B. UN PARTAGE DES MISSIONS ENTRE ACTEURS DE LA SÉCURITÉ QUI RESTE À PRÉCISER

Dans un contexte d'augmentation permanente de la charge de travail des forces de sécurité intérieure, la répartition des tâches et des missions avec les autres administrations constitue un enjeu majeur afin de garantir le recentrage des forces de sécurité intérieure sur leur coeur de métier.

1. Une répartition des compétences avec l'administration pénitentiaire qui tarde à être stabilisée
a) Une reprise des extractions judiciaires encore inachevée ...

Bien que le principe d'une reprise des extractions judiciaires par l'administration pénitentiaire ait été acté dès 2010, selon un calendrier prédéfini, les forces de sécurité intérieure, police et gendarmerie confondues, continuent de regretter les sollicitations régulières dont elles font l'objet par les juridictions pour assurer des transferts de détenus .

Bien qu'elle ait bénéficié, à due concurrence, d'un transfert d'effectifs et de moyens, l'administration pénitentiaire s'est en effet heurtée, dès l'origine, à d' importantes difficultés pour assurer la reprise effective des transferts et assurer la mise en oeuvre de la réforme dans les délais impartis.

Comme le soulignait la garde des sceaux, ministre de la justice, Nicole Belloubet, lors de son audition devant votre commission d'enquête, l'administration pénitentiaire, en raison de « l'insuffisance du transfert des équivalents temps plein nécessaires pour assumer cette mission, de l'insuffisante diminution du volume des extractions requises et de l'organisation du maillage territorial retenue par la direction de l'administration pénitentiaire », et malgré un premier moratoire accordé en 2012, n'a pas pu, y compris dans les régions dans lesquelles le transfert de charges était intervenu, honorer les demandes qui lui étaient soumises.

Ces situations d'impossibilité de faire, qui se sont élevées, en 2016, à 21 % des demandes d'extractions judiciaires émises par les juridictions , ont mécaniquement pesé sur les forces de sécurité intérieure.

Alors même que les effectifs et les moyens affectés aux missions d'extractions judiciaires étaient progressivement retirés à la police et à la gendarmerie, ces dernières ont ainsi été tenues d'assurer, au détriment de l'exercice de leur mission de sécurité publique , de nombreuses extractions judiciaires, en lieu et place des personnels pénitentiaires. En 2015, 18,8 % des heures-fonctionnaires consacrées par les policiers aux extractions judiciaires l'ont été pour combler des incapacités de faire de l'administration pénitentiaire. Quant à la gendarmerie, elle a, la même année, consacré l'équivalent horaire de 4 625 patrouilles pour combler les non-prises en charge de l'administration pénitentiaire.

Les conséquences opérationnelles pour les forces de sécurité intérieure de ce ralentissement de la reprise des transfèrements a été d'autant plus important que police et gendarmerie ont été, de manière concomitante, confrontées à une aggravation du climat sécuritaire et à une hausse conséquente de leur activité.

Malgré la réduction progressive du volume des interdictions de faire, votre commission d'enquête a pu constater, au cours de ses travaux, l'insatisfaction générée par une telle situation auprès des personnels de la police et de la gendarmerie . Le Général Richard Lizurey indiquait ainsi : « Un autre point de frustration concerne les transfèrements. En effet, cette mission a été transférée à la pénitentiaire avec les ETP et les crédits correspondants. Or, dans de nombreux cas, on demande quand même aux gendarmes de l'assurer. Nous avons au quotidien des magistrats qui emploient des termes menaçants à l'égard des commandants de groupement ou de région, avec des termes discourtois, ce qui influe indéniablement sur le moral des troupes. On nous a enlevé les effectifs, et on nous demande quand même d'assurer cette mission ! Au final, la mission de transfèrement coûte aujourd'hui plus cher à l'État que ce qu'elle coûtait auparavant. Sur ce sujet, je défends mes personnels. Ce transfert est un échec collectif ».

b) ... et qui se heurte à des difficultés structurelles propres à l'administration pénitentiaire

Au regard des difficultés rencontrées, un nouveau plan d'action a été adopté, en mars 2017, par la garde des sceaux et le ministre de l'intérieur en vue de permettre l'achèvement effectif de la reprise des extractions judiciaires par l'administration pénitentiaire d'ici la fin de l'année 2019 .

