TITRE II - DISPOSITIONS VISANT À PRÉCISER LE RÉGIME
DE L'EXÉCUTION DES PEINES ET À RENFORCER LE SUIVI ET LE CONTRÔLE DES PERSONNES CONDAMNÉES
CHAPITRE IER - PRINCIPES RÉGISSANT LA MISE EN oeUVRE DES PEINES

Article 11 (Art. 707, 705-5 [nouveau], 708-1 [nouveau], 720-1 et 723-1 du code de procédure pénale et art. 1er de la loi n° 2009-1436 du 24 novembre 2009 pénitentiaire) - Définition des principes régissant l'exécution des peines

Le présent article tend à réécrire les deuxième et troisième alinéas de l'article 707 du code de procédure pénale.

Le deuxième alinéa, issu de l'article 159 de la loi du 9 mars 2004, prévoit actuellement que « l'exécution des peines favorise, dans le respect des intérêts de la société et des droits des victimes, l'insertion ou la réinsertion des condamnés ainsi que la prévention de la récidive ».

Le troisième alinéa, issu de l'article 72 de la loi pénitentiaire du 24 novembre 2009, rappelle le principe d'individualisation des peines, prévoit leur aménagement ab initio ou en cours d'exécution et pose le principe d'un retour progressif à la liberté qui doit éviter une remise en liberté « sans aucune forme de suivi judiciaire ».

La réécriture opérée par le présent article poursuit trois objectifs :

- mettre en évidence les droits des victimes dans le processus de l'exécution de la peine ;

- reformuler les principes directeurs de l'exécution des peines en cohérence avec la nouvelle définition du sens de la peine figurant à l'article premier du projet de loi ;

-préciser le principe du retour progressif à la liberté.

Ainsi, le présent article insère d'abord un II au sein de l'article 707, disposant que la victime peut, au cours de l'exécution de la peine, saisir l'autorité judiciaire de toute atteinte à ses intérêts, obtenir réparation de son préjudice, être informée si elle le souhaite de la fin de l'exécution d'une peine privative de liberté, enfin avoir droit, s'il y a lieu, à ce que soit prise en compte la nécessité de garantir sa tranquillité et sa sûreté. Il est ajouté que « l'autorité judiciaire est tenue de garantir l'intégralité de ces droits tout au long de l'exécution de la peine quelles qu'en soient les modalités ». Ce faisant, le projet de loi ne crée pas de droits nouveaux pour les victimes mais fixe un cadre général aux droits déjà prévus par la loi en vigueur .

Actuellement, les conditions de la prise en compte de l'intérêt de la victime au cours de l'exécution de la peine sont notamment prévues par les articles 712-16 et suivants du code de procédure pénale, qui résultent de la loi n° 2010-242 du 10 mars 2010, et par diverses dispositions réglementaires du code de procédure pénale (cf. encadré ci-dessous).

Possibilité pour la victime de saisir l'autorité judiciaire de toute atteinte à ses intérêts et d'obtenir dédommagement

La possibilité pour la victime de saisir l'autorité judiciaire de toute atteinte à ses intérêts est déclinée dans la loi dans plusieurs dispositions :


• Elle peut faire valoir ses observations auprès de la juridiction de l'application des peines lorsque celle-ci la sollicite avant de prendre une décision d'aménagement d'une peine privative de liberté avant l'échéance de la peine (article 712-16-1 du code de procédure pénale) ;


• Son avocat peut assister à certains débats contradictoires pour faire valoir ses observations sur les demandes de libération conditionnelle concernant des personnes condamnées à une peine d'emprisonnement égale ou supérieure à cinq ans ou à une peine de réclusion (articles 730 et D 49-74 du code de procédure pénale), sur les demandes de relèvement de la période de sûreté ou de suspension de peine pour raison médicale qui relèvent de la compétence du tribunal de l'application des peines (article D.49-74 du code de procédure pénale) ;


• La victime peut signaler au juge de l'application des peines ou à défaut au procureur de la République les manquements du condamné aux obligations la concernant (article D49-68 du code de procédure pénale).

