CHAPITRE PREMIER BIS - DISPOSITIONS RELATIVES À L'INJONCTION DE SOINS ET À LA SURVEILLANCE JUDICIAIRE

Article 5 ter (art. 706-47-1, 706-53-19, 712-21, 717-1, 721, 721-1, 723-29, 723-31-1 nouveau, 723-32, 723-35, 723-38, 729, 732-1 et 723-38-1 nouveaux, 733, 763-5, 763-6, 763-7, 763-8, 786 du code de procédure ; art. L. 3711-1 et L. 3711-3 du code de santé publique ; art. 132-45-1 du code pénal) - Renforcement de l'efficacité de l'injonction de soins et des dispositifs de contrôle après la peine

Cet article introduit dans le projet de loi par l'Assemblée nationale à l'initiative de sa commission des lois vise, d'une part, à renforcer l'efficacité de l'injonction de soins et, d'autre part, à étendre les possibilités de contrôle, à l'issue de leur libération, des personnes condamnées présentant encore une forte dangerosité.

A cette fin, le présent article qui introduit trois nouveaux articles dans le code de procédure pénale, ne modifie pas moins de dix-sept articles du même code, deux articles du code de la santé publique et un article du code pénal.

1. L'injonction de soins

Une clarification des dispositions en vigueur

L'injonction de soins a d'abord été instituée dans le cadre du suivi socio-judiciaire institué par la loi du 17 juin 1998 relative à la prévention et à la répression des infractions sexuelles et à la protection des mineurs. Par la suite, elle a été prévue par la loi du 10 août 2007 renforçant la lutte contre la récidive dans le cadre du sursis avec mise à l'épreuve , sauf décision contraire de la juridiction de jugement (article 132-45-1 du code pénal), dans celui de la surveillance judiciaire (article 723-30 du code de procédure pénale) et d'une libération conditionnelle (article 731-1 du code de procédure pénale), sauf décision contraire de la juridiction de l'application des peines. Conformément aux principes initiaux posés par le législateur, l'injonction de soins n'est possible que si la personne a commis une infraction pour laquelle le suivi socio-judiciaire est encouru et si une expertise atteste que l'intéressé est accessible aux soins.

Le 1° du I du présent article se borne pour l'essentiel à tirer les conséquences de cet élargissement du champ d'application de l'injonction de soins en proposant une rédaction de l'article 706-47-1 du code de procédure pénale qui rappelle d'abord les différentes hypothèses dans lesquelles une injonction de soins peut être appliquée, ainsi que la possibilité pour le médecin traitant de mettre en place un traitement utilisant les médicaments entraînant une diminution de la libido et, enfin, le principe d'une expertise médicale avant tout jugement au fond pour les auteurs des infractions mentionnées à l'article 706-47 du code de procédure pénale (l'expert étant interrogé sur l'opportunité d'une injonction de soins).

En revanche, l'Assemblée nationale, reprenant une proposition de M. Etienne Blanc, a supprimé la possibilité, ouverte par la loi du 10 août 2007, de prononcer une injonction de soins dans le cadre d'un sursis avec mise à l'épreuve afin de « mettre fin à la confusion qui règne entre obligation de soins et injonction de soins » 32 ( * ) .

Le projet de loi précise que l'expert intervenant en présentenciel peut être interrogé sur l'opportunité d'un traitement inhibiteur de libido.

Les médecins interrogés sur ce point par votre rapporteur ont observé qu'il était certainement prématuré à ce stade de la procédure d'envisager un mode de traitement qui ne pouvait être mis en oeuvre de manière pertinente qu'à la fin de la détention et, qu'en tout état de cause, le médecin traitant ne tiendrait pas compte de telles indications.

Votre commission a adopté deux amendements de son rapporteur tendant, d'une part, à supprimer cette précision et, d'autre part, à marquer sans ambiguïté que le choix du traitement antihormonal relève exclusivement du médecin traitant .