Au-delà des engagements pris par le ministère de la justice de revoir l'organisation territoriale des pôles de rattachement des extractions judiciaires (PREJ) et de travailler à une optimisation du recours à la visioconférence de manière à réduire le volume global d'extractions, l'achèvement du transfert dépendra également de la capacité de l'administration pénitentiaire à résoudre ses difficultés structurelles , qui ont nettement contribué à retarder le processus de transfert.

Il apparaît en particulier urgent de travailler à un renforcement de l'attractivité de la fonction pénitentiaire , qui pâtit tant de l'insécurité croissante des missions exercées que du statut social et financier des surveillants pénitentiaires, et qui pèse, depuis plusieurs années, sur les capacités de recrutement de l'administration pénitentiaire, y compris au sein des PREJ.

Les difficultés rencontrées par les surveillants pénitentiaires, dont les représentants ont présenté un tableau très sombre à la commission d'enquête lors de leur audition, et plus largement les dysfonctionnements de la prison 45 ( * ) , sont d'ailleurs tels qu'ils ont un impact négatif sur l'ensemble de la chaîne pénale en amont et par conséquent sur le moral des agents des forces de sécurité intérieure , qui ne peuvent ignorer que tous leurs efforts peuvent être remis en cause en fin de parcours du fait de ces dysfonctionnements toujours non résolus. De ce fait, la commission d'enquête doit souligner que l'amélioration de la situation des forces de sécurité reste pour une part non négligeable tributaire des progrès qui seront accomplis en faveur de l'administration pénitentiaire .

En tout état de cause, face à l'élargissement progressif du champ de compétences des agents pénitentiaires, qui se sont en parallèle vu confier de nouvelles fonctions - en matière de renseignement ou de contrôle de la sécurité périmétrique des établissements pénitentiaires par exemple -, votre commission d'enquête recommande qu'une réflexion soit rapidement engagée sur les missions confiées à l'administration pénitentiaire ainsi que sur les conséquences à en tirer en termes de statut, de formation et d'organisation .

Proposition n° 25 : Établir un plan d'action ambitieux afin d'améliorer les conditions de travail des agents de l'administration pénitentiaire. Conduire une réflexion sur la revalorisation des missions confiées à l'administration pénitentiaire et sur les conséquences à en tirer en termes de statut, de formation et d'organisation.

2. Une réduction des « tâches indues » promise mais dont les résultats sont encore décevants

Si les extractions judiciaires tendent à focaliser l'attention, policiers et gendarmes revendiquent également le transfert ou l'abandon d'autres missions périphériques , considérées par les personnels comme des « tâches indues » qui les éloigneraient de leur coeur de métier .

Nombreuses, ces « tâches indues » recouvrent généralement des missions historiquement affectées aux forces de sécurité intérieure, pour des raisons tenant notamment à leur très grande disponibilité, et désormais accomplies par habitude. Sont par exemple concernés les convocations et les notifications de décisions judiciaires, les fonctions de gardes statiques devant les bâtiments officiels, l'enregistrement des procurations électorales ou encore le traitement des scellés judiciaires pour destruction.

Plusieurs étapes ont déjà été franchies afin de réduire le périmètre de ces missions. Ainsi en est-il par exemple de l'enregistrement de la perte de documents officiels, qui a été restreinte aux seuls cas de pertes sans renouvellement de documents, des gardes statiques, qui ont été fortement réduites, et de la notification des mesures de suspension administrative du permis de conduire.

De l'avis des personnels de la police et de la gendarmerie, ces évolutions, loin d'être suffisantes, méritent d'être poursuivies. Comme le relevait un représentant de la fédération syndicale de la police nationale -CFDT, « tous les gouvernements qui se sont succédé ces dernières années se sont saisis du problème [des tâches indues], mais rien n'a évolué à ce sujet ! ».

Votre commission d'enquête soutient cette revendication. Au moment où se met en oeuvre, au niveau local, la police de sécurité du quotidien, dégager les personnels actifs de la police et de la gendarmerie de missions périphériques apparaît en effet essentiel pour atteindre l'ambition d'une présence policière accrue sur le terrain.