- Par ailleurs, un certain nombre de dispositions permettent à la victime d'obtenir au stade de l'exécution des peines réparation du préjudice qu'elle a subi :


• Une part des valeurs pécuniaires de tout condamné détenu est affectée de droit à l'indemnisation des parties civiles (elle peut être versée directement aux parties civiles par l'établissement pénitentiaire à la demande du procureur de la République : article 728-1 du code de procédure pénale) ;


• la réparation des dommages causés par l'infraction peut constituer une obligation du sursis avec mise à l'épreuve (article 132-45 du code pénal), mais également de l'ensemble des aménagements de peine et des mesures de sûreté ;


• l'effort volontaire d'indemnisation des victimes est pris en compte pour l'octroi des réductions de peine supplémentaires (article 721-1 du code de procédure pénale). Le JAP peut également soumettre le condamné ayant bénéficié d'un crédit de réduction de peine ou d'une réduction supplémentaire de peine à l'obligation d'indemniser la partie civile après sa libération. La sanction du non-respect de cette interdiction est le retrait de ces réductions de peines conditionnelles et la réincarcération (article 721-2 du code de procédure pénale).

Le présent article insère ensuite un III reprenant la seconde partie de la définition de la peine donnée par l'article premier de la loi pénitentiaire, elle-même inspirée par les dispositions de l'article 132-24 du code pénal relatives à l'individualisation. Ce III de l'article 707 prévoit ainsi que « Le régime d'exécution des peines privatives et restrictives de liberté vise à préparer l'insertion ou la réinsertion de la personne condamnée afin de lui permettre d'agir en personne responsable, respectueuse des règles et des intérêts de la société et d'éviter la commission de nouvelles infractions ».

Le III précise par ailleurs que le régime d'exécution de la peine est adapté au fur et à mesure de son exécution « en fonction de l'évolution de la personnalité du condamné, dont la situation fait l'objet d'évaluations régulières », allant ainsi au-delà de la seule notion d' « aménagement de peine » prévue par le troisième alinéa de l'article 707 actuel 102 ( * ) . Par ailleurs, la notion d'évaluation fait l'objet d'une recommandation de la conférence de consensus, dont le rapport fait valoir que « L'évaluation peut fournir des informations pertinentes et essentielles après la décision de condamnation ».

Enfin, le présent article crée un IV qui précise, par rapport à la rédaction actuelle du troisième alinéa de l'article 707, les modalités du retour progressif à la liberté qui doit bénéficier à la personne chaque fois que cela est possible : ces modalités sont la semi-liberté, le placement à l'extérieur, le placement sous surveillance électronique, la libération conditionnelle ou la libération sous contrainte.

La nouvelle rédaction proposée pour l'article 707 par le présent article ne reprend pas le dernier alinéa de sa version actuelle, qui dispose qu'« en cas de délivrance d'un mandat de dépôt ou d'arrêt, les peines privatives de liberté peuvent être immédiatement aménagées, dans les conditions prévues par le présent code, sans attendre que la condamnation soit exécutoire conformément au présent article, sous réserve du droit d'appel suspensif du ministère public ». Ces dispositions sont en effet supprimées par le 3° du I du présent article et transférées, par le I bis de ce dernier, au sein d'un nouvel article 707-5 du code de procédure pénale.

- Les compléments apportés par l'Assemblée nationale

La commission des lois de l'Assemblée nationale a adopté un amendement de son rapporteur ayant pour objet de faire figurer les droits de la victime après les objectifs de réinsertion . En effet, l'ordre d'origine aurait pu, selon le rapporteur, donner l'impression que les droits de la victime primeraient sur l'intérêt de la société. Dans le même ordre d'idées, elle a adopté un amendement de son rapporteur précisant que le régime d'exécution des peines privatives et restrictives de liberté a pour objet de préparer l'insertion ou la réinsertion du condamné afin de lui permettre de mener une vie responsable, respectueuse non seulement des règles, mais également des intérêts de la société.

