LA MISSION « ENGAGEMENTS FINANCIERS DE L'ÉTAT »

La maquette du PLF 2014 est inchangée par rapport à celle de la LFI 2013. Toutefois, le programme « Augmentation en capital de la Banque européenne d'investissement (BEI) » (1,62 milliard d'euros dans la LFI 2013) n'est pas doté dans le PLF 2014 et la dotation en capital du MES, qui n'est pas prise en compte dans la norme de dépense que s'applique l'Etat, s'élève à 3,26 milliards d'euros dans le PLF 2014 (contre 6,52 milliards d'euros dans la LFI 2013).


Evolution en valeur et à périmètre courant des crédits de paiement de la mission

(en euros)

Hors BEI et MES, les crédits de la mission s'élèvent à 47,6 milliards d'euros, en légère diminution (- 0,8 %) par rapport à la LFI 2013 (48,01 milliards d'euros).

Evolution en valeur des crédits de paiement de la mission hors MES et BEI

(en euros)

I. LE PROGRAMME 117 « CHARGE DE LA DETTE ET TRÉSORERIE DE L'ETAT »

Dans le PLF 2014, la charge des intérêts de la dette atteint 46,7 milliards d'euros, soit une diminution de 0,2 milliard d'euros par rapport à la LFI 2013 et de 1,7 milliard d'euros par rapport à la prévision 2014 de la LPFP (48,4 milliards d'euros). Toutefois, ce montant traduit une augmentation de 1,7 milliard d'euros par rapport au montant de la charge de la dette (45 milliards d'euros) révisé pour 2013 dans les documents annexés au PLF 2014.

Evolution de la charge de la dette de l'Etat

(en milliards d'euros)

PLF 2014 (46,7)

Source : commission des finances

A. DES CONDITIONS DE FINANCEMENT DE L'ÉTAT TOUJOURS SATISFAISANTES, SOUS L'EFFET DE TAUX D'INTÉRÊT BAS

Le besoin annuel de financement de l'Etat résulte de l'addition de son déficit budgétaire et des amortissements de dette à moyen et long termes ou reprise par l'Etat.

Tableau de financement de l'Etat

(en milliards d'euros)

PS : le besoin et les ressources de financement atteignaient 172,3 milliards d'euros dans le texte de la LFI 2013 mais s'élèvent à 171,3 milliards d'euros (comme figurant dans le tableau ci-dessus) après ajustement pour prise en compte des rachats effectués en fin d'année 2012.

* Charges budgétaires d'indexation et décaissements au titre des investissements d'avenir

Source : PAP de la mission « Engagements financiers de l'Etat »

Suite aux observations de la Cour des comptes, le tableau de financement est présenté différemment dans le projet annuel de performances annexé au PLF 2014, s'agissant des charges d'indexation et des comptes de dépôt relatifs aux investissements d'avenir, comme l'explique le PAP :

« Selon la Cour, la charge budgétaire d'indexation du capital des titres indexés ne devrait pas figurer dans le besoin de financement dans la mesure où elle ne se traduit par aucune sortie en trésorerie. Afin de satisfaire cette recommandation, il est proposé de contrebalancer la charge figurant implicitement dans le déficit budgétaire par une écriture en sens inverse au sein de la ligne « Autres besoins de trésorerie ». Ceci permet, tout en continuant d'afficher un déficit budgétaire incluant cette charge, de neutraliser cette dernière dans le besoin de financement.

« Les comptes de dépôt relatifs aux investissements d'avenir sont actuellement traités comme ceux des autres correspondants du Trésor dans le tableau de financement. Ceci conduit à faire apparaître deux fois les versements opérés sur ces comptes à partir du budget général ou des comptes spéciaux : une fois dans le besoin de financement en tant que dépense participant au déficit budgétaire ; une fois dans les ressources de financement via l'accroissement en parallèle et toutes choses égales par ailleurs de l'encours de ces comptes. Ceci conduit également à traiter comme une ressource négative les décaissements opérés à partir de ces fonds. Les modifications proposées consistent à consolider ces comptes avec le solde budgétaire en distinguant, d'une part, les dotations budgétaires et, d'autre part, les intérêts versés sur les fonds non consommables ainsi que les décaissements opérés.

