TITRE III
-
DISPOSITIONS RELATIVES AUX DÉPENSES
ET À LA TRÉSORERIE
Section 1
-
Branche famille

Art. 7
Revalorisation des prestations familiales

Objet : Cet article détermine les règles de revalorisation de la base mensuelle de calcul des allocations familiales (BMAF)

I - Le dispositif proposé


Les prestations familiales, à l'exception des aides au logement, de l'allocation de garde d'enfant à domicile (AGED) et de l'aide à la famille pour l'emploi d'une assistante maternelle agréée (AFEAMA) hors majoration, sont calculées en fonction d'un pourcentage de la base mensuelle de calcul des allocations familiales (BMAF).

L'article 36 de la loi du 25 juillet 1994 relative à la famille prévoyait, pour une période allant du 1 er janvier 1995 au 31 décembre 1999, que la BMAF serait revalorisée " une ou plusieurs fois par an conformément à l'évolution des prix à la consommation hors tabac prévue dans le rapport économique et financier annexé au projet de loi de finances pour l'année civile à venir ".

Le second alinéa de cet article précisait cependant que " si l'évolution constatée des prix à la consommation hors tabac est différente de celle qui avait été initialement prévue, il est procédé à un ajustement destiné à assurer pour l'année civile suivante une évolution des bases mensuelles conforme à l'évolution des prix à la consommation hors tabac ".

Le I du présent article confère un caractère pérenne à ce dispositif qui remplace désormais à l'article L. 551-1 du code de la sécurité sociale les dispositions en vigueur avant 1995. La rédaction retenue est identique à celle figurant dans la loi de 1994 : elle prévoit une possibilité d'ajustement positif ou négatif en fonction de l'évolution observée des prix l'année précédente. Lors de ces dernières années, l'évolution observée des prix a été systématiquement inférieure à l'évolution prévisionnelle : l'ajustement a donc toujours été négatif.

Ce mécanisme a donné lieu à une revalorisation de :

•  1,1 % au 1 er janvier 1998, compte tenu d'une hypothèse prévisionnelle d'évolution des prix hors tabac de 1,3 % et de la révision à la baisse de la prévision pour 1997 (1,1 % au lieu de 1,3 % initialement prévu) ;

•  0,71 % au 1 er janvier 1999, compte tenu d'une évolution prévisionnelle des prix hors tabac de 1,2 % et de la révision à la baisse de la prévision pour 1998 (0,8 % au lieu de 1,3 %).

Le II prévoit que le mécanisme défini au I entre en vigueur à compter du 1 er janvier 2000.

En application de cette disposition, la revalorisation de la BMAF serait donc de 0,2 % au 1 er janvier 2000, compte tenu d'une évolution prévisionnelle des prix de 0,9 % et d'une nouvelle révision à la baisse de la prévision pour 1999 (0,5 % au lieu de 1,2 %).

Le Gouvernement, " souhaitant en 2000 faire participer les familles à la croissance ", propose de majorer de 0,3 point la revalorisation telle qu'elle découle des règles du I. Grâce à ce " coup de pouce ", la revalorisation sera donc finalement de 0,5 % au 1 er janvier 2000.

Cette majoration exceptionnelle se traduira par une augmentation des dépenses de la branche famille de 340 millions de francs en 2000 20( * ) .

Cet article a été adopté sans modification par l'Assemblée nationale.

II - La position de votre commission

Le dispositif de revalorisation de la BMAF institué en 1994 a permis de garantir aux familles une évolution des prestations familiales au moins égale à celle des prix. Il laisse en outre au Gouvernement la possibilité de donner un " coup de pouce " à la BMAF, afin de faire bénéficier les familles d'un gain de pouvoir d'achat.

Votre commission est donc favorable à sa reconduction. Elle remarque cependant que des mécanismes plus avantageux, fondés sur l'évolution de la richesse nationale ou des salaires, auraient pu être envisagés mais n'ont pas été retenus par le Gouvernement.

