(2) Le niveau 1 d'ambition

Le premier niveau d'ambition consiste, pour la France, à garantir son autonomie d'appréciation, à pouvoir participer à la conception de DAMB de territoires et à être capable d'en comprendre et d'en connaître le fonctionnement.

Il s'agit à la fois de pouvoir intervenir de manière pertinente dans la définition des règles de commandement et d'être en mesure de savoir comme elles sont mises en oeuvre. Cela est d'autant plus important que la DAMB appelle des décisions quasi-automatiques et que, dans l'état actuel des équilibres de l'Alliance, personne n'imagine que la décision ultime ne soit prise par quelqu'un autre que le SACEUR, qui est un général américain.

Dans ces conditions, le moins que l'on puisse faire est de rester souverain sur l'information qui permet de fonder la décision d'engagement. Cette solution recommande de s'engager, au minimum, vers l'acquisition d'un satellite d'alerte avancée.

Par ailleurs, il serait souhaitable que la France se dote d'une instance étatique de réflexion et de coordination des efforts en matière de DAMB . Le modèle ici n'est pas la Missile Defense Agency , mais le Missile Defense Centre britannique. En effet, un grand nombre de savoirs en matière de DAMB résident chez les industriels. Or ceux-ci de façon tout à fait compréhensible n'entretiennent pas un dialogue développé entre eux. Il serait donc souhaitable qu'une instance impartiale permette à un tel dialogue de voir le jour.

Par ailleurs, au sein des instances étatiques, la question DAMB est une question qui est traitée en sus des autres missions, alors que l'importance des enjeux et leur complexité mériterait qu'une équipe interministérielle lui soit spécifiquement dédiée. Une telle décision serait peu couteuse et d'une grande utilité.

(3) Niveau 2 d'ambition

Ne pas se laisser distancer technologiquement et maintenir la crédibilité de notre dissuasion.

Si nous entendons pousser notre ambition jusqu'à ce stade, alors il serait souhaitable de mettre en place un programme d'étude d'un intercepteur exo-atmosphérique, car c'est bien là que se situent les risques technologiques les plus importants pour notre dissuasion.

Si même cela paraissait trop cher, le moins que l'on puisse faire est de continuer à développer nos compétences dans le domaine des rétines infrarouges nécessaires à la détection des missiles balistiques et des algorithmes associés permettant la discrimination des têtes dans les cortèges.

(4) Niveau 3 d'ambition

Mettre en place un système complet de défense.

La DAMB est une chaîne : soit elle est complète avec tous ses maillons ; soit un maillon manque et elle ne sert pas à grand chose. Elle fonctionne comme la dissuasion. On ne dissuade pas avec un missile seul ou avec la démonstration de sa capacité à construire un sous-marin nucléaire. Une chaîne ne peut remplir sa fonction que si tous ses maillons sont assemblés et éprouvés.

Si l'ambition de la France est non seulement de pouvoir se défendre dans le cadre d'une alliance, mais éventuellement de pouvoir le faire seule, alors il faudrait qu'elle maîtrise l'ensemble des maillons de la chaîne DAMB. Ce serait évidemment un choix ambitieux. Mais il permettrait d'agir en allié et pas seulement en protégé.

Dans ce cas il faudrait un programme complet comprenant :

- l'alerte avancée : c'est-à-dire le satellite et le radar à longue portée, si les conditions évoquées précédemment relativement à l'implantation et à la localisation sont remplies ; soit au bas mot un milliard d'euros ;

- l'intercepteur exo-atmosphérique , doté de son radar en bande X pour le guidage terminal ; soit de l'ordre de 2 milliards d'euros, sans compter le déploiement sur deux frégates au minimum, à concevoir et à construire pour 1,5 milliard d'euros, soit au total, environ 3,5 milliard d'euros.

- l'intercepteur endo-atmosphérique , au minimum le radar GS 1000 pour le SAMP-T et si cela est soutenable financièrement l' Aster Block II , qui peut être lancé des frégates Horizon ou FREMM ; soit environ 1,7 milliard d'euros supplémentaires.

On peut donc chiffrer très grossièrement le prix de notre pleine souveraineté autour de sept milliards d'euros supplémentaires sur une dizaine d'années, soit environ 700 millions d'euros par an.

Est-ce trop ? En tous cas, trop pour le budget de la défense. Si nous décidions collectivement de poursuivre dans cette direction, jusqu'à ce niveau d'ambition, alors il faudrait dégager faire progresser l'effort de défense et mettre en place les moyens budgétaires adéquats, afin d'éviter un effet d'éviction sur les autres programmes nécessaires à nos forces armées.

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