« En pratique, il est proposé de procéder à une première écriture de consolidation en déduisant du déficit budgétaire les dotations enregistrées simultanément en tant que ressources sur ces comptes de dépôt (matérialisation sur la ligne « Dotations budgétaires au titre des investissements d'avenir »). Une seconde écriture est opérée via la ligne « Autres besoins de trésorerie » avec l'inscription, en négatif, des intérêts versés sur les fonds non consommables (consolidation avec la dépense correspondante enregistrée dans la ligne « déficit budgétaire » via les dépenses du programme « charge de la dette ») et, en positif, des décaissements opérés à partir de ces comptes. In fine , on remplace donc, au niveau du besoin de financement dans sa globalité, les charges budgétaires (dotations et intérêts versés), qui ne pèsent pas sur la trésorerie, par les décaissements opérés à partir de ces comptes et qui sont vraiment représentatifs du besoin de financement de l'année ».

Cette nouvelle présentation consiste ainsi à faire figurer en besoin de financement des éléments figurant auparavant en ressources, en créant en conséquence deux nouvelles lignes en besoin de financement : « Dotations budgétaires au titre des investissements d'avenir » et « Autres besoins de trésorerie ». Ces modifications doivent être saluées, dans la mesure où la charge d'indexation ne se traduit par aucune sortie en trésorerie et qu'il n'était guère lisible de retracer les investissements d'avenir à la fois en besoin et en ressources de financement.

1. Un besoin de financement en 2013 supérieur aux prévisions de la LFI, compensé par une augmentation de l'encours des BTF

Dans le révisé 2013, les amortissements de dette à moyen et long terme sont réduits de 1,2 milliard d'euros par rapport à la LFI suite aux rachats effectués en fin d'année 2012 (à hauteur de 1 milliard d'euros) et à la diminution des suppléments d'indexation versés à l'échéance sur les titres indexés (2,9 milliards d'euros dans le révisé en 2013, en baisse de 0,2 milliard d'euros par rapport aux prévisions de la LFI 2013).

L'amortissement des autres dettes est révisé à la hausse (de 1,6 milliard d'euros 1 ( * ) à 6,1 milliards d'euros) suite à la décision de reprise de la dette de l'établissement public de financement et de restructuration (EPFR) , d'un montant de 4,48 milliards d'euros qui arrive à échéance le 31 décembre 2014. Un article du prochain projet de loi de finances rectificative pour 2013 devrait soumettre cette reprise de dette à l'approbation du Parlement. Cette opération est neutre en comptabilité nationale.

La révision à la hausse du déficit budgétaire (de 62,3 milliards d'euros en LFI à 71,9 milliards d'euros dans le révisé) contribue également à l'augmentation du besoin de financement.

Les autres besoins de trésorerie correspondent, d'une part, à l'évolution des charges budgétaires d'indexation, en augmentation par rapport à la LFI 2013 (de - 3,1 milliards d'euros à - 1,8 milliard d'euros) et, d'autre part, aux décaissements effectués au titre du premier PIA (en diminution de 3,6 milliards d'euros à 2,9 milliards d'euros en 2013 selon les prévisions du Commissariat général à l'investissement).

Au total, le besoin de financement s'élève à 185,8 milliards d'euros en 2013, en hausse de 14,5 milliards d'euros par rapport aux prévisions de la LFI (171,3 milliards d'euros).

Cette hausse du besoin de financement de l'Etat est compensée par l'augmentation de l'encours des BTF (+ 8,1 milliards d'euros d'euros par rapport au 31 décembre 2012, alors que la LFI prévoyait une diminution de l'encours à hauteur de - 0,3 milliard d'euros), la variation positive du compte du Trésor sous l'effet des rachats de titres arrivant à échéance en janvier 2014 et une augmentation des autres ressources de trésorerie, principalement les primes et décotes à l'émission générées par la baisse des taux (à hauteur de 4 milliards d'euros), comme expliqué dans l'encadré ci-après. Il s'agit d'un phénomène récurrent : en 2012, le montant de primes nettes supplémentaires lors des émissions de titres à moyen et long terme, nettes des pertes sur rachats, a atteint près de 6 milliards d'euros par rapport aux prévisions de la loi de finances initiale.

