Rapport n° 241 (1984-1985) de M. Philippe DE BOURGOING , fait au nom de la commission des affaires culturelles, déposé le 17 avril 1985

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N° 241

SÉNAT

SECONDE SESSION ORDINAIRE DE 1984-1985

Annexe au procès-verbal de la séance du 17 avril 1985.

RAPPORT

FAIT

au nom de la commission des Affaires culturelles (1) , sur la proposition de résolution de MM. Michel MIROUDOT, Marcel LUCOTTE, Pierre-Christian TAITTINGER et Philippe de BOURGOING, tendant à la création d'une commission de contrôle sur les conditions dans lesquelles sont commandées et élaborées les études techniques qui fondent les expertises de l'établissement public Télédiffusion de France, en matière de répartition des fréquences hertziennes .

Par M. Philippe de BOURGOING,

Sénateur.

(1) Cette commission est composée de : MM. Léon Eeckhoutte, président ; Paul Séramy. Adrien Gouteyron, Michel Miroudot, Michel Durafour, vice - présidents ; MM. James Marson, Jacques Habert, Jacques Carat, Pierre Vallon, secrétaires M. Guy Allouche, Mme Danielle Bidard-Reydet, MM. Jean-Pierre Blanc, Marc Boeuf, Roger Boileau, Philippe de Bourgoing, Pierre Carous, Auguste Cazalet, Adolphe Chauvin, Charles-Henri de Cossé-Brissac, Jean Delaneau, Charles Descours, Jacques Durand, Jules Faigt, Claude Fuzier, Michel Giraud, Yves Goussebaire-Dupin, Guy de La Verpillière, Henri Le Breton. Jean-François Le Grand, Mme Hélène Luc, MM. Kléber Malécot, Hubert Martin, Christian Masson, Dominique Pado, Sosefo Makapé Papilio, Charles Pasqua, Jacques Pelletier, Maurice Pic, Roger Quillot, Jean Roger, Roland Ruet, Guy Schmaus, Abel Sempé, Franck Sérusclat, Pierre Sicard, Raymond Soucaret, Pierre-Christian Taittinger, Raymond Tarcy, Jacques Toutain, Albert Vecten, Marcel Vidal.

Voir le numéro :

Sénat: 211 (1984-1985).

Audiovisuel - Commissions d'enquête de contrôle - Fréquences hertziennes - télédiffusion de France (TDF)

MESDAMES, MESSIEURS,

Sans attendre la réforme globale de l'audiovisuel qui devait intervenir en juillet 1982, la loi n° 81-974 du 9 novembre 1981 portant dérogation au monopole d'Etat de la radiodiffusion autorisait la création de radios locales privées.

La rareté de l'espace hertzien et la convoitise dont il est l'objet ont rendu inévitable un régime d'autorisation pour ces radios.

Délivrées par l'Etat sous l'empire de la loi du 9 novembre 1981, ces autorisations sont accordées depuis la loi n° 82-652 du 29 juillet 1982 sur la communication audiovisuelle par la Haute autorité de l'audiovisuel.

Les décisions de la Haute autorité relatives à l'octroi, au renouvellement, au refus ou à la révocation des dérogations sont prises après avis d'une commission, créée par la loi du 9 novembre 1981 et reprise par l'article 87 de la loi du 29 juillet 1982.

Dans le régime actuel, cette commission (dite « Galabert » du nom de son président) est composée de vingt-deux membres. Le Parlement y est représenté par deux députés et deux sénateurs, chacun assisté de deux suppléants. Il ne manque donc pas d'informations sur le fonctionnement de cette instance consultative.

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Pour rendre ses avis, la commission est contrainte de se fonder sur des expertises techniques, dont l'établissement public de diffusion, T.D.F. a le monopole.

Or, comme l'a souligné notre collègue Michel Miroudot, membre de ladite commission, les avis techniques de T.D.F. sont enveloppés d'«un mystère impénétrable», et faute de l'assistance de contre-experts, les commissaires ne sont pas à même de les apprécier.

Dès lors, la commission de contrôle que la présente proposition de résolution demande au Sénat d'instituer devrait avoir pour premier objet de lever les ambiguïtés actuelles qui affectent le partage des ondes de radiodiffusion sonore, mais, au-delà, à la veille du bouleversement annoncé du panorama audiovisuel, il lui faudra aussi éclairer les choix futurs relatifs à la répartition des fréquences de télévision.

I- LEVER LES AMBIGUÏTES ACTUELLES AFFECTANT LE PARTAGE DES ONDES DE RADIODIFFUSION SONORE

- Un bref aperçu technique.

Les radios locales privées ne fonctionnent qu'en modulation de fréquence sur la bande dite FM , laquelle s'étend de 87,5 MHz à 108 MHz.

Jusqu'à présent, les fréquences 101 à 108 MHz n'étaient pas disponibles, en France, pour les radios privées, car réservées à la Défense nationale pour les liaisons mobiles de l'Armée. Mais l'Union internationale des télécommunications - dont les conférences procèdent au partage des ondes -, ayant recommandé la libération dans tous pays de la bande 101 à 108 MHz, les fréquences 87,5 - 104 MHz sont revenues au service de la radio-diffusion depuis le 1 er janvier 1985. Il est, par ailleurs, prévu que les stations de l'Armée devront quitter la partie supérieure de la bande avant le 1 er janvier 1996 , l'abandonnant ainsi aux radios privées.

Même si la saturation de la bande aujourd'hui disponible peut être invoquée, des perspectives nouvelles s'ouvrent donc.

- La commission désarmée.

Il n'est plus acceptable que la commission consultative des radios locales privées ne soit pas à même de juger les avis techniques donnés par T.D.F.