Evolution de la BMAF

 

1 er janvier

1 er juillet

Moyenne annuelle

Prix*

Année

Montant

Evolution

Montant

Evolution

Evolution

Evolution

1990

1.848,40

2,24

1.873,35

1,35

3,3

3,4

1991

1.905,20

1,70

1.920,44

0,80

2,9

3,2

1992

1.939,64

1,00

1.974,55

1,80

2,3

2,3

1993

2.014,04

2,00

2.014,06

0,00

3,0

1,8

1994

2.054,32

2,00

2.054,32

0,00

2,0

1,4

1995

2.078,97

1,20

2.096,64 **

0,00

1,7

1,7

1996

2.078,97

0,00

2.078,97

0,00

0,0

1,9

1997

2.108,49

1,42

2.108,49

0,00

1,3

1,1

1998

2.131,68

1,10

2.131,68

0,00

1,1

0,6

1999

2.146,81

0,71

2.146,81

0,00

0,7

0,5 ***

2000

2.157,54

0,50

2.157,54

0,00

0,5

0,9 ***

* Prix à la consommation de l'ensemble des ménages en moyenne annuelle, hors tabac depuis 1992, base 100 en 1990.

** Suite au contentieux 1995, revalorisation au 1 er juin 1995 de 0,85 %.

*** Evolution prévisionnelle 1999 et 2000 estimée en septembre 1999.

Source : Direction de la sécurité sociale (SDPEF/6A)

Elle accueille favorablement le " coup de pouce " de 0,3 % accordé en 2000 qui témoigne d'un changement de méthode bienvenu.

En 1999, le Gouvernement avait fait le choix, pour la deuxième année consécutive, d'opérer un rattrapage négatif sur l'évolution de la BMAF et de ne revaloriser les prestations familiales que de 0,71 %, contre 1,2 % pour les pensions de retraite. Il avait en effet décidé de ne pas proroger le mécanisme de revalorisation des retraites institué par la loi de 1993 pour éviter d'appliquer aux pensions de retraites le rattrapage négatif de 0,5 % qu'il imposait pourtant aux prestations familiales.

Votre commission a la satisfaction de constater qu'en 2000 les retraités et les familles bénéficieront des mêmes conditions, soit une revalorisation de 0,5 % intégrant une " coup de pouce " de 0,3 %.

Sous réserve de ces observations, votre commission vous propose d'adopter cet article sans modification.

Art. 8
Relèvement de l'âge limite d'ouverture du droit
au complément familial et aux aides de logement

Objet : Cet article permet de relever, par voie réglementaire, de 20 à 21 ans l'âge limite d'ouverture du droit au complément familial et aux aides au logement

I - Le dispositif proposé


Cet article est la traduction législative d'une mesure annoncée par le Gouvernement lors de la Conférence de la famille du 7 juillet 1999. Le Gouvernement avait alors indiqué qu'il entendait accentuer, en 2000, l'effort de justice sociale en portant de 20 à 21 ans, au 1 er janvier 2000, l'âge limite d'ouverture du droit au complément familial et aux allocations de logement.

Ces mesures devaient, selon le Gouvernement, permettre de mieux tenir compte de l'allongement de la durée de cohabitation des jeunes chez leurs parents, 73 % des jeunes de 20 ans habitant encore chez leurs parents. Elles avaient également pour objectif de réduire la diminution des ressources des familles lorsque l'enfant atteint 20 ans, notamment pour les familles modestes et nombreuses.

Pour comprendre cette disposition, il convient de rappeler que l'article 22 de la loi du 25 juillet 1994 relative à la famille prévoyait déjà que les limites d'âge des enfants ouvrant droit aux prestations familiales seraient progressivement et successivement relevées, au plus tard le 31 décembre 1999, afin de tenir compte du fait que les enfants demeurent plus longtemps qu'autrefois à la charge de leurs parents, notamment en raison de l'allongement de la durée des études.

