B. PRINCIPALES OBSERVATIONS DE VOTRE RAPPORTEUR SPÉCIAL

1. Une sous-exécution récurrente qui interroge sur le montant des crédits alloués à la mission en loi de finances initiale

Comme les années précédentes, le taux global d'exécution de la mission (83 % en AE et 94 % en CP) s'est avéré relativement faible, démontrant ainsi la pertinence des amendements de diminution de crédits proposés par votre rapporteur spécial lors de l'examen des précédentes lois de finances initiales.

La marge de manoeuvre budgétaire semble ainsi particulièrement importante s'agissant du programme 129 Coordination du travail intergouvernemental , pour lequel le taux d'exécution ne s'élève qu'à 90 % en AE et 89 % en CP.

S'agissant du programme 308 Protection des droits et libertés , la légère hausse des crédits alloués et exécutés en 2018 (+ 3,3 % en CP) a notamment permis aux autorités administratives rattachées au programme de faire face à l'accroissement de leurs activités. Le taux d'exécution des crédits (95 % en AE comme en CP) semble toutefois indiquer là-aussi l'existence d'une réserve budgétaire. Votre rapporteur spécial salue par ailleurs les efforts de mutualisation engagés entre les services du Premier ministre et certaines autorités administratives dans le cadre du nouveau site Ségur-Fontenoy (cf. B.3. infra ) ou dans le cadre de recours à des marchés mutualisés, et les encourage à poursuivre dans cette voie.

Le constat de la sous-exécution est également vrai en ce qui concerne le programme 333 Moyens mutualisés des administrations déconcentrées , pour lequel le taux d'exécution ne s'élève en AE qu'à 76 % des crédits alloués (826 millions d'euros) par la loi de finances pour 2018 110 ( * ) . Comme le souligne la Cour des comptes, cette importante sous-consommation trouve principalement son origine dans une estimation excessivement prudente, en loi de finances initiale, des dépenses liées au renouvellement des baux et des marchés associés au programme 333.

Cette situation récurrente interroge ainsi votre rapporteur spécial sur la qualité de la budgétisation initiale et le conduit à préconiser une nouvelle fois, à périmètre constant, un réajustement à la baisse des crédits de la mission dans le cadre de la prochaine loi de finances initiale.

2. Le programme 129 : une forte hausse inexpliquée des frais de déplacement du Premier ministre

Votre rapporteur spécial note une hausse importante des frais de fonctionnement (hors dépenses de personnel) des services et des cabinets rattachés au Premier ministre , en particulier s'agissant des frais de déplacement (+ 2 millions d'euros par rapport à 2017 , pour un total de 7,1 millions d'euros en CP). Cette hausse explique ainsi en majeure partie la surconsommation de 8,5 millions d'euros de CP, au-delà de la prévision de la loi de finances initiale, constatée pour l'action n° 10 « Soutien » du programme 129 Coordination du travail gouvernemental .

À cet égard, votre rapporteur spécial tient à souligner le manque de précision des informations fournies par les documents budgétaires , en particulier en comparaison de celles fournies concernant les frais de déplacement de la présidence de la République. S'agissant du Premier ministre, les annexes budgétaires se contentent ainsi d'indiquer que les frais de déplacement « intègre[nt] notamment le coût des vols gouvernementaux, pour un montant de 3,87 millions d'euros ». À l'inverse, les frais de déplacement de la présidence de la République sont détaillés de manière exhaustive au sein des annexes budgétaires de la mission Pouvoirs publics ,  mentionnant par exemple le nombre et la destination des vols effectués et distinguant les frais de transport de ceux d'hébergement.

Sur ce point, votre rapporteur spécial suggère ainsi , pour les prochains exercices budgétaires, que les informations fournies concernant la mission Direction de l'action du Gouvernement s'inspirent de celles contenues dans les annexes de la mission Pouvoirs publics .