Les primes et décotes à l'émission

Dans le cadre de sa politique d'émission à moyen et long terme, l'Agence France Trésor complète les émissions sur lignes nouvelles par la réouverture d'anciennes « souches ». Emettre des titres sur des souches anciennes conduit en règle générale à l'apparition d'une différence entre le taux facial servi et le taux attendu par le souscripteur, le premier reflétant les conditions de marché au moment de la création de la ligne et le second celles prévalant lors de la réémission. Si le taux facial est inférieur à celui attendu par le souscripteur, ce dernier achètera les titres moins chers que leur valeur de remboursement afin que la rentabilité de son investissement soit conforme au rendement attendu. Si, à l'inverse, le taux facial est supérieur à celui attendu par le souscripteur, ce dernier achètera les titres plus chers que leur valeur de remboursement. Les primes et décotes sont la conséquence, en trésorerie, de cet écart entre prix d'achat d'un titre et valeur de remboursement. On parle de prime lorsque le prix d'achat est supérieur à la valeur de remboursement (l'Etat encaisse, en trésorerie, plus d'argent qu'il n'en versera lors du remboursement) et de décote dans le cas contraire (l'Etat encaisse, en trésorerie, moins d'argent qu'il n'en versera lors du remboursement). Dans un contexte où les taux d'intérêt de moyen et long termes demeurent inférieurs aux taux atteints les années précédentes, l'abondement des lignes anciennes engendre des primes à l'émission, qui constituent une ressource de trésorerie pour l'Etat.

Source : Agence France Trésor

La variation des dépôts des correspondants est révisée à la hausse (de + 0,3 milliard à + 2,2 milliards d'euros), en raison notamment de nouvelles hypothèses d'augmentation des encours des collectivités territoriales, alors que la loi de finances initiale anticipait leur stabilisation.

Les prévisions d'émissions de dette à moyen et long terme nettes des rachats en 2013 s'établissent à 169 milliards d'euros, en légère diminution (- 1 milliard d'euros) par rapport au programme d'émissions de la LFI.

Les ressources affectées à la Caisse de la dette publique et consacrées au désendettement sont révisées à la baisse (- 4 milliards d'euros par rapport à la LFI), traduisant l'absence de recettes de cessions de participation affectées au désendettement de l'Etat en 2013.

Comme analysé ci-dessus dans la présentation des crédits relatifs à la charge de la dette, le financement de la dette de l'Etat continue de bénéficier de conditions de financement favorables.

Concernant la réalisation du programme de financement de l'Etat en 2013, le volume net d'émissions s'élevait, fin septembre 2013 , à 134,3 milliards d'euros, correspondant à un taux de réalisation du programme annuel (lequel s'élève à 169 milliards d'euros) à hauteur de 79,5 %, soit un rythme comparable à celui de l'année 2012 (78,3 % fin septembre 2012).

En ce qui concerne le financement de la dette française, dans le projet annuel de performances de la mission « Engagements financiers de l'Etat » annexé au projet de loi de finances pour 2014, l'Agence France Trésor (AFT) observe que le contexte financier reste très favorable :

« Après le regain de tensions observé au printemps et au début de l'été 2012, une période de détente s'est ouverte pour les taux des titres souverains de la zone euro sous l'effet, en particulier, des décisions du Conseil européen de juin 2012, de l'entrée en vigueur des mécanismes de coordination budgétaire et des annonces de la Banque centrale européenne. Les pays qui, comme l'Espagne et l'Italie, avaient pâti au printemps de la défiance des marchés ont été les principaux bénéficiaires de cette détente. Mais cette détente a également profité à l'Allemagne et à la France : le taux à 10 ans français est ainsi passé sous le seuil de 2 % en avril-mai, le TEC 10 2 ( * ) établissant un record à 1,67 % le 3 mai, gommant ainsi tout écart avec le taux équivalent américain (ce dernier était jusqu'alors sensiblement inférieur). Toutefois, dès la fin avril 2013, les signes d'amélioration de la conjoncture aux États-Unis ont poussé les marchés à anticiper une politique monétaire moins accommodante.

