III. DES MESURES DE PROTECTION DES ABEILLES À AMPLIFIER

A. LE CARACTÈRE MULTIFACTORIEL DU DÉCLIN DES COLONIES D'ABEILLES INVITE À AGIR SUR PLUSIEURS FRONTS À LA FOIS

Dans son rapport de 2015, l'Anses recommande d'agir sur l'ensemble des facteurs identifiés comme contribuant à l'affaiblissement des colonies, et notamment de diminuer l'exposition globale des abeilles aux produits phytosanitaires par une maîtrise renforcée du recours aux intrants dans les pratiques agricoles, de maintenir la biodiversité et d'assurer l'appropriation et le respect de bonnes pratiques apicoles.

L'Anses propose également de créer des ruchers de référence permettant de définir des référentiels harmonisés et d'un réseau d'observation structuré afin de produire des bilans de l'état de santé des colonies, de leur coexposition aux agents infectieux et chimiques et de leurs évolutions.

La lutte contre le déclin des abeilles passe donc par des mesures générales de maintien de la biodiversité et de réduction de l'usage des pesticides, qui dépassent le strict champ de la protection des pollinisateurs.

Il convient surtout d'agir sur les deux principales causes de surmortalité des abeilles : l'exposition aux produits phytosanitaires et aux agents pathogènes .

S'agissant des produits phytosanitaires, comme l'a souligné Michel Perret, chef du bureau de la faune et de la flore sauvages au sein du ministère de l'environnement lors de la table ronde, les actions de protection des abeilles passent par des mesures réglementaires et non réglementaires.

Concernant les mesures réglementaires, des interdictions de produits phytosanitaires ayant des effets délétères sur les pollinisateurs ont été adoptées , comme récemment s'agissant des substances néonicotinoïdes. Au niveau européen, suite à l'avis de l'EFSA de 2013, la Commission européenne a décidé d'interdire l'utilisation de substances néonicotinoïdes sur les cultures qui attirent les abeilles et sur les céréales, à l'exception des utilisations sous serre 9 ( * ) .

En France, la loi pour la reconquête de la biodiversité du 8 août 2016 10 ( * ) a interdit l'utilisation des néonicotinoïdes pour le traitement des semences à compter du 1 er septembre 2018 , avec des dérogations possibles pouvant être accordées jusqu'au 1 er juillet 2020. Un projet de décret relatif à la liste des substances néonicotinoïdes concernées par cette interdiction a été mis en consultation par le ministère de l'environnement le 14 février 2017 11 ( * ) . Par ailleurs, la loi du 6 février 2014 visant à mieux encadrer l'utilisation des produits phytosanitaires sur le territoire national 12 ( * ) a prévu l'interdiction, pour les collectivités publiques, d'utiliser des pesticides pour l'entretien des espaces verts, des forêts ou des promenades accessibles au public - cette interdiction s'applique depuis le 1 er janvier 2017.

Des initiatives non réglementaires sont également mises en oeuvre . Le ministère de l'agriculture est notamment engagé dans la mise en place d'un plan de réduction de l'utilisation des pesticides ( plan « Ecophyto » ) à travers la formation des agriculteurs à une utilisation responsable des pesticides ou la création de fermes pilotes pour favoriser l'émergence de bonnes pratiques (les fermes « DEPHY »).

De même, des initiatives de labellisation et de contractualisation sont mises en place pour inciter à la réduction de l'usage des intrants, à l'instar de la labellisation « Terres saines, communes sans pesticides » qui distingue les collectivités territoriales exemplaires en termes de gestion de leurs espaces verts et de leurs infrastructures, et propose des aides financières pour l'installation de potagers ou de ruchers municipaux. Malgré cela, le recours aux pesticides demeure important ; il a même augmenté de 9,4 % entre 2013 et 2014 13 ( * ) .


* 9 Règlement d'exécution UE n° 485/2013 de la Commission du 24 mai 2013 modifiant le règlement d'exécution (UE) n° 540/2011 en ce qui concerne les conditions d'approbation des substances actives clothianidine, thiaméthoxame et imidaclopride et interdisant l'utilisation et la vente de semences traitées avec des produits phytopharmaceutiques contenant ces substances actives.

* 10 Article 51 de la loi n° 2016-1087 du 8 août 2016 pour la reconquête de la biodiversité, de la nature et des paysages.

* 11 Les substances visées par le projet de décret sont les suivantes : acétamipride ; clothianidine ; dinotéfurane ; imidaclopride ; nitenpyrame ; thiaclopride ; thiamétoxame.

* 12 Loi n° 2014-110 du 6 février 2014 visant à mieux encadrer l'utilisation des produits phytosanitaires sur le territoire national.

* 13 Ministère de l'agriculture, de l'agroalimentaire et de la forêt, « Tendance du recours aux produits phytopharmaceutiques de 2009 à 2014 », Note de suivi du plan « Ecophyto », mars 2016.

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