TROISIÈME PARTIE - EXAMEN DES ARTICLES RATTACHÉS À LA MISSION « RELATIONS AVEC LES COLLECTIVITÉS TERRITORIALES »

ARTICLE 58 (Art. L. 1615-1 du code général des collectivités territoriales) - Automatisation du Fonds de compensation pour la taxe sur la valeur ajoutée (FCTVA)

Commentaire : le présent article prévoit la mise en place d'un mécanisme d'automatisation du fonds de compensation pour la taxe sur la valeur ajoutée (FCTVA), afin d'en simplifier la gestion.

I. LE DROIT EXISTANT

A. LE FCTVA CONSTITUE UN INSTRUMENT ESSENTIEL DE SOUTIEN À L'INVESTISSEMENT DES COLLECTIVITÉS TERRITORIALES

1. Principes

a) Une subvention d'aide à l'investissement des collectivités territoriales

Le fonds de compensation pour la taxe sur la valeur ajoutée (FCTVA) est un prélèvement sur les recettes de l'État versé aux collectivités territoriales et destiné à compenser le montant de TVA qu'elles acquittent pour leurs investissements, dans la mesure où celles-ci n'étant pas assujetties à la TVA, elles ne peuvent en principe pas bénéficier du droit à déduction .

Ce dispositif a été créé par l'article 66 de la loi de finances pour 1978 8 ( * ) et a succédé au fonds d'équipement pour les collectivités territoriales.

Comme le rappelle le « jaune » budgétaire « Transferts financiers de l'État aux collectivités territoriales » annexé au présent projet de loi de finances, le FCTVA « ne constitue pas un remboursement de la TVA, ce qui serait contraire à la directive 2006/112/CE du 28 novembre 2006 relative au système commun de TVA, mais bien une subvention d'aide à l'investissement des collectivités territoriales ».

Le FCTVA est régi par les articles L. 1615-1 à L. 1615-13, R. 1615-1 à R. 1615-6 et D. 1615-7 du code général des collectivités territoriales.

Il vise à encourager l'investissement local , dont le montant s'élevait à 45,5 milliards d'euros en 2016.

Évolution des dépenses d'investissement des collectivités territoriales

(hors remboursement de dette)

2013

2014

2015

2016

Montant des dépenses d'investissement des collectivités locales (en milliard d'euros)

55,5

51,2

46,9

45,5

Évolution (en pourcentage)

+ 4,8

- 7,7

- 8,3

- 3

Source : Observatoire des finances et de la gestion publique locales, « Les finances des collectivités locales en 2017 »

Le FCTVA concourt très fortement à l'investissement local : il représente plus de deux tiers des concours de l'État alimentant la section d'investissement des entités publiques locales 9 ( * ) . En 2016, son montant s'est élevé à 5,2 milliards d'euros.

Comme le souligne le tableau ci-après, le FCTVA représente une part croissante des prélèvements sur recettes versés aux collectivités territoriales .

Montants versés aux collectivités territoriales au titre du FCTVA

(en milliards d'euros)

Année d'exercice

Dépenses réelles d'investissement

Évolution en pourcentage

FCTVA

(Prévision LFI)

Évolution en pourcentage

FCTVA versé

Évolution en pourcentage

Part du FCTVA dans l'ensemble des PSR versés

2012

52,9

/

5,5

/

5,5

/

9,95 %

2013

55,45

+ 4,8

5,6

+ 2,2 %

5,6

+ 0,07 %

10,03 %

2014

51,17

- 7,7

6

+ 2,5 %

6

+ 6 %

10,86 %

2015

46,89

- 8,4 %

5,6

+ 3,3 %

5,6

- 5 %

11,11 %

2016

45,5

- 3%

6

+, 1,4 %

5,2

- 7 %

11,23 %

2017

/

/

5,5

- 9 %

/

/

/

2018 (PLF)

/

/

5,6

+ 1,6 %

/

/

/

Source : commission des finances du Sénat, d'après les documents budgétaires, les rapports de la Cour des Comptes sur les finances publiques locales et le rapport de l'Observatoire des finances et de la gestion publique locales, « Les finances des collectivités locales en 2017 »

Évolution des dépenses de FCTVA dans les comptes de l'État

Source : « jaune » budgétaire « Transferts financiers de l'État aux collectivités territoriales » annexé au projet de loi de finances pour 2018

b) Critères d'éligibilité

La liste des bénéficiaires du FCTVA est fixée à l'article L. 1615-2 du code général des collectivités territoriales. Il s'agit :

- des collectivités territoriales ;

- de leurs groupements, sous réserve que l'ensemble des membres soient eux- mêmes bénéficiaires. Ainsi, un syndicat mixte ouvert comprenant des communes et une chambre de commerce n'est pas bénéficiaire du FCTVA ;

- de leurs régies de services publics ;

- de certains organismes juridiquement autonomes : les centres communaux et intercommunaux d'action sociale, les caisses des écoles, le Centre national de la fonction publique territoriale et les centres de gestion des personnels de la fonction publique territoriale, les services départementaux d'incendie et de secours ainsi que les syndicats chargés de la gestion des agglomérations nouvelles.

Par ailleurs, six conditions cumulatives doivent être remplies pour bénéficier de ce dispositif :

- la dépense doit être réalisée par un bénéficiaire du fonds ;

- le bénéficiaire du fonds doit être propriétaire de l'équipement considéré, sauf dérogations particulières et dispositions applicables aux établissements publics de coopération intercommunale ;

- le bénéficiaire doit être compétent pour agir dans le domaine concerné ;

- la dépense doit être grevée de TVA ;

- elle ne doit pas avoir été exposée pour les besoins d'une activité soumise même partiellement à la TVA ;

- enfin, l'équipement ne doit pas être cédé à un tiers non bénéficiaire du fonds, ni être confié à un tiers sauf dans les cas de dérogations prévus par la loi 10 ( * ) .

2. Une assiette progressivement élargie

L'assiette du FCTVA est constituée des dépenses réelles d'investissement , correspondant principalement aux comptes 21 « Immobilisations corporelles » et 23 « Immobilisations en cours ».

Ainsi, aux termes de l'article R. 1615-1 du code général des collectivités territoriales, celles-ci correspondent aux dépenses comptabilisées « à la section d'investissement du compte administratif principal et de chacun des comptes administratifs à comptabilité distincte » au titre notamment « des immobilisations et immobilisations en cours, y compris les dépenses d'immobilisation réalisées pour le compte des collectivités et établissements par des mandataires légalement autorisés ; des fonds de concours versés à l'État en sa qualité de maître d'ouvrage des travaux sur les monuments classés ».

Certaines dépenses d'investissement en sont cependant exclues . Il s'agit par exemple des dépenses concernant les immobilisations utilisées pour la réalisation d'opérations soumises à la taxe sur la valeur ajoutée - sauf si elles sont exclues du droit à déduction de cette taxe - des dépenses exonérées de la taxe sur la valeur ajoutée et des travaux réalisés pour le compte de tiers.

Cette assiette a été élargie par les articles 34 et 35 de la loi de finances pour 2016 11 ( * ) aux dépenses d'entretien des bâtiments publics et de voirie payées à compter du 1 er janvier 2016, qui relèvent de la section de fonctionnement .

Sont également éligibles, sous certaines conditions, des dépenses réalisées sur la période 2015-2022, « sous maîtrise d'ouvrage publique, en matière d'infrastructures passives intégrant leur patrimoine dans le cadre du plan " France très haut débit " » 12 ( * ) . Cette possibilité est toutefois limitée aux investissements ne donnant pas lieu à une récupération de TVA par voie fiscale. Par exemple, l'investissement n'est pas éligible lorsque que la collectivité territoriale exploite elle-même les infrastructures ou si elle reçoit une redevance de la part de la personne morale exploitante 13 ( * ) .

3. Un taux de compensation forfaitaire

Le taux de compensation est déterminé en fonction du taux normal de TVA , minoré en raison de la contribution française au budget européen assis sur la ressource TVA. Ce taux de compensation est appliqué au montant toutes taxes comprises des dépenses d'investissement , et ce quel que soit le niveau de taxe effectivement supporté par les collectivités locales .

Le taux de compensation est déterminé en loi de finances et précisé dans le code général des collectivités territoriales. L'article L. 1615-6 du code général des collectivités territoriales prévoit ainsi que « le taux de compensation forfaitaire est fixé à 16,404 % pour les dépenses éligibles réalisées à compter du 1 er janvier 2015 ».

Évolution du taux forfaitaire selon l'année d'exécution des dépenses d'investissement

Année d'exécution des dépenses d'investissement

Taux forfaitaire de remboursement des dépenses d'investissement, appliqué aux dépenses réelles d'investissement

Jusqu'au 31 décembre 2001

16,176 %

En 2002

15,656 %

À compter de 2003

15,482 %

Dépenses réalisée à compter du 1 er avril 2000 pour les communautés de communes, les communautés de villes et les communautés d'agglomération

15,482 %

À compter du 1 er janvier 2014

15,761 %

À compter du 1 er janvier 2015

16,404 %

Source : commission des finances du Sénat

4. Les trois régimes de versement du FCTVA

Le versement du FCTVA s'effectue selon trois régimes de versement distincts .

Le régime de droit commun, correspondant à un versement intervenant deux ans après la réalisation de la dépense, ne représente plus que 25 % des demandes.

Les différents régimes pour l'attribution du FCTVA

Année de référence de l'éligibilité

Collectivités concernées

Part des demandes formulées

Régime de droit commun

Éligibilité des dépenses d'investissement de l'année N-2

Les collectivités ne bénéficiant pas de dérogation

25 %

Régime aménagé à l'occasion du plan de relance de 2009

Éligibilité des dépenses d'investissement de l'année N-1

- Les collectivités qui se sont engagée en 2009 et 2012 à accroître leurs dépenses d'investissement dans le cadre du plan de relance et qui ont respecté cet engagement.

- Les communes membres d'EPCI appliquant la mise en commun de la dotation globale de fonctionnement

61 %

Régime fondé sur la simultanéité de l'investissement et de la compensation

Éligibilité des dépenses de l'année N

Les communautés de communes, les communautés d'agglomération, les communes nouvelles, les métropoles issues d'une communauté d'agglomération et les établissements publics territoriaux

13 %

Source : commission des finances du Sénat, à partir du « jaune » budgétaire « Transferts financiers de l'État aux collectivités territoriales » annexé au projet de loi de finances pour 2018

B. LA GESTION DU FCTVA FAIT L'OBJET DE CRITIQUES ET NÉCESSITE D'ÊTRE RÉFORMÉE

La gestion du FCTVA soulève d'importantes difficultés, relevées en 2016 par l'inspection générale des finances et l'inspection générale de l'administration dans la revue de dépenses de novembre 2016 14 ( * ) .

1. Une dépense de l'État dont le rythme est difficile à prévoir

Dans leur rapport précité, l'inspection générale des finances et l'inspection générale de l'administration notent tout d'abord que la gestion du FCTVA pose des difficultés de pilotage budgétaire, dans la mesure où ce dispositif fonctionne à « guichet ouvert ».

Par ailleurs, au niveau infra-annuel, des pics de décaissement sont observés, notamment en fin d'année, obligeant l'État à faire face à des surcroîts de dépenses soudains.

2. Des difficultés liées à la détermination de l'assiette

Dans leur rapport précité, l'inspection générale des finances et l'inspection générale de l'administration relèvent que l'approche comptable retenue pour la gestion du FCTVA n'est pas complète « puisque certaines dépenses d'investissement comptabilisées ne sont pas retenues, de même que certaines opérations d'ordre peuvent l'être : certaines dépenses réalisées dans le cadre d'une opération de mandat, les avances versées pour travaux, certaines dépenses réalisées pour des travaux en régie ».

En outre, la mission relève des risques de doublons concernant certains investissements. Par exemple, certains d'entre eux peuvent être également concernés par une récupération de la TVA par voie fiscale. C'est le cas, notamment, des investissements portant sur le secteur des transports concurrentiels soumis à la TVA. Or, dans l'état actuel du dispositif, il est très difficile voire impossible de savoir quels investissements ont fait l'objet d'une récupération de TVA par voie fiscale.

3. Une gestion lourde et complexe, pour l'État comme pour les collectivités territoriales

La gestion du FCTVA est actuellement entièrement manuelle, la rendant complexe et « chronophage » .

Par ailleurs, il n'existe pas de coordination nationale portant sur l'organisation pratique de la procédure, ni de formation uniformisée pour les agents publics en charge du FCTVA.

La mission note ainsi une très grande hétérogénéité des délais de traitement en fonction du département et de la taille de collectivité. Ces délais, compris entre 80 jours et 250 jours, sont principalement liés à l'instruction des déclarations .

Délais constatés sur pièces en 2015

Côte d'Or

Loire-Atlantique

Rhône

Nord

Délai moyen de l'échantillon

Dossiers les plus importants en montant

219 jours (soit environ 7 mois)

110 jours (soit 3 mois)

80 jours
(2,6 mois)

129 jours (soit un peu plus de 4 mois) sur l'ensemble de l'arrondissement de Lille ;
96 jours sur l'échantillon de Lille, Douai, Dunkerque étudié

Dossiers les plus faibles en montant

250 jours
(soit environ 8 mois)

248 jours (35 jours sans les dossiers de 2014)

(soit 8 mois)

131 jours
(4 mois)

Inspection générale des finances et inspection générale de l'administration, « La gestion du FCTVA », Revue de dépenses, 9 novembre 2016

Selon le rapport précité, les collectivités territoriales rencontrent des difficultés pour contester les décisions de rejet de leurs demandes par la préfecture. Or ce rejet s'explique en partie par les différences de pratiques entre les agents, ce qui soulève la question du manque de formation et de coordination.

Compte tenu de la complexité de la procédure actuelle, d'importants moyens humains sont mobilisés : 3 000 équivalents temps plein (ETP) sont mobilisés pour le traitement des dossiers de FCTVA dans les collectivités territoriales, et chaque agent en équivalent temps plein consacre environ 15 jours par an au traitement des dossiers. Concernant les services préfectoraux, les ressources mobilisées sont de 140 ETP .

II. LE DISPOSITIF PROPOSÉ

A. UNE RÉFORME REPRENANT LES RECOMMANDATIONS DES INSPECTIONS GÉNÉRALES ET DE LA MISSION « MARTHIEN »

Dans leur rapport précité, l'inspection générale des finances et l'inspection générale de l'administration recommandaient de procéder à une réforme du FCTVA .

En particulier, la mission préconisait d'automatiser le dispositif, en fondant la nouvelle procédure sur une meilleure définition des bases comptables utilisées pour calculer le montant de FCTVA versé aux collectivités territoriales, ainsi qu'une homogénéisation des règles d'attribution.

Dans cette perspective, une mission a été confiée début 2017 à la préfète Nathalie Marthien . À la suite de ses travaux, la mission « Marthien » a identifié plusieurs scénarios destinés à moderniser la gestion du FCTVA (cf. tableau ci-après).

Scénarios proposés dans le cadre de la mission « Marthien »

Scénario 1 : assiette élargie

Scénario 2 : assiette élargie et taux réduit

Scénario 3 : assiette élargie et ajustée

Principe

Retenir dans l'assiette des dépenses donnant lieu à compensation l'ensemble des comptes actuellement éligibles (et ainsi les rendre éligibles dans leur totalité)

Une assiette élargie comme dans le premier scénario est choisie, mais le coût budgétaire est neutralisé par l'abaissement du taux de compensation à 14 %.

L'assiette est élargie mais ajustée, par une redéfinition des catégories comptables utilisées.

Avantages

Simplicité et ouverture et des remboursements à un grand nombre de dépenses

Simplicité et ouverture et des remboursements à un grand nombre de dépenses sans impact budgétaire négatif

Ouverture des remboursements à certaines dépenses, impact budgétaire neutre.

Inconvénients

Coût budgétaire important : si cette méthode avait été suivie, le surcoût aurait été de 800 millions d'euros en 2014 et de 650 millions d'euros en 2016

Cela conduirait à transformer le FCTVA en dotation à l'investissement par la perte du lien direct avec le taux de TVA en vigueur

Cette solution implique une redéfinition des lignes comptables utilisées.

