EXAMEN DE L'ARTICLE RATTACHÉ

ARTICLE 62 nonies (nouveau) (Art. L 115-1 du code du cinéma et de l'image animée) - Extension aux départements d'outre-mer du dispositif de soutien à l'industrie cinématographique et de son financement par la taxe sur le prix des entrées aux spectacles cinématographiques

Commentaire : le présent article vise à étendre aux départements d'outre-mer l'application de la taxe sur les entrées en salle de cinéma et le bénéfice des soutiens automatiques du CNC qui en constitue la contrepartie.

I. LE DROIT EXISTANT : LA TAXE SUR LES ENTRÉES EN SALLE DE CINÉMA

Créée par la loi du 23 septembre 1948 30 ( * ) , la taxe sur le prix des entrées aux séances organisées par les exploitants d'établissements de spectacles cinématographiques est la plus ancienne des taxes affectées au Centre national du cinéma et de l'image animée (CNC).

Aux termes de l'article L 115-1 du code du cinéma et de l'image animée, la taxe est assise sur le prix des entrées aux séances organisées par les exploitants d'établissements de spectacles cinématographiques situés en France métropolitaine , quel que soit le procédé de fixation ou de transmission et la nature du support des oeuvres ou documents cinématographiques ou audiovisuels qui y sont représentés.

Par ailleurs, le prix des entrées aux séances s'entend du prix effectivement acquitté par le spectateur ou, en cas de formule d'accès au cinéma donnant droit à des entrées multiples, du prix de référence par place et qui constitue la base de la répartition des recettes entre l'exploitant de l'établissement de spectacles cinématographiques et le distributeur et les ayants droit de chaque oeuvre ou document cinématographique ou audiovisuel.

La taxe est calculée en appliquant sur le prix des entrées aux séances organisées par les exploitants des salles de cinéma un taux de 10,72 % .

Ce taux est multiplié par 1,5 en cas de représentation d'oeuvres ou de documents à caractère pornographique ou d'incitation à la violence.

La taxe est due mensuellement par chaque établissement de spectacles cinématographiques, pour les semaines cinématographiques achevées dans le mois considéré et au cours desquelles ont été organisées au moins deux séances.

Les redevables s'en acquittent directement auprès de l'agent comptable du CNC.

D'après le tome I du programme « Voies et moyens » annexé au projet de loi de finances pour 2014, le rendement de cette taxe est estimé à 134 millions d'euros en 2014 31 ( * ) .

Aux termes de l'article 15 du décret n° 99-130 du 24 février 1999 relatif au soutien financier de l'industrie cinématographique, le paiement de la taxe ouvre droit à certains soutiens dits « automatiques » , au profit des exploitants de salles et des producteurs et distributeurs de films , mis en oeuvre par le CNC . Le montant de ces soutiens est proportionnel au produit de la taxe et résulte de l'application de taux fixés par arrêté conjoint du ministre chargé de la culture, du ministre chargé de l'économie et des finances et du ministre chargé du budget.

II. LE DISPOSITIF ADOPTÉ PAR L'ASSEMBLÉE NATIONALE

La taxe sur les entrées de cinéma n'est actuellement en vigueur que sur le territoire métropolitain . Dans la mesure où les soutiens du CNC sont conditionnés au paiement de la taxe, ces mêmes soutiens demeurent donc inaccessibles aux producteurs et distributeurs métropolitains et ultra-marins à raison de l'exploitation de leurs films dans les départements d'outre-mer (DOM) 32 ( * ) .

Le présent article, adopté par l'Assemblée nationale à l'initiative de notre collègue Hervé Féron, rapporteur pour avis au nom de la commission des affaires culturelles et de l'éducation, avec l'avis favorable du Gouvernement 33 ( * ) , a donc pour projet d'étendre le champ d'application de la taxe aux DOM , soit la Guadeloupe, la Guyane, la Martinique et la Réunion, ce qui les rendrait éligibles aux soutiens automatiques du CNC.

Pour cela, le I du présent article complète le premier alinéa de l'article L. 115-1 du code du cinéma et de l'image animée, en insérant les mots « ou dans les départements d'outre-mer », après le mot « métropolitaine ».

Par ailleurs, le présent article prévoit une entrée en vigueur différée au 1 er janvier 2015 ( III ) et une montée en puissance progressive du taux de la taxe ( II ), comme l'indique le tableau ci-dessous.

Taux de la TSA applicables aux départements d'outre-mer

Taux

Période d'application

1 %

Du 1 er janvier au 31 décembre 2015

2 %

Du 1 er janvier au 31 décembre 2016

3 %

Du 1 er janvier au 31 décembre 2017

5 %

Du 1 er janvier au 31 décembre 2018

6,5 %

Du 1 er janvier au 31 décembre 2019

8 %

Du 1 er janvier au 31 décembre 2020

Source : Article 62 nonies

Dans la mesure où les taux dérogatoires prévus par le présent article cessent de s'appliquer fin 2020, il s'en déduit que les DOM se verront appliquer le taux de droit commun de 10,72 % à compter du 1 er janvier 2021 .

Ces délais et cette progressivité doivent permettre de régulariser les conditions d'application des régimes d'autorisation d'exercice pour les salles, de mettre en conformité les équipements et la billetterie et d'aménager certaines conditions d'exploitation spécifiques à l'outre-mer.

Le compte-rendu du débat de l'Assemblée nationale ne mentionne aucune estimation des recettes associées à l'extension de la TSA selon le dispositif proposé.

Un dispositif très proche avait été proposé par le Gouvernement dans le projet de loi de finances rectificative de décembre 2010 34 ( * ) . Toutefois, cette disposition avait été supprimée par le Sénat, à l'initiative de nos collègues d'outre-mer. Ces derniers estimaient en effet que la taxe représenterait plus de 1 million d'euros pour les Antilles et la Guyane, et plus de 2 millions d'euros pour l'ensemble des DOM, ce qui risquait de « faire disparaître l'activité cinématographique outre-mer 35 ( * ) ». De surcroît, ils considéraient que « les petits exploitants sont déjà aidés et que la taxe en question ne leur apportera absolument rien 36 ( * ) ».

III. LA POSITION DE VOTRE COMMISSION DES FINANCES

Il est proposé de supprimer cet article, en cohérence avec la position exprimée par le Sénat en 2010 . En effet, au regard des appréciations portées en 2010 par nos collègues d'outre-mer sur un dispositif très proche, la pertinence et l'utilité d'une telle disposition paraissent limitées, voire contre-productives.

Décision de la commission : votre commission vous propose de supprimer cet article.


* 30 Loi n° 48-1474 du 23 septembre 1948 instituant une aide temporaire à l'industrie cinématographique.

* 31 Cette prévision se fonde sur une hypothèse de fréquentation de 195 millions d'entrées et sur un prix moyen du billet de 6,42 euros.

* 32 Actuellement, le secteur de l'industrie cinématographique dans les DOM n'est soutenu par le CNC, en l'absence d'assujettissement à la taxe sur le prix des entrées, que sur une base sélective limitée, via des crédits délégués par le ministre de la culture et de la communication.

* 33 La commission des finances de l'Assemblée nationale n'ayant pu se prononcer sur cette disposition, le rapporteur spécial a donné à titre personnel un avis favorable.

* 34 Article 35 du projet de loi.

* 35 Source : compte-rendu des débats sur l'article 35 du projet de loi de finances rectificative pour 2010 de décembre 2010.

* 36 Idem.

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