D. QUELLES PERSPECTIVES A MOYEN TERME ?

1. L'inquiétude persistante des marchés

L'annonce du plan d'austérité comme celle concernant l'initiative pour l'emploi et la compétitivité ne semblent pas avoir eu l'effet escompté à destination des investisseurs. Si on observe une relative détente des marchés sur les taux à long terme comme en témoigne l'adjudication du 12 janvier, les taux à court et moyen termes demeurent élevés et en constante progression. Il convient, à cet égard, de s'interroger sur les causes de cette détente sur les marchés à taux longs. Le fait qu'elle coïncide tant avec l'annonce de l'atteinte des objectifs budgétaires par le gouvernement qu'avec celle concernant une poursuite des investissements de la Banque centrale européenne et les rumeurs entourant une possible augmentation du montant des crédits affectés au Fonds européen de stabilisation financière ne permet pas de déterminer si les efforts du gouvernement portugais sont clairement appréciés par les marchés financiers.

Le prochain semestre devrait être marqué par une succession de remboursements de dettes à court terme par le gouvernement, soit autant d'indicateurs quant à l'appréciation de la stratégie portugaise par les marchés.

Remboursements prévus au premier semestre 2011(en milliards d'euros)

Janvier

Février

Mars

Avril

Juin

3,4

3,5

3,8

4,5

4,9

Les fragilités structurelles de l'économie portugaise comme le risque d'une récession en 2011, en partie imputable, quant à lui, à la politique de rigueur mise en place, ne sont en effet pas de nature à susciter la confiance. Les réformes entreprises jusqu'alors, que l'on songe à la réforme des retraites ou à la réduction du périmètre d'intervention de l'État, n'ont pas pu tempérer la hausse des taux. L'annonce d'un déficit public évalué entre 6,9 et 7,1 % du PIB, soit en deçà de l'objectif de 7,3 % initialement prévu reste, quant à lui, difficile à juger. Ce chiffre a été obtenu par le biais d'une manipulation comptable, le gouvernement portugais intégrant dans ses recettes le transfert du fonds de pension de Portugal Telecom (2,6 milliards d'euros) vers l'État. Sans cette manne financière, le déficit public serait estimé à 8,2 % du PIB, constituant de la sorte un échec pour le gouvernement en place. L'objectif de ramener à 4,6 % du PIB le déficit budgétaire en 2011 n'en apparait que plus ambitieux. D'autant que la nationalisation et la recapitalisation concomitante de la Banque BPN devrait grever les finances publiques d'environ 2 milliards d'euros au cours de cet exercice.

Il convient à cet égard de relever qu'en dépit des annonces du gouvernement sur la politique de rigueur mise en place, la dépense publique a continué d'augmenter en 2010 (+ 3,2 %), ce que ne manque pas de dénoncer l'opposition. Celle-ci stigmatise, à cet égard, une politique de rigueur inachevée, la création continue d'organismes paragouvernementaux étant notamment visée. La flexibilisation du marché du travail est également jugée insuffisante par l'opposition.

La campagne à l'occasion des élections présidentielles devrait être marquée logiquement par un durcissement des critiques du PSD à l'endroit du gouvernement socialiste, relançant les rumeurs de dissolution. Le PSD estime par ailleurs que le vote du budget passé, il n'est plus question d'afficher une solidarité implicite à l'égard du gouvernement. Ce risque de crise politique n'est pas de nature à renforcer la confiance des marchés à l'égard du Portugal.

Le volontarisme du gouvernement lusitanien en matière de croissance peut apparaître de surcroit infondé au regard des prévisions de la Banque du Portugal et des institutions internationales.

Prévisions de croissance du Portugal pour 2011 (en pourcentage du PIB)

Gouvernement

OCDE

Union européenne

FMI

Banque du Portugal

+ 0,2 %

- 0,2 %

- 1 %

- 1,2 %

- 1,3 %

Cette conjonction d'éléments n'est pas sans laisser songeur quant à la soutenabilité de la stratégie en solitaire du gouvernement portugais pour affronter la crise dans un contexte où les marchés demeurent relativement inquiets. Le succès de l'adjudication ne pourrait donc constituer qu'un épiphénomène et non un gage d'un retour au calme.

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