B. LA PROPOSITION DE LOI DE SIMPLIFICATION SOUMISE À VOTRE COMMISSION, UN TEXTE UTILE POUR LES ENTREPRISES FRANÇAISES

Sauf exception, les 60 articles de la proposition de loi modifient certains titres et chapitres du seul code de commerce, principalement le livre II relatif aux sociétés commerciales, ainsi que des dispositions du code civil relatives aux sociétés. Votre rapporteur souligne son caractère circonscrit et bien délimité, qui tranche avec le caractère trop souvent hétéroclite des lois de simplification.

Si la simplification du droit des sociétés est nécessaire, votre rapporteur n'ignore pas, ainsi que ses auditions l'ont montré, que les sources de complexité pour les entreprises résident d'abord dans le droit du travail, le droit fiscal et le droit social. Néanmoins, la présente proposition de loi a fait l'objet d'une large approbation, dans sa démarche comme dans la plupart de ses dispositions, lors des auditions, par les organisations patronales et les organisations représentant les entreprises comme les professionnels qui les accompagnent.

1. Quelques mesures relatives au fonds de commerce

Les articles 1 er à 5 de la proposition de loi tendent à simplifier certaines règles applicables au fonds de commerce (livre I er du code de commerce) : les mentions légales obligatoires dans l'acte de cession du fonds, les formalités de la cession du fonds et les conditions de mise en location-gérance du fonds.

Les trois mesures simplifiant les formalités de cession du fonds ont été reprises dans le cadre de la loi n° 2015-990 du 6 août 2015 précitée, à l'initiative de notre collègue François Pillet, co-rapporteur de ce texte.

2. La simplification du droit des sociétés, coeur du texte

Les articles 6 à 9 de la proposition de loi traitent du droit applicable aux sociétés en général, tandis que l' article 10 simplifie le régime des sociétés civiles (titre IX du code civil). Ces dispositions visent, notamment, à clarifier les droits du nu-propriétaire et de l'usufruitier en cas de démembrement d'une part sociale et à permettre de régulariser la prorogation d'une société au-delà de son terme normal : il n'est pas rare que les associés oublient de proroger la société dans les délais et s'en rendent compte seulement après son expiration.

Les articles 11 à 44 traitent du droit applicable à différentes formes de sociétés commerciales 12 ( * ) (livre II du code de commerce) : régime de la société à responsabilité limitée (SARL), régime de la société anonyme (SA), régime de la société par actions simplifiée (SAS) et dispositions communes aux sociétés par actions ou à l'ensemble des sociétés commerciales. Les mesures concernant les SA, cotées ou non, sont les plus nombreuses.

Sans prétendre présenter de façon exhaustive chacun de ces articles, votre rapporteur veut insister sur les principales mesures de simplification que propose le texte :

- faciliter le remplacement des gérants ou mandataires sociaux placés en tutelle ou curatelle ;

- permettre l'annulation des décisions des associés de SARL prises en violation des règles de délibération ;

- faciliter les conditions d'octroi par une société mère de sa garantie à ses filiales - disposition très utile pour les groupes français ayant des filiales à l'étranger, dans le cadre de marchés publics internationaux ;

- restreindre aux seules SA dont les actions sont cotées l'obligation de publier certaines informations destinées à informer le marché ;

- mieux prendre en compte les votes d'abstention lors des assemblées générales des SA en les excluant des voix exprimées ;

- dématérialiser la tenue des assemblées générales des SA ;

- donner au juge la possibilité d'apprécier la validité des délibérations adoptées sans avoir été inscrites à l'ordre du jour d'une assemblée générale ;

- supprimer l'obligation formelle de soumettre à l'assemblée générale d'une SA tous les trois ans une augmentation de capital réservée aux salariés ;

- clarifier les règles et resserrer les périodes d'interdiction de cession des actions gratuites attribuées aux salariés ainsi que les périodes d'interdiction d'attribution d'options donnant droit à la souscription d'actions ;

- renforcer la liberté statutaire au sein des SAS.

Souvent techniques, ces mesures présentent une utilité concrète dans la vie statutaire des sociétés, en supprimant des obligations inutiles, en simplifiant ou facilitant certaines procédures, en assouplissant les règles de fonctionnement des sociétés, en clarifiant des dispositions ambiguës, incohérentes ou rigides, en ajustant le régime des sanctions applicables en cas d'infraction à certaines règles ou en garantissant mieux la sécurité juridique et la clarté du processus de décision. Une partie de ces mesures de simplification ou d'allègement devrait permettre aux sociétés concernées de réduire leurs coûts.

