EXAMEN EN COMMISSION

Réunie le jeudi 30 juin 2005, sous la présidence de M. Jean Arthuis, président, la commission a entendu une communication de Mme Nicole Bricq, rapporteur spécial , sur le Commissariat général du Plan

Mme Nicole Bricq, rapporteur spécial , a indiqué que le contrôle mené au Commissariat général du Plan au cours des dernières semaines, en application de l'article 57 de la loi organique du 1 er août 2001 relative aux lois de finances (LOLF), n'avait pas tant porté sur l'utilisation précise des crédits alloués à cette institution que sur son utilité même et les résultats de sa mutation.

Elle a rappelé que le Commissariat général du Plan avait connu une évolution majeure au cours des deux dernières années et qu'il s'était recentré sur la prospective. Elle a précisé que, dans ce cadre, le Premier ministre lui avait demandé de porter une attention particulière aux dimensions européenne et territoriale des sujets traités.

Elle a toutefois observé que, dans cette phase de repositionnement, le Plan avait fait l'objet de critiques et que sa rénovation laissait sceptique nombre d'observateurs, dont la commission des finances, qui s'était posé la question du maintien de cette institution.

Mme Nicole Bricq, rapporteur spécial , a remarqué qu'ayant demandé à la commission des finances de « faire crédit » au Plan d'une année lors de l'examen du budget 2005, elle avait estimé nécessaire de s'y rendre à plusieurs reprises pour vérifier les avancées promises.

Elle a expliqué qu'afin d'avoir une vision globale de l'institution, elle avait assisté aux réunions de trois groupes de projet, de deux groupes de projet transversaux, du secrétariat des groupes de projet ainsi que du comité d'évaluation.

Elle a relevé que le Commissariat général du Plan comptait aujourd'hui 139 postes budgétaires, dont 67 titulaires et 72 contractuels. Elle a précisé que la parité était globalement respectée au sein des effectifs. Elle a indiqué qu'en sus de ses effectifs propres, le Plan faisait davantage appel à des vacataires et à des étudiants stagiaires. Elle a ainsi noté que les offres de stage à destination des étudiants avaient été relancées en 2003 et que le Plan accueillait en permanence une vingtaine d'étudiants, auxquels il était demandé un retour d'expérience à la fin de leur période de stage.

Elle a observé que le Commissariat général du Plan avait, par ailleurs, davantage recours aux vacataires pour les travaux des groupes de projet et a précisé qu'au total, 119 personnes avaient bénéficié de crédits de vacation depuis 2003. Elle a expliqué que les crédits de vacation (623.724 euros en 2004 et 629.011 euros en 2005) faisaient l'objet d'une négociation entre le chef de projet et la personne concernée, dans la limite de 1.000 euros mensuels pour une personne issue de l'administration et 2.000 euros mensuels pour une personne issue du secteur privé, les étudiants bénéficiant, quant à eux, de gratifications sur la base d'un tiers du SMIC, dans le cadre de conventions écrites entre le Plan et l'université ou la grande école.

Elle a toutefois remarqué que la composition des groupes de projet ne se limitait pas aux permanents du commissariat et aux vacataires. Elle a fait valoir que de nombreux membres des groupes de projet, extérieurs au Plan, ne bénéficiaient d'aucune rémunération, tandis que d'autres pouvaient n'en recevoir que pour une durée très limitée par rapport à l'ensemble des travaux du groupe, par exemple à l'occasion de la remise d'une production écrite.

Elle a indiqué que la composition des groupes était en premier lieu l'affaire des chefs de projet, même si le secrétariat des groupes de projet et le comité d'évaluation pouvaient intervenir pour demander à celui-ci de revoir cette composition. Elle a estimé que, globalement, la composition des groupes de projet faisait l'objet d'une attention particulière, afin qu'ils associent des personnalités d'horizons divers, pluridisciplinaires et mêlant secteur privé et secteur public.

Mme Nicole Bricq, rapporteur spécial , a ensuite décrit le fonctionnement du Commissariat général du Plan, en soulignant la volonté de mettre en place une culture d'évaluation de ses travaux.

Elle a indiqué que les groupes de projet, qui constituaient les véritables unités de production, présentaient la caractéristique d'être souples et périssables. Puis elle a distingué deux types de groupes de projet : les groupes de projet « sectoriels » et les groupes de projet transversaux.

Elle a expliqué que les groupes de projet « sectoriels », dont la durée de travail s'étendait en général sur une période de 15 à 18 mois, pouvaient être mis en place par le Plan en fonction de ses souhaits propres ou à la suite d'une commande. Elle a noté que cette dernière formule se développait depuis les premiers résultats de sa réorganisation et pouvait introduire un certain flou dans la définition de la mission du Commissariat.

Elle a précisé que les chefs de projet détenaient un rôle essentiel dans le fonctionnement des groupes et que leur fonction ne constituait pas un statut juridique ni administratif, mais traduisait une responsabilité à l'égard du management d'une équipe, ainsi que de l'avancement et de la qualité des travaux du groupe. Puis elle a souligné les mécanismes de « fertilisation croisée » mis en place entre les groupes de projet. Elle a estimé que les groupes de projet transversaux présentaient des caractéristiques particulières et apparaissaient, à certains égards, comme des « primi inter pares ». Elle a souligné la place très spécifique du groupe Aleph, dans la mesure où la prospective constituait son champ de réflexion et où il apportait une aide méthodologique aux autres groupes.

S'appuyant sur les réunions auxquelles elle avait assisté, Mme Nicole Bricq, rapporteur spécial , a toutefois estimé que différents points devraient être clarifiés à l'avenir.

