EXAMEN DES ARTICLES

Article 1er (article L. 621-2 du code rural et de la pêche maritime) - Participation de FranceAgrimer à la mise en oeuvre de l'aide aux personnes les plus démunies

Commentaire : cet article élargit au-delà du seul champ agricole et agroalimentaire le domaine d'intervention de FranceAgrimer, afin de lui permettre de poursuivre ses interventions en matière d'aide alimentaire, cette politique étant basculée au niveau européen de la politique agricole commune vers la politique de cohésion.

I. Le droit en vigueur.

Le chapitre I er du titre II du Livre VI du code rural et de la pêche maritime définit le statut, les missions et les modalités de fonctionnement de l'établissement national des produits de l'agriculture et de la mer, dénommé FranceAgrimer.

Établissement public administratif placé sous la tutelle du ministère chargé de l'agriculture, FranceAgrimer est le résultat du mouvement de fusion des anciens offices agricoles lancé par la loi n° 2006-11 du 5 janvier 2006 d'orientation agricole, qui avait déjà regroupé les offices en trois pôles - Office national interprofessionnel des grandes cultures, Office national interprofessionnel de l'élevage et de ses produits et Office national interprofessionnel des fruits, des légumes, des vins et de l'horticulture - mouvement achevé avec la création d'un office unifié par l'ordonnance n° 2009-325 du 25 mars 2009.

L'article L. 621-2 du code rural et de la pêche maritime définit le domaine d'intervention de FranceAgrimer comme étant celui de la « production de biens agricoles et alimentaires ou de biens non alimentaires issus des matières premières agricoles » mais aussi celui des « produits de la mer, de l'aquaculture et de la pêche professionnelle en eau douce ».

Dans ce domaine d'intervention, FranceAgrimer est chargé de missions très larges, définies à l'article L. 621-3 consistant à mettre en oeuvre les interventions publiques au titre de la PAC ou de la politique agricole nationale, assurer l'animation des onze filières (dans le cadre des conseils spécialisés), produire de l'information économique et assurer un appui aux exportateurs.

Le 4° de l'article L. 621-3 précise que FranceAgrimer est chargé de mettre en oeuvre les mesures communautaires afférentes à ses missions. C'est dans ce cadre que FranceAgrimer distribue les aides de l'Organisation commune de marché (OCM) viticole ou de l'OCM Fruits et Légumes, comme par exemple les aides à l'arrachage des vignes ou les aides à la promotion sur les marchés des pays tiers.

C'est sur cette même base juridique que FranceAgrimer est chargé d'assurer la gestion du PEAD.

II. Le texte de la proposition de loi.

La proposition de loi vise à compléter le domaine d'intervention de FranceAgrimer, au-delà du seul domaine agricole et alimentaire.

En effet, comme tout établissement public, FranceAgrimer est soumis au principe de spécialité. Or, le nouveau FEAD ne sera plus rattaché à la PAC mais à la politique de cohésion.

Au demeurant, ce FEAD aura un périmètre plus large que l'actuel PEAD, qui ne comprend que l'aide alimentaire. Le FEAD permettra aussi de fournir des biens de première nécessité aux plus démunis, et éventuellement de mettre en oeuvre des mesures d'insertion sociale.

Même si l'intention du Gouvernement français n'est pas pour l'instant de faire intervenir le FEAD pour financer d'autres biens que des biens alimentaires, le changement de nature de cet instrument au niveau communautaire nécessite une modification du champ d'intervention de FranceAgrimer défini aujourd'hui par la loi, afin que l'établissement puisse continuer d'en assurer la gestion.

Il en a aujourd'hui le savoir-faire, avec une équipe dédiée à la mise en oeuvre du PEAD ainsi que du PNAA d'environ 9 personnes, auxquels se rajoutent des agents chargés du contrôle sur place au niveau déconcentré. Au total, ces missions représentent près de 14 équivalents temps plein travaillé (ETPT), d'après les données fournies à votre rapporteure.

Ces équipes identifient les produits et lieux de livraison, gèrent les appels d'offres pour sélectionner les fournisseurs et suivent les livraisons auprès des quatre associations agréées pour assurer la distribution de l'aide alimentaire aux plus démunis (Fédération française des banques alimentaires, Restos du Coeur, Croix rouge et Secours populaire).

Avec la présente proposition de loi, il s'agit simplement d'autoriser FranceAgrimer à poursuivre cette activité.

Relevant de la politique sociale et non de la politique agricole, les interventions au titre du nouveau FEAD seraient toutefois placées sous l'autorité du ministère compétent, et plus précisément de la direction générale de la cohésion sociale (DGCS) du ministère des affaires sociales et de la santé, qui serait désignée auprès de la Commission européenne comme autorité de gestion, et à ce titre responsable de la définition du contenu du programme au niveau national et de ses priorités.

