B. LA NÉCESSITÉ D'AMÉLIORER LES TRAVAUX, LES MÉTHODES ET LES CAPACITÉS D'ÉVALUATION DE LA LOI ET DES POLITIQUES PUBLIQUES

Votre commission juge indispensable de développer les travaux et de renforcer les méthodes et les capacités d'expertise et d'évaluation du Sénat, pour améliorer l'évaluation de l'application des lois, au regard de leurs objectifs initiaux et du contenu de leurs études d'impact, et plus largement l'évaluation des politiques publiques.

Au titre du renforcement du contrôle et de l'évaluation, il a notamment été proposé à l'issue des réunions du groupe de travail du Sénat sur la révision constitutionnelle :

- de donner une plus grande portée au contrôle de l'application des lois, en inscrivant dans la Constitution l'obligation pour le Gouvernement de prendre les mesures réglementaires d'application des lois comme la mission du Parlement de contrôle de l'application des lois et d'évaluation de leur mise en oeuvre, prolongeant ainsi la révision constitutionnelle du 23 juillet 2008, mais aussi en permettant aux présidents des assemblées ainsi qu'à soixante députés ou soixante sénateurs de saisir le Conseil d'État en cas de carence dans la prise des mesures réglementaires d'application des lois ;

- d'élargir la mission d'assistance de la Cour des comptes au Parlement, en prévoyant que celle-ci assiste les assemblées dans leur mission de contrôle de l'application et de l'évaluation des lois de manière générale 17 ( * ) et en étendant à toutes les commissions permanentes la faculté de solliciter la Cour des comptes 18 ( * ) pour la réalisation d'enquêtes ;

- d'étendre les moyens d'investigation des commissions permanentes, en prévoyant dans la Constitution leur compétence en matière de contrôle de l'action du Gouvernement, d'évaluation des politiques publiques, de contrôle de l'application des lois et d'évaluation de leur mise en oeuvre, et en leur confiant les mêmes prérogatives renforcées de contrôle que les commissions des finances, des affaires sociales et de la défense (droit de communication de tout document et pouvoir d'investigation sur pièces et sur place) ;

- de lever l'interdiction faite aux assemblées de créer des commissions d'enquête sur des faits faisant l'objet de poursuites judiciaires en cours, sous réserve du respect du secret de l'instruction.

Votre commission fait siennes ces propositions.

Indépendamment de la modification de la Constitution, d'autres voies permettraient au Sénat, selon votre rapporteur, d'améliorer la manière dont il accomplit sa mission d'évaluation de la loi et des politiques publiques.

Ainsi, développant une méthode utilisée à l'Assemblée nationale, le rapporteur d'un projet ou d'une proposition de loi pourrait être chargé de façon systématique de veiller, chaque année, à l'évaluation de sa mise en oeuvre, présentant ses conclusions devant la commission, le ministre concerné pouvant être ensuite interrogé lors d'une audition . En effet, les commissions permanentes sont le lieu naturel de l'évaluation des lois, qu'elles ont examinées, ce qui suppose de parvenir à un équilibre plus satisfaisant entre le temps consacré à l'activité législative et celui consacré aux travaux d'information, de contrôle et d'évaluation, en particulier pour votre commission des lois.

Pour renforcer les capacités d'évaluation et d'expertise propres à notre assemblée, des compétences spécifiques pourraient être sollicitées (laboratoires universitaires, statisticiens, économistes...) par des partenariats durables avec des organismes extérieurs ou éventuellement par le recrutement de personnels dédiés. Il s'agirait ainsi de renforcer les moyens pratiques du Sénat permettant de conduire des travaux d'évaluation de la mise en oeuvre des lois, mais aussi de contrôler la fiabilité des études d'impact en amont de l'adoption des lois.

Les voies d'amélioration existent, les méthodes peuvent être améliorées et les capacités matérielles et humaines renforcées, les travaux d'évaluation des lois peuvent être systématisés.

Dans ces conditions, la présente proposition de loi peut constituer une utile contribution à la réflexion sénatoriale sur le renforcement des activités de contrôle et d'évaluation, sans pour autant répondre pleinement aux enjeux.

Aussi votre commission a-t-elle, sur la proposition de son rapporteur, décidé de soumettre au Sénat une motion tendant au renvoi en commission de la proposition de loi, présentée par notre collègue Franck Montaugé, visant à instituer le Conseil parlementaire d'évaluation des politiques publiques et du bien-être, ce qui permettrait, tout en prenant en compte l'apport de ce texte, de poursuivre, approfondir et élargir la réflexion sur ces questions essentielles que sont le contrôle et l'évaluation.

*

* *

Votre commission des lois a décidé de présenter une motion tendant au renvoi en commission de la proposition de loi.


* 17 Actuellement, l'article 47-2 de la Constitution dispose de façon plus limitée que la Cour des comptes « assiste le Parlement dans le contrôle de l'action du Gouvernement » et « dans le contrôle de l'exécution des lois de finances et de l'application des lois de financement de la sécurité sociale ainsi que dans l'évaluation des politiques publiques ».

* 18 Actuellement, la Cour des comptes peut réaliser des enquêtes à la demande de la commission des affaires sociales, sur des organismes entrant dans le champ des lois de financement de la sécurité sociale (article L.O. 132-3-1 du code des juridictions financières), et de la commission des finances ou d'une commission d'enquête, sur des services ou organismes soumis au contrôle de la Cour (article L. 132-4 du même code et article 58 de la loi organique n° 2001-692 du 1 er août 2001 relative aux lois de finances), ainsi que des évaluations de politiques publiques à la demande des présidents des assemblées, de leur propre initiative ou sur proposition d'une commission permanente dans son domaine de compétence (article L. 132-6 du même code).

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