Par ailleurs, la commission des lois de l'Assemblée nationale a adopté un amendement de son rapporteur précisant que le régime d'exécution des peines privatives et restrictives de liberté est adapté en fonction non seulement de la personnalité du condamné, mais également de sa situation matérielle, familiale ou sociale , précision saluée par de nombreuses personnes entendues par votre rapporteur.

Enfin, en séance publique, les députés ont adopté un amendement de M. Alain Tourret et plusieurs de ses collègues visant à améliorer la situation des femmes enceintes en prison. Ainsi, cet amendement :

- insère un article 708-1 dans le code de procédure pénale, prévoyant que le procureur de la République ou le juge de l'application des peines prennent toutes les dispositions utiles afin qu'aucune femme enceinte ne puisse être placée ou maintenue en détention au-delà de la douzième semaine de grossesse. Cette disposition ne concernerait pas les crimes. Elle ne s'appliquerait pas non plus aux délits commis contre les mineurs. ;

- modifie l'article 720-1 du code de procédure pénale relatif au fractionnement des peines en matière correctionnelle. Cet article prévoit que, lorsqu'il reste à subir par la personne condamnée une peine d'emprisonnement inférieure ou égale à deux ans, cette peine peut, pour motif d'ordre médical, familial, professionnel ou social et pendant une période n'excédant pas quatre ans, être suspendue ou exécutée par fractions, aucune de ces fractions ne pouvant être inférieure à deux jours. L'amendement étend ce dispositif aux femmes condamnées ayant à purger un reliquat de peine de quatre ans, lorsqu'elles sont enceintes de trois mois ;

- modifie l'article 723-1 du code de procédure pénale afin d'étendre aux femmes enceintes de trois mois le dispositif dérogatoire de libération conditionnelle jusqu'alors réservé aux personnes élevant un enfant de moins de dix ans.

Ce sujet a notamment été évoqué par le Contrôleur général des lieux de privation de liberté dans son avis du 8 août 2013.

Votre rapporteur estime que les mesures proposées par cet amendement sont intéressantes mais que leur formulation trop systématique pourrait comporter de graves inconvénients. Dès lors, votre commission a adopté un amendement de votre rapporteur créant un article additionnel reprenant et modifiant ces dispositions (voir infra - commentaire de l'article 11 bis AA).

Par ailleurs, les députés ont adopté en séance public un amendement du Gouvernement prévoyant que la victime, dans le cadre de son droit à obtenir la réparation de son préjudice, peut se voir proposé s'il y a lieu une mesure de justice restaurative.

Compte tenu des modifications opérées par les députés, et notamment le rétablissement de l'ordre traditionnel faisant primer l'intérêt de la société et donc la réinsertion du condamné, votre rapporteur approuve les dispositions du présent article qui permettent de fixer un cadre clair et complet pour l'exécution des condamnations.

Votre commission a adopté l'article 11 ainsi modifié .

Article 11 bis AA (nouveau) (art. 708-1 [nouveau], 720-1, 723-1 et 723-7 du code de procédure pénale) - Dispositions sur l'exécution des peines pour les femmes enceintes

Le présent article, issu d'un amendement de votre rapporteur, reprend les dispositions introduites par les députés à l'article 11 relatives aux femmes enceintes (voir supra - commentaire de l'article 11).

Toutefois, il modifie les dispositions prévoyant l'impossibilité qu'une femme enceinte reste en détention en prévoyant une formulation moins systématique qui laisse au procureur de la République et au juge de l'application des peines un pouvoir d'appréciation sur les situations : « Lorsque doit être mise à exécution une condamnation à une peine d'emprisonnement concernant une femme enceinte de plus de trois mois, le procureur de la République ou le juge de l'application doivent rechercher s'il est possible soit de différer cette mise à exécution, soit faire en sorte que la peine s'exerce en milieu ouvert ».

