III. UN DISPOSITIF ENCADRÉ

La défiscalisation n'a pas toujours bonne réputation. Depuis l'entrée en vigueur de la « loi Pons » en 1986, elle jouit d'une image sulfureuse, alimentée par la mise à jour de cas d'abus rendus possibles par l'imprécision de la législation et des règles de contrôle 11 ( * ) .

Dans ce contexte, les nombreuses adaptations du régime législatif intervenues au cours des quinze dernières années ont été autant destinées à confirmer le principe d'une aide fiscale à l'investissement outre-mer qu'à s'assurer que l'avantage fiscal accordé était véritablement lié à des investissements profitables pour les économies de l'outre-mer.

L'évolution depuis 1986 du dispositif législatif de défiscalisation outre-mer est retracée en annexe du présent rapport.

A. UN AVANTAGE FISCAL SOUMIS AU CONTRÔLE ADMINISTRATIF DU MINISTRE DU BUDGET

1. De l'autorisation préalable à l'agrément

Le dispositif d'aide fiscale à l'investissement comporte, depuis sa première mouture issue des dispositions de la loi de finances rectificative pour 1986 du 11 juillet 1986 (« loi Pons ») un mécanisme de contrôle administratif des avantages fiscaux accordés. Dans ce texte, l'avantage était accordé de plein droit aux investissements dont le montant était inférieur à 4,6 millions d'euros. Au delà, les projets d'investissement devaient être préalablement portés à la connaissance du ministre du budget qui pouvait s'y opposer, par décision motivée, dans les trois mois suivant de dépôt de la demande. A défaut de réponse, l'agrément était réputé accordé.

La loi de finances pour 1992 a souhaité renforcer le contrôle administratif des avantages fiscaux accordés dans certains secteurs dits « sensibles » en créant la procédure de l' agrément . En réalité, le renforcement du contrôle s'est moins traduit par la mise en oeuvre de nouvelles modalités d'instruction des demandes (même si, pour l'agrément, la formalisation de la décision finale du ministre obéit à des règles plus strictes) que par l'abaissement du montant à partir duquel la demande était soumise au contrôle administratif. La création de la procédure d'agrément a également été l'occasion d'inscrire dans la loi certaines conditions d'attributions de l'agrément issues de la doctrine administrative 12 ( * ) .

Dans les secteurs dits « sensibles », les avantages fiscaux étaient soumis à un contrôle administratif au premier franc (sauf pour les projets d'investissements d'un montant inférieur à 152.449 euros réalisés par des entreprises exerçant leur activité outre-mer depuis plus de deux ans, qui étaient dispensées d'agrément). Dans les autres secteurs d'activité, dits « non sensibles » , la procédure d'autorisation préalable était maintenue.

La distinction entre secteurs « sensibles » et « non sensibles » perdure jusqu'à aujourd'hui. Aucun critère ne détermine l'inscription d'un secteur d'activité dans l'une ou l'autre catégorie, sinon la volonté du législateur de soumettre certains investissements à un contrôle plus ou moins étroit. Au fil des modifications législatives, la liste des secteurs « sensibles » à tendance à s'allonger . Depuis 1992, l'ensemble des nouveaux secteurs d'activité éligibles à la défiscalisation a été jugé « sensible », tandis que le secteur de la pêche maritime est devenu « sensible » à partir de 1998.

Liste des secteurs éligibles depuis 1995

1995 13 ( * )

1996 14 ( * )

1998

1999

2001

Secteurs sensibles

Construction d'hôtels et de résidences touristiques, navigation de plaisance, transports, diffusion et production audiovisuelle et cinématographique, investissements nécessaires à l'exploitation d'un SPLIC concédé.

Construction d'hôtels et de résidences touristique, navigation de plaisance, transports, diffusion et production audiovisuelle et cinématographique, investissements nécessaires à l'exploitation d'un SPLIC concédé ou affermé.

Construction d'hôtels et de résidences touristique ou parahôtelière, navigation de plaisance, transports, diffusion et production audiovisuelle et cinématographique, investissements nécessaires à l'exploitation d'un SPLIC concédé ou affermé, la pêche à compter du 01/01/1998.

