3. Fleuves côtiers et système rhodanien

Les cours d'eau du sud-est de la France appartiennent au bassin Rhône-Méditerranée, qui couvre 9 régions et 30 départements , soit 120 000 km² (un quart du territoire national). Ce bassin peut être divisé en deux parties : le bassin du Rhône et de la Saône (90 000 km²), subissant des influences océaniques mais également de brutales montées des eaux liées à la fonte des neiges (Isère et Durance notamment), et les fleuves côtiers, dont l'Aude, avec un bassin versant de 5 000 km² qui est le plus important, dominés par un climat méditerranéen.

Le schéma directeur de prévision des crues du bassin Rhône-Méditerranée retient donc que les crues observées dans le bassin obéissent à des caractères hydrologiques extrêmement variés et complexes .

Ainsi, pour la région qui intéresse la mission (de Montélimar à la mer), le Rhône subit l'influence des crues méditerranéennes (ou cévenoles) d'affluents importants comme l'Ardèche, la Durance ou le Gard qui, à eux seuls, peuvent générer une crue du fleuve principal.

En outre, sur le littoral méditerranéen , les fleuves côtiers sont, pour nombre d'entre eux, des cours d'eau au régime torrentiel, de faible longueur . Leur fort dénivelé et le relief marqué favorisent un ruissellement rapide et, en amont, la survenue de coulées de boue . Leur appellation elle-même, à l'instar du Bouillonet, affluent du Préconil, est signe de la connaissance de ces caractéristiques par les populations.

Des caractéristiques de ce type se retrouvent dans la région de La Spezia en Italie.

Les événements de la région de La Spezia (octobre 2011)

Le 25 octobre 2011, des pluies diluviennes ont déversé plus de 400 mm d'eau en 6 heures sur la région de La Spezia (province de Ligurie) et ont entraîné des inondations dévastatrices dans le parc naturel des « Cinque Terre », le Val di Vara et le Val di Magra, plus à l'est. À l'origine du phénomène, des pluies torrentielles très localisées et s'autoalimentant dans la mer toute proche. 534 mm d'eau tomberont en 24 heures à Brugnato, soit plus du tiers des précipitations moyennes annuelles. En première urgence, 900 volontaires seront mobilisés par jour, plus 300 personnels spécialement chargés de la sécurité civile

10 communes sont particulièrement touchées : Beverino, Borghetto Vara, Brugnato, Calice al Cornoviglio, Monterosso al Mare, Pignone, Rocchetta Vara, Sesta Godano, Vernazza, Zignano. On déplorera 11 victimes dont 7 à Borghetto. Les dégâts seront estimés à 544 millions d'euros dont 208 millions d'euros pour les services et équipements publics, 167 millions d'euros pour les ouvrages de protection, 98 millions d'euros pour les particuliers et 70,5 millions d'euros pour les entreprises et les exploitations agricoles.

Dans les « Cinque Terre », les dégâts sont dus aux débordements de cours d'eau et souvent de laves torrentielles assorties de glissements de terrain entraînant des coulées de boues. L'étroitesse des vallées aux pentes très raides auxquelles s'adossent les villages, l'absence d'entretien des cours d'eau et des forêts pas toujours en bonne santé, expliquent en partie l'importance des dégâts.

On peut remarquer que les parties historiques des communes n'ont pas été inondées, alors que les parties nouvellement bâties l'ont été. En revanche, quand les villages sont installés dans des vallées particulièrement étroites, des maisons anciennes ont parfois été emportées par des glissements de terrain.

Le cas de la commune de Brugnato, première commune visitée par la mission lors de son déplacement en Italie, est particulièrement significatif.

La partie historique ancienne de la commune, qui n'a pas été touchée, est située en bordure d'une plaine traversée par le Vara qui initialement, à cet endroit se divisait en deux bras. La branche droite a été neutralisée par un endiguement léger, permettant de rendre constructible la plaine. Au moment de l'inondation, le cours d'eau a retrouvé sont lit majeur endommageant ce qui se trouvait sur son passage. Après la crise, un nouveau mur a été édifié pour neutraliser plus efficacement le bras réactivé par la crue.

Deux villages côtiers, dont Vernazza, ont été envahis par des coulées de boue, dont la puissance a été multipliée par un phénomène d'embâcles.

Les cours d'eau ont souvent été intégrés dans le réseau d'eaux pluviales des communes, notamment du littoral : canalisés, cuvelés pour finir parfois couverts dans la traversée des agglomérations (Huveaune aval et Jarret à Marseille, Eygoutier et Laz à Toulon, Reyran à Fréjus, vallons de Menton, Paillon à Nice, Basagno à Gênes).

Le dimensionnement de ces ouvrages est en général prévu pour une crue cinquantennale, mais leur capacité à résister aux surpressions issues de crues plus importantes lorsqu'ils sont couverts n'est pas sans poser problème. Le risque de ruptures d'ouvrages et d'écoulements est alors majeur, à l'instar de l'épisode génois de 2011 et, comme on l'a vu, de celui qui a touché le secteur des Arcs et de Draguignan en 2010 19 ( * ) .

Qui plus est, ces petits bassins versants ont des réactions complexes à appréhender en cas d'épisode pluvieux intense, en raison d'un bassin amont rural et/ou montagneux et de l'urbanisation d'une partie de leur bassin aval.

La surveillance coordonnée de l'ensemble du bassin , objet du schéma directeur de prévision des crues, est donc essentielle, ce d'autant que le territoire du bassin Rhône-Méditerranée est le lieu d' enjeux humains et économiques majeurs : humains et économiques dans les secteurs soumis à des crues rapides et soudaines ; économiques, agricoles et industriels dans ceux menacés par les crues lentes.

De fait, 47 % des communes du bassin Rhône-Méditerranée sont concernées par le risque inondation (68 % des communes en région PACA), dont 10 % avec des enjeux forts au regard du risque de vie humaine. À titre de comparaison, 20 % de la population de la région Languedoc-Roussillon est installée en zone inondable.


* 19 Il est à remarquer, comme le fait M. Claude Martin que même des ouvrages largement calibrés ne parviennent pas à absorber des précipitations torrentielles. Il cite Vidauban dont le chenal devant canaliser un petit cours d'eau (issu du secteur des Vallons) qui traverse la ville et qui a débordé « semble pourtant avoir été calibré en essayant de faire bonne mesure » et Figanières, dont le chenal couvert qui passe sous le village, a été « calibré à la taille du lit « majeur » (plus de 3 m de large sur plus d'1,5 m de haut) à l'entrée » du Riou venant de la Tuillière.

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