2. Réduire les dépenses de personnel qui grèvent les budgets des collectivités territoriales

Outre les pistes à suivre pour augmenter les ressources fiscales des collectivités territoriales, la mission s'est penchée sur les charges budgétaires pesant sur les collectivités.

Les budgets des collectivités territoriales des DOM se singularisent tout d'abord par un niveau de dépenses sensiblement plus élevé que celui des collectivités métropolitaines.

Moyenne des dépenses totales des collectivités territoriales en 2008
(en euros par habitant )

DOM

Métropole

Régions

848

421

Départements

1 559

1 059

Communes

1 533

1 376

Source : Institut d'émission des DOM

Or, la mission a pu constater, à l'examen de la structure des budgets locaux et lors des multiples rencontres avec des élus locaux, que les charges de personnel pesant sur les collectivités territoriales des DOM étaient particulièrement élevées et expliquaient partiellement le niveau de la dépense locale.

Comme l'indique le tableau ci-dessous, ce constat est particulièrement vrai pour les régions et les communes. En effet, la part des dépenses de personnel dans les dépenses de fonctionnement des régions d'outre-mer est égale à plus du double de ce qu'elle est en moyenne pour l'ensemble des régions françaises. Les communes des DOM se distinguent également par une part des dépenses de personnel dans leurs dépenses de fonctionnement près de 10 % plus élevée que la moyenne des communes.

Les DOM en revanche, présentent une moyenne de dépenses de personnel rapportées à leurs dépenses de fonctionnement presque égale à celle des départements français dans leur ensemble. Cette proximité de la situation des DOM et des départements de métropole est à relativiser au regard de l'importance des dépenses de fonctionnement des DOM. En effet, ces dépenses sont sensiblement plus importantes pour les DOM que pour les départements métropolitains. Il en résulte que si la part des dépenses de personnel est approximativement identique, ces dépenses sont en valeur absolue plus importantes dans les DOM qu'en métropole.

Part des dépenses de personnel dans les dépenses de fonctionnement

DOM

France entière

14,5 %

6,2 %

16,6 %

16,5 %

59 %

50,3 %

Source : direction général des collectivités locales

Lorsque l'on rapporte le montant des dépenses de personnel à la population des DOM, leur importance apparaît plus clairement, y compris pour les départements.

Dépenses de personnel des collectivités territoriales des départements d'outre-mer

Dépenses de personnel par habitant

(en euros)

DOM

France entière

Régions

39

9

Départements

183

97

Communes

625

452

Source : direction général des collectivités locales

Ainsi, le montant des dépenses de personnel par habitant est, dans les DOM, supérieur de 38 % à celles de métropole pour les communes, de 89 % pour les départements et de 333 % pour les régions.

Deux causes peuvent être identifiées pour expliquer ce niveau de dépenses de personnel : le poids des majorations de traitement et l'importance des effectifs des personnels territoriaux. Dans ces deux domaines, des évolutions pourraient permettre d'assainir la situation des finances locales des DOM.

a) Ajuster les majorations de traitement des personnels territoriaux
(1) L'effet des majorations de traitement des fonctionnaires territoriaux

La loi précitée du 3 avril 1950, qui a instauré les majorations de traitement des fonctionnaires d'État, déjà évoquées, a également prévu l'application de ces majorations aux fonctionnaires territoriaux.

Dans le cas des fonctionnaires territoriaux, l'objectif n'était pas d'attirer des métropolitains pour renforcer les effectifs de cadres dans la fonction publique ou de compenser les conditions de vie difficiles outre-mer mais essentiellement de compenser le surcoût de la vie dans les DOM par rapport au coût de la vie en métropole.

Or, ces compléments de rémunération, en majorant de 40 % le coût pour les budgets locaux des fonctionnaires territoriaux dans les Antilles et en Guyane et de 53 % à La Réunion, jouent un rôle majeur dans le poids des dépenses de personnel pour l'ensemble des collectivités des DOM.

Le poids de ces majorations de traitement est d'autant plus lourd pour les collectivités territoriales qu'elles font face à des revendications marquées de leurs agents contractuels pour en bénéficier. Ainsi, d'une part, toute titularisation entraîne nécessairement l'application des majorations de traitement et, d'autre part, certaines collectivités sont amenées à appliquer les majorations de traitement à leurs contractuels, en dépit de l'absence de toute obligation légale.

Les effets pervers de ces majorations de rémunérations ont déjà été développés par plusieurs rapports. Le rapport remis par Bertrand Fragonard, en mai 1999, au secrétariat d'État à l'outre-mer, « Les DOM : un pacte pour l'emploi », pointait déjà les coûts économiques, sociaux et politiques de ces majorations. Le rapport d'information sur la fonction publique outre-mer de la commission des finances de l'Assemblée nationale, en 2003 67 ( * ) , a rappelé ces inconvénients.

Les enjeux identifiés par le rapport Fragonard

- Un enjeu économique : il constate que l'importance des surrémunérations dans la sphère publique pèse sur les prix et exerce une influence à la hausse des rémunérations dans le secteur privé, notamment dans l'encadrement intermédiaire. Il est très vraisemblable qu'elles dissuadent les employeurs publics - et l'État ne fait pas exception - de recruter à hauteur des besoins, comme s'ils récupéraient partiellement en effectifs le surcoût unitaire de leurs agents. Constater que ces surrémunérations se diffusent dans l'économie des DOM et font « tourner la machine » en entretenant la consommation ne suffit pas à les rendre acceptables : une partie de ce pouvoir d'achat est recyclé sur la métropole sous forme d'importations ou d'épargne.

- Un enjeu politique : l'éclatement de la société des DOM entre un secteur à garantie d'emploi et à forte rémunération et un secteur exposé à salaires inférieurs, et enfin, à la marge de la société, une population en sous-emploi ou au chômage engendre des tensions sociales fortes.

- Un enjeu pour les finances des collectivités territoriales : au-delà du surcoût actuel, les budgets de ces collectivités sont exposés à la pression de demandes de titularisation d'un nombre élevé d'agents, qui souhaitent que celle-ci se fasse à la valeur majorée actuelle des titulaires. Il estime à 150 millions d'euros l'impact total d'une mesure généralisée de titularisation, ce qui représente environ 40 % des dépenses d'investissement des communes des DOM, hors remboursement d'emprunts, pour 1997.

Source : rapport de la commission des finances de l'Assemblée nationale sur la fonction publique d'État et la fonction publique locale outre-mer, 2003.

* 67 Rapport d'information n° 1094 sur la fonction publique d'État et la fonction publique locale outre-mer, M. Marc Laffineur, commission des finances, Assemblée nationale, douzième législature, déposé le 25 septembre 2003.

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