Consciente que le mouvement ne pourra être que progressif, votre commission préconise la mise en oeuvre d'un groupe de travail au sein du ministère de l'intérieur , transversal à la police et à la gendarmerie. Celui-ci pourrait être chargé d'établir un inventaire exhaustif des missions périphériques non rattachables à une mission de sécurité publique, d'évaluer précisément la charge opérationnelle qu'elles induisent et d'étudier les possibilités de transfert. Une telle mission pourrait utilement déboucher sur la définition d'une feuille de route qui fixerait un calendrier de transfert ou d'abandon des missions.

Proposition n° 26 : Mettre en place un groupe de travail, commun à la police et à la gendarmerie, chargé d'inventorier précisément les « missions périphériques » et d'établir, en conséquence, une feuille de route pour leur transfert à d'autres administrations ou leur abandon.

3. Un manque d'articulation dommageable entre les forces d'État et les polices municipales
a) Les polices municipales, « troisième force de sécurité intérieure » du pays ?

Les polices municipales ont connu, au cours des vingt dernières années, une importante montée en puissance .

Outre une augmentation conséquente de leurs effectifs , qui s'élèvent aujourd'hui, sur l'ensemble du territoire national, à plus de 21 000 agents, les polices municipales se sont progressivement professionnalisées , grâce à la création, en 1999, d'un statut commun, à la mise en place d'une formation unifiée ainsi qu'à l'adoption d'un code de déontologie commun.

Dans le même temps, elles se sont vues octroyer des compétences de plus en plus larges . À côté de leur rôle traditionnel en matière de police administrative de proximité, le champ de leurs prérogatives judiciaires a été progressivement étendu, leur conférant, au fil du temps, un pouvoir de constatation d'infraction dans des pans assez larges du domaine contraventionnel.

Statut et prérogatives des agents de police municipale

Désormais prévus aux articles L. 511-1 et suivants du code de la sécurité intérieure, le statut et les missions des polices municipales ont été, pour l'essentiel, définies par la loi n° 99-291 du 15 avril 1999 relative aux polices municipales, bien que d'autres lois soient par la suite intervenues pour élargir, au cas par cas, les compétences des agents.

Les agents de police municipale sont des fonctionnaires territoriaux recrutés à cet effet dans les conditions fixées par les statuts particuliers de la fonction publique territoriale. L'exercice des fonctions d'agents de police municipale est soumis à l'obtention d'un double agrément , délivré par le préfet du département et par le procureur de la République.

Les agents de police municipale bénéficient de deux catégories de prérogatives.

Ils exercent en premier lieu des missions classiques de protection de l'ordre public et sont chargés de la tranquillité, de la sécurité et de la salubrité publiques. Ils sont chargés d'assurer, à cet égard, l'exécution des arrêtés de police du maire et de constater les contraventions à ces arrêtés. Ils peuvent également être autorisés, lorsqu'ils sont affectés à la sécurité d'une manifestation sportive, récréative ou culturelle ou d'un périmètre de protection ou à la surveillance d'un bâtiment communal, à procéder à l'inspection visuelle de bagages et, avec le consentement des personnes concernées, à la fouille de leurs bagages et à des palpations de sécurité.

Disposant, en vertu de l'article 21 du code de procédure pénale, d'un statut d'agent de police judiciaire adjoint, les agents de police municipale disposent également de prérogatives de police judiciaire . Ils disposent ainsi d'un pouvoir de constatation des contraventions, mais uniquement lorsque la loi le prévoit spécifiquement. Ils sont notamment autorisés à constater un grand nombre de contraventions au code de la route ainsi que de nombreuses contraventions au code pénal ne nécessitant pas des actes d'enquête et ne réprimant pas des atteintes à l'intégrité des personnes. Ils peuvent également constater les infractions à la police des transports publics ferroviaires ou guidés, ou encore prescrire la mise en fourrière d'un véhicule.

En leur qualité d'agent de police judiciaire adjoint, ils disposent également de la possibilité de relever l'identité des contrevenants pour dresser des procès-verbaux aux contraventions qu'ils sont autorisés, en vertu de la loi ou du règlement, à constater.

Cette évolution, qui conduit les agents eux-mêmes à revendiquer le statut de « troisième force de sécurité intérieure », ne s'est toutefois pas traduite, dans la pratique, par le développement d'une coordination effective ni d'une réelle complémentarité entre les forces municipales et les forces de l'État.