FranceAgrimer serait l'organisme intermédiaire, assurant la logistique du programme dans le cadre d'une convention passée avec la DGCS. Cette architecture explique pourquoi la proposition de loi dispose que FranceAgrimer « participe à la mise en oeuvre » de l'aide aux personnes les plus démunies, et non en « assure la gestion ».

III. La position de votre commission.

Votre rapporteure approuve pleinement le choix fait de continuer à recourir à FranceAgrimer pour mettre en oeuvre le programme européen d'aide aux plus démunis, dans la nouvelle configuration issue du règlement communautaire en cours d'adoption.

Les compétences de l'établissement dans l'exercice de cette mission ne font pas de doute et il paraîtrait peu pertinent de créer une autre structure dédiée. Aucun organisme existant ne semble au demeurant plus adapté pour gérer le programme d'aide alimentaire. L'existence de services déconcentrés de FranceAgrimer permet en outre de se reposer sur une équipe d'agents polyvalents pour assurer les contrôles sur le terrain.

Votre commission a cependant adopté un amendement de clarification rédactionnelle présenté par votre rapporteure pour mieux articuler les articles L. 621-2 et L. 621-3 du code rural et de la pêche maritime et éviter toute ambiguïté entre les missions de FranceAgrimer relevant du champ agricole et celles relevant du champ social.

Votre commission a adopté cet article ainsi modifié.

Article 2 - Autorisation de recourir à un marché de conception-réalisation pour construire le pavillon français de l'exposition universelle de Milan de 2015

Commentaire : cet article prévoit que FranceAgrimer est la structure porteuse de la logistique administrative et financière concernant la construction du pavillon français de l'exposition universelle de Milan de 2015, et que, dans ce cadre, l'établissement peut recourir à un marché de conception-réalisation.

I. Le droit en vigueur.

Si un commissaire général de la section française à l'Exposition universelle de Milan de 2015 a été nommé par décret du 22 avril 2013 en la personne de M. Alain Berger, alors délégué interministériel aux industries agroalimentaires et à l'agro-industrie, aucune structure porteuse n'a été officiellement désignée pour assurer les opérations administratives et financières destinées à préparer cet évènement, et notamment pour faire construction le pavillon français.

Les organismes choisis précédemment pour assurer ce type de mission ont été très variés. La présence française à l'exposition internationale spécialisée de Saragosse en 2008, consacrée à l'eau et au développement durable, a été portée par Ubifrance, établissement public industriel et commercial dont les attributions définies par le décret n° 2004-103 du 30 janvier 2004 prévoient qu'il assure précisément la promotion des entreprises françaises à l'étranger. Pour l'exposition universelle de Shanghai en 2010 et pour l'exposition spécialisée de Yeosu de 2012 consacrée à la mer et aux océans, une structure porteuse particulière a été mise en place sous forme de société anonyme à capitaux publics : la COFRES SAS.

Pour l'exposition spécialisée de Milan, le thème choisi, celui de l'alimentation, permet d'envisager d'attribuer le pilotage administratif des opérations nécessaires à la présence française à FranceAgrimer , qui est déjà chargé par la loi d'encourager l'organisation de la mise en marché au niveau international des produits agricoles et alimentaires 2 ( * ) et de contribuer à des actions de coopération internationale 3 ( * ) .

La présence française dans les expositions internationales se manifeste le plus souvent par la construction d'un pavillon français, accueillant les manifestations et exposants de notre pays, ce qui sera de nouveau le cas à Milan. Or la construction de bâtiments est soumise au droit de la commande publique, en particulier au code des marchés publics (CMP) et à la loi n° 85-704 du 12 juillet 1985 relative à la maîtrise d'ouvrage publique et à ses rapports avec la maîtrise d'oeuvre privée dite loi MOP.

Le principe applicable à toute commande publique de travaux est celui de la mise en concurrence à travers un appel d'offres. Ce cadre s'impose à FranceAgrimer. En outre, la loi MOP, également applicable, prévoit une séparation stricte, pour la réalisation d'un ouvrage, entre la mission de maîtrise d'oeuvre (le concepteur) et de celle de celui qui réalise effectivement les travaux (les entrepreneurs), entraînant la nécessité de passer deux marchés distincts : un marché de maîtrise d'oeuvre et un marché de travaux.

L'article 18 de la loi MOP permet cependant de confier par un même marché la mission portant à la fois sur l'établissement des études et l'exécution des travaux, « lorsque des motifs d'ordre technique ou d'engagement contractuel sur un niveau d'amélioration de l'efficacité énergétique rendent nécessaire l'association de l'entrepreneur aux études de l'ouvrage », à travers un marché de conception-réalisation. Mais la jurisprudence administrative est très stricte sur les conditions de recours à de tels marchés et n'admet pas facilement l'utilisation de cette exception au principe de séparation de la maîtrise d'oeuvre et des travaux.