Construction d'hôtels et de résidences touristique ou parahôtelière, navigation de plaisance, transports, diffusion et production audiovisuelle et cinématographique, investissements nécessaires à l'exploitation d'un SPLIC concédé ou affermé, la pêche.

Construction d'hôtels et de résidences touristique ou parahôtelière, navigation de plaisance, transports, diffusion et production audiovisuelle et cinématographique, investissements nécessaires à l'exploitation d'un SPLIC concédé ou affermé, la pêche, services informatiques, rénovation d'hôtel ou de résidence à vocation touristique ou parahôtelière.

Secteurs non sensibles

Industrie, pêche, énergies nouvelles, agriculture, bâtiment et travaux publics, artisanat, maintenance au profit d'activités industrielles, tourisme à l'exclusion de la construction de résidence à vocation touristique ou parahôtelière et de la navigation de plaisance.

Industrie, pêche jusqu'au 31/12/1997 , énergies nouvelles, agriculture, bâtiment et travaux publics, artisanat, maintenance au profit d'activités industrielles, tourisme à l'exclusion de la construction de résidence à vocation touristique ou parahôtelière et de la navigation de plaisance, acquisition ou construction de logements dits « intermédiaires » par des entreprises soumises à l'impôt sur les sociétés.

Industrie, énergies nouvelles, agriculture, bâtiment et travaux publics, artisanat, maintenance au profit d'activités industrielles, tourisme à l'exclusion de la construction de résidence à vocation touristique ou parahôtelière et de la navigation de plaisance, acquisition ou construction de logements dits « intermédiaires » par des entreprises soumises à l'impôt sur les sociétés.

Industrie, énergies nouvelles, agriculture, bâtiment et travaux publics, artisanat, maintenance au profit d'activités industrielles, tourisme à l'exclusion de la construction de résidence à vocation touristique ou parahôtelière et de la navigation de plaisance, acquisition ou construction de logements dits « intermédiaires » par des entreprises soumises à l'impôt sur les sociétés.

Industrie, énergies nouvelles, agriculture, bâtiment et travaux publics, artisanat, maintenance au profit de l'ensemble des activités éligibles , tourisme à l'exclusion de la construction ou rénovation de résidence à vocation touristique ou parahôtelière et de la navigation de plaisance, acquisition ou construction de logements dits « intermédiaires » par des entreprises soumises à l'impôt sur les sociétés.

Depuis l'entrée en vigueur de la loi de finances pour 1999, pour les dispositifs de défiscalisation en faveur des entreprises redevables de l'impôt sur le revenu et de l'impôt sur les sociétés exerçant leur activité dans un secteur éligible, la procédure d'autorisation préalable est supprimée et celle de l'agrément est étendue aux secteurs « non sensibles ».

2. L'évolution des seuils du contrôle administratif

Depuis 1986, la tendance est au renforcement du champ du contrôle administratif sur les investissements bénéficiant de la défiscalisation à travers l'abaissement des seuils au delà desquels l'autorisation du ministre du budget est nécessaire pour l'octroi de l'avantage fiscal.

Pour les secteurs « sensibles », le droit n'a pas évolué depuis la création de l'agrément en 1992. l'agrément est exigé au premier franc , sauf pour les projets de moins de 150.000 euros réalisés par des entreprises implantées outre-mer depuis au moins deux ans.

Pour les secteurs « non sensibles », le seuil de l'autorisation préalable est resté jusqu'en 1998 au niveau de 4,6 millions d'euros fixé en 1986. Cependant, entre 1996 et 1998, le champ du contrôle administratif sur les investissements réalisés outre-mer dans les secteurs « non sensibles » a connu de manière « accidentelle » une extension sans précédent , du moins lorsque ces investissements étaient réalisés dans le cadre du dispositif relatif aux investissements pour lesquels les bénéficiaires de l'avantage fiscal sont contribuables de l'impôt sur le revenu :

Lorsque l'article 72 de la loi de finances pour 1996 a modifié les règles de détermination du revenu net global imposable à l'impôt sur le revenu en interdisant l'imputation sur les autres revenus des déficits provenant des activités relevant de la catégorie des bénéficies industriels et commerciaux lorsque ces activités n'étaient pas exercées à titre « professionnel », cette possibilité a été maintenue pour l'outre-mer.