Pour qu'elle puisse se prononcer en toute connaissance de cause, il faudrait que lui soit communiquée une information limpide sur les critères qui président aux choix des techniciens de T.D.F. Mais, et sans qu'il soit question de remettre en cause la qualité des ingénieurs et techniciens de l'établissement public de diffusion, elle n'a guère, jusqu'ici, obtenu d'éclaircissements en la matière, et cela, malgré ses demandes réitérées.

Il lui est, dès lors, permis de s'interroger : les avis techniques de T.D.F. ne recouvrent-ils pas en réalité des décisions... avant tout politiques ?

Il est de fait que certains des avis donnés par T.D.F. sont pour le moins troublants. A l'île de la Réunion, par exemple, quatre radios privées avaient sollicité une autorisation en décembre dernier. Il leur a été opposé « l'absence de fréquence dans ce département ». Depuis, le plan de fréquence global a été refait et a permis de trouver quatre fréquences !

La transparence est donc nécessaire. Les travaux de la commission de contrôle devraient contraindre T.D.F. à expliquer enfin clairement ses choix.

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II. - ECLAIRER LES CHOIX FUTURS RELATIFS À LA RÉPARTITION DES FRÉQUENCES DE TÉLÉVISION

La commission de contrôle ne devrait pas borner ses travaux à mettre au jour les mécanismes de décision relatifs à l'attribution des fréquences pour les radios locales . Elle pourrait préparer l'avenir en examinant les problèmes liés à l'éventuel futur partage des fréquences de télévision .

En effet, la question des télévisions privées est d'ores et déjà posée. Elle sera encore plus difficile à résoudre que celle de la radiodiffusion sonore , car la place occupée, dans la bande hertzienne, par les antennes du service public est plus importante. Lorsque l'heure sera venue de se partager les ondes, les futurs candidats risqueront de se heurter, demain plus qu'aujourd'hui, aux réticences ou aux prudences de T.D.F. Ne serait-ce que pour protéger le confort d'écoute des chaînes de service public, cet établissement aura tendance à exagérer les précautions et à réserver, à «geler», le maximum de fréquences. Et le fera, sans s'expliquer.

Dégager le plus possible la bande hertzienne exigera des décisions politiques fondamentales . Le Parlement sera appelé à lever des options. Il devra décider, par exemple, s'il maintient, accroît, ou diminue la part du service public, s'il préfère ou non favoriser le secteur privé, et dans quelle mesure.

Il n'est pas dans la nature d'une commission de contrôle de se substituer au Parlement pour trancher sur ces questions . Et il n'appartiendra pas au futur organe d'examen de se prononcer sur l'opportunité des choix possibles. Mais il serait légitime et utile qu'il prépare les décisions futures du Parlement en les éclairant au maximum, c'est-à-dire en exposant les conditions et les conséquences , aussi bien techniques que politiques, de chaque option.

Ce faisant, la commission de contrôle ne s'écarterait pas de sa mission qui est justement l'examen du partage des ondes.

C'est ainsi que la commission ferait oeuvre utile en précisant au maximum les choses en matière de télévision. Elle pourrait dresser des plans et cartes de disponibilités ( en fréquences hertziennes ), correspondant à tous les scénarios, toutes les variantes possibles, selon les différents paramètres envisageables.

- Un premier document à établir est celui qui, supposant la situation inchangée (la part du service public restant la même) décrirait les emplois possibles du reliquat des fréquences.

- Un deuxième cas à explorer se fonderait sur l'hypothèse qu'une - ou deux - chaîne nationale serait transmise par satellite , au lieu d'être diffusée par les relais au sol .

Cette variante libérerait beaucoup de fréquences, dès lors que nombre des réémetteurs perdraient toute utilité. Il s'agit de ceux que le service public, conformément aux obligations de sa mission, emploie pour assurer la couverture des «zones d'ombre» (vallées encaissées, sites accidentés, qui, sans relais spécialisé, demeureraient inaccessibles au rayonnement direct des grands émetteurs). Les fréquences libérées pourraient être attribuées à des stations locales qui useraient de ces antennes de réémission pour desservir des zones limitées.

- Une autre solution envisageable serait la remise au secteur privé d'une chaîne nationale, sinon même de deux. Cette «privatisation » serait assortie de cahiers des charges, fixant entre autres le régime des ressources et, selon toute vraisemblance, conditionnant la publicité pour protéger la presse écrite.

Dans la mesure où cette variante s'inspirait de l'exemple américain , ces chaînes privées seraient libres de restreindre leur desserte aux régions que les annonceurs, fournisseurs de ressources publicitaires, jugeraient intéressantes, c'est-à-dire les zones fortement urbanisées; ce qui libérerait les fréquences utilisées par les réémetteurs relais des zones défavorisées. Ces fréquences de ces équipements pourraient alors être attribués à des stations locales.

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CONCLUSION

Pour toutes ces raisons, actuelles et futures, votre commission des Affaires culturelles a, le mercredi 17 avril 1985, adopté , à l'unanimité de ses membres présents, la proposition de résolution qui invite le Sénat à instituer la commission de contrôle proposée par MM. Miroudot, Lucotte, Taittinger et moi-même.

PROPOSITION DE RESOLUTION

tendant a la création d'une commission de contrôle sur les conditions dans lesquelles sont commandées et élaborées les études techniques qui fondent les expertises de l'établissement public Télédiffusion de France, en matière de répartition des fréquences hertziennes.

(Texte proposé par la commission.)

Article unique.

En application de l'article 11 du Règlement du Sénat, il est créé une commission de contrôle, composée de vingt et un membres, chargée d'examiner les conditions dans lesquelles sont commandées et élaborées les études techniques qui fondent les expertises de l'établissement public Télédiffusion de France, en matière de répartition des fréquences hertziennes.

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