Au moment où cette loi fut votée, ouvraient droit aux prestations familiales, en application de l'article L. 512-3 du code de la sécurité sociale, complété par l'article R. 512-2 du code de la sécurité sociale, sous réserve des règles particulières à chaque prestation :

1° tout enfant jusqu'à la fin de l'obligation scolaire, c'est-à-dire âgé de moins de 16 ans ;

2° tout enfant âgé de moins de 18 ans et dont la rémunération éventuelle n'excédait pas un plafond fixé à 55 % du SMIC calculé sur 169 heures ;

3° tout enfant âgé de moins de 20 ans et dont la rémunération n'excédait pas le même plafond, à condition :

- qu'il poursuive des études,

- ou qu'il soit placé en apprentissage ou en stage de formation professionnelle,

- ou qu'il ait droit à l'allocation d'éducation spéciale ou se trouve, par suite d'infirmité ou de longue maladie, dans l'impossibilité constatée de se livrer à une activité professionnelle.

Compte tenu du dispositif retenu et des précisions données dans l'exposé des motifs du projet de loi de 1994 21( * ) , les différentes étapes devaient être, dans l'ordre de priorité suivant :

1° le relèvement à 20 ans de l'âge limite d'ouverture du droit à l'ensemble des prestations familiales (la condition de revenu demeurant fixée à 55 % du SMIC) ;

2° puis le relèvement à 22 ans de l'âge limite -sous la même condition de rémunération-, successivement pour le droit :

- à l'allocation de logement familial (ALF) et à l'aide personnalisée au logement (APL) ;

- à l'allocation d'éducation spéciale (AES), sur demande conjointe de l'intéressé et de la personne à la charge de laquelle il se trouve ;

- à l'allocation de soutien familial (ASF) et à l'allocation de parent isolé (API) ;

- au complément familial ;

- aux allocations familiales et à leurs majorations pour âge pour les familles de trois enfants et plus ;

- aux allocations familiales et majorations pour âge, pour les familles ayant deux enfants à charge.

Ledit projet de loi prévoyait que ces mesures, qui normalement relèvent du domaine réglementaire, interviendraient après constatation d'un excédent de ressources disponibles de la branche famille pour l'exercice précédent. Cette hypothèse semblant trop incertaine au Parlement, le Gouvernement avait accepté de fixer une date butoir pour la mise en place de ces mesures : le 31 décembre 1999.

Par ailleurs, des " mesures améliorant les conditions d'accès au logement des familles " devaient également intervenir, sans qu'un calendrier précis soit fixé.

L'article 22 de la loi famille de 1994 a connu un début d'application : deux décrets successifs (n° 97-1245 du 29 décembre 1997 et n° 98-1213 du 29 décembre 1998) ont en effet progressivement relevé la limite d'âge pour l'ensemble des prestations familiales de 18 à 19 ans puis de 19 à 20 ans pour les enfants dont la rémunération éventuelle n'excède pas un plafond fixé à 55 % du SMIC calculé sur 169 heures.

Le paragraphe I du présent article tire les conséquences de cette évolution et autorise le relèvement à 21 ans, par voie réglementaire, de l'âge limite d'ouverture du droit au complément familial et aux aides de logement.

Le 1° abroge le 3° de l'article L. 512-3 du code de la sécurité sociale devenu inutile puisque désormais entièrement contenu dans le 2° : il n'existe désormais plus qu'un seul âge limite, fixé à 20 ans quelle que soit la situation de l'enfant à charge.

Le 2° complète cet article par un alinéa prévoyant une possibilité de dérogation à cet âge limite pour l'attribution du complément familial et de l'allocation de logement mentionnée au 4° de l'article L. 511-1 du code de la sécurité sociale, c'est-à-dire l'allocation de logement familial (ALF). L'âge limite pour ces prestations sera, comme l'a annoncé le Gouvernement, fixé à 21 ans par voie réglementaire.

Le complément familial

Le complément familial est attribué aux ménages ou à la personne qui assume la charge d'au moins trois enfants, tous âgés de plus de trois ans, lorsque ses ressources n'excèdent pas un plafond fixé au 1 er septembre 1999, pour le revenu catégoriel net de 1998, à :

- 109.501 francs pour un ménage avec un revenu et un enfant,

- 131.401 francs pour un ménage avec un revenu et deux enfants,

- 144.710 francs pour un ménage avec deux revenus ou une personne isolée et un enfant,

- 166.610 francs pour un ménage avec deux revenus ou une personne isolée et deux enfants.