En effet, l'impossibilité totale de placer en détention toute femme enceinte de trois mois risquerait d'être instrumentalisée par les réseaux criminels.

Pour le reste, le présent article additionnel n'effectue que des modifications rédactionnelles dans les dispositions adoptées par les députés à l'article 11.

Votre commission a adopté l'article 11 bis AA ainsi rédigé .

Article 11 bis A (art. 706-15-4 [nouveau] du code de procédure pénale) - Présence d'un bureau d'aide aux victimes par TGI

Le présent article, issu d'un amendement du Gouvernement adopté par les députés lors de l'examen du projet de loi en séance publique, vise à consacrer dans la partie législative du code de procédure pénale l'existence des bureaux d'aide aux victimes (BAV).

Créés au cours des dernières années, les bureaux d'aide aux victimes ont été généralisés avec l'adoption du décret n° 2012-681 du 7 mai 2012.

Gérés par des associations d'aide aux victimes mais installés au sein même des palais de justice , les BAV ont pour mission d'informer les victimes et de répondre aux difficultés qu'elles sont susceptibles de rencontrer tout au long de la procédure pénale, notamment à l'occasion de toute procédure urgente telle que la procédure de comparution immédiate.

A leur demande, ils renseignent les victimes sur le déroulement de la procédure pénale et les aident dans leurs démarches. Ils peuvent se voir chargés de délivrer aux victimes toutes les informations dont celles-ci peuvent être destinataires en application du code de procédure pénale. Ils travaillent conjointement avec les huissiers et les barreaux locaux.

Alors que l'article D. 47-6-15 du code de procédure pénale, créé par le décret du 7 mai 2012 précité, fait de leur création dans chaque TGI une simple faculté, leur généralisation, confirmée dans la circulaire de politique pénale de la garde des sceaux du 19 septembre 2012, a donné lieu à une circulaire spécifique datée du 9 janvier 2013.

L'extension du dispositif a été rapide : on comptait ainsi 50 BAV au 31 décembre 2012, 129 au 1 er août 2013 ; la totalité des tribunaux devaient en être dotés au 1 er janvier 2014 .

Dans leur rapport d'information, publié au nom de votre commission des lois, consacré à l'indemnisation des victimes d'infractions pénales, nos collègues Philippe Kaltenbach et Christophe Béchu ont dressé un bilan positif de ces bureaux d'aide aux victimes, tout en alertant sur les conditions préalables indispensables à leur bon fonctionnement :

« L'avis des personnes entendues par vos rapporteurs a été unanime sur l'intérêt réel de ces bureaux d'aide aux victimes et l'opportunité de les généraliser . Vos rapporteurs ont pu constater par eux-mêmes le fonctionnement de deux BAV lors de leurs déplacements au TGI de Lyon et au TGI d'Angers.

« L'efficacité de ces structures dépendra toutefois de plusieurs éléments.

« Tout d'abord, comme le relève en filigrane la circulaire de politique pénale du 19 septembre 2012, il est nécessaire d'intégrer pleinement les BAV dans les palais de justice et de leur octroyer un emplacement qui soit à la fois visible et facilement accessible pour les victimes tout en assurant la confidentialité des échanges : vos rapporteurs ont pu constater au cours de leurs déplacements que cet enjeu d'architecture judiciaire était loin d'être anecdotique.

« Par ailleurs, le fonctionnement des BAV au quotidien dépend très largement de la structure associative du ressort du tribunal. À titre d'exemple, alors que les BAV du Mans et d'Angers sont tenus par une unique association, le BAV de Lyon est pour sa part tenu « par roulement » par trois associations différentes, ce qui peut susciter ponctuellement des tensions ou des risques de perte d'informations comme l'a expliqué à vos rapporteurs M. Jacques Beaume, procureur général. Une réflexion sur la structuration de ces BAV sera sans doute nécessaire à l'issue des premiers retours d'expérience.

