B. ASSURER UN ACCÈS PLUS AISÉ ET ÉQUITABLE AU FINANCEMENT DE LA VIE POLITIQUE

Annoncées par le précédent garde des sceaux, M. François Bayrou, plusieurs mesures visent à soutenir le financement des candidats et formations politiques qui rencontrent actuellement des difficultés.

Elles se rattachent ainsi à l'objectif à valeur constitutionnelle énoncé à l'article 4 de la Constitution : « La loi garantit (...) la participation équitable des partis et groupements politiques à la vie démocratique de la Nation ».

1. Une mission de médiation à consolider en faveur des candidats et partis ou groupements politiques

L'étude d'impact du projet de loi relève les difficultés de financement de certains candidats ou formations politiques, que dénote particulièrement la baisse du recours à l'emprunt pour le financement des campagnes électorales.

Afin de faciliter les relations entre les établissements de crédit et les candidats ou partis et groupements politiques, il est proposé d'instituer un médiateur du crédit aux candidats et aux partis politiques . Nommé par le président de la République, dans le cadre de la procédure prévue à l'article 13 de la Constitution - soit après audition et avis des commissions des lois de chaque assemblée parlementaire -, l'intéressé serait investi d'une mission de médiation, à l'exclusion de tout pouvoir coercitif ( articles 10 et 11 du projet de loi et article 11 du projet de loi organique ).

Votre commission a accepté la création de cette institution, au coût limité, en prévoyant d' étendre son office aux difficultés liées à l'ouverture d'un compte et aux services bancaires qui lui sont associés . En conséquence, elle l'a dénommé « médiateur du financement des candidats et des partis politiques ». Elle a également prévu qu'il soit désigné par le chef de l'État, non après avis du gouverneur de la Banque de France mais sur une liste de trois noms établie par ce dernier , de manière à assurer la qualification de la personne finalement désignée.

2. Un soutien au financement privé à refonder en faveur des candidats et partis ou groupements politiques

Le Gouvernement souhaite également apporter une réponse aux difficultés de financement de la vie politique en créant un dispositif financier spécifique assuré par la puissance publique.

Évoquée sous le nom de « banque de la démocratie », cette mesure emprunterait une forme juridique et des modalités d'intervention inconnues à ce stade.

C'est pourquoi le Gouvernement sollicite du Parlement une habilitation à légiférer par ordonnance dans le cadre de l'article 38 de la Constitution ( article 12 du projet de loi ).

Lors de son audition, Mme Nicole Belloubet, garde des sceaux, ministre de la justice, a indiqué que le contenu de l'ordonnance dépendrait des résultats d'une mission conjointe confiée à l'inspection générale des finances et à l'inspection générale de l'administration .

Il est apparu à votre commission que l'imprécision des finalités de l'habilitation soulevait une difficulté d'ordre constitutionnel en ne mettant ni le Parlement, ni le Conseil constitutionnel s'il en était saisi, en mesure de connaître ses contours, au mépris de la jurisprudence constitutionnelle 16 ( * ) .

Cette imprécision soulève plus fondamentalement des interrogations sur la pertinence de ce dispositif dès lors que le Parlement ignore selon quels critères les crédits financés par cet établissement ou ce fonds seraient accordés ou refusés aux candidats et aux partis ou groupements politiques qui les solliciteraient. Compte tenu de la neutralité qui s'impose à l'État en matière de compétition électorale, il est primordial que l'égalité de traitement soit assurée. Or, quel organe - et selon quelle composition - en déciderait ?

Pour ces raisons, sur la proposition de son rapporteur, votre commission a décidé de supprimer cette habilitation et donc l'article 12 du projet de loi .

En revanche, elle a souhaité lever dès à présent certaines difficultés pratiques rencontrées par les candidats lors de leur campagne électorale et que les auditions organisées par votre rapporteur ont mises en lumière.

Sur proposition de son rapporteur, votre commission a ainsi renforcé le « droit au compte » bénéficiant aux candidats à une élection ( article 9 bis du projet de loi ).

Actuellement, le mandataire financier d'un candidat est tenu d'ouvrir un compte bancaire ou postal pour effectuer l'ensemble des opérations financières afférentes à la campagne électorale, sous peine de rejet du compte de campagne par la CNCCFP. Il peut donc solliciter de la Banque de France la désignation d'une banque si un premier établissement de crédit a refusé de lui ouvrir un compte. Toutefois, en pratique, certains établissements de crédit se gardent de notifier leur refus d'ouvrir le compte, ce qui paralyse les démarches du mandataire.

Dès lors, pour garantir que chaque mandataire financier dispose d'un compte à sa demande et qu'il puisse l'utiliser selon des conditions normales, votre commission a encadré la procédure de refus par un établissement de crédit d'ouvrir un compte et a imposé la fixation, par décret, des services bancaires qui devraient être obligatoirement associés à ce compte, qu'il soit ouvert spontanément ou après mise en oeuvre de la procédure du « droit au compte ».

*

* *

Enfin, pour les raisons exposées par votre rapporteur dans son avant-propos, votre commission a réécrit l' intitulé des deux projets de loi afin de retenir la formulation suivante : projet de loi et projet de loi organique « pour la régulation de la vie publique ».

Votre commission des lois a adopté le projet de loi organique et le projet de loi ainsi modifiés.


* 16 Conseil constitutionnel, 26 janvier 2016, Égalité et citoyenneté, décision 2016-745 DC.

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