ARTICLE 21 bis (nouveau)

Rapport sur le refinancement des prêts accordés aux PME
par le biais d'obligations sécurisées

Commentaire : le présent article, adopté à l'initiative de votre rapporteur, prévoit que le Gouvernement remet au Parlement, dans un délai de six mois, un rapport sur le refinancement des crédits accordés aux petites et moyennes entreprises.

A la suite de l'examen de l'article 19, relatif aux obligations foncières, et de l'article 20, relatif aux obligations de financement de l'habitat, la commission a examiné un amendement présenté par le rapporteur tendant à introduire un mécanisme similaire de refinancement des prêts accordés aux petites et moyennes entreprises, dénommé « obligations sécurisées PME » .

Ces nouvelles obligations auraient pour vocation de permettre aux banques de mobiliser les créances qu'elles détiennent sur les PME . Les établissements de crédit seraient ainsi à même de lever des ressources, à un coût plus faible, qu'ils pourraient ensuite réorienter vers le financement de l'économie . Des organismes importants travaillant avec les PME ont d'ores et déjà fait part de leur vif intérêt pour un tel mécanisme.

A ce jour, il semble néanmoins que la création d'un tel instrument financier se heurte à des difficultés techniques et juridiques qu'il convient de lever.

Pour ces raisons, votre rapporteur a rectifié son amendement et proposé que le Gouvernement adresse au Parlement un rapport sur le « refinancement des crédits accordés aux PME » dans les six mois à compter de la promulgation de la loi.

Ce rapport sera d'abord l'occasion de consulter, de la façon la plus large possible, les acteurs de la place pour « sonder » leur appétence quant à l'introduction de ce nouvel outil . Il aura également vocation à étudier les démarches étrangères en la matière. Enfin, il permettra d'analyser les modalités pratiques et juridiques de mise en oeuvre de ces obligations.

Décision de la commission : votre commission a adopté cet article additionnel.

ARTICLE 21 ter (nouveau)

Rachat de titres de créance sans annulation

Commentaire : le présent article, adopté à l'initiative de votre rapporteur, permet à une société de racheter les titres de créance qu'elle a émis (titres de créances négociables, obligations) sans devoir les annuler.

I. LE DROIT EXISTANT

A. LES TITRES DE CRÉANCE RACHETÉS PAR L'ÉMETTEUR DOIVENT ÊTRE ANNULÉS

Le code monétaire et financier, en son article L. 213-1 A, dispose que « les titres de créance représentent chacun un droit de créance sur la personne morale ou le fonds commun de titrisation qui les émet ». Le code distingue en particulier deux types de titres de créance : les titres de créances négociable (TCN) et les obligations.

Les premiers « sont des titres financiers émis au gré de l'émetteur, négociables sur un marché réglementé ou de gré à gré, qui représentent chacun un droit de créance » (article L. 213-1 du code monétaire et financier) tandis que les secondes « sont des titres négociables qui, dans une même émission, confèrent les mêmes droits de créance pour une même valeur nominale » (article L. 213-5 du même code).

Les définitions juridiques sont proches mais différent cependant. En particulier, une obligation issue d'une émission est toujours strictement identique à une autre obligation de la même émission, ce qui n'est pas le cas pour les TCN puisqu'ils peuvent être émis à l'unité.

Les TCN avaient été conçus, en pratique, comme des instruments de financement à court terme dont la maturité maximale était d'une voire deux années. A l'inverse, la maturité des obligations est souvent plus longue , parfois même très longue (30, 50 ans) même si, en réalité, la frontière avec les TCN est devenue plus poreuse.

Actuellement, lorsqu'un émetteur rachète ses propres TCN, il ne les annule pas . En effet la portée exacte de l'article 1300 du code civil, qui dispose que « lorsque les qualités de créancier et de débiteur se réunissent dans la même personne, il se fait une confusion de droit qui éteint les deux créances », apparaît incertaine et l'usage n'a pas retenu que des TCN rachetés par l'émetteur doivent être annulés. Il existe donc à ce jour une réelle insécurité juridique sur ce type de montages financiers.

Pour les obligations, le cadre juridique ne comporte pas d'ambiguïtés puisque l'article L. 228-74 du code de commerce précise que « les obligations rachetées par la société émettrice, ainsi que les obligations sorties au tirage et remboursées, sont annulées et ne peuvent être remises en circulation ». Cette disposition a été introduite par la loi du 24 juillet 1966 sur les sociétés commerciales. Le législateur avait ainsi entendu interdire des pratiques qui risquaient de créer des « abus de marché » pour reprendre une terminologie contemporaine alors inexistante.

De même, la loi de 1966 précitée a interdit à une société de « constituer un gage quelconque sur ses propres obligations » (article L. 228-44 du code de commerce).

B. L'ÉMERGENCE DE PLATEFORMES OBLIGATAIRES SUR LA PLACE DE PARIS REND NÉCESSAIRE LA POSSIBILITÉ DE RACHETER SES PROPRES OBLIGATIONS

Depuis la fin de l'année 2009, les acteurs de la place de Paris ont lancé le projet d'établir, en France, une ou plusieurs plateformes de négociation des obligations des entreprises non financières (dites corporates ) libellées en euros , c'est-à-dire créer un marché secondaire liquide et transparent pour les obligations . L'émission (marché primaire) pourrait se faire dans d'autres pays, notamment au Luxembourg, mais la négociation se tiendrait à Paris.