Par ailleurs, le 4° du I de cet article précise qu'un traitement permettant une diminution de la libido peut être proposé au condamné détenu par le médecin traitant.

Le renforcement des sanctions en cas de refus d'un traitement antihormonal

Le projet de loi prévoit explicitement que le refus d'un traitement antihormonal constitue un manquement aux obligations du condamné. Il en décline les conséquences dans plusieurs dispositions du code de procédure pénale. Il ne fait qu'attacher à ce refus les mêmes conséquences que celles actuellement définies par le régime applicable à l'injonction de soins.

Lorsque la personne est encore détenue , l'article 721 du code de procédure pénale prévoit que le juge de l'application des peines peut ordonner le retrait des crédits de réduction de peine 33 ( * ) « lorsque la personne a été condamnée pour les crimes ou délits, commis sur les mineurs, de meurtre ou assassinat, tortures ou actes de barbarie, viol, agression sexuelle ou atteinte sexuelle et qu'elle refuse, pendant son incarcération, de suivre le traitement qui lui est proposé par le juge de l'application des peines, sur avis médical ». Le 5° du I du présent article précise simplement que ce retrait peut en particulier être ordonné si l'intéressé refuse de commencer ou de poursuivre un traitement inhibiteur de libido alors que ce traitement lui a été proposé. Par parallélisme, des dispositions identiques sont prévues s'agissant des réductions de peine supplémentaires (6° du I).

Comme l'ont remarqué plusieurs des médecins rencontrés par votre rapporteur, un traitement antihormonal commencé en détention ne présente pas d'intérêt et peut même produire des effets secondaires qui rendent plus délicate la mise en oeuvre du traitement à la libération du condamné, c'est-à-dire au moment où il serait le plus utile. Votre commission a adopté un amendement de son rapporteur tendant à supprimer ces deux dispositions.

Il est évidemment utile que le médecin puisse prescrire dans les mois précédant la libération un inhibiteur de libido et qu'il existe, par ailleurs, une forte incitation pour le faire accepter par la personne condamnée -sous la forme d'un retrait de réduction de peine. Les dispositions actuelles du code de procédure pénale le permettent sans équivoque.

Lorsque la personne est en milieu ouvert , le refus d'un traitement inhibiteur de libido constitue un manquement aux obligations du condamné, susceptible d'entraîner, selon les cas, la délivrance par le juge de l'application des peines d'un mandat d'amener ou d'un mandat d'arrêt (article 712-17 du code de procédure pénale), la suspension de la mesure d'aménagement de peine (article 712-18 du code de procédure pénale), l' incarcération provisoire si le condamné fait l'objet d'un sursis avec mise à l'épreuve, d'un suivi socio-judiciaire ou d'une libération conditionnelle (article 712-19 du code de procédure pénale), le retrait ou la révocation de la mesure (article 712-20 du code de procédure pénale) -3°, 15° et 16° du I ;

Lorsque la personne est placée sous surveillance judiciaire (article  723-35 du code de procédure pénale), le fait de refuser de commencer ou de poursuivre un traitement inhibiteur de libido constitue une violation des obligations susceptibles de provoquer le retrait de la durée des réductions de peine dont la personne a bénéficié et, en conséquence, sa réincarcération (10° du I).

- de même, lorsque la personne est placée sous surveillance de sûreté (article 706-53-19 du code de procédure pénale) le refus de commencer ou poursuivre un tel traitement est assimilé à un manquement aux obligations susceptibles de justifier le placement en rétention de sûreté (2° du I).

Votre commission a précisé par un amendement que cette méconnaissance n'est susceptible d'entraîner un placement en centre socio-médico-judiciaire de sûreté que si les conditions fixées par le troisième alinéa de l'article 706-53-19 sont satisfaites (la méconnaissance doit faire apparaître que la personne présente à nouveau une particulière dangerosité caractérisée par une probabilité très élevée de récidiver).

2. Renforcement des dispositifs du contrôle post-carcéral

La surveillance judiciaire

Le projet de loi propose de modifier et de compléter les dispositions relatives à la surveillance judiciaire sur quatre aspects.

