II. LA RÉNOVATION DES BÂTIMENTS DOMANIAUX MUTUALISÉS TRADUIT LA NOUVELLE APPRÉHENSION DE LA POLITIQUE IMMOBILIÈRE DE L'ÉTAT

A. L'ESSENTIEL DES CRÉDITS DU PROGRAMME DEVRAIT ÊTRE ENGAGÉ DÈS 2019

1. Un calendrier anticipé afin de permettre la réalisation des travaux d'ici 2022

Le programme 348 vise à financer des opérations de rénovation de cités administratives et autres sites domaniaux multi-occupants, représentant une surface totale d'environ un million de mètres carrés .

Ces opérations s'inscrivent en particulier dans l'objectif de transition écologique , en s'attachant à réduire la consommation énergétique des bâtiments. L'indicateur 1.1 du programme vise à apprécier la performance énergétique des bâtiments, l'année 2018 étant prise comme référence en base 100. Aucune cible n'est toutefois fixée pour 2020, dans la mesure où les travaux ne seront, pour l'essentiel, pas achevés à cette date. De fait, une difficulté doit être relevée en raison du caractère non pérenne de la mission et de l'effet sur les économies d'énergie rendues possibles par la rénovation mesurable à moyen terme uniquement.

La loi de finances pour 2018 avait inscrit 20 millions d'euros en autorisations d'engagement et en crédits de paiement afin de procéder aux études préalables .

Dès février dernier, la direction de l'immobilier de l'État a lancé un marché national d'audits énergétiques et techniques afin de disposer d'états des lieux et de propositions de travaux comparables entre les différentes cités administratives. Ces audits se poursuivent et devraient être finalisés d'ici la fin de l'année.

À l'appui de ces audits, les équipes régionales du domaine pourront élaborer et proposer des projets à financer, dans une double perspective de rénovation énergétique et de densification des implantations.

Parmi les projets qui seront soutenus par le programme 348, la direction de l'immobilier de l'État a indiqué que « deux cités ont d'ores et déjà fait l'objet d'un arbitrage conduisant à la construction d'une nouvelle cité sur un autre terrain (Nantes, Amiens), et à la cession des bâtiments existants, dont la réhabilitation n'était pas opportune. Une autre cité a fait l'objet d'un arbitrage en faveur de sa réhabilitation (Rouen), après étude d'un projet alternatif de construction neuve sur un autre terrain » 45 ( * ) .

La démarche s'intègre donc dans le cadre des schémas directeurs immobiliers régionaux (SDIR) , détaillés dans l'encadré ci-après, afin d'identifier les services déconcentrés et les opérateurs de l'État susceptibles d'intégrer les locaux rénovés de la cité administrative.

Les schémas directeurs immobiliers régionaux (SDIR)

Les schémas directeurs immobiliers régionaux (SDIR) , placés sous la responsabilité du préfet, constituent l'outil de mise en oeuvre de la politique immobilière de l'État et d'amélioration du recensement du parc immobilier. Expérimentés depuis le début de l'année 2015 dans cinq régions 46 ( * ) , ils ont été généralisés par une circulaire du Premier ministre du 6 juillet 2015 .

Remplaçant les précédents schémas pluriannuels de stratégie immobilière (SPSI), ils se déclinent en deux phases :

- un diagnostic préalable des bâtiments à l'échelon régional, des moyens humains et financiers dédiés à l'immobilier ;

- une stratégie devant conduire à un pilotage stratégique du parc à un horizon de cinq ans grâce à la définition initiale du périmètre projeté des implantations, suivi d'une stratégie d'intervention sur le parc cible.

Par rapport aux démarches précédentes, les SDIR opèrent deux changements majeurs :

- ils se fondent sur une approche transversale , puisqu'ils intègrent l'ensemble des services de l'État, à l'exception des services du ministère de la Défense et du ministère de la Justice, extérieurs au champ de compétence du préfet 47 ( * ) ;

- ils intègrent les opérateurs , dans la mesure où les nouveaux SPSI des opérateurs doivent s'inscrire dans le cadre des SDIR, en vue de disposer d'une vision globale du parc immobilier de l'État à l'échelle régionale.

La phase stratégie définit le périmètre projeté des implantations d'ici cinq années, ce qui conditionne les opérations immobilières à conduire, puis les interventions d'entretien et de rénovation nécessaires.

Source : commission des finances du Sénat

Les projets seront ensuite soumis à la conférence nationale de l'immobilier public (CNIP) en vue de leur labellisation. Les premières réunions sont prévues dès la fin novembre et s'étaleront jusqu'en janvier 2019.