« Enfin, comme l'ont observé les représentantes de l'USM, le bon fonctionnement des BAV dépendra de la mise à disposition de personnels de greffe habilités à consulter le bureau d'ordre national. En effet, la seule consultation du logiciel Cassiopée pour renseigner une victime sur l'état d'avancement de sa plainte ne peut être effectuée que par un personnel judiciaire habilité. Il sera donc nécessaire de dégager les emplois de personnels de greffe suffisants pour permettre aux BAV d'exercer pleinement leurs missions.

« En tout état de cause, au vu des appréciations extrêmement positives dont ces bureaux font l'objet, vos rapporteurs ne peuvent que préconiser la pérennisation de ces bureaux d'aide aux victimes, accompagnée du dégagement des moyens nécessaires à leur bon fonctionnement » 103 ( * ) .

Les efforts importants déployés par le Gouvernement ont permis de doter chaque TGI d'un bureau d'aide aux victimes.

Le présent article prend acte de ce déploiement du dispositif, en posant dans un nouvel article 706-15-4 du code de procédure pénale le principe d'existence d'un BAV dans chaque tribunal de grande instance, tout en renvoyant à la partie réglementaire de ce code la définition de leur composition, de leurs missions et de leurs modalités de fonctionnement.

Par cette reconnaissance, il obligera le Gouvernement à dégager chaque année les crédits nécessaires pour assurer le bon fonctionnement de ces structures.

Votre commission a adopté l'article 11 bis A sans modification .

Article 11 bis (art. 706-15-3 [nouveau] du code de procédure pénale) - Amélioration du dispositif d'indemnisation des victimes d'infractions pénales

Le présent article, inséré par la commission des lois de l'Assemblée nationale sur proposition de son rapporteur, M. Dominique Raimbourg, vise à apporter plusieurs modifications au dispositif d'indemnisation des victimes d'infractions pénales.

Comme l'ont souligné nos collègues Christophe Béchu et Philippe Kaltenbach dans un récent rapport d'information consacré à l'indemnisation des victimes d'infractions pénales 104 ( * ) , la France s'est progressivement dotée d'un dispositif complet en la matière, alliant le droit pour la victime de se constituer partie civile au cours de la procédure pénale et l'existence d'un système d'indemnisation fondé sur le principe de la solidarité nationale pour la prise en charge des dommages les plus lourds.

Ce dernier repose largement sur les indemnisations accordées par la commission d'indemnisation des victimes d'infractions (CIVI) et versées par le Fonds de garantie des victimes des actes de terrorisme et d'autres infractions (FGTI), sur le fondement de plusieurs dispositifs tenant compte selon les cas de la nature de l'infraction subie, des ressources de la victime et/ou de l'existence d'une décision judiciaire statuant sur l'allocation de dommages et intérêts 105 ( * ) .

Le présent article propose d'apporter deux modifications à ce dispositif, pour partie inspirées des recommandations formulées par nos collègues dans leur rapport d'information précité.

1. Le I du présent article s'inspire de la recommandation formulée par nos collègues tendant à confier à un organisme collecteur le soin de jouer le rôle d'interface entre la victime et l'auteur des faits et, au regard de l'expérience et de l'expertise de celui-ci en la matière, de confier ce rôle au FGTI.

Il propose ainsi de permettre à l'auteur d'une infraction (ou à la personne civilement responsable), lorsque la victime ne s'est pas constituée partie civile, de procéder au versement volontaire d'une somme d'argent, en réparation du préjudice causé par l'infraction, auprès du FGTI.

Il appartiendrait alors à ce Fonds d'effectuer les démarches nécessaires pour retrouver la victime et lui proposer d'être indemnisée de son préjudice.

En cas d'impossibilité pour le Fonds de trouver la victime, ou si celle-ci ne souhaite pas être indemnisée, un décret déterminerait l'affectation de la somme d'argent. Le rapport de M. Dominique Raimbourg suggère par exemple que ces sommes puissent être affectées au financement d'associations de contrôle judiciaire 106 ( * ) .

Ces dispositions seraient également applicables lorsque l'auteur a été condamné au paiement de dommages et intérêts mais qu'il est dans l'impossibilité de connaître l'adresse de la victime.