Le document « d'expression des besoins » publié en avril 2010 par le Comité Cassiopée (comité de Paris Europlace spécifiquement en charge de ce projet) explique notamment qu'un « objectif important est que ce ou ces marchés puissent rapidement accepter la plus grande part des obligations à taux fixe libellées en euros, émis par des "corporates" [...] , d'un encours supérieur ou égal à 500 millions d'euros ».

Le Comité a d'ores et déjà validé deux projets de plateforme de négociation ( NYSE-Euronext et Trading Screen ). Elles se constitueraient sous la forme d'un système multilatéral de négociation organisé (SMNO) , à l'instar d'Alternext. Les SMNO sont des marchés qui se soumettent aux dispositions du règlement général de l'AMF relatives à la protection des investisseurs contre les opérations d'initiés, les manipulations de cours et la diffusion de fausses informations .

Actuellement, comme indiqué plus haut, le code de commerce prévoit que les obligations rachetées par la société émettrice sont annulées et ne peuvent plus être remises en circulation. Le Comité Cassiopée a souhaité étudier la possibilité d'assouplir cette règle en vue de donner aux émetteurs une possibilité d'animer le marché obligataire secondaire et ainsi de renforcer sa liquidité .

La liquidité peut se définir comme la capacité à effectuer, sur un marché, une opération d'achat ou de vente sans affecter substantiellement le prix du titre échangé . En d'autres termes, un marché est liquide lorsque l'offre et la demande s'apparient au prix du marché, c'est-à-dire qu'il existe, à tout moment, un nombre suffisant d'acheteurs et de vendeurs.

Il s'agit d'un aspect absolument essentiel pour les nouvelles plateformes. Les investisseurs, acheteurs ou vendeurs, doivent avoir la certitude qu'ils trouveront à tout moment une contrepartie pour l'opération qu'ils entendent mener . La liquidité, mise à mal sur certains marchés avec la crise, constitue désormais un critère central de la grille d'analyse des investisseurs.

II. LE DISPOSITIF ADOPTÉ PAR VOTRE COMMISSION DES FINANCES : UN RACHAT LIMITÉ DES OBLIGATIONS AUX SEULES FINS D'ANIMER LE MARCHÉ

Comme indiqué plus haut, les émetteurs d'obligations ont un intérêt objectif à animer le marché secondaire pour assurer aux investisseurs une fluidité des transactions et un maintien des prix . Pour cette raison, il importe de prévoir que des obligations peuvent être rachetées par l'émetteur sans annulation, afin d'être ensuite remises en circulation.

C'est l'objet du présent article additionnel adopté par votre commission sur proposition de votre rapporteur. L'article couvre cependant un champ plus vaste que les seules obligations pour couvrir les TCN et l'ensemble des « titres de créance ne donnant pas accès au capital » dont font partie les obligations sous leur forme traditionnelle 306 ( * ) .

L'article L. 231-1 A du code monétaire et financier est complété ( alinéa 1 ) par plusieurs dispositions permettant, par dérogation aux articles 1300 du code civil et L. 228-74 du code de commerce, aux émetteurs d'acquérir et de conserver les titres de créance susmentionnés aux fins de favoriser leur liquidité ( alinéa 2 ).

Pour les titres de créance ne donnant pas accès au capital, cette faculté n'est ouverte que s'ils sont négociés sur un marché réglementé ou sur un SMNO tel que défini plus haut ( alinéa 4 ). Concrètement, cette disposition n'autorise le rachat sans annulation que des seules obligations négociées sur un marché qui respecte les règles dites « d'abus de marché » (protection contre les opérations d'initiés, manipulation de cours, diffusion de fausses informations).

Le présent article prévoit plusieurs garde-fous pour le rachat des obligations.

En premier lieu, pendant le temps de leur conservation par l'émetteur, tous les droits, y compris les droits financiers (les coupons) attachés aux obligations sont suspendus ( alinéa 5 ). L'entreprise ne peut donc pas participer à la masse des obligataires.

En second lieu, l'émetteur devra rendre publics, dans des conditions prévues par le règlement général de l'Autorité des marchés financiers, les rachats qu'il a effectués (alinéa 6).

En troisième lieu, il ne pourra détenir ses titres que pour une durée limitée, fixée par décret ( alinéa 7 ).

En dernier lieu, il ne pourra acquérir qu'une quantité maximale d'une même ligne obligataire, fixée à 15 % ( alinéa 8 ). Il importe en effet que la liquidité des titres sur le marché ne soit pas artificielle : l'émetteur doit animer le marché et non s'y substituer .

Pour les TCN, un décret fixe les « conditions dans lesquelles l'émetteur peut racheter [ses titres] et doit informer la Banque de France » ( alinéa 10 ). Celle-ci est en effet le régulateur compétent pour la supervision du marché des TCN.

Enfin, les alinéas 11 et 12 complètent le droit commun des TCN , sur le modèle du droit applicable aux obligations, en prévoyant qu'un « émetteur ne peut constituer un gage quelconque sur ses propres [TCN] » (nouvel article L. 213-4-1 du code monétaire et financier).

Décision de la commission : votre commission a adopté cet article additionnel.


* 306 Il existe des règles particulières pour le rachat des titres de capital (actions) par les sociétés. L'exclusion du présent dispositif des titres de créances donnant accès au capital permet de ne pas interférer avec lesdites règles.

Les thèmes associés à ce dossier

Page mise à jour le

Partager cette page