B. PRÉSERVER LA LIBERTÉ DES COMMUNES ET AMÉLIORER LE FONCTIONNEMENT DE L'INTERCOMMUNALITÉ

Approuvant sans réserve l'objectif affiché d'achever et de rationaliser la carte de l'intercommunalité, la Haute assemblée a voulu en conforter le succès par une plus grande prise en compte de la cellule de base de notre démocratie locale.

1. Adopter des solutions pragmatiques pour assurer la démocratisation des intercommunalités (articles 2 et 3)

Le Sénat a voulu dégager des solutions pragmatiques et consensuelles pour adapter la composition des organes délibérants des EPCI à fiscalité propre à la mise en place, à partir de mars 2014, d'une élection des délégués des communes-membres au suffrage universel direct (articles 2 et 3 du projet de loi).

En effet, votre commission avait considéré que le système figurant dans le texte initial du gouvernement était trop rigide , puisqu'il privait les communautés de communes et d'agglomération de la faculté de conclure des accords locaux amiables pour déterminer la composition de leur organe délibérant entre les communes-membres, et défavorable aux villes moyennes . Lors de l'examen du texte en commission, elle avait donc prévu que les communes pourraient fixer librement le nombre et la répartition des sièges au sein des conseils communautaires, quel que soit le type d'EPCI à fiscalité propre concerné, par un accord à la « super-majorité qualifiée » (deux tiers des communes représentant au moins deux tiers de la population).

En séance publique, ce système a été modifié par des amendements présentés par MM. Gérard Collomb et Pierre Hérisson , créant un système où le nombre et la répartition des sièges pourraient être fixés librement par les communes-membres des communautés de communes et d'agglomération par un accord à la majorité qualifiée simple (deux tiers des communes représentant la moitié de la population, ou la moitié des communes représentant deux tiers de la population), et où 10 % de sièges supplémentaires pourraient, dans un second temps, être créés et librement répartis selon la même majorité et avec l'accord de la ville-centre (c'est-à-dire de la commune la plus peuplée, à condition qu'elle représente plus du quart de la population totale de l'EPCI).

Ce système avait alors reçu le soutien de votre commission.

Enfin, le Sénat avait augmenté le nombre maximal de vice-présidents pouvant être élus par chaque conseil communautaire par rapport au texte du gouvernement.

2. Encadrer davantage les pouvoirs du représentant de l'Etat dans la modification de la carte intercommunale

Constatant que la décentralisation est aujourd'hui parvenue à l'âge de la maturité, le Sénat a encadré les pouvoirs conférés au préfet pour modifier la carte intercommunale.

En conséquence, il a :


• dans le cadre des procédures d'achèvement et de rationalisation de la carte des EPCI à fiscalité propre et des syndicats (articles 29 et 30),

- supprimé le pouvoir d'appréciation du préfet pour mettre en oeuvre le schéma départemental de coopération intercommunale ;

- conforté le rôle de la commission départementale de la coopération intercommunale en préservant le caractère obligatoire des modifications qu'elle adopte aux deux-tiers de ses membres et en prévoyant l'audition de tout élu qui le demande ;

- inclus la commune-centre dans la majorité requise pour exprimer l'accord des conseils municipaux au projet préfectoral. Celle-ci devra également consentir à la fusion proposée par le préfet en vertu des pouvoirs exceptionnels dont il bénéficiera en 2013 ;

- prévu la fixation, par l'arrêté de fusion, des compétences exercées par le nouvel EPCI qui assumerait l'intégralité des compétences auparavant transférées aux établissements fusionnés ;

- subordonné la mise en oeuvre, en 2013, des pouvoirs spéciaux du préfet à l'achèvement des procédures de consultation introduites en 2012 pour recueillir l'accord des collectivités ;

- assorti la révision du schéma départemental, tous les 6 ans au moins, d'une réactivation des procédures temporaires prévues en 2012 pour modifier le périmètre ou fusionner des EPCI à fiscalité propre, pour une durée d'un an ;

- étendu l'application des procédures de modification du périmètre aux syndicats mixtes fermés ;


