EXAMEN EN COMMISSION

Réunie le mardi 8 novembre 2016, sous la présidence de Mme Michèle André, présidente, la commission a procédé à l'examen du rapport de M. Jean-Claude Boulard, rapporteur spécial, sur la mission « Régimes sociaux et de retraite » et sur le compte d'affectation spéciale (CAS) « Pensions », et a entendu sa communication sur l'impact de l'accord « parcours professionnels, carrières et rémunérations » (PPCR) relatif à l'avenir de la fonction publique de novembre 2015 sur les régimes de retraite de la fonction publique.

M. Jean-Claude Boulard , rapporteur spécial . - Je vous propose de goûter aux délices du corporatisme et de rencontrer l'originalité d'un compte d'affectation spéciale (CAS) excédentaire.

Nous constatons, pour les régimes spéciaux, une tendance à la baisse de la subvention d'équilibre, esquissée en 2015, confirmée en 2017. La subvention versée par l'État sera de 6,25 milliards d'euros, soit une baisse de 1,1 % par rapport à 2016, due à une faible inflation, une indexation reportée au 1 er octobre de chaque année et un report progressif des âges de retraite.

Pour ce qui est du régime général des fonctionnaires, la tendance au ralentissement de la dépense se confirme. Après une période de très forte hausse entre 1990 et 2013 - de 176 % -, la dépense n'augmente plus que de l'ordre de 1 % en 2017 par rapport à 2016. Les engagements financiers de l'État se verront réduits. De 1 560 milliards fin 2014, ils seront de 1 535 milliards fin 2015.

Livrons-nous à un calcul intéressant : la contribution de l'État et de ses établissements publics au régime général des fonctionnaires de 48,9 milliards, en tenant compte du retour sur fiscalité, c'est-à-dire des ressources fiscales engendrées, représente une dépense nette difficile à estimer avec une absolue précision mais qui, comptablement, pourrait être de 35 milliards. Avis aux nostalgiques du keynésianisme...

Du fait de ces évolutions et d'une gestion marquée par le principe de précaution, le solde excédentaire cumulé continue sa progression. De 3,2 milliards d'euros en 2007 contre une prévision de 2,9 milliards, il serait de 5,4 milliards en 2017. C'est un CAS où l'on constate un excédent annuel cumulé, que d'aucuns jugeraient aller au-delà de la simple prudence. Mais contrairement à d'autres comptes qui suscitent des interrogations quant à leur véracité, celui-ci n'engendre aucun doute.

Nous continuerons à assister à la réduction des écarts entre les âges de départ à la retraite, mais ils restent significatifs. Cet âge diffère pour les régimes spéciaux SNCF et RATP, en plus ou en moins mais il reste inférieur à ce qu'il est dans le régime de la fonction publique, de 61 ans et 3 mois.

À quand des droits équivalents, pour un effort de cotisation semblable ? On pourrait décider que tous les nouveaux entrants relèvent d'un régime unifié, tout en préservant le droit des personnes déjà en place. C'est ce que l'on appelle le régime « bouilleurs de cru ». Ce projet n'est pas facile à mettre en oeuvre, mais il serait essentiel pour faire du mot d'égalité, en matière de retraite, une réalité.

Je vous propose un avis favorable sur les crédits de la mission « Régimes sociaux et de retraite » et sur le compte d'affectation spéciale « Pensions » dans la mesure où il n'y a pas de doute sur la vérité des écritures, ni sur le ralentissement des dépenses ou l'accumulation des excédents.

Mme Michèle André , présidente . - Qu'en est-il du contrôle budgétaire sur l'impact de l'accord « Parcours professionnels, carrières et rémunérations » ?

M. Jean-Claude Boulard , rapporteur spécial . - La vérité, par rapport à l'intégration progressive des indemnités dans les bases des cotisations de retraite et à la revalorisation de la grille indiciaire, est que l'impact n'est pas totalement perçu dans les projections à moyen terme. Les effets de long terme sur les dépenses de l'État et des collectivités territoriales, seront sensiblement plus forts. Le contrôle n'a pas permis de lever cette inquiétude par rapport à une mesure qui laisse entier le problème du poids des régimes indemnitaires dans les rémunérations publiques.

