II. UN OBJECTIF À DÉFINIR : REHAUSSER LES PERSPECTIVES DE CROISSANCE

Ainsi qu'il a été vu dans les chapitres concernant la croissance potentielle et l'investissement, la crédibilité des politiques économiques en termes de volonté de croissance est essentielle pour qu'intervienne effectivement une croissance économique plus forte. Le désir et la capacité d'innover et d'investir sur le territoire européen en dépendent.

Dans une économie mondialisée, la confiance dans la zone euro pour appliquer une stratégie de croissance autonome est ainsi déterminante. Or, parallèlement au contrôle de l'inflation, une banque centrale a naturellement vocation à favoriser la croissance, d'une part en facilitant le financement de l'économie, d'autre part en mettant en oeuvre une politique de change qui ne constitue pas un handicap pour l'activité économique.

A. FAVORISER LE FINANCEMENT DE L'ÉCONOMIE

Ainsi que le souligne l'OFCE 100 ( * ) , « l'intensification de la concurrence résultant de la mondialisation contribue à la désinflation mondiale . L'intégration croissante de la Chine au commerce international et la libéralisation progressive des échanges de services devraient favoriser le maintien des pressions à la baisse des prix. De fait, il semble important de ne pas surestimer les risques d'inflation au sein de la zone euro ».

Il est possible que la politique monétaire relativement rigoureuse récemment menée par la BCE (les deux dernières hausses, intervenues en mars et juin 2007, succèdent à six relèvements successifs depuis 2005) n'ait que peu d'effet sur une inflation dont la composante énergétique est forte.

L'ajustement est alors susceptible de peser sur les autres composantes de l'indicateur d'inflation globale, dont l'évolution n'est pourtant pas alarmante (cf. graphique n° 1 ci-dessus) .

Il n'est donc pas illégitime de poser la question de l'opportunité des dernières hausses du taux d'intervention de la BCE, que justifierait la progression de l'agrégat M3, alors même que le lien entre les agrégats monétaires et l'inflation serait ténu 101 ( * ) tandis qu'en revanche, le retard de croissance accumulé par la zone euro nécessiterait plutôt des politiques macroéconomiques volontaristes , propices à l' investissement et à l' élévation de la croissance potentielle .

L'échec relatif de la stratégie de Lisbonne, qui mise largement sur les progrès dans l'éducation et l'innovation ainsi que sur l'accroissement des dépenses de recherche et développement pour accroître le potentiel de croissance, montre que la contradiction entre la politique monétaire de la BCE et les objectifs de croissance à long terme ne sont pas qu'apparents.

Or, aucun texte ne s'opposerait à ce que la politique de la BCE participe au soutien de la croissance, et aucun texte ne fixe à 2 % la limite au-delà de laquelle la stabilité des prix ne serait plus vérifiée .

La relative indifférence de la BCE aux perspectives de croissance serait d'autant plus regrettable que la politique budgétaire des Etats membres de la zone euro est contrainte par les programmes se stabilité. Ainsi, se trouve compromise de facto toute possibilité de « policy mix » , c'est-à-dire d'une combinaison calculée de la politique budgétaire et de la politique monétaire, qu'on voudrait au service de la croissance.

Pour l'avenir, la capacité de la zone euro à appliquer une stratégie de croissance autonome dépend clairement de note capacité à poser les termes de la coordination des politiques économiques .

Alors que l' assainissement budgétaire en Europe progresse, conformément aux voeux de l'autorité monétaire, concourant ainsi à écarter encore plus les tensions inflationnistes, alors que l'essentiel de l'augmentation récente des prix du pétrole et des matières premières est absorbée dans un contexte de modération salariale , ces éléments ne semblent pourtant pas pris en considération dans la conduite de la politique monétaire. Cela n'est pas de nature à améliorer, dans le Monde, la confiance des agents économiques dans la capacité de la zone euro à appliquer une stratégie de croissance autonome.

* 100 Lettre de l'OFCE n° 278 du 7 décembre 2006.

* 101 Certains auteurs doutent même que ce lien soit pertinent en période de faible inflation : cf. P. De Grauwe et M. Polan, 2005 : « Is inflation always and everywhere a monetary phenomenon ? », Scandanivian Journal of Economics 107(2) p. 239-259.

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