En premier lieu, le 7° du I prévoit de ramener de 10 à 7 ans le quantum de peine prononcée susceptible de donner lieu à une surveillance judiciaire. Dans la mesure où cette mesure est strictement limitée dans le temps à une durée équivalente aux réductions de peine obtenues par le condamné et qu'elle constitue une « modalité d'exécution de la peine » comme l'a souligné le Conseil constitutionnel dans sa décision n° 2005-527 DC du 8 décembre 2005, l'extension du champ d'application de cette mesure ne paraît pas poser de problème de droit. En outre, il peut être utile de soumettre à des mesures de surveillance des personnes condamnées à des peines égales ou supérieures à sept ans d'emprisonnement et présentant encore une dangerosité.

Cependant, votre commission n'ignore pas que cette disposition alourdira encore la charge des juges de l'application des peines.

Selon les informations communiquées par la direction des affaires criminelles et des grâces du ministère de la justice, l'abaissement de ce seuil aurait pour effet d'accroître de 51 % le nombre de personnes éligibles à la surveillance judiciaire -et impliquera un renforcement des moyens qui leur sont dévolus.

Le 11° et le 19° du I procèdent à des coordinations concernant l'abaissement du quantum de peine prononcé pour la surveillance de sûreté.

Le 7° lève par ailleurs une ambiguïté en indiquant que la durée de la surveillance judiciaire ne peut excéder celle correspondant au crédit de réduction de peine et aux réductions de peine supplémentaires, l'emploi de la conjonction « ou » dans la rédaction actuelle de l'article 723-29 du code de procédure pénale pouvant nourrir une certaine incertitude à cet égard.

En troisième lieu, le présent article insère un nouvel article 723-31-1 dans le code de procédure pénale afin de renforcer les conditions d'examen de la personne avant un placement éventuel sous surveillance judiciaire.

En l'état du droit, la surveillance judiciaire est ordonnée « à titre de mesure de sûreté et aux seules fins de prévenir une récidive dont le risque paraît avéré » (article 723-29). Ce risque doit être constaté par une expertise ordonnée par le juge de l'application des peines « et dont la conclusion fait apparaître la dangerosité du condamné et détermine si le condamné est susceptible de faire l'objet d'un traitement » (article 723-31). La décision est prise avant la date prévue pour la libération du condamné, le cas échéant, si un placement sous surveillance électronique mobile est prévu, après avis de la commission pluridisciplinaire des mesures de sûreté (article 723-32).

Les nouvelles dispositions proposées apportent quatre éléments complémentaires :

- l'examen avant la date prévue pour leur libération de la situation de tous les condamnés susceptibles de faire l'objet d'une surveillance judiciaire ;

- la faculté, sur décision du juge de l'application des peines ou du procureur de la République, de placer le condamné pour une durée comprise entre deux et six semaines, dans un service spécialisé chargé de l'observation des personnes détenues aux fins d'une évaluation pluridisciplinaire de dangerosité ;

- la possibilité, à l'initiative du juge de l'application des peines ou du procureur de la République de saisir la commission pluridisciplinaire des mesures de sûreté de la situation de toutes les personnes condamnées susceptibles de faire l'objet d'une surveillance de sûreté, l'avis obligatoire qui lui est actuellement demandé sur celles de ces personnes pour lesquelles un placement sous surveillance électronique mobile est envisagé devenant, en contrepartie, facultatif (8° et 9° du I) ;

- la faculté pour le juge de l'application des peines ou le procureur de la République d'ordonner que l'expertise prévue par l'article 723-31 soit réalisée par deux experts.

Votre commission a adopté deux amendements de son rapporteur tendant, d'une part, à une nouvelle rédaction, plus claire de ces dispositions et, d'autre part, au rétablissement de l'avis obligatoire de la commission pluridisciplinaire des mesures de sûreté pour un placement sous surveillance électronique mobile lorsque celui-ci est décidé à l'initiative du juge de l'application des peines. En effet, compte tenu des contraintes lourdes qu'un tel placement est susceptible d'emporter, cette garantie paraît pleinement justifiée.