M. Albéric de Montgolfier , rapporteur général . - L'accord PPCR a un coût non négligeable pour l'État mais aussi pour les collectivités territoriales.

Comme l'a dit notre rapporteur spécial, pour réformer les régimes spéciaux, seule la méthode « bouilleurs de cru » est envisageable, ou encore celle de la loi du 13 août 2004 relative aux libertés et responsabilités locales qui a procédé à des transferts de compétences de grande ampleur au profit des collectivités territoriales dans le domaine des grands équipements et infrastructures.

S'il est extrêmement difficile de toucher à l'existant, pourquoi les nouveaux entrants bénéficieraient de départs à la retraite anticipés ? En termes de pénibilité, il n'y a plus de différence aujourd'hui entre les chauffeurs de bus et ceux qui conduisent les métros ou les trains. Cette pluralité de régimes était due à une espérance de vie plus courte : lorsqu'on travaillait dans les mines ou à la SNCF, on mourait jeune. Aujourd'hui, tel n'est plus le cas.

M. Jean-Claude Boulard , rapporteur spécial . - Personne ne doute de la sincérité de ce compte d'affectation spéciale. Bien que difficile, l'unification progressive des régimes est incontournable. Il en va de la cohésion de notre pays. Cela dit, les gouvernements qui se sont attaqués à cette question se sont rendu compte que la route était parsemée d'embûches.

Je me réjouis que la durée des cotisations ait été allongée et que les règles d'indexation aient été modifiées : la situation budgétaire s'en trouve assainie.

M. Jean-Claude Requier . - À la page 42 de la note de présentation, il est indiqué que le besoin de financement des régimes financés par la mission s'élèverait à 148 milliards en 2050 et qu'un taux d'actualisation de 1,5 % réduirait ce montant de 26 milliards d'euros. S'agit-il de toutes les pensions versées par l'État ?

Mme Marie-France Beaufils . - Ce n'est pas parce que les chauffeurs de bus partent tardivement à la retraite que leurs passagers sont plus en sécurité. En outre, n'oublions pas que beaucoup de conducteurs âgés se retrouvent au chômage. Alors, ne prônez pas l'allongement des carrières de façon indifférenciée.

À la page 19 de la note de présentation, il est utile de relever que les taux des cotisations patronales, mais aussi salariales, sont plus élevés dans les régimes spéciaux que dans le régime général.

Mon groupe étant en désaccord avec les mesures qui ont frappé les retraites, je voterai contre les crédits de cette mission.

M. Marc Laménie . - A-t-on une idée de l'évolution des régimes spéciaux pour les années à venir ?

M. Jean-Claude Boulard , rapporteur spécial . - Les chiffres cumulés montrent une baisse progressive du besoin de financement propre aux régimes spéciaux et une augmentation année après année de la capacité de financement du CAS « Pensions ». Ces données sont assez intéressantes en termes budgétaires.

Marie-France Beaufils, à force d'avoir accepté des régimes différents, le sentiment d'inégalité s'est installé : une mise à plat du niveau et de la durée des cotisations renforcerait la cohésion de notre pays. La pénibilité du travail doit bien sûr être prise en compte, non pas sur une base professionnelle, mais en fonction des métiers.

À l'issue de ce débat, la commission a décidé de proposer au Sénat l'adoption, sans modification, des crédits de la mission « Régimes sociaux et de retraite » et du compte d'affectation spéciale « Pensions » .

La commission a donné acte au rapporteur spécial de sa communication sur son contrôle budgétaire sur l'impact de l'accord « parcours professionnels, carrières et rémunérations » (PPCR) relatif à l'avenir de la fonction publique de novembre 2015 sur les régimes de retraite de la fonction publique et en a autorisé la publication sous la forme d'un rapport d'information.

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Réunie à nouveau le jeudi 24 novembre 2016, sous la présidence de Mme Michèle André, présidente, la commission a décidé de proposer au Sénat d'opposer la question préalable au projet de loi de finances pour 2017.

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