Ces plafonds sont majorés de 26.280 francs par enfant au-delà du deuxième.

Si une quatrième naissance survient, le complément familial est supprimé, la famille ayant à charge un enfant de moins de trois ans.

Le montant du complément familial est fixé à 41,65 % de la BMAF, soit au 1 er septembre 1999, 889,53 francs.

Un complément familial différentiel est versé aux ménages ou personnes dont les ressources annuelles dépassent le plafond d'une somme inférieure à douze fois le montant mensuel du complément familial en vigueur au 1 er juillet de l'année de référence.

Le Gouvernement a indiqué que l'aide personnalisée au logement (APL) serait également concernée par cette mesure, même si elle n'est pas visée explicitement dans le texte de l'article. Le régime de cette allocation est en effet prévu par l'article R. 351-8 du code de la construction et de l'habitation qui renvoie à l'article L. 512-3 du code de la sécurité sociale pour la définition des personnes à charge.

La troisième aide au logement -l'allocation de logement à caractère social (ALS)- est versée aux personnes isolées ou aux couples n'ayant aucune personne à charge : elle n'entre donc pas dans le champ de cette mesure.

Le paragraphe II du présent article prévoit que le relèvement de l'âge limite de 20 à 21 ans interviendra à compter du 1 er janvier 2000, au titre des enfants nés à compter du 1 er janvier 1980. Cette mesure ne concernera donc que les enfants qui atteindront l'âge de 20 ans en 2000 et non ceux qui auraient déjà atteint cet âge au 1 er janvier et qui seraient âgés de moins de 21 ans.

L'allocation de logement familial

L'allocation de logement familial est une prestation familiale. Elle est accordée :

1° aux personnes qui perçoivent à un titre quelconque :

a) soit les allocations familiales,

b) soit le complément familial,

c) soit l'allocation pour jeune enfant,

d) soit l'allocation de soutien familial,

e) soit l'allocation d'éducation spéciale ;

2° aux ménages ou personnes qui, n'ayant pas droit à l'une des prestations mentionnées au 1°, ont en enfant à charge ;

3° aux chefs de famille qui n'ont pas d'enfant à charge, pendant une durée déterminée à compter du mariage, à la condition que celui-ci ait été célébré avant que les époux aient l'un et l'autre atteint un âge limite (art. D. 542-1) ;

4° aux ménages ou aux personnes qui ont à leur charge un ascendant vivant au foyer ayant dépassé un âge déterminé ;

5° aux ménages ou personnes qui ont à leur charge un ascendant ou un descendant ou un collatéral au deuxième ou au troisième degré vivant au foyer atteint d'une infirmité permanente au moins égale à un pourcentage fixé par décret ou qui est, compte tenu de son handicap, dans l'impossibilité, reconnue par la commission technique d'orientation et de reclassement professionnel prévue à l'article L. 323-11 du code du travail, de se procurer un emploi.

L'allocation de logement n'est due, au titre de leur résidence principale, qu'aux personnes :

1° payant un minimum de loyer, compte tenu de leurs ressources ; sont assimilées aux loyers les mensualités versées pour accéder à la propriété de l'habitation ;

2° habitant un logement répondant à des conditions minima de salubrité et de peuplement ; si un logement devient surpeuplé par suite de naissance ou de prise en charge d'un enfant ou d'un proche parent, les allocations sont maintenues pendant une durée déterminée (art. D. 542-2 : 4 ans).

Les taux de l'allocation sont déterminés compte tenu du nombre des personnes à charge vivant au foyer et du pourcentage des ressources affecté au loyer.

Selon le relevé de décisions de la Conférence de la famille du 7 juillet dernier, la mesure concernant l'allocation de logement familiale et l'aide personnalisée au logement devrait concerner 175.000 familles et coûtera 800 millions de francs en année pleine. Compte tenu de sa montée en charge progressive, elle se traduira par une dépense supplémentaire de 220 millions de francs pour la branche famille en 2000 (cf. annexe C du projet de loi).

Le recul de 20 à 21 ans de l'âge limite pour le versement du complément familial concernera 60.000 familles et coûtera 700 millions de francs à la branche famille en année pleine. Cette mesure se traduira en 2000 par une dépense supplémentaire de 330 millions de francs (cf. annexe C du projet de loi).