• exigé, pour la simplification de la procédure de fusion des EPCI dont l'un au moins est à fiscalité propre , l'accord de l'organe délibérant au rattachement d'une commune à un établissement public de coopération intercommunale par le préfet (article 20) ;


• pour le schéma départemental (article 16) ,

- modifié les orientations fixées à son élaboration en abaissant à 3.000 habitants le seuil de constitution d'un établissement en prévoyant, toutefois, la faculté, pour le préfet, de descendre en deçà pour tenir compte des réalités géographiques et en les complétant par celle du transfert des compétences d'un syndicat à un EPCI à fiscalité propre,

- précisé le contenu de la carte annexée au schéma en y inscrivant les périmètres des EPCI, des syndicats mixtes, des SCOT et des parcs naturels régionaux,

- prévu la faculté de proposer la création d'un syndicat,

- exempté de l'obligation de couverture intégrale les schémas des départements de la petite couronne parisienne ;


• encadré le dispositif de suppression des communes isolées, des enclaves et des discontinuités territoriales, qui entrera en vigueur au terme du processus d'achèvement et de rationalisation de la carte de l'intercommunalité (article 18),

- en prévoyant l'accord de l'EPCI au rattachement assorti d'une clause de sauvegarde pour le préfet en cas de refus de l'établissement  avec l'intervention de la commission départementale de la coopération intercommunale, la consultation du comité de massif en cas de divergence sur le futur périmètre d'une communauté de communes entre une collectivité classée montagne et le préfet,

- et en soustrayant les trois départements de la petite commune parisienne à l'application de ce dispositif ;


• adopté, pour faciliter la recomposition des structures syndicales , des amendements permettant de recourir plus largement, pour les syndicats intercommunaux et les syndicats mixtes, ouverts ou fermés, aux mécanismes de fusion, de dissolution ou de substitution (articles 22 à 24) ;


• créé un collège des syndicats au sein de la commission départementale de la coopération intercommunale qu'il a dotée d'un pouvoir d'autosaisine et organisé en son sein la présence des collectivités classées « montagne » (article 26).

3. Préserver le caractère consensuel du fonctionnement de l'intercommunalité

La logique privilégiée par votre commission est de préserver les compétences de l'échelon communal tout en améliorant le fonctionnement du couple commune/EPCI , qui constitue l'axe de proximité de l'organisation territoriale. Toute disposition ayant pour effet de réduire la liberté des communes et des maires irait au-delà de cette logique. Elle risquerait de remettre en cause les compromis trouvés au cours des dernières années, voire de transformer radicalement le climat de la coopération intercommunale en le rendant plus souvent conflictuel.

En suivant ces principes, le Sénat a souhaité rétablir la majorité qualifiée et les conditions démographiques en vigueur pour les transferts de compétences après la création d'un EPCI et pour la détermination de l'intérêt communautaire , à la place des dispositions du projet de loi prévoyant des majorités simples.

Notons l'intégration au sein des majorités prévues pour créer les EPCI très intégrés (communautés d'agglomération, communautés urbaines, métropoles) ou les instituer par transformation d'un établissement existant, des communes représentant plus du tiers de la population totale afin de prendre en compte l'ensemble des moteurs du développement de l'intercommunalité (articles 5 A et 5 B).

La Haute assemblée a souhaité revenir sur le caractère automatique du transfert du pouvoir de police au président de l'EPCI dans certains domaines, ce pouvoir faisant partie du noyau dur des compétences du maire. Le Sénat a par ailleurs adopté, à l'initiative de M. Jean-Claude Merceron, un amendement prévoyant que, lorsque la compétence en matière de collecte des eaux a été transférée à un établissement public de coopération intercommunale ou à un syndicat mixte, l'autorisation des déversements d'eaux usées autres que domestiques est du ressort du président de cet établissement, même si les pouvoirs de police du maire en la matière ne lui ont pas été transférés. Cette disposition a été adoptée conforme par l'Assemblée nationale.

Elle a en outre introduit, pour la création d'un EPCI, l'obligation d'une délibération simultanée des conseils municipaux non seulement sur le périmètre de l'EPCI, mais également sur ses statuts, c'est-à-dire sur les compétences transférées.