Enfin, le 10° du I de cet article donne à la juridiction de jugement, après avis du juge de l'application des peines, la faculté de retirer la durée des réductions de peine dont la personne a bénéficié et d'ordonner sa réincarcération, en cas de condamnation de la personne placée sous surveillance judiciaire pour un crime ou un délit pour lequel le suivi socio-judiciaire est encouru. En effet, il semble logique d'éviter qu'à une surveillance judiciaire décidée au titre de la nouvelle peine prononcée s'ajoute le reliquat de surveillance judiciaire ordonné dans le cadre de la peine précédente.

En outre, par coordination avec le choix de ramener de quinze à dix ans le quantum de peine susceptible de donner lieu à l'application de la surveillance de sûreté, la rédaction de l'article 723-38 prévoit la possibilité de renouveler le placement sous surveillance électronique mobile tant que la personne fait l'objet d'une surveillance judiciaire ou d'une surveillance de sûreté. Par coordination avec la position adoptée à l'article 4, votre commission vous propose, par un amendement de son rapporteur, de supprimer cette disposition.

Le 14° du I de cet article tend à insérer un article 723-38-1 dans le code de procédure pénale afin de prévoir que la surveillance judiciaire est suspendue par toute détention intervenant au cours de son exécution et qui ne découle pas d'un retrait de tout ou partie des réductions de peine dont a bénéficié la personne.

La libération conditionnelle

Le projet de loi propose d'apporter deux modifications à la libération conditionnelle, la première formelle, la seconde de fond.

En premier lieu, le 12° du I du présent article suggère une rédaction plus explicite du 10 ème alinéa de l'article 729 en rappelant d'abord que l'avis de la commission pluridisciplinaire des mesures de sûreté, auquel est subordonnée la libération conditionnelle d'une personne condamnée à la réclusion criminelle à perpétuité, est rendu à la suite d'une évaluation de la dangerosité réalisée dans un service spécialisé chargé de l'observation des détenus et assortie d'une expertise médicale.

Il apporte deux précisions nouvelles : s'il s'agit d'un crime pour lequel le suivi socio-judiciaire est encouru, cette expertise serait réalisée par deux experts et devrait porter sur l'opportunité, dans le cadre d'une injonction de soins, du recours à un traitement inhibiteur de libido.

En second lieu, le 13° du I insère un article 732-1 dans le code de procédure pénale afin de permettre qu'une libération conditionnelle, à l'instar d'une surveillance judiciaire ou d'un suivi socio-judiciaire, soit suivie d'une surveillance de sûreté.

Cette disposition s'inspire d'une proposition (n° 10) du rapport Lamanda et vise à surmonter une situation paradoxale. En principe, la durée de la libération conditionnelle correspond à la partie de la peine non subie en détention. Elle peut cependant être prolongée d'une année au-delà, sous réserve que la totalité du temps passé sous le régime de la libération conditionnelle n'excède pas dix ans. Comme le relevait, dans son rapport le Premier président Lamanda, « cette prolongation d'un an permet d'assurer un suivi utile, lorsque le condamné présente une certaine fragilité, qu'il a été sanctionné à plusieurs reprises, ou encore lorsque la libération conditionnelle intervient en fin de peine et ne permet plus un contrôle suffisamment prolongé ». Toutefois, si la libération conditionnelle est révoquée en raison d'une violation des obligations imposées au condamné, celui-ci sera réincarcéré. Il ne pourrait alors être soumis à un contrôle à l'issue de sa détention que s'il est de nouveau libéré sous la forme d'une surveillance judiciaire. Or, les obligations fixées au titre de la surveillance judiciaire étant très proches de celles de la libération conditionnelle, pourquoi seraient-elles mieux respectées si elles ont été enfreintes une première fois ? Le Premier président Lamanda recommandait qu'au terme de la détention de l'intéressé, une surveillance de sûreté soit possible en précisant cependant que « le sort du condamné ne pouvant être aggravé, il conviendrait de prévoir que la surveillance de sûreté ne soit pas reconduite indéfiniment, mais limitée dans les conditions de durée de la prolongation d'une mesure de libération conditionnelle et assortie des seules obligations initialement prévues ».