Si votre commission partage sans réserves les objectifs poursuivis par ces dispositions, elle s'est toutefois interrogée sur les difficultés d'application que celles-ci, dans leurs modalités, seraient susceptibles de soulever.

En effet, s'il est compétent pour indemniser les victimes dans un certain nombre de circonstances et pour exercer des actions récursoires à l'encontre des auteurs, le FGTI ne dispose en revanche d'aucunes prérogatives pour retrouver les victimes d'infractions qui ne se seraient pas manifestées au cours de la procédure ou qui ne seraient pas portées parties civiles.

Il est par ailleurs singulier de confier une nouvelle mission au FGTI tout en prévoyant l'affectation à d'autres personnes morales du produit des versements effectués volontairement par les auteurs d'infractions.

Cela est d'autant plus contestable que les ressources du Fonds (principalement le produit d'une taxe sur les contrats d'assurance de biens ainsi que celui des actions récursoires exercées contre les auteurs) ne lui permettent désormais que partiellement de couvrir les dépenses qui lui incombent au titre des différents régimes d'indemnisation des victimes.

Les délais impartis au Sénat pour l'examen du présent projet de loi n'ont, à ce stade, pas permis à votre rapporteur de proposer d'apporter à ce dispositif les améliorations nécessaires. Votre commission estime toutefois que la réflexion devra se poursuivre d'ici la séance publique.

2. Le II du présent article propose d'attribuer une nouvelle ressource au FGTI.

En l'état du droit, le « pécule » des personnes détenues est régi par l'article 728-1 du code de procédure pénale, qui le scinde en trois parts :

- une première est réservée à l'indemnisation des parties civiles et des créanciers d'aliments ;

- la seconde constitue une somme dont l'intéressé ne pourra disposer qu'à sa libération ;

- enfin, la troisième part est laissée à la libre disposition du détenu, ce qui lui permet, notamment, de « cantiner » (voir encadré).

Gestion des valeurs pécuniaires des détenus

La gestion des valeurs pécuniaires des détenus est précisée par les articles D. 319 et suivants du code de procédure pénale.

Ceux-ci prévoient notamment :

Article D. 320-1 :

« La première part, affectée à l'indemnisation des parties civiles et créanciers d'aliments, est déterminée en appliquant à la fraction des sommes qui échoient aux détenus les taux de :

« - 20 %, pour la fraction supérieure à 200 euros et inférieure ou égale à 400 euros ;

« - 25 %, pour la fraction supérieure à 400 euros et inférieure ou égale à 600 euros ;

« - 30 %, pour la fraction supérieure à 600 euros.

« Lorsque, d'une part, les sommes inscrites sur cette part atteignent le montant de 1 000 euros, que, d'autre part, les parties civiles ont été entièrement indemnisées ou qu'il ressort de la décision définitive sur l'action publique et les intérêts civils qu'il n'y a pas de parties civiles ou qu'aucun dommage et intérêt n'a été accordé et que, enfin, aucun créancier d'aliments ne s'est prévalu de sa créance sur le fondement d'un titre exécutoire, la répartition opérée au titre de cette part a lieu au profit de la part disponible.

« Toutefois, le prélèvement au titre de la part réservée à l'indemnisation des parties civiles et des créanciers d'aliments est opéré à nouveau, y compris au-delà du plafond précité, dès qu'un créancier d'aliments vient à se prévaloir de sa créance sur le fondement d'un titre exécutoire ou qu'une victime d'une infraction visée par une condamnation inscrite à l'écrou se prévaut d'une décision exécutoire de condamnation à des dommages et intérêts ».

Article D. 320-2 :

« La deuxième part, affectée à la constitution du pécule de libération, est déterminée en appliquant à la fraction des sommes qui échoient aux détenus le taux de 10 %, sous réserve de la dispense prévue par l'article D. 121-1 ».