Source : commission des finances du Sénat, à partir de la note à l'attention des membres de la commission des finances de l'AMF, réunion du 19 septembre 2017, mission relative à l'automatisation du FCTVA

B. LA RÉFORME PROPOSÉE PAR LE GOUVERNEMENT

Le présent article vise à insérer dans le code général des collectivités territoriales, au sein de l'article 1615-1 régissant le FCTVA, un paragraphe fixant « une procédure de traitement automatisé des données budgétaires et comptables » à compter du 1 er janvier 2019 .

Cette réforme, qui ne remet pas en cause la triple temporalité de l'assiette des compensations du FCTVA , s'inspire de la troisième option proposée par la mission « Marthien ».

Le versement serait établi automatiquement en fonction des informations figurant sur les mandats de dépense enregistrés sur l'application HELIOS .

Certaines dépenses d'investissements, répertoriées dans le tableau ci-après, seraient toutefois exclues de ce dispositif. Pour ces dépenses, un système déclaratif devra être maintenu .

Domaines non concernés par le projet d'automatisation du FCTVA

Alinéas de l'article L. 1615-2 exclus du dispositif d'automatisation

Domaines concernés

Quatrième

Biens dont les collectivités locales n'ont pas la propriété, concernant les travaux de lutte contre les avalanches, glissements de terrain, inondations, incendies, défense contre la mer, prévention des incendies de forêt, présentant un caractère d'intérêt général et d'urgence.

Huitième

Dépenses d'investissement réalisées sur le domaine public fluvial de l'État, dans le cadre d'une convention conclue avec l'État.

Neuvième

Dépenses réalisées sur des immeubles du domaine relevant du Conservatoire de l'espace littoral et des rivages lacustre, dans le cadre d'une convention conclue avec le Conservatoire de l'espace littoral.

Dixième

Subventions d'équipements versées à l'établissement public « Société du Canal Seine-Nord Europe » pour les dépenses d'investissement que cette société effectue pour la réalisation de l'infrastructure fluviale qu'elle a la mission de réaliser.

Source : commission des finances du Sénat à partir du projet de loi de finances pour 2018

Les coûts administratifs pour l'adaptation des systèmes informatiques sont estimés à 120 000 euros pour le système HELIOS, 13 500 euros pour le système Delphes et 130 000 euros pour le système Colbert .

En revanche, la réforme proposée se traduira par des économies de personnel. Au total, selon l'évaluation préalable du présent article, elle « devrait permettre de redéployer entre la moitié et les deux tiers des effectifs des préfectures, à compter du 1 er janvier 2019 ».

*

L'Assemblée nationale a adopté le présent article sans modification.

III. LA POSITION DE VOTRE COMMISSION DES FINANCES

A. UNE RÉFORME BIENVENUE QUI PERMETTRA DE SIMPLIFIER LA GESTION DU FCTVA

Si elle ne répond pas à l'ensemble des difficultés rappelées par l'inspection générale des finances et l'inspection générale de l'administration, l'automatisation du FCTVA permettra d'en simplifier la gestion tant pour l'État que pour les collectivités territoriales .

Comme indiqué précédemment, elle permettra des économies de personnel importantes pour l'État . Concernant les effectifs des collectivités territoriales, le Gouvernement donne moins de précision, considérant simplement que la réforme permettra de diminuer le délai de traitement des dossiers, qui serait réduit à quelques jours.

Ce projet est globalement soutenu par les représentants des collectivités territoriales . Lors de sa réunion du 19 septembre 2017, la commission des finances de l'Association des maires de France a ainsi donné un accord de principe en faveur de l'automatisation du FCTVA , considérant que « la réforme, en simplifiant la gestion du fonds, répond aux constats largement partagés sur le processus actuel (procédure lourde, restée en très grande partie manuelle, manque de prévisibilité de la recette pour les collectivités et versements parfois aléatoires dans le temps, complexité des règles d'éligibilité, etc.). En outre, le scénario retenu par la mission assure une neutralité de la réforme à l'égard du taux du FCTVA ; il permet de maintenir ce taux à son niveau actuel et préserve ainsi la nature du FCTVA, ce qui correspond à une demande forte de l'AMF ».

B. DES MODALITÉS DE MISE EN oeUVRE QUI DOIVENT CEPENDANT ENCORE ÊTRE PRÉCISÉES

Selon les informations communiquées par la direction générale des finances publiques à vos rapporteurs spéciaux, le scénario retenu serait le suivant.

Pour procéder à l'automatisation du dispositif, les comptes retenus seront rendus intégralement éligibles au FCTVA, ce qui n'est pas le cas actuellement .

Néanmoins, pour maintenir un coût proche du coût actuel, certains comptes seraient exclus du périmètre (immobilisations incorporelles - exceptées certaines subventions d'équipement - les terrains et leurs aménagements).

Par ailleurs, deux subdivisions seraient créées pour les subventions d'investissement versées à l'État au titre des travaux réalisés sur la voirie et sur les monuments historiques afin d'assurer le maintien de l'éligibilité actuelle de ces dépenses.

Au total, la direction générale des finances publiques a indiqué à vos rapporteurs spéciaux que l'assiette des dépenses éligibles au dispositif rénové pourrait être la suivante :

- l'exclusion des comptes d'immobilisations incorporelles (dont les comptes 202 « frais liés à la réalisation des documents d'urbanisme et à la numérisation du cadastre » et 2051 « concessions et droits similaires »), avec prise en compte des subventions d'équipement versées par les départements et les régions aux établissements publics locaux d'enseignement portés au compte 2043, des subventions versées à l'État au titre des travaux sur le domaine public routier et sur les monuments historiques ;

- la prise en compte des immobilisations corporelles , à l'exception des comptes 211 « terrains », 212 « agencement et aménagements de terrains » et 214 « constructions sur sol d'autrui », et des comptes d'immobilisations en cours ;

- la prise en compte des dépenses d'entretien des bâtiments publics et de la voirie .

La définition de l'assiette n'est cependant pas définitivement arrêtée.

Le délai prévu pour l'entrée en vigueur de cette mesure, prévue au 1 er janvier 2019, apparaît à cet égard indispensable pour permettre de déterminer une assiette la plus neutre possible pour les collectivités territoriales .

Ces discussions devront cependant aboutir rapidement afin de permettre l'évolution des systèmes d'information et pour permettre aux collectivités territoriales de disposer d'une visibilité sur les montants de FCTVA qu'elles seront susceptibles de percevoir dans les années à venir.

Au total, vos rapporteurs spéciaux considèrent que cette réforme va dans le bon sens. C'est pourquoi ils vous proposent d'adopter le présent article sans modification.

Décision de la commission : votre commission vous propose d'adopter cet article sans modification.

ARTICLE 59 (Art. L. 2334-42 [nouveau] du code général des collectivités territoriales) - Dotation de soutien à l'investissement local

Commentaire : le présent article prévoit l'institution et les modalités d'attribution d'une dotation de soutien à l'investissement local (DSIL), dont les crédits sont inscrits au sein de la mission « Relations avec les collectivités territoriales ».

I. LE DROIT EXISTANT

A. UNE DOTATION EXCEPTIONNELLE DE SOUTIEN À L'INVESTISSEMENT DES COMMUNES ET DE LEURS GROUPEMENTS CRÉÉE EN 2016

Dans un contexte de baisse des dotations et de réduction de l'investissement public local, la loi de finances pour 2016 15 ( * ) a prévu la création, en 2016, d'une dotation budgétaire de soutien à l'investissement des communes et de leurs groupements à fiscalité propre , constituée de deux enveloppes :

- la première, répartie entre les régions en fonction de la population, pouvait être attribuée, par le préfet de région, à toutes les communes et établissements publics de coopération intercommunale (EPCI) à fiscalité propre, « en vue de la réalisation de projets de rénovation thermique, de transition énergétique, de développement des énergies renouvelables, de mise aux normes des équipements publics, de développement d'infrastructures en faveur de la mobilité ou de construction de logements et de la réalisation d'hébergements et d'équipements publics rendus nécessaires par l'accroissement de la population » ;

- la seconde, destinée aux communes rurales, était répartie entre les régions en fonction de la population des communes appartenant à une unité urbaine de moins de 50 000 habitants, et pouvait être attribuée aux communes de moins de 50 000 habitants, « en vue de la réalisation d'opérations d'investissement s'inscrivant dans le cadre d'un projet global de développement du territoire concerné ».

Les attributions perçues au titre de cette dotation étaient inscrites à la section d'investissement du budget.

Dotée de 800 millions d'euros en autorisations d'engagement et de 120 millions d'euros en crédits de paiement, 791 millions d'euros d'AE et 42,4 millions d'euros en CP avaient été consommés au 31 décembre 2016 (soit, respectivement, un taux d'exécution de 99 % et 35 %).

Cette dotation, créée initialement pour la seule année 2016, a été reconduite en 2017, selon des modalités un peu différentes.

B . UNE DOTATION DE SOUTIEN À L'INVESTISSEMENT LOCAL REMANIÉE EN 2017

La loi de finances pour 2017 16 ( * ) a ainsi prévu la création d'une dotation de soutien à l'investissement local, divisée en deux enveloppes :

- la première, divisée en trois parts :

- une part destinée à financer les contrats État-métropoles (30 millions d'euros) ;

- deux autres parts, l'une répartie entre les départements en fonction de leur population, l'autre destinée au « soutien des grandes priorités d'aménagement du territoire », attribuées par le préfet de région pour financer les mêmes priorités 17 ( * ) que celles financées en 2016 par la première part de dotation de soutien (570 millions d'euros) ;

- la seconde, destinée aux communes et EPCI ruraux et aux pôles d'équilibre territoriaux et ruraux (PETR), répartie entre les départements en fonction de la population des communes situées dans une unité urbaine de moins de 50 000 habitants, attribuée en vue du financement d'opérations inscrites dans un contrat prévoyant « notamment des actions destinées à favoriser l'accessibilité des services et des soins, à développer l'attractivité, à stimuler l'activité des bourg-centres, à développer le numérique et la téléphonie mobile et à renforcer la mobilité, la transition écologique et la cohésion sociale » (126 millions d'euros, prévus au programme 112 de la mission « Politique des territoires » et gérés par le commissariat général à l'égalité des territoires).

Si ces crédits sont destinés prioritairement à l'investissement, il est prévu que par dérogation, une partie des crédits « peut financer des dépenses de fonctionnement non récurrentes, notamment relatives à des études préalables, et être inscrites en section de fonctionnement de leur budget ».

Enfin, il est précisé que le refus d'attribution de cette dotation ne peut être fondé sur le cumul de cette dotation avec d'autres dotations ou subventions, ni sur le faible nombre d'habitants de la collectivité territoriale concernée, ni sur le faible montant de l'opération envisagée.

II. LE DISPOSITIF PROPOSÉ

Le présent article vise à créer une nouvelle version de la dotation de soutien à l'investissement local, qui serait pérennisée : contrairement aux années précédentes, elle serait codifiée dans le code général des collectivités territoriales (CGCT).

Ainsi, le A du nouvel article L. 2334-42 du code général des collectivités territoriales prévoit la création d'une dotation budgétaire de soutien à l'investissement local en faveur des communes et EPCI à fiscalité propre, en métropole et dans les départements et régions d'outre-mer.

Les crédits inscrits au titre de cette dotation sur la mission « Relations avec les collectivités territoriales » s'élèvent à 665 millions d'euros en autorisations d'engagement (AE) et 481,3 millions d'euros en crédits de paiement (CP).

Elle serait divisée en deux parts : l'une finançant des projets « structurants », l'autre soutenant les projets de mutualisation et de modernisation des collectivités territoriales.

A. UNE PREMIÈRE PART VISANT À FINANCER DES INVESTISSEMENTS PRIORITAIRES ET UNE SECONDE PART POUR ENCOURAGER LA MAÎTRISE DES DÉPENSES DE FONCTIONNEMENT

La première part ( 1° du A ), dotée de 615 millions d'euros, financerait les mêmes priorités d'aménagement du territoire que celles énumérées par les deux précédentes versions de la DSIL, et aussi la « création, transformation et rénovation des bâtiments scolaires ».

Elle pourrait également, comme la version précédente de la DSIL, financer les opérations « visant au développement des territoires ruraux » inscrites dans un contrat signé entre le préfet et l'EPCI ou le pôle d'équilibre territorial et rural (PETR).

La seconde part ( 2° du A ), dotée de 50 millions d'euros, aurait pour objet l'attribution de subventions, « principalement d'investissement », aux communes et EPCI à fiscalité propre à condition qu'ils maîtrisent leurs dépenses de fonctionnement. En effet, pourraient bénéficier de cette seconde part de la DSIL, ceux « qui s'engagent à maîtriser leurs dépenses de fonctionnement sur la base d'un projet de modernisation , en vue du financement de ce dernier, et dans le cadre d'un contrat conclu avec le représentant de l'État dans la région. Le contrat indique notamment, en contrepartie, la date à laquelle l'objectif en matière de dépenses de fonctionnement sera atteint , les modalités de mise en oeuvre et de suivi de cet engagement ainsi que les mesures destinées à en assurer le respect ».

B. LES MODALITÉS DE RÉPARTITION ET D'ATTRIBUTION DE LA DOTATION DE SOUTIEN À L'INVESTISSEMENT LOCAL

Les modalités de répartition ( B ) s'inspirent du fonctionnement des deux versions de la DSIL précédentes : elles sont réparties à 65 % en fonction de la population des régions et du département de Mayotte et à 35 % en fonction de la population des communes situées dans une unité urbaine de moins de 50 000 habitants. Il est fait référence à la population utilisée pour la répartition de la dotation globale de fonctionnement (DGF) et les unités urbaines définies par l'Institut national de la statistique et des études économiques (Insee).

Le C précise que les communes, les EPCI à fiscalité propre et les PETR peuvent bénéficier de la DSIL, et, dans le cadre des contrats de ruralité signés avec le préfet, elle peut être attribuée aux maîtres d'ouvrage désignés par le contrat.

Les subventions, attribuées par le préfet de région, sont inscrites, s'agissant de la première part, à la section d'investissement du budget des bénéficiaires. Toutefois, s'il s'agit d'une subvention attribuée dans le cadre d'un contrat, « les crédits attribués au titre de cette dotation peuvent financer des dépenses de fonctionnement de modernisation et d'études préalables, et être inscrite en section de fonctionnement de leur budget, dans la limite de 10 % du montant total attribué ». Il est précisé que dans ce cas, la subvention n'est pas reconductible : elle ne saurait ainsi prendre en charge des dépenses de personnel.

Les précisions introduites pour la DSIL versée en 2017 concernant l'interdiction de refuser la subvention pour certains motifs particuliers (cumul avec d'autres dotations, faible nombre d'habitants ou faible montant de l'opération envisagée) sont reconduites.

III. LES MODIFICATIONS APPORTÉES PAR L'ASSEMBLÉE NATIONALE

L'Assemblée nationale a adopté quatre amendements, dont deux rédactionnels. À l'initiative de Joël Giraud, rapporteur général au nom de la commission des finances, et de Paul Molac, rapporteur pour avis au nom de la commission des lois, l'Assemblée nationale a adopté deux amendements identiques avec l'avis favorable du Gouvernement.

Ces amendements visent à supprimer la seconde part de la DSIL, dont les crédits (50 millions d'euros) seraient transférés à la dotation d'équipement des territoires ruraux (DETR) .

En réalité, dans la mesure où les crédits destinés à la DETR et à la DSIL sont inscrits sur la même action 18 ( * ) du programme n° 119 « Concours financiers aux collectivités territoriales et à leurs groupements », il reviendra au gestionnaire de doter ces deux dotations selon la volonté du législateur.

IV. LA POSITION DE VOTRE COMMISSION DES FINANCES

La pérennisation de la dotation de soutien à l'investissement local, selon des modalités d'attribution en partie révisées, devrait contribuer à relancer l'investissement public local. En outre, l'élargissement de son utilisation à des projets de création, transformation et rénovation des bâtiments scolaires paraît pertinent.

S'agissant plus particulièrement de la seconde part de la DSIL, le projet annuel de performances de la mission « Relations avec les collectivités territoriales » souligne que « le montant de la DSIL a tenu compte de la suppression de la réserve parlementaire, à hauteur de 50 millions d'euros en autorisations d'engagement. Cette enveloppe est destinée à soutenir les projets de modernisation des communes et de leurs groupements ».