II. Le texte de la proposition de loi.

S'il n'est pas indispensable de modifier la loi pour confier à FranceAgrimer la responsabilité des opérations nécessaires pour assurer la présence française à l'exposition universelle de Milan de 2015, l'attribution d'une telle mission doit faire l'objet d'un acte juridique. Une convention entre l'État et l'établissement pourrait être suffisante. Mais passer par la loi est plus solennel , et identifie FranceAgrimer sans conteste comme le pilote de l'opération Milan 2015, sous l'autorité du commissaire général de l'exposition. L' alinéa 1 précise donc cette mission ponctuelle de FranceAgrimer.

L' alinéa 3 prévoit expressément que le directeur général de FranceAgrimer peut lui déléguer sa signature et lui conférer la qualité d'ordonnateur secondaire de l'établissement pour l'accomplissement des missions de gestion administrative et financière des opérations nécessaires pour assurer la présence française à l'exposition de Milan. FranceAgrimer est donc bien le réceptacle administratif d'une mission placée sous l'autorité du commissaire général de l'exposition.

L' alinéa 2 , pour sa part, précise que FranceAgrimer pourra recourir pour la construction du pavillon français à un marché de conception-réalisation, élargi le cas échéant à l'exploitation ou à la maintenance.

Une telle procédure semble avoir de solides justifications : le cahier des charges imposé par les organisateurs italiens impose de lourdes contraintes en matière de développement durable, exige que le bâtiment soit démontable, la construction doit comprendre la conception d'une muséographie et d'une scénographie inventives, ce tant à l'intérieur qu'à l'extérieur et elle devra supporter pendant les 6 mois de l'exposition, des taux de disponibilité des matériels et de gestion du flux des visiteurs importants de 9 heures à minuit, 7 jours sur 7. Enfin les espaces extérieurs devront intégrer la problématique de gestion des files d'attentes. Un marché de conception-réalisation avait au demeurant déjà été conclu lors des Jeux Olympiques d'Albertville en 1992 et lors de la Coupe du Monde de Football en 1998.

De telles spécificités justifient probablement le recours à un marché de conception-réalisation, mais il s'agit, en autorisant expressément FranceAgrimer à utiliser l'article 69 du code des marchés publics, de prévenir tout risque de recours contentieux portant sur le choix de cette procédure, qui bloquerait la procédure de passation de marché et retarderait l'ouverture du pavillon français, qui doit être livré pour la fin 2014.

III. La position de votre commission.

Votre rapporteure approuve le choix de FranceAgrimer pour porter le pilotage administratif et financier de l'exposition de Milan. Ce choix traduit une confiance du législateur dans les compétences des agents de l'établissement.

Votre rapporteure approuve également la sécurisation du choix de la procédure de conception-réalisation pour la construction du pavillon français de l'exposition. De tels marchés ne se traduisent pas par des coûts plus élevés, la Cour des Comptes ayant même estimé dans son rapport public pour 1993 qu'elle pouvait générer des économies. L'ampleur et le retentissement de l'opération paraissent au demeurant suffisants pour qu'une réelle concurrence puisse avoir lieu entre plusieurs groupements pour l'attribution du marché.

Cette procédure permettra aussi d'aller plus vite, en n'ayant pas deux phases d'appels d'offres, répondant ainsi à l'urgence du projet.

Le renvoi à l'article 69 du CMP paraît pertinent, car cet article fournit le cadre général des marchés de conception-réalisation. Le recours à l'article 73, qui définit les marchés de conception, de réalisation et d'exploitation ou de maintenance, aurait été moins pertinent, car dans de tels marchés, l'entrepreneur ne peut être associé à la conception que pour la réalisation d'engagements de performance énergétique dans un ou des bâtiments existants, ou pour des motifs d'ordre technique, ce qui constitue une formulation trop restrictive.

Votre rapporteure a en outre proposé à votre commission, qui l'a accepté, la suppression du troisième alinéa de l'article. En effet, il n'était pertinent que la loi permette au directeur général de FranceAgrimer de déléguer sa signature et de nommer ordonnateur secondaire de l'établissement le commissaire général de l'exposition que tant que celui-ci n'avait pas de lien juridique avec l'établissement. Or, étant devenu un agent de FranceAgrimer, il peut désormais recevoir délégation de signature du directeur général selon les modalités de droit commun. La précision apportée par le troisième alinéa de l'article 2 n'est donc plus nécessaire.

Votre commission a adopté cet article ainsi modifié.

Au cours de sa réunion du mardi 1 er octobre 2013, la commission des Affaires économiques a adopté, à l'unanimité, l'ensemble de la proposition de loi dans la rédaction issue de ses travaux.


* 2 Troisième alinéa du 2° de l'article L. 621-3 du code rural et de la pêche maritime.

* 3 7° du même article.

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