« Ces anticipations ont été confortées fin mai lorsque le président de la Réserve fédérale américaine, Ben Bernanke, a déclaré que la Réserve fédérale pourrait commencer à réduire le montant de ses achats (« tapering ») de titres dans un avenir proche si la reprise de l'économie se confirmait. Un mouvement de remontée rapide et généralisée des taux s'est alors enclenché : entre début mai et fin août 2013, le taux à 10 ans américain est passé de 1,7 % à près de 2,8 % et le taux à 10 ans français de 1,7 % à 2,5 %.

« L'effet d'entraînement avéré des taux américains et les nouvelles conjoncturelles encourageantes publiées durant l'été en zone euro ont conduit à retenir un scénario prudent pour la fin de l'année 2013 et l'année 2014. Après avoir progressé de trois quarts de point entre le début mai et la fin août, le taux à 10 ans français progresserait d'un demi-point d'ici la fin de l'année 2013 et d'encore un demi-point en 2014, atteignant alors 3,5 % en toute fin d'année. Ce scénario est nettement plus prudent que celui du Consensus forecast qui, en septembre, anticipe un niveau de 2,5 % pour le 10 ans français à la fin de 2013 et de 2,6 % à la fin septembre 2014, soit à peine plus que le niveau observé fin août. Il convient de noter que, du fait de l'impact différé et limité d'une variation des taux de marché sur la charge budgétaire des titres à moyen et long terme, un écart, même important, par rapport au scénario retenu n'aurait que peu d'impact sur la charge budgétaire de 2014 » 3 ( * ) .

Compte tenu du faible niveau des taux d'intérêt, l'évolution de la charge de la dette a ainsi été nettement moins dynamique que celle de l'encours de la dette négociable , comme le montre le graphique ci-après.

Evolution comparée 2008-2014
de la charge de la dette et de l'encours de la dette (valeur actualisée)

(en milliards d'euros)

Echelle de gauche : encours de la dette. Echelle de droite : charge de la dette

Source : commission des finances

2. La couverture du besoin de financement en 2014

Les dotations budgétaires au titre des investissements d'avenir s'élèvent à 12 milliards d'euros dans le PLF 2014, et sont à déduire du montant du déficit budgétaire (82,2 milliards d'euros) pour établir le niveau du déficit à financer. Le besoin de financement à ce titre, au fur et à mesure des décaissements, figure dans la nouvelle ligne « Autres besoins de trésorerie » du tableau de financement.

Les ressources de financement en 2014 proviennent pour l'essentiel des émissions nouvelles de dette à moyen et long terme nettes de rachats qui s'élèvent à 174 milliards d'euros. Elles comprennent également les ressources affectées à la Caisse de la dette publique et consacrées au désendettement, fixées à 1,5 milliard d'euros, ainsi que d'autres ressources de trésorerie (0,5 milliard d'euros) qui représentent le montant des suppléments d'indexation perçus à l'émission des titres indexés.

L'encours des BTF est stabilisé, de même que les dépôts des correspondants.

Le solde du compte de Trésor diminuerait de 1 milliard d'euros entre le 31 décembre 2013 et le 31 décembre 2014, correspondant à une augmentation des ressources de financement, en raison de moindres amortissements de la dette de moyen et long terme arrivant à échéance en janvier 2015 par rapport à janvier 2014.

Comme en 2013, les annulations de titres de l'Etat par la Caisse de la dette publique (à hauteur de 1,5 milliard d'euros dans le PLF 2014) correspondent à d'éventuelles cessions de participation qui seraient affectées au désendettement de l'Etat. Comme pour les cessions de participation inscrites sur le compte d'affectation spéciale « Participations financières de l'Etat », il s'agit d'une inscription « pour ordre » ( cf . infra ).

L'impact des investissements d'avenir sur le solde de trésorerie est examiné ci-après 4 ( * ) .


* 1 Ces amortissements correspondent aux dettes de la SNCF, à hauteur de 1,1 milliard d'euros, et de Charbonnage de France (0,5 milliard d'euros).

* 2 Taux de l'échéance constante.

* 3 PAP annexé à la mission « Engagements financiers de l'Etat ». Citation p. 31-32. Les éléments soulignés le sont par votre rapporteur spécial.

* 4 Paragraphe I D.

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