Le paragraphe III abroge l'article 22 de la loi du 25 juillet 1994 relative à la famille.

Le paragraphe IV vise à maintenir dans les départements d'outre-mer le régime aujourd'hui applicable de l'allocation de logement familial (ALF), régime plus favorable qu'en métropole.

L'article 19 de la loi n° 95-97 du 1 er février 1995 étendant dans les territoires d'outre-mer certaines dispositions du code de la route et portant dispositions diverses relatives à l'outre-mer a modifié l'article 22 de la loi relative à la famille afin d'y insérer un III prévoyant un relèvement à compter du 1 er avril 1995, dans les départements d'outre mer, de l'âge limite d'ouverture du droit à l'allocation de logement familial. Cette allocation est donc versée dans les DOM jusqu'à l'âge de 22 ans, sous réserve que l'enfant poursuive des études, soit placé en apprentissage ou en stage de formation professionnelle et que sa rémunération ne dépasse pas 55 % du SMIC.

Le IV du présent article permet de maintenir ce régime spécifique pour les enfants âgés de 21 à 22 ans ; de 20 à 21 ans, ces derniers relèveront du droit commun applicable en métropole.

Cet article a été adopté sans modification par l'Assemblée nationale.

II - La position de votre commission

Votre commission accueille de manière favorable les I, II et IV de cet article relatifs au relèvement de 20 à 21 ans de l'âge limite d'ouverture du droit au complément familial et aux aides au logement. Ces prestations étant placées sous condition de ressources, elles ne bénéficient cependant qu'à un nombre limité de personnes.

Ces dispositions s'inscrivent dans la droite ligne des objectifs définis par l'article 22 de la loi famille de 1994. Pour autant, ce relèvement ne constitue, pour votre commission, qu'une étape du processus prévu par ledit article.

L'article 22 expirera au 31 décembre 1999 ; toutefois, les objectifs qu'il avait définis en 1994 -relèvement progressif jusqu'à 22 ans de l'âge limite d'ouverture du droit à l'ensemble des prestations familiales- restent, pour votre commission tout à fait pertinents.

Or, telle ne semble pas être l'analyse du Gouvernement qui a clairement écarté, par la voix du Premier ministre, lors de la Conférence de la famille du 7 juillet dernier, tout " prolongement indéfini des allocations familiales ".

Soucieux de faire disparaître cet article dont la portée symbolique est évidente, le Gouvernement propose de l'abroger alors même qu'il cesse d'être applicable.

Votre commission, qui est attachée au maintien de cet article, ne peut accepter cette logique. Elle vous propose par conséquent d'adopter un amendement supprimant l'abrogation de l'article 22 et prolongeant l'application de cet article de trois années, soit jusqu'au 31 décembre 2002.

Votre commission vous propose d'adopter cet article ainsi amendé.

Art. 9
Garantie de ressources pour la branche famille

Objet : Cet article institue une garantie de ressources pour la branche famille.

I - Le dispositif proposé


Selon l'exposé des motifs du projet de loi, cet article " a pour objet de donner une meilleure lisibilité aux ressources de la branche famille, en instituant une garantie de ressources au regard de la richesse nationale ". Il fait partie des mesures annoncées par le Gouvernement lors de la Conférence de la famille du 7 juillet 1999.

Cet article reprend une idée ancienne consistant à assurer à la branche famille une certaine pérennité de ses ressources et qui a trouvé sa traduction législative dans l'article 34 de la loi n° 94-629 du 25 juillet 1994 relative à la famille.

L'article 34 de la loi famille dispose que " les ressources de la Caisse nationale des allocations familiales sont au moins égales chaque année, pour la période du 1 er janvier 1994 au 31 décembre 1998, au montant qu'elles auraient atteint à la fin de l'année considérée en cas de maintien des dispositions législatives et réglementaires applicables le 1 er janvier 1993 aux taux, à l'assiette et au champ d'application des cotisations et contributions énumérées à l'article L. 241-6 du code de la sécurité sociale.