Deux de ces mesures ont été satisfaites dans le cadre des lois n° 2014-1545 du 20 décembre 2014 et n° 2015-990 du 6 août 2015 précitées.

3. Plusieurs mesures concernant l'Autorité de la concurrence, déjà satisfaites et excédant le champ de la simplification

Les articles 45 à 49 de la proposition de loi comportent une série de mesures visant à clarifier les procédures devant l'Autorité de la concurrence en matière d'autorisation et de contrôle des opérations de concentration, ainsi qu'à lui attribuer la faculté de se faire communiquer les factures détaillées détenues par les opérateurs téléphoniques (« fadettes »), dans le cadre de ses pouvoirs d'enquête sur les pratiques anti-concurrentielles, et à moderniser la procédure transactionnelle prévue en cas de constatation de telles pratiques (livre IV du code de commerce).

Il semble à votre rapporteur que ces dispositions, si elles contribuent à clarifier le droit en vigueur sur certains aspects, excèdent toutefois le champ de la simplification, compte tenu du renforcement des prérogatives de l'Autorité de la concurrence qu'elles représentent, dans ses deux missions de contrôle des concentrations économiques et de sanction des pratiques anti-concurrentielles.

En outre, ces cinq articles sont satisfaits par des dispositions analogues adoptées dans le cadre de la loi n° 2015-990 du 6 août 2015 précitée. À cet égard, votre rapporteur rappelle que le Conseil constitutionnel a censuré, pour atteinte excessive à la protection de la vie privée, sans garanties suffisantes, la faculté pour l'Autorité de la concurrence d'accéder aux « fadettes » 13 ( * ) .

4. Quelques dispositions relatives aux commissaires aux comptes

Les articles 50 à 57 de la proposition de loi concernent la profession et les missions des commissaires aux comptes (livre VIII du code de commerce). Si certaines dispositions concernent la mission de contrôle légal des comptes que les commissaires aux comptes exercent auprès des sociétés - notamment pour assouplir certaines règles d'incompatibilité ou de secret professionnel, sources de complexité formelles pour les entreprises sans pour autant constituer des garanties substantielles, ou pour étendre la norme professionnelle simplifiée à de nouvelles petites entités -, d'autres relèvent uniquement de l'organisation interne à la profession, excédant sans doute le strict champ de la simplification ou de la clarification.

Par ailleurs, la récente ordonnance n° 2016-315 du 17 mars 2016 relative au commissariat aux comptes, laquelle a transposé la réforme européenne de l'audit 14 ( * ) , a procédé à plusieurs modifications du livre VIII du code de commerce chevauchant en partie les articles du présent texte.

5. Un nombre très restreint de dispositions diverses, en lien direct avec le droit des sociétés

Enfin, au nombre de trois, les articles 58 à 60 de la proposition de loi sont des dispositions diverses. La principale d'entre elles, déjà évoquée supra et partiellement reprise par la loi n° 2014-1545 du 20 décembre 2014 précitée, est la suppression de la formalité d'enregistrement des actes statutaires des sociétés commerciales, tant pour la création de la société que pour les actes ultérieurs de la vie de la société.


* 12 La proposition de loi ne comporte pas de mesure concernant spécifiquement la société en nom collectif (SNC), la société en commandite simple (SCS), la société en commandite par actions (SCA), la société européenne (SE) ou encore le groupement d'intérêt économique (GIE).

* 13 Décision n° 2015-715 DC du 5 août 2015.

* 14 Ordonnance prise sur le fondement de l'article 30 de la loi n° 2014-1662 du 30 décembre 2014 portant diverses dispositions d'adaptation de la législation au droit de l'Union européenne en matière économique et financière, en vue notamment de transposer la directive 2014/56/UE du 16 avril 2014 modifiant la directive 2006/43/CE concernant les contrôles légaux des comptes annuels et des comptes consolidés et de mettre en conformité le droit français avec le règlement (UE) n° 537/2014 du 16 avril 2014 relatif aux exigences spécifiques applicables au contrôle légal des comptes des entités d'intérêt public.

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