Vos rapporteurs spéciaux ne partagent pas cette vision des choses :

- d'une part, la seconde part de la DSIL s'élève à 50 millions d'euros alors que le montant de la réserve parlementaire destinée aux collectivités territoriales était, en 2017, de 86 millions d'euros ;

- d'autre part, la dotation d'action parlementaire pouvait être accordée sans condition, alors que la seconde part de la DSIL suppose un engagement à diminuer les dépenses de fonctionnement.

En d'autres termes, certaines communes rurales, qui n'ont que très peu de dépenses mais doivent parfois faire face à une dépense exceptionnelle et pouvaient, à ce titre, bénéficier de la réserve parlementaire, n'auraient pas accès à cette enveloppe de la DSIL . La suppression de la seconde part de la DSIL et l'abondement de la DETR permettent, certes, d'éviter cet écueil mais, par rapport à 2017, le niveau des dotations de soutien à l'investissement demeure insuffisant 19 ( * ) .

Décision de la commission : votre commission vous propose d'adopter cet article sans modification.

ARTICLE 59 bis (nouveau) (Art L. 2334-37 du code général des collectivités territoriales) - Modalités d'examen par la commission ad hoc des demandes de subvention au titre de la dotation d'équipement des territoires ruraux (DETR)

. Commentaire : le présent article prévoit de diminuer le seuil à partir duquel les demandes de subvention au titre de la dotation d'équipement des territoires ruraux (DETR) sont soumises pour avis à la commission instituée auprès du préfet.

I. LE DROIT EXISTANT

La dotation d'équipement des territoires ruraux (DETR) est répartie entre les départements selon des critères de population, de richesse (mesurée par le potentiel fiscal) et de densité, en application de l'article L. 2334-35 du code général des collectivités territoriales.

Ces enveloppes départementales sont ensuite attribuées aux communes et établissements publics de coopération intercommunale (EPCI) éligibles 20 ( * ) par le préfet, sous forme de subventions « en vue de la réalisation d'investissements, ainsi que de projets dans le domaine économique, social, environnemental, sportif et touristique ou favorisant le développement ou le maintien des services publics en milieu rural » 21 ( * ) .

L'article L. 2334-37 du code général des collectivités territoriales (DGCT) prévoit qu'est créée une commission départementale auprès du préfet, dont la mission est double :

- d'une part, elle fixe chaque année les catégories d'opérations prioritaires ainsi qu'une fourchette de taux de subvention applicables à chacune d'entre elles ;

- d'autre part, elle est informée, par le préfet, de la liste des opérations à subventionner et du montant accordée par l'État et est même « saisie pour avis des projets dont la subvention au titre de la [DETR] porte sur un montant supérieur à 150 000 euros ».

Cette commission est composée :

- des représentants des maires des communes de moins de 20 000 habitants dans les communes de métropole et 35 000 habitants dans les départements d'outre-mer ;

- des représentants des présidents des EPCI à fiscalité propre de moins de 60 000 habitants en métropole et 150 000 habitants dans les départements d'outre-mer ;

- des députés et des sénateurs élus dans le département lorsque celui-ci compte moins de cinq parlementaires ; à partir du 1 er janvier 2018, « lorsque le département compte cinq parlementaires ou plus, deux députés et deux sénateurs sont désignés, respectivement, par l'Assemblée nationale et par le Sénat ».

Par ailleurs, le préfet communique aux membres de la commission, « cinq jours francs avant toute réunion, une note explicative de synthèse sur les affaires inscrites à l'ordre du jour ». Cette note est également communiquée, dans les mêmes délais, à tous les parlementaires élus dans le département .

II. LE DISPOSITIF ADOPTÉ PAR L'ASSEMBLÉE NATIONALE

À l'initiative des rapporteurs spéciaux au nom de la commission des finances, Jean-René Cazeneuve et Christophe Jerretie et des députés du groupe Nouvelle gauche, l'Assemblée nationale a adopté, avec un avis favorable du Gouvernement, le présent article visant à diminuer à 100 000 euros (au lieu de 150 000 euros actuellement) le seuil à partir duquel la commission départementale est saisie pour avis sur les projets de subvention.

III. LA POSITION DE VOTRE COMMISSION DES FINANCES

Selon les informations transmises à vos rapporteurs spéciaux par la direction générale des collectivités territoriales, un tel seuil ne devrait pas conduire à un encombrement des commissions départementales : dans le Cantal, 11 % des projets seraient soumis à la commission, contre 5 % actuellement ; de même, dans le Finistère et dans l'Isère, le taux passerait de 13 % aujourd'hui à 21 %.

Cette disposition permet de renforcer l'étendue du contrôle effectué par la commission départementale sur les projets de subventions, sans toutefois risquer de l'engorger.

Décision de la commission : votre commission vous propose d'adopter cet article sans modification.

ARTICLE 60 (Art. L. 1613-5-1, art. L. 2113-20, art. L. 2113-22, art. L. 2334-7-3, art. L. 2334-7-3, art. L. 2334-13, art. L. 2334-17, art. L. 2334-21, art. L. 3334-1, art. L. 3334-4, art. L. 3663-9 et art. L. 5214-23-1 du code général des collectivités territoriales) - Répartition de la dotation globale de fonctionnement (DGF)

Commentaire : le présent article procède à la répartition de la dotation globale de fonctionnement (DGF) pour 2018.

I. HAUSSE DE 190 MILLIONS D'EUROS DE LA PÉRÉQUATION VERTICALE

Le 5° du I du présent article prévoit que la dotation de solidarité urbaine et de cohésion sociale (DSU) et la dotation de solidarité rurale (DSR) augmentent toutes deux d'au moins 90 millions d'euros en 2018 . Il appartiendra au comité des finances locales d'aller éventuellement au-delà de ce que prévoit la loi de finances, ce qu'il n'a cependant jamais fait au cours des dernières années.

Par ailleurs, le c du 6° et le 7° du I du présent article proposent d'augmenter de 10 millions d'euros les dotations de péréquation des départements.

Au total, la hausse de la péréquation verticale atteint donc 190 millions d'euros en 2018 . Comme l'a souligné le rapporteur général de la commission des finances du Sénat dans son commentaire de l'article 16 du présent projet de loi de finances, cette hausse est sensiblement moins importante que les années précédentes, qui étaient cependant marquées par une diminution considérable des dotations.

Évolution de la péréquation verticale et des fonds de péréquation du bloc communal depuis 2012

(en millions d'euros)

Source : commission des finances du Sénat

Cette hausse est financée, comme le veut l'usage :

- pour moitié par abondement de l'enveloppe grâce à la minoration des prélèvements sur recettes « variables d'ajustement » ;

- et, pour l'autre moitié, par écrêtement de la dotation forfaitaire des communes et de la dotation forfaitaire des départements. Depuis 2017, le prélèvement sur les communes est plafonné à 1 % des recettes réelles de fonctionnement et non plus à 3 % de la dotation forfaitaire : ainsi, le nombre de communes plafonnées est passé de 10 467 (sur 17 702 prélevées) en 2016 à 2 415 communes plafonnées (sur 18 080 prélevées) , alors même que l'écrêtement total est passé entre ces deux années de 152 millions d'euros à 218 millions d'euros.

Au cours de l'examen de la première partie du projet de loi de finances à l'Assemblée nationale, le rapporteur général a souhaité que la hausse de la péréquation verticale soit entièrement financée par l'écrêtement précité et non par minoration des variables d'ajustement , afin d'éviter de diminuer excessivement la dotation de compensation de la réforme de la taxe professionnelle (DCRTP) 22 ( * ) . Cependant, à ce stade, les dispositions prévoyant qu'elle n'est financée que pour moitié par écrêtement n'ont pas été supprimées .

II. EXTENSION DES INCITATIONS FINANCIÈRES ACCORDÉES AUX COMMUNES NOUVELLES

A. LE DROIT EXISTANT

Depuis 2015 23 ( * ) , la création de communes nouvelles est assortie de plusieurs incitations financières, conditionnées à des critères de population et de date de création 24 ( * ) :

- d'une exonération de la contribution au redressement des finances publiques pendant trois ans ;

- d'une garantie de non baisse de leur dotation forfaitaire par rapport à celle perçue par les communes préexistantes pendant trois ans ;

- d'une garantie de non baisse des attributions au titre de la dotation nationale de péréquation (DNP), de la dotation de solidarité urbaine (DSU) et de la dotation de solidarité rurale (DSR) perçues par les communes préexistantes, pendant trois ans ;

- d'une majoration de 5 % de leur dotation forfaitaire, après garantie, pour celles regroupant entre 1 000 et 10 000 habitants pendant trois ans ;

- d'une garantie de non baisse des « compensations » perçues par le ou les EPCI préexistants pendant trois ans ;

- et d'une garantie de non baisse de la dotation de consolidation correspondant à la dotation d'intercommunalité perçue par le ou les EPCI préexistants pendant trois ans.

Peuvent en bénéficier les communes nouvelles créées au plus tard le 1 er janvier 2017 et regroupant au plus 10 000 habitants, ce seuil étant porté à 15 000 habitants pour les communes nouvelles regroupant l'ensemble des anciennes communes membres d'un ou plusieurs EPCI. La bonification de DGF est également conditionnée au respect d'un plancher démographique de 1 000 habitants.

Ces dispositions restent applicables à une commune nouvelle étendue à une ou plusieurs communes, sans que cette extension en prolonge la durée d'application (de trois ans).

B. LE DISPOSITIF PROPOSÉ

Les 2° à 3° du I du présent article, dans la rédaction présentée par le Gouvernement, modifient ces dispositions :

- les communes nouvelles créées entre le 2 janvier 2017 et le 1 er janvier 2019 pourront bénéficier des incitations financières précitées ;

- le critère de l'appartenance à un ancien EPCI s'appréciera au 1 er janvier de l'année précédant l'année de répartition, afin d'éviter l'effet d'aubaine que constituerait la modification du périmètre d'un EPCI juste avant la constitution de la commune nouvelle ;

- il est précisé que les plafonds de droit commun relatifs à l'évolution de la DSR, de la DSU et de la DNP (attribution égale à 120 % du montant de l'année précédente au maximum) s'appliquent aux communes nouvelles, indépendamment des garanties de non baisse dont elles bénéficient.

C. LES MODIFICATIONS APPORTÉES PAR L'ASSEMBLÉE NATIONALE

À l'initiative de son rapporteur général et avec l'avis favorable du Gouvernement, l'Assemblée nationale a adopté un amendement :

- relevant de 10 000 à 15 000 habitants le seuil de population ouvrant droit aux incitations financières ;

- supprimant le plancher de 1 000 habitants pour bénéficier de la bonification de dotation forfaitaire.

Par ailleurs, à l'initiative de notre collègue député Jean-René Cazeneuve, co-rapporteur spécial de la mission « Relations avec les collectivités territoriales », le Gouvernement s'en remettant à la sagesse des députés, l'Assemblée nationale a adopté un amendement prévoyant que le fait d'élargir le périmètre d'une commune nouvelle permet de bénéficier des incitations financières à nouveau pendant la période totale de trois ans , et non plus juste pour la durée restant à courir. Cette possibilité est limitée à l'extension à des communes de moins de 2 000 habitants.

D. LA POSITION DE VOTRE COMMISSION DES FINANCES

Vos rapporteurs spéciaux considèrent que les communes nouvelles sont un moyen de renforcer l'efficacité de l'action publique locale tout en respectant l'institution communale et la démocratie locale et se réjouissent donc que les incitations existantes soient prolongées.

Le tableau ci-dessous retrace le coût de ces dispositifs, en 2017.

Coût des incitations financières à la création de communes nouvelles en 2017

(en millions d'euros et en euros par habitant)

Nombre de communes concernées

Coût

(en millions d'euros)

Coût par habitant pour celles créées au 1 er janvier 2017

Dotation forfaitaire

Majoration de 5 % de la dotation forfaitaire

137

2,77

5,92

Garantie de non-baisse de la dotation forfaitaire

85

11,2

23,90

Exonération de contribution au redressement des finances publiques

196

4,32

7,75

Dotations de péréquation

Garantie de non-baisse de la DSR

1

0,29

15,11

Attribution de la fraction « bourg centre » de la DSR à des communes nouvelles normalement non éligibles

5

0,54

24,27

Garantie de non-baisse et attribution des communes nouvelles normalement non-éligibles à la part « péréquation » de la DSR

8

5,03

5,53

Attributions au titre de la part « cible » de la DSR des communes nouvelles

21

2,48

5,29

Garantie de non-baisse de la part principale de la DNP

174

4,95

8,33

Garantie de non-baisse de la part majoration de la DNP

100

1,46

3,65

Dotations intercommunales

Dotation de consolidation

3

0,41

17,12

Dotation de compensation

6

1,26

27,95

Total

34,71

Source : commission des finances du Sénat à partir des données de la DGCL

III. SIMPLIFICATION DES MODALITÉS DE NOTIFICATION DES DOTATIONS

A. LE DROIT EXISTANT

La notification des dotations aux collectivités territoriales se fait en plusieurs étapes :

- fin mars / début avril, une fois les opérations de répartition achevées, les montants revenant à chaque collectivité sont mis en ligne sur le site internet de la DGCL ; les collectivités territoriales disposent ainsi de l'information nécessaire à l'élaboration du budget, mais il ne s'agit pas d'une notification au sens juridique ;

- en avril et mai, la DGCL établit les fiches de notification de chaque collectivité et les circulaires présentant les modalités de calcul de chaque dotation ;

- enfin, les préfectures envoient à chaque collectivité territoriale les arrêtés fixant le montant de chaque dotation ; c'est à partir de cette notification que court le délai contentieux .

B. LE DISPOSITIF PROPOSÉ

Le 1° du I du présent article prévoit de supprimer la phase déconcentrée de la notification. Un arrêté du ministre chargé des collectivités territoriales serait publié au journal officiel, accompagné du tableau de répartition. Cet arrêté vaudrait notification aux collectivités territoriales. C'est donc à partir de cette publication que courrait le délai de recours contentieux de deux mois .

C. LA POSITION DE VOTRE COMMISSION DES FINANCES

Vos rapporteurs spéciaux comprennent le souci de rationalisation des opérations de notification des dotations aux collectivités territoriales qui, d'après l'évaluation préalable, représentent 500 équivalents temps plein travaillés (ETPT) dans les préfectures, mais sur une période de quelques mois seulement. Une telle simplification permettrait un gain d'efficacité certain. Ils n'ont donc pas d'opposition de principe à cette simplification .

Néanmoins, ils constatent que cette modification ne s'est accompagnée d'aucune concertation avec les associations d'élus locaux et souhaitent obtenir des précisions quant aux conséquences en matière de contentieux (délai de recours avancé) et aux documents qui seront envoyés aux collectivités territoriales , le cas échéant au format électronique.

C'est pourquoi ils ont déposé un amendement de suppression de ces alinéas, afin d'entendre le ministre sur ce sujet.

IV. PÉRENNISATION DES PRÉLÈVEMENTS SUR LES RESSOURCES FISCALES OPÉRÉS AU TITRE DE LA CRFP ENTRE 2014 ET 2017

La contribution au redressement des finances publiques (CRFP), qui a conduit à minorer de 11,5 milliards d'euros les concours financiers de l'État aux collectivités territoriales entre 2014 et 2017, portait en principe sur la dotation forfaitaire des communes, des départements et des régions et, pour les EPCI, sur leur dotation d'intercommunalité. Dans les cas où ces vecteurs étaient insuffisants, il était procédé à un prélèvement sur les ressources fiscales des collectivités concernées.

Le présent article pérennise les prélèvements opérés au titre des exercices antérieurs. À défaut, il y aurait une inégalité de traitement entre les collectivités qui auraient acquitté la CRFP sur leur dotation forfaitaire - qui ne retrouveraient pas le montant de dotation perçu avant 2014 - et celles qui l'ont vue prélever sur leurs ressources fiscales . Tel est l'objet du 4° du I du présent article, pour les communes, du 6° du I, pour les départements, et du III, pour les régions. L'article du code général des collectivités territoriales relatif à la CRFP des EPCI n'est pas modifié, dans la mesure où sa rédaction indique déjà que le prélèvement est effectué « à compter de 2017 ».