Les revendications des agents de police municipale sont, à cet égard, fortes.

Alors qu'ils constituent généralement, en raison de leur présence sur le terrain, les primo-intervenants, la plupart d'entre eux regrette le manque de reconnaissance à leur égard, de la part des autres forces de sécurité intérieure comme de l'autorité judiciaire. Ils voient dans la confiance insuffisante qui leur est accordée l'une des principales causes du manque de coordination avec les services de l'État . Selon un membre directeur du collectif national CGT pour la police municipale, « le mal-être des policiers municipaux tient surtout à un manque de reconnaissance, qui se traduit en termes de statut, de rémunération et de moyens matériels et juridiques, ainsi qu'à un manque de confiance de nos partenaires - gendarmerie et police nationales - avec lesquels nous assurons, au quotidien, la sécurité des Français » .

Partageant ce constat, un représentant du syndicat de défense des policiers municipaux indiquait : « Nous n'avons aucune relation avec l'institution judiciaire. En principe, le commandant de brigade de gendarmerie et le chef de la sécurité publique doivent échanger des informations avec le maire, mais cela reste la plupart du temps théorique. Souvent, les prérogatives de la police municipale sont méconnues ».

En réponse à ce constat, les policiers municipaux revendiquent que la professionnalisation des polices municipales soit poursuivie . Deux axes d'évolution paraissent à ce titre devoir être étudiées. Bien qu'elle ait été consolidée au cours des dernières années, la formation initiale des agents de police municipale mériterait en premier lieu d'être plus étroitement articulée avec les formations dispensées aux policiers nationaux ainsi qu'aux gendarmes. À cet égard, il serait utile que le ministère de l'intérieur s'investisse davantage dans l'établissement des programmes ainsi que dans l'organisation des formations, par exemple en mettant à disposition du centre national de la fonction publique territoriale des formateurs issus des rangs de la police nationale.

En second lieu, votre rapporteur estime nécessaire de conduire une réforme de la filière statutaire des agents de police municipale, afin d'une part de créer de véritables grades au sein des polices municipales, par le biais d'une revalorisation de certaines fonctions en catégorie B, et d'autre part de renforcer l'encadrement.

Proposition n° 27 : Poursuivre la professionnalisation des polices municipales en :

- consolidant la formation initiale des agents de police municipale et en l'articulant plus étroitement avec les formations dispensées aux policiers nationaux, notamment par la mise à la disposition du centre national de la fonction publique territoriale (CNFPT) de formateurs issus des rangs de la police nationale ;

- conduisant une réforme de leur filière statutaire, par un élargissement des catégories A et B du corps des agents de police municipale.

b) Mieux articuler les forces d'État et les polices municipales

Revendiqué par les agents de police municipale, le renforcement de la complémentarité entre les forces au niveau local, par une montée en puissance des polices municipales, est également souhaité au niveau central et par les forces de l'ordre. Un représentant du syndicat CFDT de la police nationale soulignait ainsi qu' « il est impératif de fluidifier les relations entre les forces de sécurité nationales et municipales en créant des synergies ».

La valorisation de l'action des polices municipales au niveau de chaque territoire constitue un enjeu particulièrement important dans le cadre de la mise en place de la police de sécurité du quotidien . Une implication renforcée des agents des polices municipales permettrait d'assurer un meilleur maillage du territoire, au bénéfice d'une plus grande proximité des forces de sécurité avec la population et une plus grande présence sur le terrain. Comme le relevait par ailleurs un rapport de l'Inspection générale de l'administration sur le maire et la sécurité intérieure de juillet 2017, « le contexte de risque terroriste, qui a vocation à perdurer à moyen terme, appelle une nouvelle appréhension au plan territorial des responsabilités de chacun. L'État doit ainsi renforcer ses moyens de sécurité étatiques sur des missions prioritaires de protection de la population et de répression des formes de délinquance les plus criminogènes ».

Affichée depuis près de quarante ans sans trouver de réelle concrétisation sur le terrain, la promotion d'une véritable coproduction de sécurité paraît possible à droit constant . Comme le relevait Rémy Heitz, directeur des affaires criminelles et des grâces, il existe en effet d'importantes marges de manoeuvre afin de permettre, par le biais de l'outil des conventions de coordination, une meilleure implication des polices municipales dans les dispositifs locaux de sécurité publique, ceci dans l'état actuel des prérogatives des agents de police municipale.

