3. Les difficultés propres aux remboursements et dégrèvements d'impôts locaux

a. La nature des dégrèvements d'impôts locaux est complexe
Des objectifs en apparence bien identifiés

Comme pour les crédits d'impôts d'État, la plupart des dégrèvements d'impôts locaux s'inscrivent dans une politique publique généralement bien identifiée au moment de la mise en place de l'avantage fiscal :

- en matière de taxe professionnelle, les objectifs des divers dégrèvements sont largement visibles : soutien aux entreprises (plafonnement en fonction de la valeur ajoutée 50 ( * ) ), encouragement aux investissements nouveaux (dispositif DIN), aide à certaines professions (entreprises de transport sanitaire, armateurs 51 ( * ) ) ou à des zones géographiques (crédit en faveur des entreprises implantées dans les zones d'emploi en grande difficulté 52 ( * ) ).

- en matière de taxe d'habitation, les objectifs poursuivis sont sociaux. Depuis le vote du budget 2000 et la refonte des dégrèvements en un seul dispositif de plafonnement en fonction du revenu, l'utilisation de cet impôt comme élément de la politique des revenus apparaît clairement.

- les dégrèvements des taxes foncières, dont le poids est plus limité, relèvent des deux logiques.

Le jeu combiné de ces dégrèvements et des exonérations limite la participation des contribuables aux ressources fiscales de leur collectivité d'appartenance. Dès 2003, le sénateur Fréville dans son rapport d'information sur les dégrèvements d'impôts locaux soulignait « la taxe d'habitation n'est plus un vrai impôt local : la moitié des contribuables ne paie plus ou ne paie que partiellement cet impôt en fonction de leurs revenus, sans que subsiste un quelconque lien avec l'impôt sur l'habitation voté par les collectivités locales ». En matière de taxe professionnelle, le plafonnement en fonction de la valeur ajoutée distend le lien entre implantation territoriale et impôt.

Des effets en réalité plus complexes en raison de la neutralité pour la collectivité territoriale

Les recettes fiscales des collectivités locales sont composées du produit voté et des compensations d'exonérations de fiscalité (cf. annexe 4). Par ailleurs l'État prélève pour son compte sur le contribuable certains frais afin de couvrir les charges qu'il supporte dans le cadre de sa fonction de collecteur des impôts locaux (frais d'assiette et de recouvrement, frais de dégrèvement et de non valeur 53 ( * ) ).

L'État garantit aux collectivités l'intégralité du produit fiscal qu'elles ont voté, qui leur est versé par douzième par l'intermédiaire du compte d'avance (cf. annexe 4). Cela signifie que l'État prend à sa charge non seulement les admissions en non valeur mais aussi les dégrèvements d'impôts.

Ce constat conduit certains observateurs à considérer les dégrèvements législatifs sur impôts locaux comme des subventions. Cette opinion s'est exprimée ouvertement dès 2004 « les dégrèvements législatifs même s'ils sont d'abord des aides individuelles apportées à certains contribuables, constituent également des « subventions implicites » aux collectivités territoriales où résident ces contribuables » 54 ( * ) .

* 50 Dans les documents de présentation du budget 2007, le plafonnement de la taxe professionnelle en fonction de la valeur ajoutée n'a pas été considéré comme une mesure ayant un objectif de politique publique propre, mais comme ressortissant du fonctionnement de l'impôt. Par conséquent, et au contraire du dispositif DIN, elle ne figure pas dans la liste des « dépenses fiscales locales ».

* 51 Dispositif en faveur des entreprises de transport sanitaire : dégrèvement d'office de 50% pour les entreprises exerçant dans les conditions prévues aux articles L.6312-1 du code de la santé publique (article 1647 C bis du CGI) ; dégrèvement d'office en faveur des armateurs mis en place en 1969 (article 1647 C ter du CGI).

* 52 Crédit en faveur des entreprises implantées dans les zones d'emploi en grande difficulté : dispositif mis en place par la loi de finances 2005 (article 1647 C sexies du CGI) sous forme d'un CI de montant forfaitaire par salarié employé depuis au moins un an ; l'arrêté du 7 mars 2006 en réserve le bénéfice à 20 bassins d'emploi.

* 53 Frais pour dégrèvements et non valeurs. L'article 1641-I-1 du CGI prévoit que, en contrepartie des frais de dégrèvements et de non valeurs qu'il prend à charge, l'Etat perçoit 3,6% du montant des taxes suivantes : la taxe professionnelle et les deux taxes foncières, la taxe d'habitation pour certains locaux, la taxe d'enlèvement des ordures ménagères, la taxe de balayage, les taxes pour frais de chambre d'agriculture, pour frais de chambre de commerce et d'industrie et pour frais de chambre de métiers.

* 54 Rapport d'information sur les dégrèvements de taxe d'habitation du sénateur Fréville, n°71 (2003-2004)

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