Article D. 320-3 :

« La troisième part, laissée à la libre disposition des détenus, correspond aux sommes restantes après que les prélèvements prévus aux articles D. 320 à D. 320-2 ont été opérés ».

Le II du présent article propose de prévoir que lorsque, à la libération d'une personne détenue, la part de ses valeurs pécuniaires affectée à l'indemnisation des parties civiles n'a pas été réclamée, ces valeurs sont, sous réserve des droits des créanciers d'aliments, versées au FGTI.

Votre commission approuve ces dispositions qui vont dans le sens d'une diversification des sources de financement du FGTI, préconisée par le rapport d'information précité de nos collègues Christophe Béchu et Philippe Kaltenbach.

Votre commission a adopté l'article 11 bis sans modification .

Article 11 ter (art. 710 du code de procédure pénale) - Critères mis en oeuvre en matière de confusion de peines

L'article 710 du code de procédure pénale, relatif à l'exécution des jugements, prévoit que la juridiction qui a prononcé la sentence statue sur les demandes de confusion de peines. Le présent article, issu d'un amendement de M. Sergio Coronado adopté par les députés en séance publique, prévoit que « pour l'examen de ces demandes, elle [la juridiction] tient compte du comportement de la personne condamnée depuis la condamnation, de sa personnalité ainsi que de sa situation ».

Selon l'auteur de l'amendement, « pour l'étude des confusions de peine, la jurisprudence actuelle impose de ne tenir compte que du passé pénal de la personne », ce qui serait réducteur.

Bien que la jurisprudence actuelle permette en réalité souvent déjà de tenir compte de ces critères, il ne semble pas inutile de les inscrire dans la loi.

Votre commission a adopté l'article 11 ter sans modification .

Article 11 quater (nouveau) (art. 733-1-1 [nouveau] du code de procédure pénale) - Conversion d'une peine de jours-amende en peine de TIG

Le présent article, inséré par votre commission à l'initiative de Mme Esther Benbassa, vise à permettre au juge de l'application des peines (JAP) de convertir une peine de jours-amende en peine de travail d'intérêt général (TIG).

En l'état du droit, l'article 733-1 du code de procédure pénale autorise le juge de l'application des peines, d'office, à la demande de l'intéressé ou sur réquisitions du procureur de la République, à ordonner par décision motivée de substituer une peine de jours-amende au travail d'intérêt général. Cette décision, qui est prise à l'issue d'un débat contradictoire, peut intervenir à la suite de l'exécution partielle du TIG.

Le présent article propose d'introduire une souplesse supplémentaire, en autorisant, selon les mêmes modalités, le juge de l'application des peines à ordonner de substituer un TIG à une peine de jours-amende.

Conformément au droit applicable au TIG, cette substitution ne serait possible que si le détenu, présent à l'audience, a donné son accord.

Au soutien de son amendement, Mme Esther Benbassa a relevé que cette souplesse pourrait notamment s'avérer utile en cas d'insolvabilité du condamné.

Votre commission a adopté l'article 11 quater ainsi rédigé .


* 102 Par exemple, la conversion des peines d'emprisonnement ferme inférieures à 6 mois en sursis assorti de l'obligation d'accomplir un travail d'intérêt général (sursis-TIG) ou en jours-amende (article 132-57 du code pénal), la modification des obligations particulières dans le cadre du SME (article 739 du code de procédure pénale) ou encore la prolongation du délai d'épreuve (article 742 du code de procédure pénale).

* 103 « Pour une meilleure indemnisation des victimes d'infractions pénales », rapport d'information n°107 (2013-2014) de MM. Christophe Béchu et Philippe Kaltenbach, fait au nom de la commission des lois du Sénat, pages 39-40. Ce rapport peut être consulté à l'adresse suivante : http://www.senat.fr/notice-rapport/2013/r13-107-notice.html

* 104 Rapport précité.

* 105 Pour une présentation de l'ensemble de ces dispositifs, voir le rapport d'information précité, pages 50 et suivantes.

* 106 Rapport précité, page 299.

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