Au total, ces prélèvements s'élèvent à 67 millions d'euros , dont 26,5 millions d'euros pour 439 communes, 36,4 millions d'euros pour 132 EPCI et 4,1 millions d'euros pour 3 régions.

V. DISPOSITIONS DIVERSES

A. ASSOUPLISSEMENT DES CONDITIONS OUVRANT DROIT AU BÉNÉFICE DE LA BONIFICATION DE LA DOTATION D'INTERCOMMUNALITÉ DES COMMUNAUTÉS DE COMMUNES À FISCALITÉ PROFESSIONNELLE UNIQUE

Le montant par habitant de la dotation d'intercommunalité des communautés de communes à fiscalité professionnelle unique est de 24,48 euros, avant application des multiples garanties. En application de l'article 5214-23-1 du code général des collectivités locales, ce montant est porté à 34,06 euros :

- lorsque, d'une part :

o leur population est comprise entre 3 500 habitants et 50 000 habitants au plus ;

o ou, lorsque leur population est inférieure à 3 500 habitants, et qu'elles sont situées en zone de revitalisation rurale de montagne et comprennent au moins dix communes dont une commune siège du bureau centralisateur ou un chef-lieu de canton à la date du 1 er janvier 2014 ou la totalité des communes d'un canton ,

o ou bien, lorsque leur population est supérieure à 50 000 habitants, qu'elles n'incluent pas de commune centre ou de commune chef-lieu de département de plus de 15 000 habitants ;

- et, d'autre part, exercent au moins six des onze groupes de compétences suivants :

o développement économique ;

o aménagement de l'espace communautaire ;

o création ou aménagement et entretien de voirie d'intérêt communautaire ;

o politique du logement social ;

o politique de la ville ;

o collecte et traitement des déchets des ménages et déchets assimilés ;

o développement et aménagement sportif ;

o assainissement collectif et assainissement non collectif ;

o aménagement, entretien et gestion des aires d'accueil des gens du voyage ;

o création et gestion de maisons de services au public ;

o eau.

La loi de finances pour 2017 a ajouté à cette liste de compétences la gestion des milieux aquatiques et porté de six à neuf le nombre de compétences à exercer pour bénéficier de la bonification. À l'initiative conjointe de son rapporteur général et de nos collègues députés Hélène Zannier (LREM, Moselle) et Paul Molac (LREM, Morbihan), avec l'avis favorable de la commission et du Gouvernement, l'Assemblée nationale a adopté un amendement réduisant de neuf à huit le nombre de compétences à exercer pour bénéficier de la bonification de DGF .

Cet assouplissement est bienvenu, dans la mesure où prévoir l'exercice de compétences comme l'eau ou la politique de la ville, notamment, est particulièrement complexe.

B. ABONDEMENT D'UN MILLION D'EUROS DU FONDS D'AIDE POUR LE RELOGEMENT D'URGENCE

Créé par l'article 39 de la loi de finances pour 2006 25 ( * ) , le fonds d'aide pour le relogement d'urgence (FARU) permet aux préfets d'accorder des aides financières aux communes ou à des EPCI « pour assurer durant une période maximale de six mois l'hébergement d'urgence ou le relogement temporaire de personnes occupant des locaux qui présentent un danger pour leur santé ou leur sécurité, et qui ont fait l'objet soit d'une ordonnance d'expulsion, soit d'un ordre d'évacuation ». Ce fonds a été prorogé jusqu'en 2020 par la loi de finances pour 2016.

L'évaluation préalable du présent article précise que l'abondement du FARU est rendu nécessaire par le rythme soutenu d'utilisation des crédits : « le niveau des crédits qui atteindra 1,4 million d'euros au 1 er janvier 2018 risque d'être insuffisant pour soutenir le rythme actuel de consommation qui s'établit environ à 1,6 million d'euros ».

Cet abondement permettra de soutenir les collectivités concernées et ne pèsera pas sur les variables d'ajustement .

C. ACCORD D'UNE DEUXIÈME ANNÉE DE GARANTIE DE SORTIE DE LA FRACTION « BOURG CENTRE » DE LA DSR POUR LES COMMUNES TOURISTIQUES

Le quinzième alinéa de l'article L. 2334-21 du code général des collectivités locales prévoit que les communes qui cessent d'être éligibles à la fraction « bourg centre » de dotation de solidarité rurale (DSR) perçoivent, à titre de garantie, la moitié du montant perçu l'année précédente.

Par ailleurs, la loi de finances pour 2017, à l'initiative de notre collègue député Joël Giraud, a prévu que la population prise en compte pour le calcul de la fraction « bourg centre » de la DSR soit la « population DGF », c'est-à-dire qu'elle prenne en compte les majorations pour résidences secondaires notamment. Il s'agissait ainsi de favoriser les communes touristiques. En contrepartie, la population DGF prise en compte est plafonnée en fonction de la « population Insee », afin de ne pas favoriser excessivement ces communes et donc de léser les autres.

À l'initiative de notre collègue député Joël Giraud, désormais rapporteur général, avec l'avis favorable du Gouvernement, l'Assemblée nationale a adopté un amendement prévoyant que les communes qui ont cessé d'être éligibles en 2017 du fait du plafonnement précité continuent à bénéficier en 2018 de la garantie perçue en 2017.

D. ASSOUPLISSEMENT DES CONDITIONS D'ÉLIGIBILITÉ À LA FRACTION « BOURG CENTRE » DE LA DSR DES COMMUNES SIÈGES DE BUREAUX CENTRALISATEURS

La fraction « bourg centre » de la dotation de solidarité rurale (DSR) bénéficie aux communes dont la population représente au moins 15 % de celle du canton, aux communes sièges des bureaux centralisateurs, ainsi qu'aux communes chefs-lieux de canton au 1 er janvier 2014. Cependant, en sont exclues certaines communes, notamment celles situées dans un canton dont la commune chef-lieu compte plus de 10 000 habitants.

Or, en 2017, 25 communes éligibles en tant que bureau centralisateur ont été exclues du fait qu'elles sont situées dans un canton - aux périmètres 2014 - comptant plus de 10 000 habitants.

À l'initiative de notre collègue député Olivier Dussopt (Nouvelle gauche, Ardèche), avec l'avis favorable de la commission et du Gouvernement, l'Assemblée nationale a adopté un amendement prévoyant que les communes sièges des bureaux centralisateurs ne peuvent plus être exclues du fait de ce critère.

E. PRISE EN COMPTE DE CERTAINS TYPES DE LOGEMENT SOCIAUX DANS L'INDICE SYNTHÉTIQUE DE LA DSU

L'article L. 2334-17 du code général des collectivités locales fixe les modalités de calcul de l'indice synthétique utilisé pour l'éligibilité et la répartition de la DSU. Celui-ci prend notamment en compte le nombre de logement sociaux.

À l'initiative de notre collègue député Pierre-Alain Raphan (LREM, Essonne), avec l'avis favorable de la commission et du Gouvernement, l'Assemblée nationale a adopté un amendement étendant les catégories de logements sociaux pris en compte aux logements inclus dans le périmètre d'une opération de requalification des copropriétés dégradées d'intérêt national (ORCOD-IN). Par ricochet, ces logements sociaux sont également pris en compte pour le calcul du fonds de solidarité des communes de la région d'Île-de-France (FSRIF).

D'après les auteurs de l'amendement, cette modification apporterait 400 000 euros de DSU supplémentaire et 2,2 millions d'euros de FSRIF supplémentaires aux communes de Grigny et de Clichy-sous-bois.

F. MAJORATION DE LA DACOM DE GUYANE

L'article 144 de la loi n° 2017-256 du 28 février 2017 de programmation relative à l'égalité réelle outre-mer et portant autres dispositions en matière sociale et économique a prévu, à l'initiative de notre collègue sénateur Georges Patient, de majorer la population des communes aurifères de Guyane pour le calcul de la dotation de base des communes, au sein de la dotation forfaitaire. Cependant, depuis le 1 er janvier 2015, la dotation de base n'existe plus en tant que telle : son montant a été cristallisé au sein de la dotation forfaitaire ; de plus, il n'existe pas de définition juridique des communes aurifères.

À l'initiative du Gouvernement, avec l'avis favorable de la commission, nos collègues députés ont adopté un amendement supprimant les dispositions précitées et, en contrepartie, majorant de 1,5 million d'euros la dotation d'aménagement des communes et circonscriptions territoriales d'outre-mer (Dacom) allouée aux communes de Guyane. Ce montant sera réparti entre les communes bénéficiaires de la redevance des mines, en fonction de leur population.

G. PRÉCISIONS CONSÉCUTIVES À LA MISE EN PLACE DE LA COLLECTIVITÉ UNIQUE DE CORSE

Le II du présent article précise que les composantes de la « DGF départementale » et les bases et produits de la fiscalité départementale de la collectivité unique de Corse sont égaux, pour les exercices antérieurs, à la somme des attributions de ses deux anciens départements, afin de permettre de calculer les attributions de la nouvelle collectivité.

H. AJUSTEMENT DU POTENTIEL FISCAL DE LA MÉTROPOLE DE LYON

Le 8° du I du présent article modifie les dispositions relatives au calcul des potentiels fiscaux communal et départemental de la métropole de Lyon, afin de tenir compte du transfert de 25 points de CVAE des départements aux régions.

La part des recettes de CVAE de la métropole de Lyon étant considérée comme communale ou départementale est calculée en appliquant une « règle de trois » à partir des critères nationaux. La part régionale étant passée de 25 % à 50 % au 1 er janvier 2016, il était nécessaire de modifier en conséquence l'article L. 3663-9.

Répartition du produit de la CVAE

Part communale

Part départementale

Part régionale

Avant le 1 er janvier 2016

Répartition du produit national

26,50%

48,50%

25,00%

Imputation du produit revenant à la métropole de Lyon

35,33%

64,67%

Depuis le 1 er janvier 2016

Répartition du produit national

26,50%

23,50%

50,00%

Imputation du produit revenant à la métropole de Lyon

53,00%

47,00%

Source : commission des finances du Sénat

Décision de la commission : votre commission vous propose d'adopter cet article ainsi modifié.

ARTICLE 60 bis (nouveau) (Art. L. 2336-2 et art. L. 5211-30 du code général des collectivités territoriales) - Potentiel fiscal des communautés d'agglomération issues de syndicats d'agglomération nouvelle

. Commentaire : le présent article prévoit de supprimer en six ans l'avantage dont bénéficient les anciens syndicats d'agglomération nouvelle dans les modalités de calcul de leur potentiel fiscal.

I. LE DROIT EXISTANT

A. LES CA ISSUES DE SAN BÉNÉFICIENT D'UN AVANTAGE CONSIDÉRABLE POUR LE CALCUL DE LEUR POTENTIEL FISCAL

Les villes nouvelles créées dans les années 1970 se sont organisées en syndicat d'agglomération nouvelle (SAN). Lorsque la loi dite « Chevènement » de 1999 26 ( * ) , a créé la catégorie juridique des communautés d'agglomération (CA), il a été prévu que celles issues de SAN bénéficieraient d'une modalité particulière de calcul de leur potentiel fiscal . Celui-ci est minoré par application d'un coefficient égal au rapport entre, d'une part, les bases brutes par habitant de taxe professionnelle des communautés d'agglomération et, d'autre part, les bases brutes par habitant de taxe professionnelle des SAN, des communautés d'agglomération nouvelle et de ceux d'entre eux qui se sont transformés en CA, à condition qu'il soit inférieur à 1. Ainsi, leurs ressources sont artificiellement diminuées, ce qui leur permet, toutes choses égales par ailleurs, de bénéficier de façon plus importante des concours de l'État ou des dispositifs de péréquation .

La loi de finances pour 2012 27 ( * ) a adapté cette disposition à la réforme de la taxe professionnelle, en faisant référence aux bases de cotisation foncière des entreprises (CFE). À l'initiative de l'Assemblée nationale, la loi de finances pour 2013 28 ( * ) a pour sa part étendu cette pondération au calcul du potentiel fiscal agrégé d'un ensemble intercommunal, utilisé pour calculer les versements et attributions au titre du fonds national de péréquation des ressources communales et intercommunales (FPIC). Indirectement, le coefficient s'est donc également appliqué au potentiel fiscal des communes membres de l'EPCI, compris dans le potentiel fiscal agrégé. Enfin, pour éviter que les changements de périmètre des EPCI ne suppriment cet avantage, l'article 157 de la loi de finances pour 2016 29 ( * ) , introduit à l'Assemblée nationale à l'initiative du Gouvernement, prévoit que cette pondération bénéficie également aux CA issues de la fusion d'EPCI dont l'un au moins est un SAN qui s'est transformé en CA avant le 1 er janvier 2015 . Cette pondération s'applique uniquement à la part de potentiel fiscal correspondant au périmètre des SAN au 1 er janvier 2015 ou des CA issues de SAN.

En 2016, ce coefficient de pondération était égal à 0,551901, ce qui impliquait donc une diminution de près de moitié du potentiel fiscal des CA issues de SAN .

B. UNE REMISE EN CAUSE FIN 2016, ANNULÉE DÉBUT 2017

L'article 79 de la loi de finances rectificative pour 2016 30 ( * ) , introduit à l'Assemblée nationale à l'initiative de notre collègue députée Valérie Rabault, alors rapporteure générale, et adopté avec un avis de sagesse du Gouvernement, a restreint l'avantage en prévoyant qu'il ne s'appliquerait plus, à compter de 2017, à l'ensemble du potentiel fiscal de l'ancien SAN, mais uniquement à la part de ce potentiel correspondant à la seule cotisation foncière des entreprises (CFE).

Afin d'éviter une baisse trop brutale des ressources des anciens SAN, la loi 31 ( * ) du 1 er mars 2017, issue d'une proposition de loi, déposée à l'Assemblée nationale 32 ( * ) , est revenue sur l'article 79 de la loi de finances rectificative pour 2016 : les CA concernées continuent à bénéficier des modalités favorables de calcul du potentiel fiscal, mais uniquement pour 2017 .

II. LE DISPOSITIF ADOPTÉ PAR L'ASSEMBLÉE NATIONALE

L'Assemblée nationale a adopté trois amendements identiques, à l'initiative de nos collègues députés Jean-René Cazeneuve (LREM, Gers), Paul Molac (LREM, Morbihan) et Jean-Noël Barrot (LREM, Yvelines), avec l'avis favorable du Gouvernement, introduisant le présent article 60 bis, qui propose un retour en six ans au droit commun .

Le I prévoit que le coefficient de pondération est reconduit à l'identique en 2018 , année au cours de laquelle il devrait donc être égal à 50 % environ. Il augmenterait ensuite progressivement entre 2019 (60 %) et 2022 (90 %) de 10 points chaque année. Le 1° procède à cette modification dans les dispositions relatives au potentiel fiscal et le 2° à la même modification pour le potentiel fiscal agrégé.

Le II du présent article supprime cet avantage à compter du 1 er janvier 2023 .

III. LA POSITION DE VOTRE COMMISSION DES FINANCES

A. LA COMMISSION DES FINANCES AVAIT ÉMIS QUELQUES RÉTICENCES À PROLONGER CE DISPOSITIF EN 2017

Lors de l'examen de la proposition de loi précitée au Sénat, votre commission des finances avait exprimé une certaine réticence à prolonger cet avantage 33 ( * ) .

Elle avait tout d'abord noté que les anciens SAN ont des bases fiscales plus importantes que les autres CA : « leurs bases de cotisation foncière des entreprises (CFE) par habitant sont supérieures de 81 % à celles des autres CA ou que celles de cotisation sur la valeur ajoutée des entreprises (CVAE) le sont de 65 %. De même, elles bénéficient de façon plus importante des compensations de la réforme de la taxe professionnelle ».

Elle avait donc considéré que la pertinence de cet avantage était à réévaluer, à la lumière du rapport prévu par l'article 3 de la loi précitée, mais en notant que « en tout état de cause, la situation économique et financière a changé : dans un contexte de baisse des dotations et de montée en puissance de la péréquation, les avantages accordés à des collectivités qui disposent de bases fiscales importantes sont plus difficiles à accepter ».

