul impératif est de prohiber l'allongement de programmes en cours d'exécution, qui est source d'intérêts intercalaires, de surcoûts importants, et de défiance future des industriels et d'éventuels partenaires européens si le programme a donné lieu à une coopération

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