Le dispositif proposé répond à ces préoccupations et fixe des conditions strictes au prolongement d'une libération conditionnelle par une surveillance de sûreté. En effet, aux conditions qui sont actuellement prévues pour un placement sous surveillance de sûreté après une surveillance judiciaire s'ajouteraient trois autres conditions.

En premier lieu, cette prolongation ne pourrait concerner que les personnes condamnées à la réclusion à perpétuité pour l'un des crimes visés à l'article 706-53-13.

Ensuite, seule serait concernée la libération conditionnelle assortie d'une injonction de soins .

Par ailleurs, le placement sous surveillance de sûreté ne pourrait être ordonné qu'après expertise médicale constatant que le maintien d'une injonction de soins est indispensable pour prévenir la récidive.

L'Assemblée nationale n'a pas souhaité déroger au principe du renouvellement de la surveillance de sûreté mais elle a en revanche maintenu la durée actuelle d'un an -qu'elle a pourtant relevée à deux ans dans les autres cas d'application de la surveillance de sûreté. Par coordination, votre commission a adopté un amendement de son rapporteur portant cette durée à deux ans .

Le relèvement du suivi socio-judiciaire

En l'état du droit, si le juge de l'application des peines peut modifier ou compléter les mesures du suivi socio-judiciaire (article 763-3, 1 er alinéa du code de procédure pénale), il ne peut néanmoins relever l'intéressé d'un suivi socio-judiciaire. Il appartient en effet à la juridiction de jugement qui a statué de le relever de cette mesure 34 ( * ) .

Reprenant une proposition présentée par M. Etienne Blanc, rapporteur de la mission d'information sur l'exécution des décisions de justice pénale, l'Assemblée nationale a ouvert au juge de l'application des peines la faculté de décider lui-même, par ordonnance motivée, de mettre fin de manière anticipée au suivi socio-judiciaire. Deux séries de conditions seraient néanmoins requises :

- le reclassement du condamné devrait être acquis, un traitement n'étant plus nécessaire ;

- sur le plan procédural, l'accord du parquet, l'audition du condamné et l'avis positif du médecin coordonnateur. Votre commission estime qu'il n'est pas souhaitable de soumettre la décision du juge de l'application des peines à l'accord du parquet et à l'avis positif du médecin coordonnateur. Comme l'a observé le Premier président Lamanda lors de ses échanges avec votre rapporteur, le procureur de la République aura toujours la possibilité selon la procédure de droit commun (article 712-11 du code de procédure pénale) de faire appel de la décision du juge de l'application des peines.

Votre commission a adopté un amendement de son rapporteur tendant à rendre au juge de l'application des peines une compétence entière pour décider de la levée du suivi socio-judiciaire après avis du procureur de la République et du médecin coordonnateur.

La simplification des modalités d'information du détenu par le juge de l'application des peines sur les possibilités de traitement

Aux termes de l'article 763-7, la personne condamnée à un suivi socio-judiciaire comprenant une injonction de soins est immédiatement informée par le juge de l'application des peines de la possibilité d'entreprendre un traitement.

Si elle ne consent pas à suivre ce traitement, l'information doit être renouvelée au moins une fois tous les six mois. Dans son rapport, M. Etienne Blanc avait jugé cette disposition « très contraignante, en particulier au sein des maisons d'arrêt où il est difficile pour l'administration pénitentiaire de repérer et suivre les personnes condamnées au suivi socio-judiciaire pour satisfaire à cette obligation. L'intérêt de ces rappels a de surcroît un effet limité alors que ces formalités sont extrêmement lourdes à gérer » 35 ( * ) . Les députés ont proposé en conséquence que, si la personne n'a pas déjà commencé un traitement, cette information soit faite six mois avant sa libération -le juge de l'application des peines devant alors indiquer à l'intéressé qu'il peut toujours entreprendre son traitement en détention et, qu'à défaut, il devra le faire sous le contrôle du service pénitentiaire d'insertion et de probation ainsi que du médecin coordonnateur lors de sa remise en liberté.