B. LE RAPPORT TRANSMIS PAR LE GOUVERNEMENT MONTRE QUE L'AVANTAGE EST SIGNIFICATIF ET QU'IL BÉNÉFICIE À DES EPCI DONT LA SITUATION FINANCIÈRE EST BONNE

Le rapport transmis par le Gouvernement permet d'établir plusieurs constats.

1. La situation financière des anciens SAN est bonne

La situation financière des anciens SAN est bonne . Leur niveau d'épargne brute est nettement supérieur à la moyenne nationale des CA (24 % contre 16,5 %). Le taux d'épargne nette est en revanche plus dégradé : 2,9 % pour une moyenne nationale des CA de 9,1 %. Leur taux d'endettement est effectivement élevé, mais leur capacité de désendettement est très bonne : 5,3 ans en moyenne, contre 11,7 ans pour la moyenne nationale des CA.

2. L'avantage dont ils bénéficient est significatif

L'avantage dont bénéficient les anciens SAN a tout d'abord pour effet de majorer leur dotation d'intercommunalité . D'après le Gouvernement, ce mécanisme représenterait, en 2017, un bonus de près d'un million d'euros . La pertinence de ce montant doit toutefois être relativisée : il prend en compte les garanties dont bénéficient les EPCI issus de fusions ou ayant changé de catégorie, de même que les garanties limitant les baisses de dotation d'intercommunalité. Ce montant d'un million d'euros correspond donc au coût théorique pour la seule année 2017 ; il ne correspond pas au coût réel total, qui serait constaté lorsque tous les mécanismes de garantie auront cessé de produire leurs effets .

Par ailleurs, l'avantage en matière de répartition du FPIC représente, toujours d'après le Gouvernement, un montant de 41,5 millions d'euros, malgré le jeu des mécanismes de garantie qui limitent la baisse des versements d'une année sur l'autre.

L'ensemble de ces avantages jouant à l'intérieur d'enveloppes « fermées », ils sont financés par les autres EPCI et communes .

C. VOS RAPPORTEURS SPÉCIAUX SOUTIENNENT LE MÉCANISME DE SORTIE PRÉVU PAR LE PRÉSENT ARTICLE

Vos rapporteurs spéciaux constatent que la situation financière des anciens SAN ne justifie pas un traitement particulier. Au demeurant, les autres communes et EPCI particulièrement endettés ne bénéficient d'aucun avantage particulier. Ils notent également qu'aucune autre catégorie de collectivité ne bénéficie d'un avantage dans la répartition du FPIC en fonction de son organisation juridique antérieure.

Ils se réjouissent donc que ce mécanisme soit in fine supprimé. Ils constatent néanmoins que l'avantage aurait pu commencer à diminuer dès 2018 au lieu d'attendre 2019 et que le Gouvernement envisageait dans son rapport précité un mécanisme de sortie en trois ans et non en six ans.

Décision de la commission : votre commission vous propose d'adopter cet article sans modification.

ARTICLE 60 ter (nouveau) - Demande de rapport sur la prise en compte dans la répartition des dotations et des fonds de péréquation des charges liées à l'accueil d'une population touristique non permanente

. Commentaire : le présent article demande un rapport au Gouvernement sur la prise en compte dans la répartition des dotations et des fonds de péréquation des charges liées à l'accueil d'une population touristique non permanente.

I. LE DROIT EXISTANT

La dotation globale de fonctionnement (DGF) et les fonds de péréquation communale (fonds nationale de péréquation des ressources intercommunales et communales - FPIC - et fonds de solidarité des communes de la région d'Île-de-France - FSRIF) sont répartis en fonction de critères de ressources (potentiels fiscal et financier notamment) et de charges.

Les critères de charges utilisés sont variables d'une dotation ou d'un fonds à l'autre . Dans leur rapport de 2015 34 ( * ) , notre regretté collègue Jean Germain et notre collègue députée Christine Pires Beaune recensaient au total 11 critères de ressources et 19 critères de charges utilisés au niveau communal (voir tableau ci-dessous).

En particulier, la « population DGF » , définie à l'article L. 2334-2 du code général des collectivités locales, correspond à la population issue du recensement, majorée d'un habitant par résidence secondaire et d'un habitant par place de caravane située sur une aire d'accueil des gens du voyage (majoration de deux habitants par place de caravane pour les communes éligibles l'année précédente à la DSU). Elle vise notamment à prendre en compte la situation des communes touristiques , qui accueillent une population non permanente importante. Au total, en 2017, la population DGF était supérieure de près de 5 % à la population INSEE (+ 3,3 millions « d'habitants » ).

-

Critères utilisés pour apprécier les charges des communes et EPCI

Source : commission des finances du Sénat à partir du rapport précité de Christine Pires Beaune et Jean Germain

II. LE DISPOSITIF ADOPTÉ PAR L'ASSEMBLÉE NATIONALE

À l'initiative de notre collègue député Joël Giraud (LREM, Hautes-Alpes), rapporteur général, avec l'avis favorable du Gouvernement, l'Assemblée nationale a adopté l'amendement introduisant le présent article. Celui-ci propose que le Gouvernement remette au Parlement, avant le 30 septembre 2018, un rapport sur la prise en compte de la fréquentation touristique dans la répartition des concours financiers et de la péréquation .

De même, toujours à l'initiative de son rapporteur général et avec l'avis favorable du Gouvernement, nos collègues députés ont introduit l'article 60 quater , qui prévoit un second rapport sur la prise en compte des surfaces comprises dans les sites « Natura 2000 » dans la répartition des concours financiers et de la péréquation , au même titre que celles appartenant à des parcs nationaux et des parcs naturels marins.

III. LA POSITION DE VOTRE COMMISSION DES FINANCES

A. LA FRAGILITÉ DE LA MESURE DES CHARGES DES COLLECTIVITÉS TERRITORIALES FAIT PESER DES DOUTES SUR LA PERTINENCE DE LA RÉPARTITION DES CONCOURS FINANCIERS

Les critères utilisés pour répartir les dotations de l'État et la péréquation constituent les fondations sur lesquelles repose l'édifice des concours financiers. Si les discussions sur la réforme de la DGF et de la péréquation, sur les montants, la définition et l'articulation de leurs différentes enveloppes, sont naturellement nécessaires, on ne peut occulter le fait que la plus grande justice et transparence attendues de telles réformes dépend également du caractère juste et transparent des critères sur lesquels elles reposent.

1. Les critères de ressources sont à corriger mais leur logique n'est pas remise en cause

Concernant les critères de ressources , les potentiels fiscal et financier sont critiqués du fait de la vétusté des valeurs locatives qui servent de base fiscale à la taxe d'habitation et à la taxe foncière sur les propriétés bâties et en raison de la transformation de certaines ressources fiscales en concours financiers, qui a cristallisé le niveau des produits (et donc des taux) plutôt que les potentiels. De même, certains souhaiteraient que l' effort fiscal soit pris en compte de façon plus importante ou que soient calculés des niveaux de ressources avant et après péréquation (régionale ou nationale). En d'autres termes, les critères de ressources du bloc communal devraient être corrigés, voire complétés, mais ne sont pas remis en cause dans leur logique .

2. Faute de critères justes et transparents, les charges sont appréciées de façon bancale

a) Il n'existe pas de critères de charges justes et transparents

S'agissant des critères de charges, force est de constater que nous ne disposons d'aucun outil permettant d'apprécier de façon juste et transparente les charges pesant sur une collectivité et donc de les comparer à celles pesant sur une autre . Le terme de charges est naturellement à distinguer de celui de dépenses : il s'agit de pouvoir apprécier les contraintes propres à un territoire (liées par exemple à sa population, à son territoire, à sa situation économique, à sa localisation régionale, etc.) qui impliquent un certain niveau de charges et, in fine , un certain niveau de dépenses, qui dépend à la fois des ressources disponibles et des choix politiques exprimés localement.

L'exemple le plus emblématique de la difficulté à définir les charges pesant sur une commune est sans doute celui des « charges de centralité » . Il est communément admis que les charges d'une commune ne sont pas strictement proportionnelles à sa population, dans la mesure où les villes d'une taille importante produisent des services publics (théâtres, piscines, etc.) dont bénéficient ses habitants mais également les habitants des communes voisines, qui ne participent pourtant pas à leur financement à travers la fiscalité. C'est pour cette raison que la dotation forfaitaire des communes 35 ( * ) était basée sur la population pondérée par un coefficient logarithmique variant de 1 (communes de 500 habitants ou moins) à 2 (communes de plus de 200 000 habitants). Cette pondération était assise sur une étude économétrique de Guy Gilbert et Alain Guengant de 2004.

Cette pondération peut cependant être critiquée. Tout d'abord, si les charges de centralité sont avérées, elles ne peuvent occulter que le coût de production des services publics est également plus important dans les zones très peu denses, les coûts fixes étant plus difficilement amortis. En d'autres termes, le lien entre charges et population forme une courbe « en U ». D'autre part, l'avènement de l'intercommunalité a pu fortement modifier la façon dont pèsent les charges de centralité, par transfert de la ville centre à l'intercommunalité ; cet argument doit cependant être fortement relativisé, les attributions de compensations ayant pu totalement compenser ce transfert. Enfin, il semble également évident qu'à population égale, une commune située dans la banlieue d'une métropole ne supporte pas les mêmes charges que celle située dans une zone rurale. Force est de constater que ces critiques sont légitimes et qu'il difficile d'y répondre de façon précise et transparente .

De même, les alternatives envisagées ne sont pas convaincantes . L'idée, régulièrement évoquée, d'un critère de centralité fondé sur le nombre d'équipements collectifs recensés dans la commune se heurte aux difficultés à disposer des données, à leur fiabilité et au travail considérable qui devrait être mené pour accorder une valeur différente à chaque type d'équipement. En 2015, le Gouvernement avait également souhaité que la part communale de la dotation de centralité 36 ( * ) soit répartie entre les communes en fonction du rapport entre leur population et celle de l'intercommunalité, porté à la puissance 5 : la volonté de concentrer la dotation pour compenser les charges de centralité s'était heurtée à l'opacité de la définition de ce critère et aux effets absurdes qui en découlaient, notamment dans la périphérie des métropoles 37 ( * ) .

Des raisonnements équivalents auraient pu être tenus par exemple sur le critère du revenu moyen par habitant (prise en compte du coût du logement, du carburant, etc.).

b) La solution bancale des « indices synthétiques »

Les critères de charges précités sont utilisés, le plus souvent, dans le cadre d'indices synthétiques, calculés en attribuant à chaque critère une pondération spécifique.

Ces indices synthétiques souffrent cependant de nombreuses limites : les facteurs pris en considération ne reflètent pas forcément parfaitement les charges à mesurer et leur pondération est rarement étayée, voire semble parfois définie en fonction de la répartition souhaitée. De même, l'instabilité des critères et de leur pondération pose question : d'une année à l'autre, l'appréciation d'une même charge semble s'expliquer par des facteurs très différents, dont certains sont introduits par des amendements examinés à des heures tardives.

En définitive, les charges des communes et EPCI ne sont pas mesurées de façon satisfaisante, ce qui nuit à l'équité de la répartition des concours financiers de l'État et de la péréquation. Aussi, vos rapporteurs spéciaux appelaient en 2015 à « dépasser la logique des indices synthétiques français, qui ne suffisent pas à apprécier assez finement les contraintes de chaque territoire et dont la définition n'est jamais consensuelle » 38 ( * ) .

B. LA NÉCESSITÉ DE LANCER UNE RÉFLEXION SUR LES CRITÈRES DE CHARGES DU BLOC COMMUNAL

1. Les principes devant présider à la définition des critères de charges

La diversité des critères est nécessaire car elle permet de prendre en compte de façon fine la situation de chaque territoire . Mais les critères retenus doivent obéir à un certain nombre de principes :

- la pertinence : les critères doivent avoir un lien étayé avec les charges qu'ils servent à mesurer et être liés par exemple aux compétences exercées par chaque échelon ;

- l'exhaustivité : des critères pertinents aboutiraient à une répartition injuste si l'ensemble des facteurs créant la charge n'étaient pas pris en considération ; il s'agit donc de veiller à ce que l'ensemble des facteurs relatifs à certaines charges soient pris en compte ;

- la cohérence : la mesure de deux catégories de charges différentes peuvent naturellement avoir des effets contraires pour une commune, mais pour que l'appréciation d'ensemble soit cohérente et donc pertinente, il est nécessaire d'apprécier les charges de façon globale - il n'y a pas de raison d'occulter certaines charges tant qu'elles sont liées aux compétences exercées - et leur pondération relative doit être étayée ;

- la stabilité : la modification régulière des critères utilisés et de leur pondération crée des doutes quant à leur légitimité ; de bons critères n'auraient plus besoin d'être constamment revus ;

- la transparence et l'objectivité : pour être justes, le système de mesure des charges devrait être fondé sur des analyses objectives et transparentes.

2. L'exemple italien des fabbisogni standard

Dans leur rapport précité de septembre 2015, vos rapporteurs spéciaux avaient présenté le système italien des « besoins de financement standard » ( fabbisogni standard ), qui mesurent de façon extrêmement précise le coût de fourniture d'un service public local dans chaque collectivité, afin de répartir en conséquence les fonds de péréquation et de financer un « niveau essentiel » de service public . La définition de ces indicateurs a été confiée à une filiale de la Banque d'Italie, qui a mené un travail considérable de recueil de données et de traitement, réalisé auprès de la quasi-totalité des collectivités italiennes. Ce travail a été mené en associant les représentants des collectivités territoriales et validé par une commission paritaire, composée de représentants de l'État et des collectivités.

Douze services publics fondamentaux ont été identifiés (gestion des déchets, éducation, etc.), ainsi que treize facteurs de coût (prix des intrants, caractéristiques du territoire, démographie, etc.), alimentés par 122 critères (prix au m² des bureaux, nombre de bénéficiaires d'une allocation d'invalidité, etc.). Ce travail permet par exemple de constater que le nombre d'habitants explique 43 % du coût des transports publics, les caractéristiques du territoire 15 %, le prix des intrants 5 %, etc.

Les 12 services publics fondamentaux

Les 13 facteurs de coût

Source : Commission des finances du Sénat

Le coût de mise en place d'un tel système était évalué à 3 millions d'euros environ.

3. Une réflexion qu'il est nécessaire de lancer dès 2018

En définitive, si vos rapporteurs spéciaux partagent le souci du rapporteur général de l'Assemblée nationale de mieux mesurer les charges qui pèsent sur les communes qui accueillent une importante population touristique (article 60 ter ) ou comportent des zones « Natura 2000 » (article 60 quater ), ils vous proposent d'élargir cette réflexion à l'ensemble des charges du bloc communal.

Cette réflexion est complémentaire de celle qui a été lancée sur la réforme de la fiscalité locale : d'une part, une réforme des concours financiers n'étant pas annoncée pour l'instant, la réflexion sur les critères de répartition peut être menée ; d'autre part, disposer de critères pertinents sera indispensable s'il était envisagé de remplacer certaines impositions locales par une part d'impositions nationales.

Ils vous proposent donc un amendement prévoyant la remise, avant le 30 mai 2018, d'un rapport sur la mise en place d'un système de mesures des charges pesant sur les communes et établissements publics de coopération intercommunale, basés sur des études économétriques.

Décision de la commission : votre commission vous propose d'adopter cet article ainsi modifié.

ARTICLE 60 quater (nouveau) - Demande de rapport sur la prise en compte dans la répartition des dotations et des fonds de péréquation des surfaces comprises dans les sites Natura 2000

. Commentaire : le présent article demande au Gouvernement un rapport sur la prise en compte dans la répartition des dotations et des fonds de péréquation des surfaces comprises dans les sites Natura 2000.

Pour les raisons exposées dans le commentaire de l'article 60 ter , vos rapporteurs spéciaux privilégient une réflexion globale sur la mesure des charges des collectivités territoriales et vous proposent donc de modifier en conséquence l'article 60 ter et, dès lors, de supprimer le présent article.

Décision de la commission : votre commission vous propose de supprimer cet article.