La possibilité d'imputer les déficits était cependant subordonnée à l'obtention d'un agrément au premier franc pour l'ensemble des secteurs d'activité. Par conséquent, la quasi totalité des investissements dans les secteurs « non sensibles » portés par des structures transparentes de type SNC, qui échappaient auparavant au contrôle administratif car leur montant était inférieur au seuil de 4,6 millions d'euros, est entré dans le champ de l'agrément.

La loi de finances pour 1998 a supprimé la possibilité d'imputer les déficits provenant d'activités exercées à titre « non professionnel ». Le législateur a alors souhaité que les investissements réalisés dans les secteurs non sensibles qui étaient entrés par ce biais dans le champ de l'agrément n'en ressortent pas tous. Pour ce faire, le seuil de l'autorisation préalable a été abaissé de 4,6 millions d'euros à 1,525 million d'euros. Cette réduction du champ de l'agrément est qualifiée par le rapport du groupe de travail interministériel de 1998 de « recul » du point de vue de « l'appréhension du dispositif ».

La loi de finances pour 1999 a encore renforcé le contrôle administratif sur les investissements réalisés dans les secteurs « non sensibles ». La suppression de la procédure de l'autorisation préalable à laquelle elle a procédé et la généralisation celle de l'agrément se sont accompagné d'une nouvelle réduction du seuil.

Depuis 1999, pour les secteurs « non sensibles », le seuil est différent selon que le bénéficiaire de l'avantage fiscal est un investisseur « professionnel » et un investisseur non professionnel 15 ( * ) :

- lorsque l'investisseur participe directement à l'exploitation du bien faisant l'objet de l'investissement, l'agrément est requis pour les investissements de plus de 760.000 euros ;

- lorsque l'investisseur ne participe pas directement à l'exploitation du bien et se contente d'acheter des parts dans une structure transparente qui achète le bien et le met à la disposition de l'entrepreneur local en contrepartie d'un loyer, l'agrément est requis pour les investissements de plus de 300.000 euros.

Ces seuils sont fixés par les dispositions de l'article 217 undecies du code général des impôts relatif à la déduction du bénéfice imposable par les contribuables de l'impôt sur les sociétés. Ils s'appliquent également aux investissements réalisés dans le cadre des dispositions de l'article 199 undecies B du code général des impôts, relatif à la réduction d'impôt sur le revenu accordée en cas d'investissements dans l'un des secteurs éligibles.

Le contrôle administratif des investissements réalisés dans le secteur du logement et des souscriptions au capital de sociétés

Les investissements dans le secteur logement (acquisition ou construction de logements neufs) réalisés dans les conditions prévues à l'article 199 undecies A du code général des impôts par des personnes physiques ou des sociétés immobilières redevables de l'impôt sur le revenu ne sont soumis à aucun dispositif de contrôle administratif. En revanche, les mêmes investissements, lorsqu'ils sont réalisés par des redevables de l'impôt sur les sociétés, sont soumis à agrément lorsque leur montant excède 760.000 euros.

Pour les sociétés qui ouvrent leur capital par souscription de parts ou d'actions (sociétés immobilières, sociétés de développement régional ou les sociétés effectuant dans les douze mois de la souscription des investissements dans les secteurs éligibles), il est nécessaire de distinguer les règles applicables à l'entreprise qui ouvre son capital et les règles applicables à l'investisseur qui souscrit des actions ou des parts de cette entreprise :

- si l'entreprise qui ouvre son capital est redevable de l'impôt sur le revenu , l'article 199 undecies A du code général des impôts prévoit qu'une autorisation préalable du ministre du budget est nécessaire si le montant de la souscription est supérieur à 4,6 millions d'euros. Faute de cette autorisation, les investisseurs ne peuvent pas bénéficier de l'avantage fiscal.

