III. LES OUTILS DÉVELOPPÉS

Afin de répondre à l'ensemble des questions précédentes, le CEPII a développé un ensemble d'outils, dans une perspective de création de « biens publics ». La base de données tarifaires a été mise à disposition de la profession, et le code du modèle d'équilibre général calculable va être diffusé aux équipes et institutions intéressées, sous réserve d'un fonctionnement en réseau permettant de valider les développements futurs éventuels. La Commission européenne (DG Entreprises et Industrie) a déjà signé la Convention en ce sens, ainsi que l'Organisation des Nations Unies pour l'Afrique.

A. BACI

Les statistiques du commerce international ne permettent des études détaillées et en rapport avec les développements récents de la théorie économique qu'au prix d'un travail fastidieux de traitement de données de sources multiples et hétérogènes. Pour répondre à ces difficultés, le CEPII a développé une base de données sur le commerce international rassemblant et mettant en cohérence différents niveaux d'analyse et nomenclatures, tout en tirant profit de l'information disponible au niveau le plus fin possible.

Il s'agit notamment de proposer une caractérisation des flux commerciaux en termes de types de commerce (commerce univoque : exportation d'un produit sans importation de celui-ci, commerce croisé de produits similaires, commerce croisé de produits différenciés par leur qualité), de gammes de qualité des produits exportés, de niveau technologique et enfin de stades de production (matières premières, biens intermédiaires, composants...). La base ainsi obtenue permet une description des évolutions du commerce mondial plus circonstanciée que les bases disponibles jusqu'ici.

B. MACMAP

Market Access Map (MAcMap) est une base de données développée conjointement par le Centre du Commerce International (ITC, CNUCED-OMC, Genève) et le CEPII. Elle contient une mesure exhaustive des droits de douane appliqués bilatéraux, tenant compte des préférences commerciales et de tous les accords régionaux. Bien que la base MAcMap puisse être utilisée à différents niveaux, le CEPII utilise plus particulièrement la base au niveau des six chiffres du système harmonisé, pour l'année 2001. La base 2004 est en construction, avec l'appui de la Banque mondiale et du consortium GTAP.

Un dérivé important est la base de données cohérente au niveau des six chiffres du système harmonisé, à vocation analytique : MacMap_HS6 (HS, pour Nomenclature Harmonisée à 6 chiffres). Le niveau de 6 chiffres correspond au plus petit dénominateur commun des nomenclatures de commerce international et de données d'échange pour l'ensemble des pays. Les quelque 5 000 produits recensés sont suffisamment fins pour que l'on puisse calculer leur valeur unitaire (dollar par tonne) afin de convertir les droits de douane spécifiques en droits ad valorem (ce qui est nécessaire pour pouvoir ensuite procéder à l'agrégation des niveaux de protection pour les différents produits). Cette base est maintenue par le CEPII.

Pour chaque importateur et chaque produit, on dispose de l'information sur les droits de douane appliqués à chaque exportateur, et pour chaque catégorie d'instrument. L'information sur les quotas tarifaires et les droits anti-dumping est également disponible. On dispose également du droit NPF (pour Nation la Plus Favorisée, MFN en anglais), appliqué à l'ensemble des partenaires de l'OMC ne disposant pas d'un accès préférentiel (appliqué par exemple aux États-Unis dans le cas européen).

A la source, MAcMap est un ensemble de fichiers au niveau des lignes tarifaires qui peut être mobilisé pour différents usages, notamment pour les études pour des clients particuliers et des bases de données interactives en ligne pour les entreprises, réalisées par le CCI. Ces utilisations correspondent à la partie gauche de la Figure 2. Les mêmes données, agrégées au niveau 6 chiffres (5 000 produits) de la nomenclature harmonisée, sont combinées avec les données de commerce international reprises de la base BACI pour construire la base MacMap_HS6. Cette dernière base est destinée à deux usages.

Tout d'abord, le CEPII construit la base MAcMap for GTAP, intégrée par le consortium GTAP dans la base de données internationales du même nom. L'ensemble des équipes de modélisation au niveau international utilisent donc, dans leur version agrégée, les données du CEPII, elles-mêmes issues de la collaboration avec l'ITC à Genève.

La deuxième utilisation consiste à combiner cette information sur les droits appliqués, reflétant le véritable niveau de protection, pertinent pour l'analyse des effets des droits de douane sur les prix, la spécialisation, le commerce et les revenus, avec les données de droits consolidés sur lesquels portent les négociations commerciales. Cette combinaison est désormais systématiquement réalisée au CEPII pour l'analyse des effets de la libéralisation commerciale avec le modèle MIRAGE. Nous en donnerons des exemples plus loin.

Figure 2 : Des données brutes de protection aux bases MAcMap, MAcMap_HS6 et MAcMap for GTAP

Des procédures originales ont été adoptées pour minimiser les biais généralement introduits dans le calcul des niveaux de protection i) par la conversion des unités physiques en valeur et ii) lors du calcul des moyennes agrégeant les données à partir du niveau fin.

Sur le premier point, la question posée (question faisant d'ailleurs l'objet de négociations dans le cadre de l'OMC) est celle du calcul des équivalents ad valorem (en pourcentage de la valeur du produit) des droits spécifiques (exprimés en dollars par quantité importée). Utiliser la valeur unitaire mondiale du produit considéré pose problème dans la mesure où pour un même produit les niveaux de qualité (et donc les valeurs unitaires des exportations) des différents fournisseurs sont très éloignés. A contrario, utiliser une valeur unitaire par fournisseur peut être trompeur dans la mesure où cette valeur unitaire peut elle-même être influencée par le niveau de protection rencontré par l'exportateur sur chaque marché de destination. La solution adoptée par le CEPII consiste a définir, sur la base d'une classification hiérarchique ascendante, des groupes d'exportateurs définissant autant de niveaux de qualité retenus pour calculer les équivalents ad valorem des droits spécifiques.

Concernant le calcul des moyennes, une question évidente de pondération se pose : une pondération des droits de douane appliqués par la valeur des importations pour chacun des produits va surpondérer les produits peu protégés et donc fortement importés, et réciproquement pour les produits fortement protégés. D'où une moyenne tirée vers le bas. Afin d'éviter cette sous-estimation des niveaux de protection, on doit utiliser une pondération s'approchant autant que possible de la structure des échanges qui serait observée en libre échange (et qui n'est naturellement pas observable). La solution retenue consiste ici à utiliser comme pondération non pas la structure d'importations du pays dont on mesure la protection douanière, mais la structure d'importations d'un groupe de pays de référence.

Fin 2004, cette base a été couplée à une information sur les droits consolidés, c'est à dire ceux sur lesquels portent les négociations à l'OMC, afin de pouvoir prendre en compte la marge de consolidation ("binding overhang"), marge définie comme la différence entre les droits de douane consolidés et appliqués.

Les thèmes associés à ce dossier

Page mise à jour le

Partager cette page