ARTICLE 61 (Art. L. 2336-1, art. L. 2336-3, art. L. 2336-6, art. L.3335-1, art. L. 3335-3, art. L. 4332-9 du code général des collectivités territoriales, art. 166 de la loi n° 2015-1785 du 29 décembre 2015 de finances pour 2016) - Modification des règles de répartition des dispositifs de péréquation horizontale

. Commentaire : le présent article prévoit des adaptations des dispositifs de péréquation horizontale, notamment pour tenir compte du transfert de 25 points de cotisation sur la valeur ajoutée des entreprises (CVAE) des départements aux régions.

I. LE FONDS DE PÉRÉQUATION DES RESSOURCES INTERCOMMUNALES ET COMMUNALES (FPIC)

A. LE DROIT EXISTANT

Le fonds national de péréquation des ressources intercommunales et communales (FPIC), créé à partir de 2012 à la suite de la réforme de la taxe professionnelle, a vu son montant progressivement augmenter, passant de 150 millions d'euros en 2012 à 1 milliard d'euros en 2017. À partir de 2018, il est prévu que les ressources de ce fonds de péréquation horizontale atteignent 2 % des recettes fiscales des communes et des établissements publics de coopération intercommunale (EPCI) à fiscalité propre.

Les contributeurs au FPIC sont les ensembles intercommunaux et communes isolées dont le potentiel financier agrégé (PFIA) par habitant est supérieur à 90 % du PFIA moyen par habitant ; la contribution est répartie entre l'ensemble des contributeurs en fonction d'un indice synthétique qui tient compte du potentiel financier agrégé par habitant (pondéré à 75 %) et du revenu par habitant (pondéré à 25 %).

Un mécanisme de plafonnement a été introduit afin notamment d'éviter que les communes franciliennes les plus riches, qui contribuent par ailleurs à un fonds de péréquation horizontale dédié - le fonds de solidarité des communes de la région d'Île-de-France (FSRIF) - ne soient pas trop prélevées au titre des deux dispositifs. Ainsi, la somme des prélèvements au titre du FSRIF de l'année n-1 et au titre du FPIC de l'année n, ne peut être supérieure à 13 % des ressources 39 ( * ) de la commune.

En 2017, les contributions au FPIC de Paris, de l'établissement public territorial Paris Ouest La Défense et de la communauté de communes des Falaises du Talou ont été plafonnées.

Seuls 60 % des ensembles intercommunaux, classés en fonction d'un indice synthétique de ressources et de charges, peuvent bénéficier du FPIC, sous réserve que leur effort fiscal soit inférieur à 1.

La répartition des ressources du fonds entre les bénéficiaires est calculée en fonction du produit de sa population par son indice synthétique.

Un mécanisme de garantie a été introduit à compter de 2013, pour que les ensembles intercommunaux et les communes isolées qui cessent d'être éligibles au bénéfice du FPIC perçoivent, la première année, une attribution égale à 50 % de celle perçue l'année précédente.

En outre, en raison de la modification des schémas départementaux de coopération intercommunale (SDCI) en 2017, un mécanisme spécifique a été créé, qui prévoit que ceux qui perdent leur éligibilité en 2017 ou qui ont perçu une garantie en 2016, perçoivent une attribution égale :

- en 2017, à 90 % de l'attribution perçue en 2016 ;

- en 2018, à 75 % de l'attribution perçue en 2016 ;

- en 2019, à 50 % de l'attribution perçue en 2016.

Par ailleurs, afin de permettre de calculer la garantie malgré les changements de périmètre des EPCI, une quote-part communale de l'attribution perçue par l'EPCI au périmètre 2016 est calculée en fonction de l'insuffisance du potentiel financier et de leur population. Elle permet de « reconstituer » les ensembles intercommunaux malgré l'évolution de la carte intercommunale.

Afin d'évaluer l'efficacité du FPIC, la loi de finances pour 2016 40 ( * ) a prévu qu' « avant le 1 er octobre de chaque année, le Gouvernement remet au Parlement un rapport sur le fonctionnement et l'évolution du Fonds national de péréquation des ressources intercommunales et communales. Ce rapport évalue notamment la soutenabilité des prélèvements pour les communes contributrices et le caractère péréquateur des reversements pour les communes bénéficiaires . »

B. LE DISPOSITIF PROPOSÉ

Le 1° du I du présent article propose de fixer à 1 milliard d'euros le montant du FPIC à compter de 2018 - au lieu de 2 % des ressources fiscales du bloc communal, soit 1,2 milliard d'euros.

Le a) 2° du I prévoit d'adapter le mécanisme de garantie afin d'éviter que les ensembles intercommunaux qui perdraient l'éligibilité au FPIC en 2018 perçoivent une garantie manifestement moins généreuse que ceux l'ayant perdue en 2017.

Comparaison des garanties en fonction de la date de perte d'éligibilité (2017 ou 2018)

Sortie du bénéfice en 2017

Sortie du bénéfice en 2018

2016

100

2017

90

100

2018

75

50

2019

50

0

2020

0

0

Source : commission des finances du Sénat

Il est donc proposé d'appliquer un mécanisme de garantie, sur trois ans, qui permet de traiter de façon plus juste les ensembles intercommunaux perdant l'éligibilité au FPIC en 2018 et 2019 : tous les ensembles intercommunaux qui cessent d'être éligibles ou qui ont bénéficié d'une garantie en 2017 perçoivent, en 2018, une attribution égale à 85 % de celle perçue en 2017.

De même, en 2019, tous les ensembles intercommunaux qui cessent d'être éligibles ou qui ont bénéficié d'une garantie en 2018 perçoivent une attribution égale à 70 % de celle perçue en 2018.

La solution proposée, légèrement plus favorable que le droit existant aux ensembles intercommunaux qui ont perdu l'éligibilité au FPIC en 2017, permet surtout d'éviter des sorties particulièrement brutales du dispositif pour les ensembles intercommunaux cessant d'être éligibles en 2018.

Sortie en sifflet du FPIC en 2017 et 2018 : comparaison entre le droit existant et le dispositif proposé

Source : commission des finances du Sénat

Compte tenu de cette modification , le b) du 2° du I prévoit que la quote-part communale de l'attribution qu'il est nécessaire de calculer afin de tenir compte des éventuels changements de périmètre s'applique au périmètre de l'année précédente - et non plus au périmètre 2016.

C. LES MODIFICATIONS APPORTÉES PAR L'ASSEMBLÉE NATIONALE

L'Assemblée nationale a adopté un amendement présenté par Joël Giraud, rapporteur général de la commission des finances, avec l'avis favorable du Gouvernement, qui vise à relever le plafonnement de la contribution des ensembles intercommunaux et communes isolées qui sont prélevés à la fois au titre du FPIC et du FSRIF.

En effet, le montant du FSRIF est passé de 290 millions d'euros en 2016 à 310 millions d'euros en 2017. Pour éviter que les contributions au FPIC de Paris et de l'établissement public territorial (EPT) Paris Ouest La Défense ne soient mécaniquement diminuées par la hausse du FSRIF, il est proposé de porter le plafond de 13 % à 13,5 % de leurs ressources.

Selon l'exposé sommaire de l'amendement du Gouvernement, Paris et l'EPT Paris Ouest La Défense ayant versé, en 2017, 12 millions d'euros de contribution supplémentaire au FSRIF, leur contribution au FPIC aurait diminué de ce même montant.

Enfin, à l'initiative de Joël Giraud, rapporteur général de la commission des finances et avec l'avis favorable du Gouvernement, l'Assemblée nationale a complété le rapport sur le FPIC remis annuellement par le Gouvernement au Parlement, en prévoyant qu'en 2018, il comporte « une analyse des indicateurs agrégés utilisés dans la répartition du fonds ».

D. LA POSITION DE VOTRE COMMISSION DES FINANCES

Le gel du montant du FPIC, après une croissance forte depuis 2012, paraît raisonnable, alors même que la carte intercommunale est bouleversée.

Les nouvelles modalités de garantie, qui permettent d'éviter des traitements manifestement très différents entre collectivités et d'étaler la sortie du dispositif tout en le simplifiant, vont dans le bon sens.

De la même façon, le relèvement du plafonnement au titre du FPIC et du FSRIF s'inscrit dans le prolongement de ce qui a été fait les années précédentes, les montées en charge progressives de ces deux dispositifs de péréquation horizontale ont toujours été accompagnées d'un relèvement de ce plafond, afin de s'assurer que la solidarité entre communes franciliennes n'empêche pas une contribution à la solidarité nationale.

II. ADAPTATION DES FONDS DE PÉRÉQUATION DE LA COTISATION SUR LA VALEUR AJOUTÉE DES ENTREPRISES (CVAE)

A. LE DROIT EXISTANT

Le fonds national de péréquation de la cotisation sur la valeur ajoutée des entreprises (CVAE) vise à permettre aux départements les moins riches de percevoir une partie des richesses de CVAE « captées » par les départements les plus riches.

Ainsi, le fonds est alimenté par :

- un prélèvement « sur stock » dû par les départements dont le produit de CVAE par habitant perçu l'année précédant la répartition est supérieur à 90 % du montant de CVAE par habitant moyen pour l'ensemble des départements ; ce prélèvement s'élève au total à 60 millions d'euros depuis 2015 et aucun département ne peut voir plus de 2 % du produit de la CVAE perçue l'année précédente ainsi prélevé ;

- un prélèvement « sur flux », dû par les départements contributeurs au prélèvement sur stock et dont le montant de CVAE a augmenté entre l'année n-2 et l'année n-1 ; la répartition du prélèvement entre départements dépend du dynamisme de leur CVAE rapporté au dynamisme d'ensemble ; le montant prélevé à ce titre ne peut être supérieur, pour un département, à 1 % du produit de CVAE ainsi perçu ;

- une contribution minimale : les départements contributeurs qui perçoivent un montant de CVAE plus de trois fois supérieur à la moyenne nationale sont prélevés à hauteur de 3 % du produit de CVAE perçu l'année précédant la répartition.

Par ailleurs, il existe également un fonds de péréquation des régions, qui tient notamment compte de la CVAE qu'elles perçoivent, mais aussi du produit des impositions forfaitaires sur les entreprises de réseau (IFER), de la dotation de compensation de la réforme de la taxe professionnelle (DCRTP) et, le cas échéant, du fonds national de garantie individuelle des ressources (FNGIR).

L'objectif du fonds est d'assurer une répartition plus juste de la CVAE, au profit notamment des régions défavorisées par la réforme de la taxe professionnelle. Une région est contributrice si ses ressources au titre de l'année précédant la répartition sont supérieures aux ressources qu'elle aurait perçues si ses ressources de 2011 avaient connu la même évolution que celle enregistrée par l'ensemble des régions.

B. LE DISPOSITIF PROPOSÉ

Le dispositif proposé vise à adapter les modalités de fonctionnement de ce fonds au transfert aux régions, à partir de 2017, de 25 points de la CVAE jusqu'alors perçue par les départements. Ainsi, les départements perçoivent désormais 23,5 % de la CVAE (au lieu de 48,5 % jusqu'en 2017) et les régions en perçoivent désormais 50 % (au lieu de 25 %).

Cette diminution du montant de CVAE perçue par les départements conduit à déstabiliser le prélèvement « sur stock » dont le montant s'élève à 60 millions d'euros et dont les prélèvements sont plafonnés à 2 % du produit de CVAE. Ainsi, selon les évaluations préalables annexées au présent projet de loi de finances, « en maintenant inchangées ces conditions en 2018, les 23 départements contributeurs verraient leur prélèvement plafonné sans qu'il soit possible d'atteindre 60 millions d'euros (2 % de la CVAE des 23 départements prélevés s'élèvent à 47,5 millions d'euros) ».

Par conséquent, les a) et b) du 3° du I prévoient qu'à partir de 2018, le montant du prélèvement « sur stock » est fixé à 30 millions d'euros - au lieu de 60 millions d'euros. En 2017, Paris, la métropole de Lyon, les Hauts-de-Seine et la Haute-Garonne étaient plafonnés ; en 2018, hormis la Haute-Garonne, les mêmes départements seraient plafonnés .

En outre, pour calculer la répartition des prélèvements au titre de 2018, il convient d'évaluer le dynamisme de la CVAE entre 2016 et 2017. Il est donc nécessaire de retraiter les montants perçus en 2016 en tenant compte de la diminution de la part de CVAE perçue par les départements (de 48,5 % à 23,5 %). C'est pourquoi, le c) du 3° du I prévoit que pour l'année 2018, est recalculé un produit « fictif » de CVAE perçu en 2016 par chaque département, correspondant à leur part actuelle (23,5 %) de CVAE.

Enfin, les plafonnements des prélèvements sont relevés :

- le plafonnement au titre du prélèvement « sur flux » ne peut excéder 2 % du produit de CVAE perçu l'année précédant la répartition (au lieu de 1 % actuellement) : en 2017, sur 12 départements prélevés, cinq étaient plafonnés et en 2018, sur 14 départements désormais prélevés, huit seraient plafonnés ;

- le plafonnement de la contribution minimale acquittée par les départements percevant trois fois plus de CVAE que la moyenne nationale est fixé à 3 % (au lieu de 4 % actuellement) : selon les informations transmises par la DGCL, « le relèvement de la contribution minimale touche les deux départements déjà concernés l'année dernière, à savoir Paris et les Hauts-de-Seine. Ceux-ci voient leurs contributions respectives alourdies de 9,3 millions d'euros et de 5,7 millions d'euros ».

Prélèvement par département en pourcentage de la CVAE

Hauts- de-Seine

4,0%

Paris

4,0%

Yvelines

3,8%

Val-de-Marne

3,5%

Bas-Rhin

3,3%

Loiret

3,1%

Seine-Maritime

2,9%

Métropole de Lyon

4,0%

Gironde

2,2%

Val d'Oise

2,1%

Essonne

2,1%

Haute-Garonne

1,6%

Marne

1,0%

Ille-et-Vilaine

0,7%

Drome

0,7%

Rhône

0,7%

Isère

0,6%

Loire-Atlantique

0,6%

Seine-et-Marne

0,6%

Bouches-du-Rhône

0,5%

Haute-Savoie

0,2%

Côte-d'Or

0,1%

Savoie

0,1%

Source : DGCL

En ce qui concerne les régions, le fonctionnement du fonds régional de péréquation conduit, à partir de 2018, à comparer les ressources perçues en 2017 (correspond à l'attribution de 50 % du produit de CVAE) avec les ressources de 2011 telles qu'elles auraient évoluées. Il convient donc de neutraliser le doublement de la part de CVAE affecté aux régions depuis 2017.

Aussi le 5° du I prévoit que les ressources de CVAE prises en compte au titre de l'année précédant la répartition correspondent à la moitié de la CVAE. Ainsi, la comparaison avec les ressources perçues en 2011 demeure pertinente.

Enfin, le 4° du I prévoit un mécanisme de régularisation concernant le fonds de solidarité en faveur des départements créé depuis 2014. En effet, alors que le fonds de péréquation de la CVAE des départements prévoit un prélèvement, avant répartition, des montants nécessaires à la régularisation des erreurs commises l'année précédente lors de la répartition, ce n'est pas le cas du fonds de solidarité. Un tel mécanisme est donc prévu par le présent article.

*

L'Assemblée nationale a adopté un amendement rédactionnel.

C. LA POSITION DE VOTRE COMMISSION DES FINANCES

Vos rapporteurs spéciaux prennent acte des adaptations des fonds de péréquation de la CVAE au transfert de CVAE des départements aux régions.

III. L'APPLICATION DES DISPOSITIFS DE PÉRÉQUATION À LA COLLECTIVITÉ TERRITORIALE DE CORSE

La création 41 ( * ) de la collectivité territoriale de Corse correspond à la fusion des départements de Haute-Corse et de Corse du Sud et de la collectivité territoriale de Corse.

Le II précise par conséquent qu'à partir de 2018, les données à utiliser au titre des années antérieures à la création de la collectivité territoriale de Corse pour le calcul des différents fonds départementaux 42 ( * ) correspondent à la somme des données relatives aux deux anciens départements.

Cette agrégation des données respectives de chaque département est conforme au souhait exprimé par votre rapporteur spécial Charles Guené, rapporteur de l'ordonnance complétant et précisant les règles budgétaires, financières, fiscales et comptables applicables à la collectivité de Corse : « le choix de mettre en place une collectivité unique implique une solidarité territoriale et, dès lors, il serait difficilement justifiable de continuer à calculer les dotations et les attributions ou prélèvements sans prendre en compte les données agrégées ou en mettant en place des mécanismes de garantie 43 ( * ) ».