Si l'entreprise qui ouvre son capital est redevable de l'impôt sur les sociétés , elle n'a pas besoin de solliciter l'autorisation ou l'agrément du ministre du budget pour que ses investisseurs puissent bénéficier de l'avantage fiscal ;

- si l'investisseur dans l'une de ces entreprises (qu'elle soit redevable de l'impôt sur le revenu ou de l'impôt sur les sociétés) est redevable de l'impôt sur le revenu , il bénéficie de l'avantage fiscal sans agrément ni autorisation préalable, quel que soit le montant de sa souscription.

Si l'investisseur dans l'une de ces entreprises (qu'elle soit redevable de l'impôt sur le revenu ou de l'impôt sur les sociétés) est redevable de l'impôt sur les sociétés , l'article 217 undecies du code général des impôts prévoit que son avantage fiscal est subordonné à l'agrément du ministre du budget lorsque sa souscription est supérieure à 760.000 euros.

Evolution depuis 1995 des seuils déclenchant l'obligation de recueillir un agrément

Pour les secteurs sensibles : l'agrément est obligatoire dès le premier franc sauf pour des investissements d'un montant inférieur à 1 MF (152 449 €) pour une activité réalisée en direct et exercée depuis au moins deux ans.

Pour les secteurs non sensibles :

1993 à 1996

1996 à 1997

1997 à 1998

1999

2001

238 bis HA, HC, 46 quaterdecies à 46 quaterdecies I

163 tervicies, 91 sexies à 91 decies de l'annexe II

217 undecices et duodecies, 140 quater à 140 terdecies de l'annexe II

Investissements réalisés du 01/07/93 au 31/03/96

Investissements réalisés du 01/04/96 au 14/09/97

Investissements réalisés du 15/09/97 au 31/12/98

Industrie, pêche, énergies nouvelles, agriculture, BTP, artisanat, maintenance au profit d'activités industrielles, tourisme à l'exclusion de la construction de résidence à vocation touristique ou parahôtelière et de la navigation de plaisance

Industrie, pêche, énergies nouvelles, agriculture, BTP, artisanat, maintenance au profit d'activités industrielles, tourisme à l'exclusion de la construction de résidence à vocation touristique ou parahôtelière et de la navigation de plaisance, acquisition ou construction de logements dits « intermédiaires » par des entreprises soumises à l'impôt sur les sociétés

Industrie, pêche jusqu'au 31/12/97, tourisme à l'exclusion de la construction de résidence à vocation touristique ou parahôtelière et de la navigation de plaisance, énergies nouvelles, agriculture, BTP, artisanat

Industrie, pêche jusqu'au 31/12/97, tourisme à l'exclusion de la construction de résidence à vocation touristique ou parahôtelière et de la navigation de plaisance, énergies nouvelles, agricultures, BTP artisanat et acquisitions ou construction de logements dits « intermédiaires » par des entreprises soumises à l'impôt sur les sociétés

- si résultats provenant d'exploitations susceptibles de relever des dispositions du 1° bis du I de l'article 156 du CGI : > 300 000 €

- autres : > 760 000 €

- si résultats provenant de sociétés relevant des articles 8, 239 quater et 239 quater C du CGI : > 300 000 €

- autre : > 760 000 €

- si résultats provenant d'exploitations susceptibles de relever des dispositions du 1° bis du I de l'article 156 du CGI : >300 000 €

- autres : > 760 000 €

- si résultats provenant d'exploitations susceptibles de relever des dispositions du 1° bis du I de l'article 156 du CGI : >300 000 €

- autres : > 760 000 €

> 4 600 000 €

> 4 600 000 € pour les investissements réalisés entre le 15/09/97 et le 31/12/97

> 1 525 000 € pour les investissements réalisés à compter du 01/01/98

NB : L'ensemble des seuils a été libellé en euro afin de faciliter l'analyse comparative de leur évolution.

