C. UNE ADHÉSION A LA ZONE EURO DÈS 2014 ?

Si les plans de rigueur mis en oeuvre depuis 2008 visent à renforcer la compétitivité des économies lettone et lituanienne, ils ont également pour objectif l'adoption en 2014 de la monnaie unique. Cette perspective a été réaffirmée au début de la crise par les gouvernements locaux, qui ont souhaité maintenir la fixité des taux de change.

Les économies lettone et lituanienne sont arrimées à l'euro depuis les années quatre-vingt-dix. La Lituanie a privilégié en 1994 un taux de change fixe. La Lettonie s'est intégrée, quant à elle, dans le mécanisme de taux de change européen (MCE II) en 1992 et ne dispose à cet égard que d'une marge de variation de cours plus ou moins égale à 1 %.

Taux de change

Lat letton

Litas lituanien

1,418 €

0,2896 €

Cette absence de marge de manoeuvre monétaire n'a pas été remise en cause par la crise économique qui frappe les deux pays. Le maintien de la parité, même si elle a fait l'objet d'un débat en Lettonie jusqu'au printemps 2009, ne suscite plus aucune observation négative à Riga et à Vilnius, la sortie de la crise s'opérant dans les deux pays par des mesures dites de « dévaluation interne ». Ces mesures, en contribuant notamment à l'assainissement des comptes publics, doivent d'ailleurs permettre aux deux États baltes de rejoindre l'Estonie au sein de la zone euro.

1. Objectif 2014

L'intégration dans la zone euro au 1 er janvier 2014 suppose le respect des critères de Maastricht dès 2012. Ceux-ci doivent, en effet, être respectés sur deux exercices au moins avant l'adhésion effective. Les lois de finances pour 2012 devraient, à cet égard, s'avérer cruciales. Les gouvernements letton et lituanien tablent à l'heure actuelle sur un déficit public en dessous de la barre des 3 % à l'horizon 2012.

Déficit public : perspectives pour 2011 et 2012 (en % du PIB)

2011

2012

Lettonie

5,4

2,5 - 2,9

Lituanie

5,8

< 3

Cet optimisme ne saurait néanmoins effacer quelques réserves sur les réformes restant à accomplir, en vue de respecter les critères de Maastricht. Deux axes doivent, à cet égard, être poursuivis, impliquant la mise en oeuvre de réformes structurelles et non plus seulement des mesures de consolidation budgétaire conjoncturelle. Les bailleurs de fonds ont, notamment, insisté sur cet aspect auprès des autorités lettones, regrettant que les mesures d'austérité soient financées aux deux tiers par des augmentations d'impôts. L'Union européenne et le FMI privilégient en effet un ratio deux tiers d'économies budgétaires / un tiers d'augmentation des recettes.

Trois objectifs, d'ailleurs communs aux deux pays, semblent devoir être poursuivis en vue de permettre une amélioration des comptes publics.

Le premier concerne la réforme des régimes sociaux, déficitaires dans les deux pays (799 millions d'euros de déficit en Lituanie en 2010). La question des retraites est, à cet égard, une des priorités pour les deux gouvernements qui se retrouvent cependant dans une position délicate face au mécontentement que les atteintes au niveau des pensions ont déjà suscitées. Le transfert de la charge de l'État vers les régimes complémentaires constitue ainsi une piste de travail. A cet égard, le gouvernement letton a, contrairement aux recommandations des bailleurs internationaux, minoré le transfert de cotisation vers ce deuxième pilier. La Lituanie a, quant à elle, mis en place un régime extrêmement favorable qui permet d'obtenir une retraite à taux plein au bout de 25 années de cotisation, qui n'est, d'ailleurs, pas sans conséquence sur les migrations.

Au-delà de l'assurance vieillesse, les gouvernements locaux s'interrogent sur une révision du périmètre de l'État. La Lituanie doit, à cet égard, poursuivre la rationalisation de son système éducatif, manifestement surdimensionné - 22 universités maillent ainsi un territoire peuplé de 3,25 millions de personnes. Cette problématique est également partagée en Lettonie. Les autorités lettones doivent de surcroît reconsidérer la taille de leur système de santé. Elles ne peuvent se contenter à l'heure actuelle de réformes structurelles timorées, à l'image de la réorganisation de la sécurité routière ou des archives nationales.

Le dernier axe concerne la lutte contre l'économie dite « grise ». Représentant entre 20 et 40 % du PIB local, l'économie informelle a pu constituer, notamment en Lituanie, une réponse officieuse à la crise en permettant de compléter des salaires en baisse. Elle n'en reste pas moins une perte de recettes pour l'État. Les autorités lettones estiment ainsi à 13 milliards de lats (18,4 milliards d'euros) ce manque à gagner. Vilnius a fait, comme Riga, de la régularisation de ce pan de l'économie une priorité et a adopté à cet égard quelques mesures symboliques, à l'instar de l'introduction obligatoire des caisses enregistreuses sur les marchés. Cette seule mesure pourrait rapporter près de 14,5 millions d'euros au gouvernement lituanien. A terme, Vilnius entend, via cette lutte, collecter environ 290 millions d'euros de revenus complémentaires.

Par-delà les réformes structurelles indispensables, les deux gouvernements doivent être particulièrement vigilants au sujet de l'inflation. Riga considère d'ailleurs que la lutte contre l'inflation demeure plus délicate à mettre en oeuvre que la réduction du déficit public. C'est, à cet effet, que les autorités lettones ont insisté dans la loi de finances pour 2011 sur l'augmentation de la fiscalité dont les effets inflationnistes devraient être tempérés en 2012. La Lituanie est, quant à elle, confrontée à une inflation - 2,9 % en janvier 2011 - en large partie importée. Elle repose en effet sur un certain nombre de facteurs externes à l'image de la hausse des prix agricoles, mais aussi de l'augmentation des prix de l'énergie en raison de tensions persistantes avec Moscou. Il convient de rappeler qu'en Lituanie, 16 % des revenus d'un ménage sont consacrés aux dépenses de chauffage. Au-delà même de la monnaie unique, cette inflation menace à terme l'attractivité du territoire et n'est pas non plus sans poser un problème politique pour le gouvernement, soumis aux critiques de la communauté d'affaires.

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