Décision de la commission : votre commission vous propose d'adopter cet article sans modification.

ARTICLE 61 bis (nouveau) (Art. L. 2334-40 du code général des collectivités territoriales) - Élargissement du bénéfice de la dotation politique de la ville

. Commentaire : le présent article prévoit d'élargir à toutes les communes de moins de 10 000 habitants éligibles à la dotation de solidarité urbaine (DSU) le bénéfice potentiel de la dotation politique de la ville.

I. LE DROIT EXISTANT

La dotation politique de la ville (DPV), dotée en 2017 de 150 millions d'euros en autorisations d'engagement (AE), a été profondément réformée en 2016.

Ainsi, les communes éligibles à la DPV sont celles qui figurent parmi les 180 premières d'un classement établi en fonction « d'un indice synthétique de ressources et de charges composé du potentiel financier par habitant, du revenu par habitant, de la proportion de bénéficiaires d'aides au logement dans le nombre total des logements de la commune » et qui remplissent trois conditions cumulatives :

- être éligible à la dotation de solidarité urbaine (DSU) et être bénéficiaire, l'année précédente, de l'ancienne 44 ( * ) « DSU-cible » 45 ( * ) ;

- présenter une proportion de population en quartiers prioritaires de la politique de la ville ou en zone franche urbaine de plus de 19 % ;

- être citée dans la liste des quartiers qui présentent les dysfonctionnements urbains les plus importants ou avoir conclu au moins une convention pluriannuelle conclue avec l'Agence nationale pour la rénovation urbaine (Anru).

Ces nouveaux critères d'éligibilité et de répartition de cette dotation de soutien à l'investissement des communes bénéficiaires de la politique de la ville ont été introduits à l'initiative du Gouvernement à l'Assemblée nationale en nouvelle lecture du projet de loi de finances pour 2017.

Alors que le Gouvernement souhaitait initialement que toutes les communes éligibles à la DSU puissent, le cas échéant, bénéficier de la DPV, un sous-amendement de François Pupponi et Marc Goua, adopté avec l'avis favorable de la commission des finances et malgré l'avis défavorable du Gouvernement, a restreint ces conditions d'éligibilité aux seules communes bénéficiaires de l'ancienne « DSU-cible ».

Dans la mesure où le Sénat a adopté une motion tendant à opposer la question préalable, ces dispositions n'ont pas été examinées par le Sénat.

II. LE DISPOSITIF ADOPTÉ PAR L'ASSEMBLÉE NATIONALE

À l'initiative du Gouvernement et avec l'avis favorable de la commission des finances, l'Assemblée nationale a adopté un amendement visant permettre aux communes de moins de 10 000 habitants éligibles à la DSU de bénéficier de la DPV, sous réserve de remplir les autres conditions.

Comparaison entre le droit existant et le dispositif proposé

Droit existant

Dispositif proposé

Communes dont la population est comprise entre 5 000 et 9 999 habitants

les 30 premières

celles éligibles à la DSU

Communes de plus de 10 000 habitants

les 250 premières

Source : commission des finances du Sénat

III. LA POSITION DE VOTRE COMMISSION DES FINANCES

Au lieu de 280 communes potentiellement 46 ( * ) éligibles en 2017, ce sont 373 communes qui pourraient l'être en 2018 :

- 250 communes de plus de 10 000 habitants ;

- 123 communes dont la population est comprise entre 5 000 et 9 999 habitants.

Le présent article permet donc, à compter de 2018, à toutes les communes de moins de 10 000 habitants éligibles à la DSU l'année précédente de prétendre à la dotation politique de la ville - et non plus aux seules 30 premières du classement.

Cette proposition permettra de soutenir des communes urbaines relativement peu peuplées mais rencontrant de réelles difficultés et paraît plus équilibrée que le dispositif antérieur, qui conduisait à exclure « d'office » certaines communes .

Liste des communes de moins de 10 000 habitants éligibles à la DSU en fonction de leur rang

Source : commission des finances du Sénat à partir des données du site http://www.dotations-dgcl.interieur.gouv.fr

Décision de la commission : votre commission vous propose d'adopter cet article sans modification.

ARTICLE 61 ter (nouveau) (Art. L. 4425-22 et art. L. 4425-23 du code général des collectivités territoriales, et art. 149 de la loi n° 2016-1917 du 29 décembre 2016 de finances pour 2017) - Exclusion de la dotation de continuité territoriale (DCT) pour le calcul de la fraction de TVA versée à la future collectivité de Corse

Commentaire : le présent article vise à exclure la dotation de continuité territoriale du calcul de la fraction de TVA revenant à la collectivité unique de Corse, qui se substituera à la collectivité territoriale de Corse et aux deux départements corses à compter du 1 er janvier 2018.

I. LE DROIT EXISTANT

A. EN VERTU DU PRINCIPE DE CONTINUITÉ TERRITORIALE, LA COLLECTIVITÉ TERRITORIALE DE CORSE PERÇOIT UNE DOTATION DE CONTINUITÉ TERRITORIALE

L'article L. 4424-18 du code général des collectivités territoriales définit le principe de continuité territoriale comme étant « destiné à atténuer les contraintes de l'insularité ». En vertu de ce principe, il prévoit que la collectivité territoriale de Corse définit « les modalités d'organisation des transports maritimes et aériens entre l'île et toute destination de la France continentale, en particulier en matière de desserte et de tarifs ».

Aux termes de l'article L. 4424-19 du code général des collectivités territoriales, la collectivité territoriale de Corse peut notamment imposer des obligations de service public sur certaines liaisons aériennes ou maritimes , notamment la « fourniture des services passagers ou fret suffisants en termes de continuité, régularité, fréquence, qualité et prix et, le cas échéant, de capacité, pour atténuer les contraintes liées à l'insularité et faciliter ainsi le développement économique de l'île, l'aménagement équilibré du territoire insulaire et le développement des échanges économiques et humains entre l'île et la France continentale ». Elle peut également établir un régime d'aides individuelles à caractère social pour certaines catégories de passagers .

Pour permettre à la collectivité territoriale de Corse l'exercice de cette compétence, l'article L. 4425-4 du code général des collectivités territoriales (qui deviendra l'article L. 4425-26 à compter du 1 er janvier 2018) prévoit que l'État lui verse un concours individualisé au sein de la dotation générale de décentralisation intitulé dotation de continuité territoriale (DCT) . Le montant de cette dotation peut être majoré des sommes versées par toute autre personne publique, et en particulier l'Union européenne, afin de compenser tout préjudice résultant des restrictions apportées à la liberté de fixation des tarifs. Par ailleurs, les éventuels reliquats sont affectés à la réalisation d'équipements portuaires et aéroportuaires destinés au transport et à l'accueil de voyageurs et de marchandises.

Son montant, qui évolue comme la dotation globale de fonctionnement, s'élève à 187 millions d'euros en 2017 .

B. L'AFFECTATION D'UNE FRACTION DE TVA AUX RÉGIONS À COMPTER DE 2018

Le II de l'article 149 de la loi de finances pour 2017 47 ( * ) a prévu le transfert, à compter du 1 er janvier 2018, d'une fraction de taxe sur la valeur ajoutée (TVA), en remplacement de la dotation globale de fonctionnement qu'elles perçoivent et de la dotation générale de décentralisation pour la Corse 48 ( * ) , le montant de sa dotation globale de fonctionnement forfaitaire étant nul . Aux termes du III de l'article 149 précité, cette fraction est égale au rapport entre :

- d'une part, la somme de la dotation globale de fonctionnement des régions et de la dotation générale de décentralisation de Corse en 2017 et du fonds de soutien exceptionnel de 450 millions d'euros créé par le I de l'article 149 précité 49 ( * ) ;

- d'autre part, le produit de TVA en 2017.

Ce montant est ensuite réparti entre les régions proportionnellement à la somme, d'une part, du montant de la dotation forfaitaire et de la dotation de péréquation, ou de la dotation générale de décentralisation pour la Corse, notifiées en 2017, et, d'autre part, du montant perçu au titre du fonds de soutien exceptionnel en 2017 (IV de l'article 149 précité).

II. LE DISPOSITIF ADOPTÉ PAR L'ASSEMBLÉE NATIONALE

Le présent article est issu d'un amendement du Gouvernement adopté par l'Assemblée nationale avec l'avis favorable de sa commission des finances.

Il vise à préciser le montant pris en compte pour le calcul de la fraction de TVA dont bénéficiera la collectivité de Corse à compter de 2018 .

Le 1° du I du présent article vise à insérer un 6° au sein de l'article L. 4425-22 du code général des collectivités territoriales, qui entrera en vigueur à compter du 1 er janvier 2018, afin de préciser que la future collectivité de Corse bénéficiera d'une « fraction prélevée sur le produit net de la taxe sur la valeur ajoutée », en application du II de l'article 149 précité .

Par cohérence, le 2° du I du présent article modifie le II de l'article L. 4425-23 du code général des collectivités territoriales, qui entrera en vigueur au 1 er janvier 2018, afin de retirer des ressources de la future collectivité de Corse la dotation générale de décentralisation dont disposait la collectivité territoriale de Corse, celle-ci étant remplacée par une fraction de TVA.

Le 1° du II du présent article modifie le b du 1° du III de l'article 149 précité afin d' exclure du montant de la dotation générale de décentralisation pris en compte pour le calcul de la fraction de TVA revenant aux régions le montant de la dotation de continuité territoriale versée à la Corse .

Par coordination, son 2° modifie le 2° du IV de l'article 149 précité afin de préciser que le montant pris en compte pour le calcul de la part de TVA qui reviendra à la collectivité de Corse n'intègrera pas la dotation de continuité territoriale . Par ailleurs, son 3° modifie le VI de l'article 149 précité afin de prévoir qu'en cas de montant de TVA transféré à la collectivité de Corse inférieur à la somme de la dotation forfaitaire, de la dotation de péréquation et de la dotation générale de décentralisation notifiées en 2017, hors dotation de continuité territoriale , la différence fait l'objet d'une attribution supplémentaire d'une part du produit de la TVA .

Enfin, le III du présent article prévoit une entrée en vigueur du dispositif prévu au II au 1 er janvier 2018.

III. LA POSITION DE VOTRE COMMISSION DES FINANCES

Le présent article vise à préciser et clarifier le droit existant . Il inscrit dans le code général des collectivités territoriales le fait que la future collectivité de Corse, qui se substituera à la collectivité territoriale de Corse et aux deux départements corses à compter du 1 er janvier 2018, bénéficiera effectivement d'une fraction du produit de la TVA . Ce dispositif, qui répond à une demande ancienne des élus corses , permettra à la collectivité de bénéficier de la dynamique de la taxe , correspondant à un surcroît de ressources évalué à deux millions d'euros en 2018.

Par ailleurs, la dotation de continuité territoriale constituant une ressource affectée, il ne semble pas opportun de l'inclure dans le mécanisme de conversion en TVA, comme cela est le cas de la dotation générale de décentralisation .

Vos rapporteurs spéciaux vous proposent par conséquent d'adopter le présent article sans modification.

Décision de la commission : votre commission vous propose d'adopter cet article sans modification.

ARTICLE 61 quater (nouveau) (Art. 104 de la loi n° 2007-182 du 25 décembre 2007 de finances rectificative pour 2007) - Exonération de Saint-Barthélemy du paiement de la dotation globale de compensation en 2018

Commentaire : le présent article vise à exonérer la collectivité d'outre-mer de Saint-Barthélemy du paiement de la dotation globale de compensation due en 2018 afin de prendre en compte les dégâts causés par l'ouragan « Irma ».

I. LE DROIT EXISTANT

A. LE CHANGEMENT DE STATUT DE SAINT-BARTHÉLEMY EN 2007 S'EST ACCOMPAGNÉ D'UN TRANSFERT DE RESSOURCES SURCOMPENSANT LES CHARGES TRANSFÉRÉES

La loi organique du 21 février 2007 50 ( * ) portant dispositions statutaires et institutionnelles relatives à l'outre-mer a prévu la création de la collectivité d'outre-mer (COM) de Saint-Barthélemy, anciennement commune du département d'outre-mer de Guadeloupe .

Cette création s'est accompagnée des transferts complets des compétences du département et de la région Guadeloupe au profit de la nouvelle COM et du transfert partiel de compétences de l'État . La loi organique a prévu les modalités financières de compensation de ces transferts, notamment le fait que tout accroissement net des charges résultant du transfert de compétences est accompagné du transfert concomitant des ressources nécessaires à l'exercice de ces compétences.

L'article L.O. 6271-5 prévoit ainsi que la collectivité de Saint-Barthélemy bénéficie du transfert de l'impôt jusqu'alors destiné au conseil régional et au conseil général et de trois dotations de l'État : la dotation globale de fonctionnement (DGF), la dotation globale de construction et d'équipement scolaire (DGES) et, pour le solde, par l'attribution d'une dotation globale de compensation (DGC) inscrite au budget de l'État.

Une première évaluation du montant de ces différents transferts avait été prévue par l'article 104 de la loi de finances rectificative pour 2007 51 ( * ) . Toutefois, à la suite des conclusions de la commission consultative d'évaluation des charges mise en place à cet effet, cette évaluation initiale a été modifiée par l'article 6 de la loi de finances rectificative pour 2008 52 ( * ) .

Il est ainsi apparu que le bilan des transferts de ressources et de charges à Saint-Barthélemy faisait apparaître un trop versé annuel de 5,6 millions d'euros (de l'ordre de 2,7 millions d'euros au détriment de l'État et 2,9 millions d'euros au détriment du département de Guadeloupe).

Or il n'est pas possible de rééquilibrer ce solde, en raison de l'autonomie fiscale de Saint-Barthélemy, qui implique des pouvoirs étendus en matière de fiscalité. L'article 6 de la loi de finances rectificative pour 2008 a donc prévu un versement annuel, par Saint-Barthélemy, de la somme de 5,6 millions d'euros, répartie entre l'État et la Guadeloupe, qui correspond au trop-perçu à l'issu des transferts de compétence, sous la forme d'une dotation globale de compensation négative . Il prévoyait en outre que le remboursement de la dette de Saint-Barthélemy pour le trop versé au titre de 2008 devait être effectué sur deux ans.

B. LES LOIS DE FINANCES POUR 2015 ET 2016 ONT FIXÉ LES MODALITÉS DE REVERSEMENT DE CE TROP-PERÇU

Les autorités de l'État ont tardé à émettre les titres de perception. Ainsi, le montant de la dotation globale de compensation annuelle n'a été ni prélevé, ni réclamé par l'État pendant les quatre années qui ont suivi la mise en place de la législation. Ce n'est que le 20 décembre 2012 que les premiers titres de perception pour les années 2008 et 2009 ont été émis ; ils ont été notifiés le 16 janvier 2013.

L'article 28 de la loi de finances pour 2015 53 ( * ) a inscrit à l'article 104 de la loi de finances rectificative pour 2007 précitée le montant de la dotation globale de compensation due par Saint-Barthélemy à hauteur de 5 773 499 euros.

L'article 36 de la loi n° 2015-1785 du 29 décembre 2015 de finances pour 2016 a prévu qu'en contrepartie de la diminution de moitié de la dotation globale de compensation négative, désormais fixée à 2 882 572 euros , et de la dette dues par la collectivité de Saint-Barthélemy, l'article L. 6264-6 du code général des collectivités territoriales, qui permettait à la collectivité de bénéficier du fonds de compensation de la taxe sur la valeur ajoutée, soit abrogé.

II. LE DISPOSITIF ADOPTÉ PAR L'ASSEMBLÉE NATIONALE

Le présent article est issu d'un amendement du Gouvernement adopté par l'Assemblée nationale avec l'avis favorable de sa commission des finances.

Il vise à modifier l'article 104 de la loi de finances rectificative pour 2007 précité afin d' exonérer la collectivité d'outre-mer de Saint-Barthélemy du paiement de la dotation globale de compensation due au titre de l'année 2018 .

III. LA POSITION DE VOTRE COMMISSION DES FINANCES

Le présent article, qui exonère Saint-Barthélemy du paiement de la dotation globale de compensation due en 2018, vise à prendre en compte les graves dégâts causés par l'ouragan « Irma » , qui a durement frappé les Antilles le 6 septembre dernier.

