C. UNE ÉVALUATION NOUVELLE DES MÉTIERS SOUS TENSION

1. Des listes de métiers sous tension, déclinées par région

Le comité interministériel de contrôle de l'immigration (CICI) du 7 novembre 2007, réuni sous la présidence du ministre de l'immigration, de l'intégration, de l'identité nationale et du développement solidaire, a approuvé deux listes de métiers connaissant des difficultés de recrutement et, pour lesquels la situation de l'emploi ne sera pas opposée, l'une ouverte aux ressortissants des nouveaux États membres, en application du principe de préférence communautaire, l'autre aux ressortissants de pays tiers à l'Union européenne, publiées dans une circulaire du 20 décembre 2007 et un arrêté ministériel du 18 janvier 2008.

Ces deux listes ne posent pas de difficultés aux services de l'État, qui ont le plus souvent contribué à leur réalisation. Certaines directions départementales du travail, de l'emploi et de la formation professionnelle ont, en effet, rencontré en 2007 les fédérations professionnelles pour constituer la liste des métiers en tension. Certains services signalent toutefois qu'il pourrait être éventuellement nécessaire de réfléchir sur les métiers de la restauration de spécialité (ex. : cuisine thaï, indienne etc...) pour lesquels les professionnelles disent ne pas trouver de « bons candidats » en France et ne pas connaître de centres de formation assurant ce genre de prestations.

La liste de métiers ouverts aux ressortissants des États membres de l'Union européenne soumis à des dispositions transitoires devrait être d'application restreinte , puisque les restrictions à la libre circulation des salariés, ressortissants de l'Estonie, la Lettonie, la Lituanie, la Hongrie, la Pologne, la République tchèque, la Slovaquie et la Slovénie, soumis dès lors à autorisation de travail, devraient être levées au cours du second semestre 2008. Elle ne concernerait plus que la Roumanie et la Bulgarie.

Une première liste, établie le 29 avril 2006, concernait 61 métiers connaissant des difficultés de recrutement. Elle a été complétée dans la circulaire du 20 décembre 2007 de 89 métiers supplémentaires permettant ainsi aux ressortissants des nouveaux États membres d'exercer en France une activité salariée dans 150 métiers sans que la situation de l'emploi ne leur soit opposable. Ces métiers représentent 40 % du total des offres d'emploi enregistrées par l'ANPE en 2006.

La liste de métiers ouverts aux ressortissants de pays tiers est établie par métiers, mais aussi par zones géographiques. En application du principe de préférence communautaire, elle est plus limitée que celle ouverte aux ressortissants des nouveaux États membres dont elle constitue un sous-ensemble.

Une liste de 30 métiers a ainsi été adoptée dont six valent pour l'ensemble des régions de la France métropolitaine (cadre de l'audit et du contrôle comptable, informaticien d'études, informaticien expert, chargé d'études techniques du bâtiment, chef de chantier du BTP, conducteur de travaux du BTP). Les autres métiers ne sont accessibles sans que soit opposable la situation de l'emploi que dans certaines régions. Cette liste des métiers n'est pas ouverte aux ressortissants algériens et tunisiens qui sont régis par des conventions bilatérales spécifiques.

2. La prise en compte des besoins économiques exige des adaptations constantes

Les listes de métiers sous tension existent dans la plupart des pays ouverts à l'immigration économique.

Elles ne peuvent être adaptées aux besoins des entreprises qu'à plusieurs conditions.

Tout d'abord, la déclinaison régionale des listes de métiers n'est pas toujours suffisante . Ainsi, pour les métiers les moins qualifiés, où la mobilité géographique est faible, une analyse complémentaire par bassin d'emploi peut être nécessaire pour mesurer les tensions observées dans certains métiers.

En termes de méthodologie, les indicateurs de « tension » qui consistent à mettre en perspective les offres et les demandes d'emploi doivent être complétés par des analyses plus qualitatives en relation avec les entreprises . L'expérience montre qu'une demande d'emplois supérieure à l'offre ne suffit pas à établir l'absence de difficulté de recrutement. Encore faut-il connaître la réelle employabilité des demandeurs d'emploi enregistrés.

Enfin, et surtout, les listes de métiers en tension doivent être actualisées très régulièrement, si possible sur une base annuelle : le contexte économique et les besoins de main d'oeuvre d'une industrie particulière évoluent très rapidement. Si l'immigration professionnelle vise à répondre aux difficultés de recrutement des entreprises, les listes doivent pouvoir évoluer en fonction de la demande des entreprises.

C'est en raison de ces enjeux, et des difficultés rencontrées, que le Canada a été conduit à abandonner les listes de métiers. Celles-ci ouvraient la porte à la fraude et à de fausses déclarations sur les métiers exercés. Le système avait, en outre, créé de fausses attentes pour certains nouveaux arrivants pensaient exercer obligatoirement leur profession. Aussi, depuis 2002, les listes de métier ont-elles été remplacées par une grille qui évalue le « capital humain » des candidats à l'immigration et l'intégration.

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