Si le renouvellement tous les six mois de l'information peut apparaître excessivement formel, en revanche, les nouvelles dispositions proposées par l'Assemblée nationale ne répondent pas à l'exigence rappelée en particulier par le premier Président de la Cour de cassation d'une prise en charge le plus tôt possible de la personne détenue. Aussi votre commission a-t-elle adopté un amendement de son rapporteur afin de prévoir que l'information du détenu par le juge de l'application des peines intervient une fois tous les ans.

Aux termes de l'article L. 3711-3 du code de la santé publique, le médecin traitant est habilité , sans que puisse lui être opposé le secret médical, à informer le juge de l'application des peines ou l'agent de probation de l'interruption du traitement. Lorsque le médecin traitant informe le juge ou l'agent de probation, il en avise immédiatement le médecin coordonnateur.

Le médecin traitant peut également informer de toutes difficultés survenues dans l'exécution du traitement le médecin coordonnateur, également habilité à prévenir le juge de l'application des peines ou l'agent de probation.

Le 2° du II du présent article introduit dans l'article L. 3711-3 des dispositions spécifiques concernant les modalités d'information lorsque le médecin traitant a prescrit au condamné un traitement antihormonal. Elles se distinguent du droit en vigueur sur deux points :

- d'une part, par le champ de l'information attendue du médecin traitant qui couvre non seulement l'interruption du traitement mais aussi le refus initial de l'intéressé de le suivre ;

- d'autre part, surtout, le médecin traitant est tenu d'informer, sans délai , le juge de l'application des peines ou l'agent de probation soit directement, soit par l'intermédiaire du médecin coordonnateur.

Une telle obligation a été très critiquée par les médecins comme par les magistrats rencontrés par votre rapporteur. Elle pourrait altérer le lien de confiance indispensable entre médecin et patient. Perçue comme une nouvelle contrainte, elle risque de compliquer encore davantage le recrutement des médecins coordonnateurs. Enfin, est-il justifié de prévoir une obligation spécifique d'information concernant le suivi d'une médication qui ne constitue généralement qu'une partie d'un traitement dont les autres éléments peuvent par ailleurs être suivis par le patient ?

Votre commission a estimé préférable de s'en tenir au droit en vigueur dont la souplesse et l'efficacité semblent satisfaire l'ensemble des acteurs de l'injonction de soins. Elle a en conséquence adopté un amendement de son rapporteur tendant à supprimer les dispositions proposées.

Votre commission a adopté l'article 5 ter ainsi modifié .

* 32 Juger et soigner : lutter contre les pathologies et addictions à l'origine de la récidive ; rapport d'information (n° 1811) de M. Etienne Blanc ; mission d'information sur l'exécution des décisions de justice pénale, MM. Jean-Luc Warsmann, président et Etienne Blanc, rapporteur, proposition n° 016, p. 84. En effet, l'obligation de soins présente un caractère moins spécifique que l'injonction de soins. Son prononcé n'implique pas une expertise préalable et sa mise en oeuvre est plus simple. Seule l'injonction de soins requiert l'intervention d'un médecin coordonnateur comme interface entre le médecin traitant et le juge.

* 33 A hauteur de trois mois maximum par an et de sept jours par mois.

* 34 La demande de relèvement est adressée au juge de l'application des peines qui ordonne une expertise médicale et la transmet à la juridiction compétente avec les conclusions de l'expert ainsi que son avis motivé.

* 35 Rapport d'information (n° 1811) de M. Etienne Blanc, rapporteur de la mission d'information sur l'exécution des décisions de justice, p. 86.

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