C'est pourquoi il est proposé d'inscrire dès 2019 la quasi-intégralité des crédits prévus sur le programme en autorisations d'engagement . La prévision actualisée du programme est détaillée dans le tableau ci-après.

Prévision actualisée du programme 348 « Rénovation des cités administratives et autres sites domaniaux multi-occupants »

(en millions d'euros)

2018

2019

2020

AE

20

900

80

CP

20

100

330

Source : commission des finances du Sénat, à partir des documents budgétaires

La direction de l'immobilier de l'État justifie cette décision par la nécessité de boucler la réalisation des travaux d'ici 2022 .

Elle indique à cet égard que « deux modalités différentes de la commande publique seront actionnées, en fonction des projets : soit des marchés classiques (marchés de maîtrise d'oeuvre puis marchés de travaux), soit des marchés publics de performance (marché global de performance [MGP], dans lesquels sont confiés à un groupement unique la conception et la réalisation des travaux, ainsi que l'exploitation maintenance des installations). Le choix entre ces deux modalités sera effectué par les équipes régionales, la direction de l'immobilier de l'État préconisant, dans la mesure du possible, un recours aux MGP , lorsque l'ampleur des projets le justifie. L'année 2019 devrait être ainsi consacrée en grande partie aux étapes préparatoires au lancement des travaux. La répartition pluriannuelle initiale des crédits du programme a ainsi été modifiée pour permettre de disposer de l'essentiel des crédits permettant l'engagement de la grande majorité des opérations de travaux au cours du dernier trimestre 2019 le plus vraisemblablement, sous réserve du bon avancement des études et des procédures de marché public » 48 ( * ) .

Cette anticipation résulte en pratique d'une double contrainte :

- d'une part, compte tenu du caractère non pérenne de la mission , les travaux doivent être engagés dès 2019 pour être terminés d'ici 2022 ;

- d'autre part, en raison du principe de réallocation des crédits du Grand plan d'investissement 49 ( * ) , l'inscription de 900 millions d'euros en AE dès 2019 peut aussi être vue comme un moyen de sécuriser les crédits du programme 348, dans un contexte où la direction de l'immobilier de l'État précise d'ores-et-déjà que « les échanges avec les équipes régionales et les rapports provisoires d'audit confirment que les besoins sur le parc des cités administratives dépassent potentiellement le montant total du programme » 50 ( * ) .

Dans ces conditions, il importe que l'anticipation ne conduise pas à précipiter le choix des projets au détriment de leur qualité et de leur efficacité au regard des objectifs visés de rénovation thermique et de densification des implantations.

Compte tenu de la faiblesse des compétences de l'État en matière de conduite et de suivi des chantiers 51 ( * ) , il importe également que la volonté d'engager rapidement les chantiers n'entraîne pas le recours à des montages juridiques coûteux pour les finances publiques .

2. Une montée en charge des crédits immobiliers interministériels

Vos rapporteurs spéciaux présentent une analyse détaillée de la politique immobilière de l'État dans leur rapport spécial consacré aux crédits du compte d'affectation spéciale « Gestion du patrimoine immobilier de l'État ».

Il convient toutefois de souligner l'importance des crédits inscrits sur le programme 348 en 2019 au regard des crédits immobiliers interministériels prévus depuis 2015.

De fait, pour 2019, le programme 348 porte l'essentiel des autorisations d'engagements interministériels en matière immobilière , comme l'illustre le graphique ci-après.

Évolution des crédits immobiliers interministériels depuis 2015

(autorisations d'engagement, en millions d'euros)

Source : commission des finances du Sénat, à partir des documents budgétaires


* 45 Réponse de la direction de l'immobilier de l'État au questionnaire budgétaire de vos rapporteurs spéciaux.

* 46 Haute et Basse Normandie, Pays de la Loire, Rhône-Alpes et La Réunion.

* 47 Sont intégrés au sein des SDIR les directions régionales, les préfectures, les directions départementales, les administrations financières, les services de l'éducation nationale, les services de police et de gendarmerie, ainsi que l'immobilier de la justice hors tribunaux.

* 48 Réponse de la direction de l'immobilier de l'État au questionnaire budgétaire de vos rapporteurs spéciaux.

* 49 Le projet annuel de performances précise qu'en « cohérence avec le principe général de réallocation des crédits du Grand plan d'investissement, la programmation pluriannuelle présentée pourra être modifiée annuellement notamment dans le cas de réallocations vers ou depuis d'autres actions » du plan.

* 50 Réponse de la direction de l'immobilier de l'État au questionnaire budgétaire de vos rapporteurs spéciaux.

* 51 Voir le rapport spécial sur les crédits du compte d'affectation spéciale « Gestion du patrimoine immobilier de l'État ».

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