B. UNE PROPOSITION DE LOI POUR REMEDIER À L'EMBALLEMENT NORMATIF

Afin de remédier à cet emballement normatif et faire face aux charges induites pour les budgets locaux, la proposition de loi de M. Eric Doligé propose un certain nombre d'innovations et de simplifications.

Le texte élaboré le 4 août 2011 a été soumis pour avis au Conseil d'Etat le 23 août par le président du Sénat en application de l'article 39, dernier alinéa, de la Constitution.

La Haute juridiction a rendu son avis le 6 octobre 2011.

Les quatre premiers articles de la proposition de loi constituent les éléments d'un dispositif destiné tout à la fois à combattre l'inflation normative unanimement dénoncée et à permettre une application modulée des mesures réglementaires selon la situation des collectivités.

Les autres dispositions déclinent des réponses aux difficultés identifiées dans divers secteurs.

1. L'institution d'un principe de proportionnalité des normes

L'article premier introduit dans le code général des collectivités territoriales un principe de proportionnalité des normes et de leur adaptation à la situation financière des collectivités qu'il décline ensuite dans trois domaines dont l'encadrement réglementaire est emblématique des difficultés de mise en oeuvre sur le terrain.

a) L'adaptation des normes à la taille des collectivités

Tel est l'énoncé du principe n° 13 inscrit dans le rapport de notre collègue Eric Doligé.

Son objectif est de « s'adapter à l'inégalité de facto qui existe entre les collectivités ».

A cette fin, l'article premier prévoit la faculté pour le préfet d'adapter les mesures réglementaires d'application des lois, soit parce que leur mise en oeuvre se heurterait « à des impossibilités techniques avérées », soit dans le cas où elle entraînerait « des conséquences manifestement disproportionnées au regard des objectifs recherchés et des capacités financières » des assujettis.

Toutefois, l'intervention du préfet est encadrée :

- elle doit tout d'abord être autorisée par la loi qui déterminerait les domaines intéressés ;

- elle ne doit pas remettre en cause les objectifs de celle-ci ;

- les dérogations accordées en conséquence sont précisées par décrets en Conseil d'État ;

- leur bénéfice intervient après avis de la commission départementale consultative compétente ; les dérogations sont motivées par arrêté préfectoral ;

- sauf impossibilité technique avérée, elles s'accompagnent de mesures de substitution lesquelles sont, en tout état de cause, obligatoires en matière de sécurité des personnes et d'accessibilité des bâtiments publics.

b) Des déclinaisons sectorielles

L'article premier met déjà en oeuvre le principe qu'il proclame dans trois secteurs identifiés en raison des difficultés qu'ils soulèvent pour les collectivités locales.

Il s'agit de l'accessibilité des établissements recevant du public (ERP), de la restauration collective et de l'agrément des assistants maternels et des assistants familiaux.

(1) L'assouplissement de l'encadrement des dérogations en matière d'accessibilité

La loi précitée du 11 février 2005 pour l'égalité des droits et des chances, la participation et la citoyenneté des personnes handicapées a fixé un objectif général d'accessibilité des ERP qui doit être respecté au plus tard dix ans à compter de sa publication, soit en 2015.

Or, remarque notre collègue Eric Doligé, il « nécessite de mobiliser des moyens financiers importants qui ne sont pas à la portée de toutes les collectivités territoriales » 14 ( * ) .

Il renforce donc le bénéfice des dérogations déjà ouvertes par la loi de 2005. Aujourd'hui, il n'est qu'une faculté accordée, à titre exceptionnel, au motif de l'impossibilité technique de procéder à la mise en accessibilité, de contraintes liées à la conservation du patrimoine architectural ou encore en raison de la disproportion manifeste entre les améliorations apportées et leurs conséquences 15 ( * ) . L'article premier-II de la proposition de loi, pour sa part, prévoit, en tout premier lieu, l'intervention de la CCEN pour préciser, par décrets en Conseil d'État, les dérogations ouvertes, lesquelles seraient dorénavant accordées de plein droit, dès lors que l'impossibilité technique ou les contraintes de conservation de patrimoine monumental sont démontrées.

Dans le troisième cas - la disproportion manifeste entre améliorations et conséquences -, les dérogations demeureraient une faculté à la disposition du préfet. L'évaluation de la disparité devrait s'apprécier notamment au regard des coûts induits par la mise en accessibilité et de la capacité financière du propriétaire de l'établissement.

(2) Un régime dérogatoire en matière de restauration scolaire et d'assistants maternels

Les III et IV de l'article premier déclinent le principe général défini dans son I :

- d'une part, pour l'application des règles encadrant la qualité nutritionnelle des repas servis dans les services de restauration scolaire et universitaire, des établissements d'accueil des enfants de moins de six ans, des établissements de santé sociaux et médicaux-sociaux, ainsi que des établissements pénitentiaires 16 ( * ) ;

- d'autre part, pour la définition des critères d'agrément des assistants maternels et des assistants familiaux 17 ( * ) .

Dans le premier cas, le préfet pourrait accorder, dans des conditions fixées par décret, des dérogations qui ne pourraient remettre en cause l'application des règles minimales concernant la variété des plats.

Pour la seconde hypothèse, le président du conseil général pourrait, par décision motivée et à titre dérogatoire, adapter les critères d'agrément afin de faciliter la mise en oeuvre de la politique départementale de petite enfance tout en maintenant le niveau des conditions d'hygiène et de sécurité entourant l'accueil des enfants.

Ce faisant, l'article premier réintroduit la faculté ouverte au président du conseil général avant l'intervention de la loi du 9 juin 2010 relative à la création des missions d'assistants maternels, d'adapter les critères nationaux d'agrément.


* 14 Cf. Exposé des motifs de la proposition de loi.

* 15 Cf. art. L. 111-7-3 du code de la construction et de l'habitation.

* 16 Cf. art. L. 230-5 du code rural et de la pêche maritime.

* 17 Cf. art. L. 421-3 du code de l'action sociale et des familles.

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