Votre commission partage l'objectif de souplesse et d'économie de fonctionnement des EPCI, promu par le texte du gouvernement. C'est pourquoi elle a souhaité faciliter davantage les mises à disposition de services , notamment entre la métropole et le département ou la région, de manière à adapter le plus efficacement possible les moyens disponibles aux compétences transférées. Par ailleurs, le Sénat a adopté en séance publique un amendement ouvrant la possibilité pour les collectivités territoriales de passer des conventions de gestion commune de services publics et de mettre en oeuvre cette gestion par le biais de mutualisations.

Le Sénat a également adopté un amendement tendant à permettre aux communes membres d'un EPCI de décider à l'unanimité le transfert de leur DGF à cet établissement.

Enfin, une garantie de dotation de développement rural a été créée pour les EPCI issus de la fusion d'EPCI préexistants et dépassant le seuil d'éligibilité à cette dotation.

4. Préciser le régime des métropoles dans le respect de l'autonomie communale (articles 5 à 6)

Le Sénat a validé le principe d'un EPCI plus intégré pour favoriser sa capacité à rayonner au niveau européen.

Au préalable, pour conserver une cohérence à la déclinaison des EPCI au regard de leur degré d'intégration, il a souhaité abaisser le seuil démographique de création des communautés urbaines de 500.000 à 450.000 habitants .

Souhaitant concilier la nécessité de favoriser le développement des métropoles et celle de préserver la gestion de proximité , la Haute assemblée a maintenu au maire sa compétence en matière d'autorisations d'urbanisme et introduit la notion d'intérêt métropolitain pour le transfert des équipements.

Pour conforter le régime des métropoles , la Haute assemblée a :

- prévu un nouveau cas de création d'une métropole, celui de la fusion-transformation institué à l'article 20 ;

- précisé la procédure de transfert de plein droit du bloc économique du département et de la région en cas d'échec de la procédure conventionnelle ;

- modifié la composition de la commission chargée de procéder au transfert définitif de propriété des biens et droits utilisés pour l'exercice des compétences transférées à la métropole afin de préserver l'intérêt des collectivités concernées ;

- clarifié les dispositions régissant les transferts de service et précisé le contenu des conventions, les modalités de transfert des services ainsi que la situation des personnels (notons l'adoption d'une réglementation de la création des emplois) ;

- offert, dans le souci d'une gestion économe et efficace des actions métropolitaines, la faculté de mutualiser, sur les compétences partagées, des services départementaux/régionaux et métropolitains.

Par ailleurs, elle a préservé l'autonomie des communes au sein des nouvelles métropoles, en supprimant le transfert de l'ensemble de la fiscalité des communes à la métropole et en rendant le transfert de la DGF communale à celle-ci simplement facultatif.

Le Sénat a souhaité faciliter la transformation-extension d'une communauté urbaine en métropole en permettant l'intégration de communes membres d'une communauté de communes levant la TPU et éligible à la dotation globale de fonctionnement bonifiée et, par parallélisme des formes, il a renvoyé au décret et non à un arrêté préfectoral, la décision d'étendre le périmètre de la métropole. Il a précisé que le périmètre d'une métropole peut être étendu à une commune appartenant à une communauté de communes à DGF bonifiée.

5. Offrir un véritable outil de coopération entre territoires urbains (article 7)

En première lecture, le Sénat a approuvé  le dispositif proposé des pôles métropolitains tout en précisant leur régime juridique :


•  clarification et élargissement des champs d'intervention du pôle (recherche, culture, coordination des SCOT -schémas de cohérence territoriale-, transports publics) ;


• consultation préalable des régions et départements d'implantation ;


• abaissement du double seuil de création à 300.000 habitants pour la population totale du périmètre et à 150.000 habitants pour celle de l'EPCI membre le plus peuplé ;


• diversification de l'objectif assigné au pôle par la promotion d'un modèle de développement durable ;


• détermination du mode de répartition des sièges au sein de l'organe délibérant du pôle pour tenir compte du poids démographique de chacun de ses membres.

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