II. UN CONSTAT SÉVÈRE, LARGEMENT PARTAGÉ, QUI MET EN LUMIÈRE DES AMÉLIORATIONS POSSIBLES

Le constat de la Cour des comptes s'est inscrit au début de l'année 2007, année charnière, caractérisée notamment par la mise en place d'une nouvelle structure, l'Agence nationale pour la cohésion sociale et l'égalité des chances (ACSé), créée par la loi du 31 mars 2006 sur l'égalité des chances.

Cette circonstance a pu avoir pour effet d'amplifier certains des défauts de confusion et de chevauchement des compétences relevés par l'enquête de la Cour des comptes. En effet, la mise en place de l'ACSé a ajouté un intervenant dans une chaîne de distribution de subventions déjà complexe alors que son positionnement par rapport aux institutions existantes , notamment la délégation interministérielle à la Ville (DIV) n'était pas clarifié.

Il n'en reste pas moins que les observations de la Cour des comptes rejoignent les constatations formulées par la mission d'information du Sénat qui précédaient la création de la nouvelle Agence et qu'elles reprennent, pour une large part, les conclusions du rapport public particulier que la Cour des comptes avait publié en 2002 sur la politique de la ville. Dans la plupart des cas, la Cour des comptes constate la persistance des défauts qu'elle avait alors relevés et souvent leur aggravation, en particulier en ce qui concerne les procédures de versement des subventions aux associations, accusées de lenteur excessive, et aussi l' incapacité de l'Etat et des préfets, délégataires des crédits, à contrôler le bon usage de ces subventions et l'efficacité de l'action des bénéficiaires.

Ces défauts ont alimenté le paradoxe de la politique de la ville qui voit les associations de terrain se « plaindre », à juste titre, de crédits insuffisants et trop tardivement attribués alors que ces crédits étaient inscrits dans les lois de finances mais qu'ils n'ont pas été consommés.

A. UNE URGENCE IDENTIFIÉE : AMÉLIORER LE CIRCUIT DES SUBVENTIONS AUX ASSOCIATIONS

Les observations de la Cour des comptes relatives à la gestion des subventions s'appuient sur les expériences d'un panel d'associations rencontrées dans les trois départements représentatifs de la diversité des contextes d'intervention des dispositifs de la politique de la ville sélectionnés dans le cadre de l'enquête menée par la Cour des comptes en accord avec les rapporteurs spéciaux 7 ( * ) : la Somme (Amiens), le Rhône (Vaulx-en-Velin) et la Seine-Saint-Denis (Clichy-sous-Bois et Montfermeil).

1. Instruction des demandes et paiement des subventions

Après avoir constaté l' hétérogénéité des associations du point de vue de leur taille, de leur rapport au quartier et de leur activité, la Cour des comptes souligne le manque de visibilité dont elles disposent sur les moyens que l'Etat peut leur allouer à moyen terme . La pratique de conventions pluriannuelles d'objectifs et de moyens reste marginale, malgré les orientations retenues par la circulaire du Premier ministre en date du 1 er décembre 2000 qui demandait qu'il y soit recouru systématiquement.

Le processus d'instruction des demandes de subvention, qui s'effectue durant le premier semestre de l'exercice en cours, est complexe 8 ( * ) et aboutit à des paiements tardifs aux associations 9 ( * ) .

S'agissant des outils informatiques à disposition des préfectures pour le suivi des demandes de subventions, la Cour des comptes a constaté la non compatibilité des systèmes utilisés respectivement par la DIV et par l'ACSé.

Elle observe également le non respect de la circulaire du 24 décembre 2002, relative aux subventions de l'Etat aux associations, qui impose un contrôle systématique, en raison notamment de la part importante de subventions de faible montant et de l'absence de définition ex ante d'objectifs et d'indicateurs de résultats.

La Cour des comptes formule dans ce domaine plusieurs propositions dont une partie a déjà été mise en application par l'ACSé :

- généraliser la pratique des conventions pluriannuelles d'objectifs et de moyens pour les associations exerçant les actions les plus structurantes en direction des quartiers. On rappellera, à cet égard, que seules 10 % des subventions donnent lieu à des conventions pluriannuelles alors que les CUCS devaient assurer la généralisation de cette procédure qui permet aux associations de disposer de la visibilité nécessaire à leur action ;

- affiner les restitutions sur l'utilisation des crédits d'intervention ;

- mieux utiliser, sans les rendre systématiques, les possibilités de versement d'avances au-delà d'un montant plancher ;

- reconfigurer la procédure d'attribution des subventions en positionnant le travail partenarial de pré-programmation en n-1 ;

- fixer un objectif de versement des subventions avant la fin du premier trimestre de l'exercice en cours ;

- donner aux acteurs de terrain un cadrage pour l'évaluation des associations ;

- faire élaborer, par les préfectures et les trésoreries générales, des plans départementaux de contrôle des associations.

A ces préconisations, votre rapporteur spécial souhaite ajouter celle d'une expérimentation de la délégation des crédits d'intervention aux communes, EPCI ou à des Groupements d'intérêt public (GIP) en échange d'un contrôle renforcé sur l'utilisation de ces dotations qui pourrait être exercé par les délégués de l'Etat à la politique de la ville.

* 7 MM. Philippe Dallier et Roger Karoutchi.

* 8 Ce processus comprend trois phases : l'appel à projets conjoint des partenaires du contrat de ville, l'instruction des projets en comités techniques, la validation des orientations financières en comité de programmation.

* 9 « Les paiements au cours du second semestre de l'exercice en cours sont fréquemment relevés », comme le relève la Cour des comptes.

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