" S'il est constaté par la Commission des comptes de la sécurité sociale que les ressources de cette caisse sont inférieures au titre d'une année civile au montant déterminé dans les conditions définies à l'alinéa précédent, un versement de l'Etat équivalant à cette différence intervient selon des modalités prévues par la loi de finances établie au titre de l'année suivante ".


Cet article entendait mettre fin à des pratiques récurrentes qui avaient abouti à des baisses ou à des exonérations de cotisations non compensées, obérant d'autant les ressources de la branche famille.

Cette garantie de ressources n'a cependant jamais joué, les différentes parties concernées (CNAF, ACOSS, Direction de la sécurité sociale, Ministère de l'agriculture, Direction du Budget) ne parvenant pas à s'accorder sur l'évaluation des pertes ou des gains de recettes enregistrés par la branche famille.

En effet, l'article 34 de la loi famille a fait l'objet de deux interprétations inconciliables. D'une part, celle de la Direction du Budget qui considère qu'il faut retenir une appréciation globale des ressources de la Caisse nationale d'allocations familiales et qui estime que cette disposition ne s'applique pas seulement aux mesures pénalisantes. D'autre part, celle de la Caisse nationale d'allocations familiales qui considère qu'il faut retenir chaque catégorie de ressources séparément et souligne que la double garantie (art. 34 de la loi famille et art. L. 131-7 du code de la sécurité sociale) témoigne du souhait du législateur de prendre en compte les seules réductions de ressources, année après année.

Une analyse juridique sur ce point a d'ailleurs été demandée à un membre du Conseil d'Etat par le secrétaire général de la Commission des comptes de la sécurité sociale.

Le secrétaire général de la Commission des comptes a organisé une ultime réunion le 7 septembre 1999 avec les différentes parties concernées afin d'établir un constat sur la mise en oeuvre des dispositions de l'article 34.

Au total sur la période, les pertes de ressources de la branche famille résultant de mesures nouvelles ont été évaluées à 1,285 milliard de francs. Elles se décomposent ainsi :

(en millions de francs)

 

Mesures du champ de compétence

 

Année

des régimes agricoles

de l'ACOSS

TOTAL

1994

 

0,3

0,3

1995

217

5,2

222,2

1996

325

9,5

334,5

1997

335

16

351

1998

344

33

377

1994-1998

1.221

64

1.285

Dans son avis rendu le 7 septembre, la mission juridique effectuée par un membre du Conseil d'Etat a validé la position de la direction du budget qui consiste à retenir une appréciation globale des ressources de la CNAF au lieu de prendre en compte les seules réductions de ressources année après année.

Prenant acte de cet avis, le secrétaire général de la Commission des comptes de la sécurité sociale a considéré que l'Etat n'avait pas de versement à faire à la CNAF au titre de la garantie de ressources. En effet, selon le rapport de la Commission des comptes de la sécurité sociale 22( * ) " plusieurs mesures prises depuis 1997 ont eu pour effet d'augmenter les ressources de la CNAF, notamment l'extension d'assiette de la CSG intervenue au 1er janvier 1997 et celle du prélèvement social sur les revenus du capital au 1er janvier 1998, ainsi que le relèvement du taux des cotisations d'allocations familiales de l'Etat employeur en 1997. Ces mesures contrebalancent largement les réductions de ressources de la CNAF enregistrées par ailleurs. "

Le rapport de la Commission des comptes ajoute : " Cette conclusion a recueilli l'accord de tous les participants ".

Il semble que l'accord donné par la CNAF à cette conclusion résulte plus de la lassitude que de la conviction.

Le présent article prévoit pour sa part que la Caisse nationale des allocations familiales (CNAF) bénéficie d'une garantie de ressources pour une période de cinq années courant du 1 er janvier 1998 au 31 décembre 2002.

Le deuxième alinéa précise que les ressources de la CNAF perçues au titre de l'année 2002 ne seront pas inférieures aux ressources de cette caisse pour l'année 1997 revalorisées, déduction faite de la subvention versée par l'Etat au titre de la majoration de l'allocation de rentrée scolaire (MARS) et d'un montant équivalent aux ressources transférées en 2000 à la CNAMTS en vertu de l'article 10 de la loi n° 99-641 du 27 juillet 1999 portant création d'une couverture maladie universelle.

