II. UN OPÉRATEUR QUI DOIT FAIRE FACE À DE NOMBREUX DÉFIS

A. UN BESOIN D'INVESTISSEMENTS QUI VA CONSIDÉRABLEMENT AUGMENTER À COMPTER DE 2017

Conformément aux objectifs de la COP 2012-2016, Météo-France a investi 20,6 millions d'euros en 2015 et prévoit d'investir 22 millions d'euros en 2016.

Ces investissements concernent principalement la modernisation des réseaux d'observation (radars, réseaux au sol, radiosondage) et des moyens de calcul intensif (renouvellement des équipements de stockage des données). Dans une moindre mesure, ils concernent également la rénovation du patrimoine immobilier de l'opérateur, en particulier la réhabilitation du site de Toulouse. Le projet annuel de performances pour 2016 précise que « pour le reste, seules les dépenses correspondant à des investissements absolument nécessaires seront engagées ».

Lors de son audition par votre rapporteur spécial, le président-directeur général de Météo-France a mis en avant sa volonté de « rehausser la courbe de l'investissement à partir de 2017 ». En effet, l'activité de prévision devient de plus en plus intensive en capital et repose sur des technologies de calcul de plus en plus puissantes . Ainsi, le Royaume-Uni s'est récemment doté d'un supercalculateur, quinze fois plus puissant que celui actuellement en service à Météo-France, pour un montant de 120 millions d'euros.

Or, dans les années à venir, les recherches sur le climat vont nécessiter de disposer de modèles informatiques permettant à la fois d'établir des prévisions sur le long terme (vingt ans) et sur des zones géographiques précises.

Si Météo-France veut maintenir son rang, il sera donc contraint d'investir, compliquant un peu plus son équation budgétaire. En effet, les efforts sur les dépenses de fonctionnement apparaissent déjà importants.

La fermeture de nouveaux centres régionaux pourra être étudiée à partir de 2018 mais il est peu probable que cette nouvelle réorganisation, si elle devait être décidée, permette de réaliser des économies aussi importantes que celle en cours.

En revanche, compte tenu de son poids au sein du budget, votre rapporteur spécial considère que la réduction de la dépense de personnel devra se poursuivre au-delà de 2017.

B. AMÉLIORER LA COMPETITIVITÉ DE MÉTÉO-FRANCE POUR DÉVELOPPER LES RECETTES COMMERCIALES

Face à la diminution de la dotation de l'État, il apparaît urgent que Météo-France puisse consolider ses ressources propres , à savoir la redevance en tant que prestataire à la navigation aérienne et, surtout, ses ressources commerciales, dont le niveau reste décevant.

1. Des prestations au secteur aérien qui ne devraient pas être ouvertes à la concurrence

Dans le cadre du Ciel unique européen (CUE), Météo-France est le prestataire exclusif de l'assistance météorologique pour la navigation dans l'espace aérien sous juridiction française 6 ( * ) .

Toutefois, les réponses au questionnaire budgétaire de 2015 avaient signalé à votre rapporteur spécial que « la proposition réglementaire « CUE2+ » initiée par la Commission Européenne créait une menace pour Météo-France du fait d'une volonté de mise en concurrence des prestataires météorologiques pour la navigation aérienne ».

Lors de son audition, le président-directeur général de Météo-France s'est montré très rassurant, relevant que suite aux travaux du groupe aviation mis en place par la présidence italienne de l'Union européenne en juillet 2014, l'article 9 du règlement européen n° 550/2004 actuellement en vigueur 7 ( * ) , relatif à la désignation des prestataires de services météorologiques sur une base exclusive, ainsi que le considérant associé (qui précise que pour des raisons de sécurité il n'est pas nécessaire de soumettre les services météorologiques aux lois du marché), avaient été réintroduits dans la proposition « CUE2+ » et que le texte ainsi modifié avait été approuvé par le Conseil de l'Union européenne le 3 décembre 2014. Il devrait être prochainement ratifié par le Parlement européen.

En tout état de cause, les 85,5 millions d'euros versés chaque année par la DGAC à Météo-France sont indispensable à son budget , mais ne constituent pas une ressource dynamique .

2. Des recettes commerciales qui doivent s'accroître en profitant de nouveaux marchés en expansion

Les recettes commerciales de Météo-France ont connu ces dernières années un important recul et ont systématiquement été inférieures aux prévisions , en raison de la forte concurrence à laquelle est confronté l'opérateur public.

S'il est producteur de données brutes, les règles applicables aux données publiques l'obligent en effet à les mettre à disposition gratuitement : de nombreuses entreprises utilisent ces données brutes, les retraitent puis les revendent.

Météo-France présente ainsi le paradoxe de disposer d'une expertise reconnue au niveau international pour la production de données mais de se retrouver parfois dépassé par ses concurrents pour leur exploitation et leur diffusion .

Si le nombre d'utilisateurs des services téléphoniques (numéro 3250) va poursuivre son inexorable déclin dans les années à venir ( 5 millions d'euros de recettes environ en 2015 contre encore 10 millions d'euros il y a seulement cinq ans), le grand enjeu pour Météo France est de :

- reconquérir des parts de marché dans le secteur des services au grand public en prenant pleinement en compte l'évolution des usages (sites internet mobile, applications mobiles, applications tablettes, objets connectés, etc.), dans un contexte de forte croissance du marché publicitaire sur les supports mobiles . Le profond renouvellement du site internet en 2013 et de l'application mobile à l'été 2015 vont déjà dans ce sens et ont permis de développer l'offre commerciale en ligne , qui bénéficie d'environ un million de visites quotidiennes ;

- accroître le volume des prestations météorologiques aux professionnels , qui représentent un marché estimé à 40 millions d'euros environ pour le territoire français en 2014 (Météo-France détient actuellement 50 % de ce marché). Selon l'opérateur, 40 % des entreprises seraient en effet « météo-sensibles » (secteurs de l'agriculture, du BTP, de l'énergie, des transports ou bien encore du sport) et sont à la recherche d'information météorologiques toujours plus précises et de services réactifs et innovants.

Le nouveau contrat d'objectifs et de performance qui sera négocié en 2016 avec la tutelle devra mettre l'accent sur la nécessaire augmentation des ressources commerciales de Météo-France .


* 6 Les règlements communautaires du CUE, qui s'imposent directement aux États membres de l'Union européenne et aux prestataires de services de navigation aérienne autorisés à opérer dans l'espace aérien de l'Union, laissent la liberté aux États de désigner un prestataire exclusif dans leur espace aérien. Pour la France, ce prestataire est Météo-France.

* 7 Règlement (CE) n° 550/2004 du Parlement européen et du Conseil du 10 mars 2004 relatif à la fourniture de services de navigation aérienne dans le ciel unique européen (« règlement sur la fourniture de services »).

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