Elle a tout d'abord noté l'hétérogénéité des méthodes de travail entre les groupes et a estimé qu'il serait important de les harmoniser, d'une part pour asseoir la crédibilité et le « style » du Plan, d'autre part pour disposer d'éléments comparatifs indissociables de l'évaluation. Elle a indiqué, à cet égard, que les chefs de projet de la « deuxième vague » seraient davantage encadrés.

Elle a ensuite observé que la conception de la démarche prospective posait également question. Elle a indiqué avoir constaté des résistances ou des tensions au sein des groupes et a souligné, notamment, les réticences de quelques administrations centrales à accepter certaines pistes de réflexion, voire plus simplement à coopérer lorsque des cellules de réflexion d'un ministère travaillaient sur un thème voisin de celui traité par le groupe de projet. Elle a jugé que le positionnement du Commissariat général du Plan devait, de ce point de vue, être renforcé, qu'un « modus vivendi » devait être trouvé avec les administrations de l'Etat et que la manière de concevoir la démarche prospective devrait, à l'avenir, être clarifiée. Elle a également souligné la nécessité de mener une réflexion sur le traitement des commandes extérieures, au regard des objectifs propres et de la spécificité de la démarche du Commissariat général du Plan.

Mme Nicole Bricq, rapporteur spécial , a ensuite indiqué que la coordination des groupes de projets s'effectuait au sein du secrétariat des groupes de projet, qui apparaissait comme la « tour de contrôle » des travaux, puis a décrit sa composition, son rôle et son fonctionnement.

Elle a ensuite présenté le comité d'évaluation, instance suprême d'évaluation du travail des groupes de projet, soulignant qu'il comprenait, outre le commissaire et le commissaire adjoint, neuf personnes extérieures au Plan. Après avoir expliqué son mode de fonctionnement, elle a précisé qu'elle avait pu apprécier la qualité des échanges entre les membres du comité d'évaluation et la clarté de leurs recommandations. Elle a toutefois noté que cette culture de l'évaluation pouvait se heurter à certaines résistances, ce qui impliquait de renforcer la culture de management des chefs de projet.

Mme Nicole Bricq, rapporteur spécial , a ensuite remarqué que le Commissariat général du Plan avait diversifié ses types de production afin d'obtenir une diffusion plus large et a présenté les trois types de production: notes, cahiers - qui s'apparentent à des « working papers » - et rapports. Elle a relevé que certains groupes diffusaient leurs notes dans le cadre de revues extérieures, comme le groupe Aleph dans les revues « Futuribles » et « Foresight ».

Elle a indiqué que l'année 2005 avait vu la montée en puissance du niveau des productions du Plan, mais que cette diversification des publications pouvait donner une impression de confusion. A cet égard, elle a jugé qu'un effort particulier de pédagogie devrait être mené pour expliquer clairement la démarche du Plan et le statut des différentes publications, afin d'éviter tout malentendu dans leur utilisation. Elle a précisé qu'un travail en ce sens commençait à être effectué et devait être poursuivi.

En conclusion, Mme Nicole Bricq, rapporteur spécial , a estimé qu'après une période de « flottement », la mutation du Commissariat général du Plan était bien engagée, même si certains points devaient encore être clarifiés, en particulier s'agissant de la démarche prospective elle-même.

Elle a toutefois observé que sa réorientation ne soldait pas les réflexions sur l'organisation de la prospective en France, notamment au sein de l'appareil d'Etat, qui se révélait souvent un piètre stratège dans un monde incertain et dangereux.

Un débat s'est alors instauré.

M. Jean Arthuis, président , a remercié Mme Nicole Bricq pour la qualité de son intervention, puis s'est déclaré sceptique sur les suites données aux travaux menés par le Commissariat général du Plan. Il a estimé qu'il serait intéressant de disposer d'éléments permettant de comparer l'impact des études de prospective dans d'autres pays.

M. Maurice Blin a remarqué que le Commissariat général du Plan était né dans un contexte particulier et qu'il avait rendu de grands services à la France, mais s'est interrogé sur la pertinence de maintenir, aujourd'hui, un tel outil. Il a estimé qu'il serait intéressant de s'inspirer des expériences étrangères pour comprendre comment certains pays parvenaient à se réformer.

Mme Nicole Bricq, rapporteur spécial , a approuvé l'intérêt manifesté pour les approches comparatives et a estimé que l'Etat français souffrait d'un défaut de pilotage. Elle a relevé les dysfonctionnements des administrations déconcentrées de l'Etat et leur faible réactivité par rapport à celle des collectivités territoriales.

M. Jean-Jacques Jégou , faisant part de certaines réflexions issues de son contrôle sur l'informatisation dans le secteur de la santé, a approuvé les propos de Mme Nicole Bricq et mis en exergue les carences de l'Etat en matière de définition de stratégies d'action.

M. Maurice Blin , s'appuyant notamment sur les travaux qu'il menait dans le domaine de la recherche, a estimé que l'Etat devait évoluer vers un rôle d'accompagnement des initiatives privées, et non constituer un frein à celles-ci.

M. Jean Arthuis, président , a estimé qu'il fallait envisager de remettre en cause l'existence de certaines structures si l'on voulait réellement parvenir à réformer l'Etat.

M. Jean-Claude Frécon et Mme Nicole Bricq, rapporteur spécial , ont indiqué qu'il fallait également soulever le problème de l'utilisation, par l'Etat, de ses outils de pilotage.

La commission a alors, à l'unanimité , donné acte à Mme Nicole Bricq, rapporteur spécial, de sa communication et décidé d'en autoriser la publication sous la forme d'un rapport d'information .

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