Article 14 - Relèvement des seuils du régime simplifié d'imposition

Commentaire : Le présent article propose de relever de 30 % les seuils en deçà desquels s'applique le régime d'imposition du réel simplifié, sans modifier le champ de compétence actuel des centres de gestion agréés en matière comptable.

I. UN SUBSTANTIEL RELÈVEMENT DE SEUIL

Défini à l'article 302 septies du code général des impôts, le régime d'imposition dit "du réel simplifié" (RSI) s'adresse à des petites entreprises.

Contrairement à l'approche retenue dans le cadre du forfait, les entreprises concernées restent soumises à l'impôt sur une base réelle. Toutefois, elles sont soumises à des obligations comptables et administratives allégées par rapport aux règles de droit commun.

Schématiquement, le RSI présente trois caractéristiques :

- les documents comptables et fiscaux à joindre à la déclaration annuelle de résultat s'avèrent plus simples. En outre, les entreprises relevant de l'impôt sur le revenu sont autorisées à tenir une comptabilité super-simplifiée et, dans certains cas, sont dispensées de produire un bilan. Pour les entreprises relevant de l'impôt sur les sociétés, la production de ce dernier document reste obligatoire, mais son contenu est allégé ;

- les déclarations de TVA sont déposées avec une périodicité trimestrielle. En outre, le montant à verser en cours d'exercice est évalué sur une base semi-forfaitaire, la régularisation intervenant en fin d'année.

- enfin, en cas de contrôle de l'administration, la durée de la vérification sur place est limitée à trois mois.

Jusqu'en 1994, ce régime était accessible aux entreprises ayant un chiffre d'affaires hors taxes inférieur :

- à 3,5 millions de francs dans le cas où leur activité principale consiste en la vente de marchandises ou la fourniture de logements ;

- à 1 million de francs, dans les autres cas.

Introduit à l'initiative de notre Assemblée, l'article 15 de la loi de finances rectificative pour 1994 a cependant relevé ces seuils afin de tenir compte de l'évolution des prix depuis 1990. Il les a ainsi portés respectivement à 3,8 millions et 1,1 million de francs pour l'imposition des résultats dégagés au titre de 1994.

Le présent article propose de franchir une nouvelle et substantielle étape. Il prévoit ainsi de majorer de 30 % ces deux seuils pour les fixer à 5 millions et 1,5 million à compter de l'imposition des résultats de 1995.

Cette mesure répond ainsi au souci d'alléger les formalités administratives pesant sur les petites entreprises et s'inscrit de ce fait dans le prolongement direct des engagements pris par le gouvernement lors de la présentation, le 28 novembre dernier, du plan "PME pour la France".

En pratique, environ 60.000 entreprises pourraient ainsi basculer dans le régime simplifié, soit 8 % de celles actuellement soumises au régime réel.

II. UNE NEUTRALISATION DES CONSÉQUENCES SUR LE CHAMP DE COMPÉTENCES DES CENTRES DE GESTION AGRÉÉS

Constitués à l'initiative d'experts comptables ou d'organisations professionnelles, les centres de gestion agréés ont pour but d'apporter à leurs adhérents une assistance en matière de gestion, d'établissement des déclarations fiscales et de formation.

Au plan fiscal, l'adhésion à un de ces centres permet au contribuable de bénéficier d'un abattement de 20 % sur le montant de son revenu professionnel imposable.

En outre, et par dérogation au monopole des experts comptables, les centres de gestion agréés peuvent tenir et centraliser les documents comptables de certains de leurs adhérents.

En pratique, on distingue trois situations :

- les centres de gestion regroupant exclusivement des agriculteurs Peuvent tenir la comptabilité de leurs adhérents imposables suivant un régime réel ;

- les centres de gestion dit " Cluzel " peuvent exercer cette activité pour leurs ressortissants dont les recettes n'excèdent pas 60 % des limites du régime réel simplifié ;

- enfin, les centres de gestion disposant d'une habilitation spécifique s ont autorisés à tenir la comptabilité de leurs adhérents dont le chiffre d'affaires reste inférieur aux limites du régime réel simplifié.

Dans les deux dernières situations il y a donc, en application de la législation actuelle, une relation directe entre le champ du régime réel simplifié et le domaine de compétence en matière comptable des centres de gestion agréés.

Le présent article propose toutefois de couper ce lien "automatique" pour éviter que le relèvement important des seuils du régime du RSI ne conduise, par voie de conséquence, à élargir dans les mêmes proportions le champ de compétence des centres agréés.

Juridiquement, les dispositions du paragraphe II suppriment toute référence au régime du RSI dans les dispositions concernant les compétences des centres en matière de tenue de comptabilité, et leur substituent un seuil, exprimé en terme de chiffre d'affaires hors taxes, dont le niveau correspond à leurs compétences actuelles. En d'autres termes, il fige le champ d'intervention des centres en ce domaine.

Pour le gouvernement, cet aménagement ne constitue toutefois qu'une mesure permettant de simplifier les obligations des entreprises, sans volonté de relancer un débat ancien.

Devant l'Assemblée nationale, le ministre de l'Économie et des finances a d'ailleurs annoncé la constitution d'un groupe de travail afin de rechercher les moyens de rapprocher les centres de gestion agréés et les experts comptables. De fait, il n'exclut pas la perspective d'une "unification de la profession, sur le principe d'égalité de droits et de devoirs, notamment en ce qui concerne la qualification, la déontologie et le financement".

A cet effet, le gouvernement "propose d'agir en deux étapes, en commençant par mettre en place un groupe de travail, sous la direction d'un inspecteur général des finances, qui sera chargé d'étudier et d'évaluer le fonctionnement des organismes agréés, de faire des propositions sur les modalités à mettre en oeuvre pour atteindre l'objectif correspondant à la philosophie que je viens de rappeler. Ce groupe serait composé de deux personnalités qualifiées, de trois représentants du conseil supérieur de l'ordre des experts-comptables, d'un représentant du conseil national des centres d'économie rurale, d'un représentant du comité de liaison des centres de gestion et d'un représentant de la fédération française des centres de gestion et d'économie de l'artisanat.

"Ce groupe de travail pourrait procéder à l'ensemble des auditions qui lui seraient nécessaires. Les conclusions de ses travaux devraient être formalisées dans les deux mois -je réponds là à une autre question qui m'a été posée- afin d'être communiquées à une commission, plus vaste, dans laquelle siégeraient toutes les professions intéressées et à laquelle participeraient aussi des représentants de l'Assemblée nationale et du Sénat, afin que cette commission puisse proposer les éventuelles modifications législatives nécessaires, lesquelles ne devraient d'ailleurs pas obligatoirement figurer dans une loi de finances, mais pourraient donner lieu soit à un texte spécifique, soit à un amendement à un autre projet de loi sur un sujet voisin." ( ( * )1)

Votre commission approuve cette démarche et souhaite qu'elle permette de dégager une solution équitable de nature à mettre fin à un problème lancinant. Elle relève toutefois que la négociation déjà conduite sur ce thème en 1992 n'a pas pu aboutir, et s'inquiète de ce précédent.

Décision de la commission : votre commission a décidé de réserver sa position sur cet article et de présenter, le cas échéant, des propositions de modification lors de l'examen des amendements extérieurs.

* (1) Journal officiel - Assemblée nationale - mercredi 6 décembre 1995, page 4673.

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