Dans le cas contraire, constaté par la Commission des comptes de la sécurité sociale à l'issue de la période, un versement à la CNAF permet, dans des conditions prévues par la loi de financement de la sécurité sociale, de combler la différence observée.

La revalorisation évoquée au deuxième alinéa de l'article est égale à l'évolution du produit intérieur brut en valeur aux prix courants sur l'ensemble de la période 1998-2002, mentionnée dans le rapport sur les comptes de la Nation.

L'Assemblée nationale a adopté cet article sans modification.

II - La position de votre commission

Même si l'objectif se veut probablement identique, le dispositif proposé par le Gouvernement est très différent de celui institué en 1994 :

•  l'approche est globale : seul est visé le niveau absolu des ressources de la branche alors que l'article 34 de la loi famille de 1994 prévoyait que ces ressources seraient comparées au montant qu'elles auraient atteint en cas de maintien des dispositions législatives et réglementaires applicables le 1 er janvier 1993 aux taux, à l'assiette et au champ d'application des cotisations et contributions énumérées à l'article L. 241-6 du code de la sécurité sociale ;

•  le constat est désormais dressé en fin de période alors que l'article 34 de la loi famille de 1994 prévoyait une évaluation " chaque année " : les ressources peuvent donc éventuellement baisser en cours de période ;

•  les modalités d'application restent très floues puisqu'il est fait mention d'un versement à la CNAF pour compenser une éventuelle perte de ressources, versement dont on ignore la provenance : s'agit-il d'un versement de l'Etat, comme c'était le cas dans le dispositif de 1994 ? Pourquoi alors ne pas le dire ? S'agit-il d'un versement d'une autre branche de la sécurité sociale, voire de l'ACOSS ?

Votre commission est naturellement favorable à l'institution d'une garantie de ressources pour la branche famille -elle avait d'ailleurs apporté son entier soutien à la rédaction retenue en 1994 pour une telle garantie de ressources.

Toutefois, elle ne peut que s'étonner que le Gouvernement propose un nouveau dispositif de garantie de ressources alors même qu'il s'est refusé à appliquer la garantie de ressources existante.

Elle remarque en outre que l'année 1997 qui a été choisie par le Gouvernement comme année de référence est une année peu favorable pour les ressources de la branche. Elle s'interroge sur les raisons du choix de l'année 1997 alors que les comptes définitifs de 1998 sont aujourd'hui disponibles et qu'il aurait donc été possible de faire porter cette garantie sur les années 1999-2003.

Elle émet des doutes sur l'effectivité du dispositif proposé dans la mesure où la provenance du versement compensateur n'est pas mentionnée.

Enfin, elle se demande quelle peut être l'utilité réelle d'une garantie de ressources si l'on multiplie parallèlement les ponctions sur la branche sous la forme de dépenses nouvelles, telles que la prise en charge de la majoration de l'allocation de rentrée scolaire.

Votre commission exprime par conséquent sa crainte que cette nouvelle garantie de ressources ne soit très rapidement vidée de toute portée. Le Gouvernement attache d'ailleurs si peu d'importance à cette disposition qu'il n'a pas cru bon de la modifier par coordination avec le vote, par l'Assemblée nationale, de la diminution des ressources affectées à la branche au titre du prélèvement social de 2 % sur les revenus du patrimoine.

Votre commission vous propose par conséquent d'adopter trois amendements permettant de conférer à cette garantie de ressources une plus grande efficacité. Les deux premiers amendements décalent d'une année cette garantie de ressources afin qu'elle couvre la période 1999-2003 et non 1998-2002 et qu'elle prenne comme base de référence l'année 1998 et non l'année 1997. Mme Martine Aubry, ministre de l'emploi et de la solidarité, ayant affirmé devant votre commission, le 21 octobre dernier, que l'Etat serait garant des ressources de la CNAF, le troisième amendement précise en outre que le versement compensateur provient, comme c'était le cas dans le précédent dispositif, de l'Etat.

Votre commission vous propose d'adopter cet article ainsi amendé.

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