3. Les critères d'attribution de l'agrément

Les évolutions législatives intervenues depuis l'entrée en vigueur de la loi de finances rectificative pour 1986 du 11 juillet 1986 tendent à une toujours plus grande précision dans la loi des conditions à remplir pour bénéficier d'un agrément.

Dans le dispositif issu de la loi de finances rectificative pour 1986, la marge de manoeuvre du ministre du budget pour accorder ou refuser un agrément était totale, même si sa décision devait être motivée.

Avec la création en 1992 de la procédure de l'agrément, des conditions à remplir pour pouvoir bénéficier de l'agrément ont pour la première fois été introduites dans la loi. Elles s'inspiraient de la méthodologie retenue par le ministère de l'économie, des finances et de l'industrie pour instruire les dossiers de demande d'autorisation préalable. Ces conditions n'ont cessé d'être précisées jusqu'à aujourd'hui et figurent à l'article 217 undecies du code général des impôts. Le tableau ci-dessous retrace leur évolution depuis 1995 :

1996-14 septembre 1997

15 septembre 1997-2000

Depuis 2001

- intérêt économique ;

- intégration dans la politique d'aménagement du territoire et de l'environnement ;

- garantie de la protection des investisseurs et des tiers.

- intérêt économique ;

- intégration dans la politique d'aménagement du territoire et de l'environnement ;

- garantie de la protection des investisseurs et des tiers ;

- maintien ou création d'emploi ;

- intérêt économique ;

- intégration dans la politique d'aménagement du territoire et de l'environnement ;

- garantie de la protection des investisseurs et des tiers.

- si l'un des buts principaux est le maintien ou création d'emploi ;

- accompagner la demande d'agrément de données chiffrées en matière d'emplois.

La loi prévoit que, pour examiner la conformité à ces conditions des demandes d'agrément, le ministre du budget sollicite l' avis du ministre chargé de l'outre-mer .

4. L'agrément et la jurisprudence du Conseil constitutionnel

Dans sa décision sur la loi de finances pour 1988 (n° 87-237 DC du 30 décembre 1987), le Conseil constitutionnel a fixé les limites du champ de l'agrément ministériel : « à défaut d'autres critères fixés par la loi, l'exigence d'un agrément n'a pas pour conséquence de conférer à l'autorité ministérielle le pouvoir, qui n'appartient qu'à la loi en application de l'article 34 de la Constitution, de déterminer le champ d'application d'un avantage fiscal ».

Il a jugé conforme à la Constitution un dispositif dans lequel « l'exigence d'un agrément confère seulement au ministre chargé du budget le pouvoir de s'assurer, conformément à l'objectif poursuivi par le législateur, que l'opération (...) en cause satisfait aux conditions fixées par la loi ».

Selon le Conseil constitutionnel, l'agrément peut s'analyser comme procédure consistant « à charger l'autorité ministérielle de prendre les mesures individuelles nécessaires à l'application de la loi ».

5. Les agréments sont accordés par « programme » et par « exercice »

L'article 217 undecies du code général des impôts, relatif à la déduction du bénéfice imposable à l'impôt sur les sociétés des investissements réalisés dans les secteurs éligibles, prévoit que « les investissements (...) dont le montant total par programme et par exercice est supérieur à 760.000 euros ne peuvent ouvrir droit à déduction que s'ils ont reçu un agrément préalable du ministre chargé du budget ». La même formule est utilisée à l'article 199 undecies B du code général des impôts pour la réduction d'impôt accordée aux entreprises qui investissent dans les secteurs éligibles.

Afin d'interpréter le sens de cette formulation, le ministère de l'économie et des finances a apporté à votre rapporteur les précisions suivantes :

« L'exercice est la période qui s'écoule entre deux arrêtés de comptes d'une entreprise. La durée normale d'un exercice est de 12 mois.

Un programme d'investissements s'entend des acquisitions de biens simultanées ou successives sur un ou plusieurs exercices, sous réserve, dans cette seconde hypothèse, que les investissements aient une finalité commune (acquisition de plusieurs navires de pêche, construction d'une usine et des matériels destinés à l'équiper).