Selon les chiffres du Gouvernement, l'ouragan aurait ainsi endommagé 95 % du bâti sur les deux îles .

Vos rapporteurs spéciaux estiment que cette mesure, qui témoigne de la solidarité nationale à l'égard de Saint-Barthélemy, est pleinement justifiée .

Ils vous proposent par conséquent d'adopter le présent article sans modification.

Décision de la commission : votre commission vous propose d'adopter cet article sans modification.

ARTICLE 61 quinquies (nouveau) (Art. L. 3335-1, art. L. 3335-2, art. L. 3335-3 et art. L. 2334-35 du code général des collectivités territoriales et art. 42 de la loi n° 2013-1278 du 29 décembre 2013 de finances pour 2014) - Garantie de non baisse des versements au titre des fonds départementaux de péréquation pour la collectivité unique de Corse

. Commentaire : le présent article crée une garantie au profit de la collectivité unique de Corse au titre des fonds de péréquation départementaux.

I. LE DROIT EXISTANT

L'article 30 de la loi NOTRé 54 ( * ) dispose que la Corse devient, à compter du 1 er janvier 2018, une collectivité unique : elle exercera ainsi à la fois les compétences de la région et des deux anciens départements de Corse-du-Sud et de Haute-Corse. En d'autres termes, il prévoit une fusion « verticale », entre la collectivité territoriale de Corse et l'échelon départemental, mais également une fusion « horizontale », entre les deux départements.

La fusion « verticale » ne devrait pas avoir d'incidence particulière sur les dispositifs de péréquation, dans la mesure où il sera toujours possible d'isoler les données financières relatives à l'échelon régional et à l'échelon départemental. En revanche, la fusion « horizontale » implique l'agrégation des données financières des deux départements préexistants, ce qui aurait des conséquences sur les fonds de péréquation départementale .

Conséquences financières de la « fusion » des deux départements

(en euros ou en nombre d'habitants)

Corse-du-Sud

Haute-Corse

Collectivité de Corse

Moyenne nationale

Population INSEE

149 234

170 974

320 208

-

Population DGF

190 242

212 690

402 932

-

Revenu par habitant

13 591,35

11 883,62

12 679,51

14 415,29

Potentiel financier par habitant

817,35

623,51

713,85

632,77

Potentiel fiscal par habitant

576,24

407,59

486,19

532,56

DMTO par habitant

183,88

101,72

140,01

137,07

CVAE par habitant

90,59

66,91

77,94

121,71

Source : commission des finances du Sénat

Le tableau ci-dessus, extrait du rapport 55 ( * ) de votre rapporteur spécial Charles Guené sur le projet de loi ratifiant l'ordonnance sur les dispositions financières relatives à la mise en place de la collectivité unique, montre qu'une prise en compte de la situation agrégée des données financières de ces départements conduirait à ce que la collectivité de Corse se situe au-dessus de la moyenne ou juste en-dessous sur certains indicateurs (cf. tableau), alors que la Haute-Corse est aujourd'hui souvent en-dessous de la moyenne nationale. Dès lors, cette fusion pourrait avoir des conséquences en termes de péréquation horizontale et de répartition des concours de l'État .

L'assemblée de Corse avait formulé des observations sur ce sujet dès septembre 2016 56 ( * ) :

Le Gouvernement a décidé que les dispositions tendant à préciser et compléter les règles relatives aux concours financiers de l'État et aux fonds nationaux de péréquation de recettes fiscales applicables à la collectivité de Corse seront traitées dans le cadre de la loi de finances.

Il est demandé :

- que l'exercice d'agrégation des dispositifs applicables à la collectivité territoriale de Corse et aux deux départements ne conduise ni à minorer les ressources qui seront attribuées à ce titre à la collectivité de Corse en 2018, ni à mettre en place des mécanismes de calcul qui s'avèreraient défavorables dans la durée ;

- que les dispositions figurant à ce titre dans la loi de finances soient soumises à l'examen préalable de la collectivité territoriale de Corse et des deux départements.

II. LE DISPOSITIF ADOPTÉ PAR L'ASSEMBLÉE NATIONALE

À l'initiative du Gouvernement, et avec l'avis favorable de la commission des finances, l'Assemblée nationale a adopté un amendement introduisant le présent article. Celui-ci prévoit qu' au titre des fonds de péréquation départementale, la collectivité unique de Corse perçoit une attribution nette au moins égale à la somme des attributions versées en 2017 à chacun des deux anciens départements . Cette égalité s'apprécie en pourcentage des ressources de chaque fonds.

Ce dispositif s'applique (I) à la répartition péréquée des frais de gestion de la taxe foncière sur les propriétés bâties et (II) au fonds national de péréquation de la cotisation sur la valeur ajoutée des entreprises perçue par les départements, au fonds national de péréquation des droits de mutation à titre onéreux perçus par les départements et au fonds de solidarité en faveur des départements.

Cette garantie est valable pour les répartitions 2018, 2019 et 2020.

Par ailleurs, les III et IV de l'article procède à une coordination des dispositions relatives à la dotation d'équipement des territoires ruraux (DETR) et à la dotation globale d'équipement des départements, à la suite de la mise en place de la collectivité unique.

III. LA POSITION DE VOTRE COMMISSION DES FINANCES

Le présent article représente un coût total de 4 millions d'euros environ , qui sera pris en charge par les autres départements.

Vos rapporteurs spéciaux soulignent que la mise en place d'une collectivité unique implique une solidarité locale. La garantie dont bénéficiera la Corse pèsera naturellement sur des départements par définition plus pauvres que la collectivité unique.

Dans la mesure où le dispositif est limité dans le temps, ils considèrent qu'il est acceptable .

Décision de la commission : votre commission vous propose d'adopter cet article sans modification.

ARTICLE 62 (Art. L. 2335-16 du code général des collectivités territoriales) - Revalorisation de la dotation pour les titres sécurisés

. Commentaire : le présent article augmente le montant forfaitaire servant à calculer la dotation pour les titres sécurisés.

I. LE DROIT EXISTANT

L'article L. 2335-16 du code général des collectivités territoriales institue une dotation pour les titres sécurisés , en faveur des communes équipées d'une ou plusieurs stations d'enregistrement des demandes de passeport et de carte nationale d'identité électronique. En 2017, le montant de cette dotation s'élevait à 18,3 millions d'euros , calculée sur la base d'un montant forfaitaire de 5 030 euros par an et par station en fonctionnement dans la commune au 1 er janvier de l'année en cours.

II. LE DISPOSITIF PROPOSÉ

Jusqu'à la fin de l'année 2016, seules les demandes de passeports étaient concernées, mais depuis l'automne dernier, dans le cadre du « plan préfectures nouvelle génération », des dispositifs de recueil des demandes de cartes nationales d'identité ont également été déployés . D'après l'évaluation préalable, 278 stations ont été installées en 2016 et 2017 et 250 stations supplémentaires devraient l'être entre 2017 et 2018.

Dès lors, le présent article vise à augmenter la compensation perçue par les communes concernées à travers la dotation précitée :

- le montant forfaitaire est relevé de 5 030 euros à 8 580 euros par an et par station ;

- une majoration de 3 550 euros de ce montant forfaitaire est accordée pour chaque station ayant enregistré plus de 1 875 demandes, soit, d'après l'évaluation préalable du présent article, « la moitié du taux d'utilisation nominal ».

Au total, en 2018, le montant de la dotation devrait atteindre 40 millions d'euros.

*

À l'initiative de ses rapporteurs spéciaux Christophe Jerretie et Jean-René Cazeneuve, avec l'avis favorable du Gouvernement, l'Assemblée nationale a adopté un amendement rédactionnel.

III. LA POSITION DE VOTRE COMMISSION DES FINANCES

Le présent article permet d'apporter un soutien aux communes qui devront accueillir un nombre plus importants de demandeurs de carte d'identité ou de passeport.

Décision de la commission : votre commission vous propose d'adopter cet article sans modification.

ARTICLE 62 bis (nouveau) (Art. 1609 nonies C du code général des impôts) - Définition unilatérale de l'attribution de compensation des établissements publics de coopération intercommunale issus de fusion
ou ayant changé de périmètre

. Commentaire : le présent article prévoit d'étendre la période durant laquelle les EPCI issus de fusion ou ayant connu un changement de périmètre peuvent définir de façon unilatérale l'attribution de compensation.

Les établissements publics de coopération intercommunale (EPCI) à fiscalité professionnelle unique (FPU), bénéficient du produit de recettes jusqu'alors perçues par les communes, en contrepartie des compétences que celles-ci lui ont transférées. Une attribution de compensation est calculée pour assurer l'égalité entre la recette perçue par le nouvel EPCI et le coût des compétences transférées.

À la suite d'une fusion d'EPCI ou d'un changement de périmètre d'un EPCI, le 5° du V de l'article 1609 nonies C du code général des impôts prévoit les modalités de calcul de l'attribution de compensation en cas d'absence d'accord sur la fixation libre du montant. Par dérogation, l'EPCI peut la fixer unilatéralement à la majorité des deux tiers, dans la limite de certaines bornes. Cette possibilité n'est ouverte que les deux premières années suivant la fusion ou le changement de périmètre .

À l'initiative du Gouvernement et avec l'avis favorable de la commission, nos collègues députés ont adopté le présent article qui porte de deux ans à trois ans ce délai .

Cette disposition permettra d'assouplir le fonctionnement des intercommunalités.

Décision de la commission : votre commission vous propose d'adopter cet article sans modification.


* 8 Loi n° 77-1467 du 30 décembre 1977 de finances pour 1978.

* 9 Jaune budgétaire « Transferts de l'État aux collectivités territoriales » annexé au projet de loi de finances pour 2018.

* 10 Direction générale des finances publiques, « Guide TVA à destination des collectivités locales », 22 juillet 2016.

* 11 Loi n° 2015-1785 du 25 décembre 2015 de finances pour 2016.

* 12 Article 34 loi de finances pour 2016 modifiant l'article 1615-7 du code général des collectivités territoriales.

* 13 Note d'information à destination des préfets portant sur le FCTVA du 8 février 2016, ministères de l'intérieur et des finances et des comptes publics.

* 14 Inspection générale des finances et inspection générale de l'administration, « La gestion du FCTVA », Revue de dépenses, 9 novembre 2016 .

* 15 Article 159 de la loi n° 2015-1785 du 29 décembre 2015 de finances pour 2016.

* 16 Article 141 de la loi n° 2016-1917 du 29 décembre 2016 de finances pour 2017.

* 17 Avec l'ajout de deux priorités supplémentaires : les projets de sécurisation des équipements publics et de développement du numérique et de la téléphonie mobile.

* 18 Action n° 01 « Soutien aux projets des communes et groupements de communes ».

* 19 Pour plus de détail, voir l'analyse des crédits de la mission « Relations avec les collectivités territoriales ».

* 20 Les critères d'éligibilité sont fixés par l'article L. 2334-33 du code général des collectivités territoriales (CGCT).

* 21 Article L. 2334-36 du CGCT.

* 22 Voir le commentaire de l'article 16 dans le tome II du rapport général.

* 23 Article 14 de la loi n° 2015-292 du 16 mars 2015 relative à l'amélioration du régime de la commune nouvelle, pour des communes fortes et vivantes.

* 24 Codifiées aux articles L. 2113-20 à L. 2113-22 du code général des collectivités territoriales.

* 25 Loi n° 2005-1719 du 30 décembre 2005 de finances pour 2006.

* 26 Loi n° 99-586 du 12 juillet 1999 relative au renforcement et à la simplification de la coopération intercommunale.

* 27 Article 140 de la loi n° 2011-1977 du 28 décembre 2011 de finances pour 2012.

* 28 Article 112 de la loi n° 2012-1509 du 29 décembre 2012 de finances pour 2013.

* 29 Article 157 de la loi n° 2015-1785 du 29 décembre 2015 de finances pour 2016.

* 30 Loi n° 2016-1918 du 29 décembre 2016 de finances rectificative pour 2016.

* 31 Loi n° 2017-262 du 1 er mars 2017 relative aux modalités de calcul du potentiel fiscal agrégé des communautés d'agglomération issues de la transformation de syndicats d'agglomération nouvelle (ex SAN).

* 32 Proposition de loi n° 4445 (XIV ème législature) déposée par Dominique Lefebvre, Gilles Carrez, Olivier Dussopt, Olivier Faure, Eduardo Rihan Cypel et Emeric Bréhier.

* 33 Voir le rapport n° 403 (2016-2017) de M. Charles Guené, fait au nom de la commission des finances, déposé le 14 février 2017.

* 34 Christine Pires Beaune et Jean Germain, « Pour une dotation globale de fonctionnement équitable et transparente : osons la réforme », 15 juillet 2015.

* 35 Celle-ci a été cristallisée en 2015 au sein de la dotation forfaitaire.

* 36 Voir le rapport spécial sur la mission « Relations avec les collectivités territoriales » sur le projet de loi de finances pour 2016.

* 37 Vos rapporteurs spéciaux avaient suggéré en 2016 de rapporter la population de chaque commune éligible à la population de l'ensemble des communes éligible dans le département afin d'éviter ces effets.

* 38 Charles Guené et Claude Raynal, « L'association des collectivités territoriales à la maîtrise des finances publiques : les exemples autrichien et italien », rapport d'information n° 678 (2014-2015) du 9 septembre 2015.

* 39 Il s'agit de l'ensemble des ressources fiscales, des dotations et fonds de compensation de la réforme de la taxe professionnelle et de la dotation forfaitaire de la dotation globale de fonctionnement (DGF).

* 40 Article 166 de la loi n° 2015-1785 du 29 décembre 2015 de finances pour 2016.

* 41 Cf. ordonnances n° 2016-1562 du 21 novembre 2016 portant diverses mesures institutionnelles relatives à la collectivité de Corse, n° 2016-1563 du 21 novembre 2016 portant diverses mesures électorales applicables en Corse et n° 2016-1561 du 21 novembre 2016 complétant et précisant les règles budgétaires, financières, fiscales et comptables applicables à la collectivité de Corse.

* 42 Il s'agit du fonds de mobilisation départementale pour l'insertion (FMDI), du fonds national de péréquation de la CVAE, du fonds national de péréquation des droits de mutation à titre onéreux (DMTO), du fonds de solidarité des département et de la répartition entre départements des frais de gestion de la taxe foncière sur les propriétés bâties.

* 43 Rapport pour avis n° 306 (2016-2017) de M. Charles Guené , fait au nom de la commission des finances, déposé le 18 janvier 2017.

* 44 Élargie par l'article 138 de la loi n° 2016-1917 du 29 décembre 2016 de finances pour 2017.

* 45 C'est-à-dire faire partie des 250 premières communes de 10 000 habitants ou les 30 premières communes dont la population est comprise entre 5 000 et 9 999 habitants, classées en fonction d'un indice synthétique de ressources et de charges.

* 46 À condition de respecter les autres conditions.

* 47 Loi n° 2016-1917 du 29 décembre 2016 de finances pour 2017.

* 48 Le montant de la dotation générale de décentralisation allouée à la Corse est gelé depuis 2008. Il s'élève à 277 millions d'euros, dont 187 millions d'euros de dotation de continuité territoriale.

* 49 L'article 16 du présent projet de loi de finances exclut ce montant de la base de calcul de la fraction de TVA affectée aux régions.

* 50 Loi organique n° 2007-223 du 21 février 2007 portant dispositions statutaires et institutionnelles relatives à l'outre-mer.

* 51 Loi n° 2007-182 du 25 décembre 2007 de finances rectificative pour 2007.

* 52 Loi n° 2008-1443 du 30 décembre 2008 de finances rectificative pour 2008.

* 53 Loi n° 2014-1654 du 29 décembre 2014 de finances pour 2015.

* 54 Loi n° 2015-991 du 7 août 2015 portant nouvelle organisation territoriale de la République.

* 55 Avis n° 306 (2016-2017) de Charles Guené, fait au nom de la commission des finances, déposé le 18 janvier 2017.

* 56 Délibération n° 16/204 AC de l'assemblée de Corse portant avis sur trois projets d'ordonnances relatives à la création de la Corse du 7 septembre 2016.

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