EXPOSÉ GÉNÉRAL

Mesdames, Messieurs,

Adoptée par l'Assemblée nationale le 14 février 2012, la proposition de loi n° 363 (2011-2012) visant à assouplir les règles relatives à la refonte de la carte intercommunale sera examinée par notre Haute Assemblée à partir du 20 février.

Déposé par M. Jacques Pélissard, député et président de l'Association des maires de France, ce texte a pour objectif de répondre aux craintes et aux difficultés rencontrées par les élus locaux dans la mise en oeuvre du processus d'achèvement et de rationalisation de la carte de l'intercommunalité, impulsé par la loi de réforme des collectivités territoriales.

En effet, dans les territoires comme au Parlement, des voix se sont élevées au cours des derniers mois pour faire état des lacunes du volet intercommunal de la loi du 16 décembre 2010 : les conseillers municipaux et les délégués intercommunaux ont ainsi déploré la brièveté des délais impartis pour la refonte des intercommunalités et l'insuffisante association des élus à l'élaboration des schémas de coopération intercommunale dans certains départements ; ils ont également pointé le risque de voir la gouvernance des conseils communautaires déstabilisée par la réforme.

Votre rapporteur rappelle que le Sénat s'était, dès le mois d'octobre 2011, fait l'écho de ces préoccupations en examinant la proposition de loi déposée par le président de la commission des lois, M. Jean-Pierre Sueur, que notre Assemblée avait adoptée le 4 novembre dernier.

Les événements récents apportent d'ailleurs la preuve de la légitimité de cette initiative et démontrent que les critiques émises par les élus locaux étaient fondées : alors que 99 départements devaient être couverts par un schéma de coopération intercommunale au 31 décembre 2011, 33 d'entre eux en sont aujourd'hui dépourvus. Dans ce contexte, on ne peut que regretter que les députés ne se soient pas saisis, avant la fin de l'année 2011, du texte établi par le Sénat -qui aurait certainement permis d'éviter qu'une proportion aussi importante de départements se retrouve au milieu du gué, faute de consensus locaux.

Malgré ces réserves, on doit constater que le dispositif de la présente proposition de loi est proche du texte adopté par notre Assemblée fin 2011. Le rapport de M. Charles de la Verpillière, rapporteur du texte à l'Assemblée nationale, indique d'ailleurs que la proposition de loi initiale a été « amélior[ée] » avec « l'introduction de dispositions issues de la proposition de loi portant diverses dispositions relatives à l'intercommunalité, issue d'une proposition de loi déposée par le président Jean-Pierre Sueur et adoptée par le Sénat le 4 novembre dernier, dont les préoccupations et les solutions rejoignent largement celles de l'auteur de la présente proposition de loi ». Votre rapporteur -qui était également le rapporteur de la proposition de loi précitée 1 ( * ) - se réjouit, à cet égard, que l'examen du présent texte par les députés ait pu être précédé d'un dialogue constructif entre les rapporteurs des deux Assemblées, qui ont travaillé de concert pour favoriser l'adoption d'un texte pragmatique de compromis ; il forme le voeu que ces échanges préalables permettent au présent texte d'être rapidement mis en application.

I. LES LACUNES DE LA LOI DU 16 DÉCEMBRE 2010 EN MATIÈRE D'INTERCOMMUNALITÉ

Aux termes de la loi de réforme des collectivités territoriales, les schémas départementaux de coopération intercommunale (SDCI), permettant une couverture intégrale de notre territoire par des établissements publics de coopération intercommunale (EPCI) à fiscalité propre, devaient être arrêtés avant le 31 décembre 2011. Si ce calendrier a été respecté dans deux tiers des départements (66 sur 99, Paris et Mayotte n'étant pas soumis aux dispositions de la loi du 16 décembre 2010), 33 départements ne sont actuellement pas couverts par un schéma 2 ( * ) .

Ces difficultés, qui sont apparues dès le printemps 2011, découlent à la fois des principes fixés par la loi de réforme des collectivités territoriales et du calendrier de leur mise en oeuvre.

A. LE PROCESSUS DE RATIONALISATION ET D'ACHÈVEMENT DE LA CARTE INTERCOMMUNALE

1. Les principes directeurs de la loi de réforme des collectivités territoriales en matière intercommunale

Instruments majeurs du processus de rationalisation et d'achèvement de la carte intercommunale prévu par la loi du 16 décembre 2010, les schémas départementaux de coopération intercommunale (SDCI) reposent sur une évaluation préalable de la cohérence des périmètres et des compétences des groupements existants et répondent à une double vocation :

- d'une part, ils doivent permettre la couverture intégrale du territoire par des EPCI à fiscalité propre et, corrélativement, la suppression des enclaves et des discontinuités territoriales affectant les EPCI existants ;

- d'autre part, ils doivent prévoir les modalités de rationalisation des périmètres des autres EPCI et des syndicats mixtes existants par création, extension, transformation ou fusion de ceux-ci.

On soulignera que les périmètres créés ou modifiés par les SDCI sont mis en regard par la loi avec ceux des schémas de cohérence territoriale (SCOT) et des parcs naturels régionaux, qui figurent sur la carte annexée au schéma départemental.

Sur le fond, et aux termes de l'article L. 5210-1-1 du code général des collectivités territoriales, six objectifs sont assignés aux SDCI :

- les EPCI constitués doivent regrouper au moins 5 000 habitants. Les débats parlementaires ont, toutefois, permis d'apporter deux tempéraments à cette exigence, qui ne s'applique pas aux EPCI situés (fût-ce partiellement) en zone de montagne, et à laquelle le préfet peut déroger « pour tenir compte des caractéristiques particulières de certains espaces » (insularité, faible densité démographique, etc.) ;

- la cohérence spatiale des EPCI à fiscalité propre doit être améliorée en tenant compte du périmètre des unités urbaines, des bassins de vie et des SCOT ;

- la solidarité financière doit être accrue ;

- le nombre de syndicats de communes et de syndicats mixtes doit être réduit en vue, notamment, de supprimer « les doubles emplois entre des EPCI ou entre ceux-ci et des syndicats mixtes » : en d'autres termes, le schéma est chargé de contribuer à la dissolution des syndicats dont les compétences peuvent être reprises par un autre groupement ;

- les compétences exercées par des syndicats doivent, dans la mesure du possible, être transférées à des EPCI à fiscalité propre ;

- les structures compétentes dans les domaines de l'aménagement de l'espace, de la protection de l'environnement et du respect des principes du développement durable doivent, elles aussi, être rationalisées.


* 1 Rapport n° 67 (2011-2012), disponible sur le site Internet du Sénat :

http://www.senat.fr/rap/l11-067/l11-067.html

* 2 Ces chiffres proviennent de la communication présentée en conseil des ministres, le 25 janvier 2012, par M. Philippe Richert, ministre chargé des collectivités territoriales, et disponible sur Internet à l'adresse suivante :

http://www.gouvernement.fr/gouvernement/la-mise-en-oeuvre-du-volet-intercommunal-de-la-loi-du-16-decembre-2010-de-reforme-des-c

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