Le seuil de l'agrément doit s'apprécier, en premier lieu, sur l'exercice : pour déterminer si le programme d'investissements de l'entreprise requiert un agrément, on prend en compte l'ensemble des investissements réalisés par l'entreprise au cours d'un même exercice, quelle que soit la nature de ces investissements.

Cependant, face à un programme d'investissements pluriannuel, on prend en compte le montant de ce programme et l'agrément est requis, pour le tout, si le seuil de l'agrément est, au total, dépassé même si le montant des investissements réalisés sur chacun des exercices est inférieur à ce seuil. »

L'avantage fiscal est accordé aux entreprises qui, au cours d'un exercice, réalisent un investissement ou un programme d'investissement et qui ont obtenu un agrément. Il convient, pour déterminer les entreprises auxquelles est accordé l'avantage fiscal, de distinguer les cas de défiscalisation « en direct » des cas de défiscalisation « externalisée » dans le cadre de montages locatifs :

- lorsque la défiscalisation est réalisée « en direct », l'agrément est demandé par l'entreprise ultramarine pour l'ensemble des investissements qu'elle réalise au cours de l'exercice et qu'elle autofinance ou qu'elle finance par emprunt . Si le montant total de ces investissements est supérieur au seuil de l'agrément, l'agrément est nécessaire. Si le montant des investissements réalisé au cours de l'exercice est inférieur au seuil, mais s'inscrit dans le cadre d'un programme cohérent pluriannuel dont le montant est supérieur au seuil, l'agrément est également nécessaire ;

- lorsque l'investissement est réalisé par une structure transparente de type SNC , qui loue le bien à l'exploitant local pendant cinq ans avant que celui-ci n'en devienne propriétaire, l'interprétation du dispositif est moins aisée à formuler. Il ne fait aucun doute que, la SNC étant l'entreprise qui réalise l'investissement (« pour le compte » d'une entreprise locale), c'est à son niveau que doivent s'apprécier les notions de « programme » et d' « exercice ».

Les structures externalisées doivent demander un agrément lorsqu'elles réalisent au cours d'un exercice des investissements pour un montant supérieur au seuil de l'agrément. Mais la loi ne précise pas, au sein des investissements réalisés par une SNC, si certains sont exemptés de la procédure d'agrément. Par conséquent, dès lors qu'une SNC réalise un montant d'investissement supérieur au seuil de l'agrément, tous les investissements qu'elle finance, quel que soit leur montant, nécessitent un agrément. Ainsi, des projets dont la soumission à l'agrément n'aurait pas été jugée utile s'ils avaient été réalisés « en direct » par les entreprises ultramarines doivent tous être agréés dès lors que leur financement est assuré par une SNC.

L'agrément, conçu au départ comme la subordination d'un avantage fiscal à l'analyse de l'intérêt économique de l'investissement, est appliqué en fonction d'une logique qui relève plus du contrôle fiscal que de l'analyse économique.

* 11 Certains « excès » passés de la défiscalisation sont décrits avec précision dans le rapport de notre collègue député Didier Migaud, « Défiscalisation des investissements outre-mer : un instrument maîtrisé au service du développement » (Assemblée nationale, rapport d'information n° 1060, onzième législature, enregistré à la présidence de l'Assemblée nationale le 9 juillet 1998).

* 12 Sur ce point, se reporter au 3 ci-après.

* 13 Le régime applicable en 1995 est issu de l'article 30 de la loi de finances rectificative pour 1993 et l'article 20 de la loi de finances pour 1994.

* 14 De 1996 à 1997 (inclus), l'ensemble des investissements (qu'ils soient réalisés dans un secteur sensible ou non) sont soumis à une procédure d'agrément lorsqu'ils sont réalisés en externalisation, dans un schéma IR.

* 15 La distinction entre les investisseurs professionnels et les investisseurs non professionnels permet, en la présentant schématiquement, de distinguer les investissements réalisés par les entreprises qui vont les exploiter (professionnels) des investissements financés par des structures transparentes pour lesquels l'avantage fiscal bénéficie à des contribuables qui ne participent pas à la gestion de l'entreprise.

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