EXPOSÉ GÉNÉRAL

Mesdames, Messieurs,

Le bon fonctionnement de ces « coopératives de communes » que sont les établissements publics de coopération intercommunale (EPCI) à fiscalité propre nécessite une parfaite coordination entre les conseils municipaux et communautaires. Non seulement les communes doivent-elles pouvoir faire entendre leur point de vue au sein des assemblées délibérantes des communautés qui les réunissent, mais les maires et les conseils municipaux doivent être pleinement associés aux décisions prises au niveau intercommunal. C'est là, d'une part, une condition de la légitimité de l'action communautaire, car un EPCI à fiscalité propre n'est que l'émanation de ses communes membres, et c'est à l'échelle de la commune que le lien démocratique entre les citoyens et les élus reste le plus fort. C'est, d'autre part, un gage de bonne administration locale, tant les compétences communales et intercommunales sont étroitement imbriquées.

Aussi votre commission des lois a-t-elle accueilli avec un grand intérêt la proposition de loi n° 285 (2018-2019) tendant à renforcer les synergies entre les conseils municipaux et les conseils communautaires , présentée par notre collègue Alain Marc et les membres du groupe Les Indépendants - République et Territoires. La réforme du mode de désignation des conseillers communautaires adoptée en 2013, si elle constitue un compromis satisfaisant entre des exigences qui pouvaient paraître contradictoires, n'en appelle pas moins des ajustements, notamment pour consolider la place des maires dans la gouvernance de l'intercommunalité. Si certaines dispositions proposées lui ont paru se heurter à des difficultés juridiques, votre commission s'est néanmoins efforcée de parfaire et de compléter le texte soumis à son examen, dans la poursuite des mêmes objectifs.

I. LES COMMUNES ET L'INTERCOMMUNALITÉ : UNE SOLIDARITÉ À RENFORCER

A. UN FONCTIONNEMENT NÉCESSAIREMENT COOPÉRATIF

Concevoir l'intercommunalité comme un nouvel échelon autonome d'administration locale , intermédiaire entre la commune d'un côté, le département et la région de l'autre, c'est méconnaître la véritable nature de celle-ci .

Pas plus que les syndicats de communes, les communautés de communes ou d'agglomération, les communautés urbaines et les métropoles ne sont des collectivités territoriales, mais des établissements publics au sein desquels des communes s'associent pour exercer ensemble des compétences qui leur sont dévolues par la loi . Certes, la coopération n'est pas toujours, et sous tous ses aspects, librement consentie. Le législateur et, sur son autorisation, l'autorité administrative ont parfois forcé l'adhésion de communes à des groupements de communes. La loi fixe aussi, pour chaque catégorie d'établissements publics de coopération intercommunale (EPCI) à fiscalité propre, une liste de compétences qui doivent obligatoirement leur être transférées. Il n'en reste pas moins que ces compétences sont avant tout des compétences communales, et que leur exercice au niveau intercommunal nécessite une coopération étroite et constante entre l'EPCI et ses membres .

Rien ne l'illustre mieux que le cas des compétences qui ne sont transférées au niveau intercommunal que dans la mesure de l'intérêt communautaire, comme par exemple la gestion des équipements sportifs et culturels 1 ( * ) . Non seulement les communes membres doivent se mettre d'accord pour définir ce qui relève ou non de l'intérêt communautaire, et tracer ainsi les limites de la compétence transférée, mais la conduite d'une politique culturelle ou sportive cohérente à l'échelle de la communauté implique une bonne coordination entre les deux échelons.

Dans d'autres cas, les communes et leurs groupements ont des compétences de nature distincte, mais qui nécessitent d'être exercées conjointement : ainsi lorsqu'un EPCI à fiscalité propre est compétent pour élaborer le plan local d'urbanisme (PLU), tandis que l'autorité chargée de délivrer le permis de construire, d'aménager ou de démolir reste le maire
- l'instruction des dossiers étant d'ailleurs parfois déléguée aux services de l'EPCI. De même, il est fréquent que le maire continue d'exercer le pouvoir de police dans un domaine où la gestion du service public relève de l'intercommunalité : assainissement des eaux usées, gestion des déchets, logement, voirie, etc . 2 ( * )

Sur le plan financier également, la solidarité est étroite entre un EPCI à fiscalité propre et ses communes membres, car ce sont les mêmes masses fiscales qui, d'une manière ou d'une autre, sont réparties entre les deux échelons. Sous le régime de la fiscalité additionnelle, les communes et l'EPCI perçoivent une fraction des mêmes impositions et doivent en fixer le taux de manière coordonnée, afin de ne pas peser excessivement sur les contribuables. Sous le régime de la fiscalité professionnelle unique, le fait que l'EPCI prélève seul la plupart des impôts locaux sur les entreprises lui impose généralement de redistribuer une partie de leur produit entre ses communes membres, sous la forme d'attributions de compensation. À cela s'ajoutent, dans les deux cas, d'autres mécanismes de solidarité financière au sein des communautés : dotation de solidarité communautaire, fonds de concours, etc .

Enfin, pour l'exercice de leurs compétences respectives, les communes et l'EPCI à fiscalité propre dont elles sont membres peuvent se doter de services fonctionnels communs (ressources humaines, informatiques, finances...) 3 ( * ) .

Voilà qui explique que les établissements publics de coopération intercommunale ne soient pas administrés comme les collectivités territoriales par un conseil élu lors d'un scrutin distinct, mais par une assemblée délibérante composée de délégués des communes membres et où ces dernières sont toutes représentées . Toutefois, le mode de désignation des délégués a été profondément modifié par la loi n° 2013-403 du 17 mai 2013 relative à l'élection des conseillers départementaux, des conseillers municipaux et des conseillers communautaires, et modifiant le calendrier électoral .


* 1 La construction, l'entretien et le fonctionnement d'équipements culturels ou sportifs d'intérêt communautaire constituent une compétence transférée à titre optionnel aux communautés de communes et d'agglomération, à titre obligatoire aux communautés urbaines et aux métropoles (voir, respectivement, les articles L. 5214-16, L. 5216-5, L. 5215-20 et L. 5217-2 du code général des collectivités territoriales).

* 2 Voir les matières énumérées au I de l'article L. 5211-9-2 du même code. Le transfert au président de l'EPCI des pouvoirs de police mentionnés au A du même I est de principe, mais les maires peuvent s'y opposer dans les conditions définies au III du même article.

* 3 Le régime des services communs est défini à l'article L. 5211-4-2 du même code.

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