3. Le programme 308 : une baisse significative des dépenses dans le cadre du nouvel ensemble immobilier Ségur-Fontenoy

L'année 2018 étant la première année de fonctionnement complet du nouveau site Ségur-Fontenoy, on retrouve pour la première fois cette année les effets de la mutualisation des locaux et des dépenses d'équipement permise par le regroupement, engagé en 2017, de plusieurs services du Premier ministre (SGMAP, DSAF...) et autorités administratives indépendantes (CADA, CNIL, Défenseur des droits, CNCDH) sur le site.

Les dépenses exceptionnelles liées aux différentes opérations de déménagement ont ainsi fortement baissé (-11 millions d'euros) entre 2017 et 2018 et demeurent principalement liées à la mise en place de divers projets informatiques (3,2 millions d'euros en AE et 4,6 millions d'euros en CP). Elles dépassent toutefois de près de 200 000 euros (soit 3,7 %) le montant initialement prévu par les services du Premier ministre pour l'année 2018.

En termes d'effectifs, la mutualisation des fonctions support (logistique, finances, documentation) a d'ores et déjà permis un transfert de 39 ETPT du programme 129 vers le programme 308 et devrait permettre, d'ici 2022, une économie totale de 52 ETPT, soit 10 % du total des effectifs des fonctions support concernées.

Le déménagement des autorités administratives susmentionnées s'est par ailleurs traduit par une baisse, entre 2017 et 2018, de 1,1 million d'euros de restes à payer pour le programme 308 , en raison notamment de la fin des baux privés des anciens locaux du Défenseur des droits et de la CNIL.

Sous réserve de ne pas dépasser les prévisions pour l'année 2019, le coût global de l'opération Ségur-Fontenoy sur les années 2015-2019 devrait donc respecter le montant total de 35 millions d'euros initialement prévu.

4. Programmes 129 et 308 : des indicateurs rendant difficile la mesure de la performance réelle

L'hétérogénéité des organismes composant la mission, notamment les programmes 129 et 308, complique la mise en place d'objectifs et d'indicateurs communs pertinents. Leur nombre limité et leur manque de finesse n'est toutefois pas de nature à permettre un suivi attentif de l'ensemble de la mission.

Votre rapporteur spécial appelle notamment à revoir les trois indicateurs les plus représentatifs de la mission, à savoir le taux d'application des lois, le taux de déficit de transposition des directives européennes et le niveau de sécurité des systèmes d'information de l'État. Outre le fait que ces indicateurs dits représentatifs ne relèvent tous trois que d'un seul des trois programmes de la mission et soient imparfaitement renseignés 111 ( * ) , ce que votre rapporteur spécial ne peut que déplorer, leur faible lisibilité et leur manque d'objectivité ne permet pas à votre rapporteur spécial d'apprécier la réalité de la performance de la mission.

À titre d'exemple, l'indicateur global relatif au niveau de sécurité des systèmes d'information de l'État (du point de vue de l'usager) masque ainsi en réalité un niveau très hétérogène de sécurité des systèmes d'information selon les ministères , ce qu'avait déjà souligné votre rapporteur spécial dans sa communication du 18 avril 2018 relative à l'Agence nationale de sécurité des systèmes d'information (ANSSI).

Ces indicateurs ne présentent en outre qu'un lien ténu avec la budgétisation des crédits alloués. Ainsi, comme le souligne la Cour des comptes, « si les résultats [concernant la démarche de performance] sont globalement satisfaisants, ils ne sont pas liés à l'exercice annuel de prévision budgétaire ».


* 110 À noter toutefois qu'un transfert de gestion au profit du ministère de l'Intérieur ayant été décidé en 2019, le programme 333 sera, à compter de la loi de finances pour 2020, supprimé de la mission « Direction de l'action du Gouvernement » pour voir ses crédits transférés au sein du programme 307 de la mission « Administration générale et territoriale de l'État ».

* 111 L'indicateur « taux d'application des lois » est ainsi non-renseigné pour la prévision du PAP 2018, tandis que certains chiffres fournis pour la réalisation 2018 semblent totalement incohérents au regard des résultats des années 2016 et 2017 (on serait ainsi passé à un total de près de 2500 lois appliquées en 2016 et 2017 à seulement 223 en 2018).

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