Force est en effet de constater que si certaines communes se sont engagées, au travers des conventions de coordination, dans le développement de coopérations très étroites avec les forces de police et de gendarmerie, d'autres se sont en revanche satisfaites d'une convention plus formelle, sans chercher à valoriser une quelconque complémentarité avec les forces de l'État. Comme le regrettait un représentant du collectif national CGT pour la police municipale, « des conventions de coordination ont été mises en oeuvre, mais elles ne sont pas toujours effectives sur le terrain ».

Sans porter atteinte au principe de libre administration des collectivités territoriales ni à la liberté du maire dans la définition de sa police municipale, votre commission recommande que soit impulsée au niveau local, le cas échéant sous l'égide du préfet, la négociation de conventions de coordination plus approfondies . Comme l'indiquait le directeur des affaires criminelles et des grâces, l'implication plus étroite et plus systématique du procureur de la République dans l'établissement de la convention de coordination faciliterait par ailleurs une répartition plus fine des prérogatives, notamment en matière de police judiciaire, et mieux adaptées aux réalités du terrain. Cette implication de l'autorité judiciaire apparaît d'autant plus utile que les agents de police municipale ne paraissent pas tous disposer d'une connaissance approfondie des prérogatives judiciaires qui sont les leurs.

Votre rapporteur note au demeurant que la négociation des conventions de coordination devrait également être l'occasion de s'assurer de la bonne adéquation, sur un territoire, entre les missions confiées à la police municipale, d'une part, et les moyens et l'équipement qui lui sont attribués , d'autre part. Sans remettre en cause la liberté de décision du maire en la matière, il paraîtrait par exemple utile que l'armement des agents de police municipale fasse l'objet de discussions dans le cadre de ces enceintes, le maire restant, en tout état de cause, décisionnaire.

Enfin, au-delà de l'établissement de la convention de coordination, votre commission d'enquête note que le renforcement de la coopération entre les polices municipales et les forces nationales dépendra également de la capacité à mettre en place, sur le plan opérationnel, de véritables synergies entre les agents . Il apparaîtrait à cet égard essentiel que le ministère de l'intérieur s'attache à assurer une véritable interopérabilité des systèmes de communication de l'ensemble des forces de sécurité intérieure.

Proposition n° 28 : Impulser, le cas échéant sous l'égide des préfets et en impliquant étroitement les procureurs de la République, la négociation de conventions de coordination plus précises, au bénéfice d'une meilleure complémentarité entre les forces d'État et les forces de police municipale.

c) Élargir les prérogatives des agents de police municipale

À moyen terme, votre rapporteur considère qu' une réflexion pourrait également être engagée en vue d'une revalorisation du statut des policiers municipaux .

Dans un premier temps, à statut constant, l'attribution de nouvelles prérogatives de police judiciaire paraît, au cas par cas, pouvoir être envisagée . Une étape importante a récemment été franchie avec la publication du décret autorisant les agents de police municipale à accéder directement aux fichiers relatifs au permis de conduire et à la circulation des véhicules 46 ( * ) . D'autres pistes mériteraient également d'être étudiées. La forfaitisation de certaines infractions constitue une occasion de transférer, en bloc, des pouvoirs de constatation de certaines infractions aux agents de police municipale . Au demeurant, il paraîtrait également possible de leur permettre, comme l'a récemment recommandé le rapport de l'Inspection générale de l'administration précité sur le rôle du maire en matière de sécurité intérieure, de dresser des timbres-amendes pour réprimer la violation des arrêtés municipaux de police générale, ce qu'ils ne peuvent faire actuellement que lorsque l'arrêté est pris en application d'une réglementation nationale.

Au-delà, votre rapporteur estime souhaitable que soit étudiée la possibilité de conférer un statut d'agent de police judiciaire aux policiers municipaux , voire un statut d'officier de police judiciaire pour des compétences très limitées, par exemple s'agissant de la poursuite des infractions au code de la route ou à la réglementation municipale. La clarification, dans la loi, de l'articulation entre les agents de police municipale et les instances judiciaires, en particulier l'introduction d'un principe clair de subordination des policiers municipaux à l'officier de police judiciaire territorialement compétent et au procureur de la République dès lors qu'ils exercent des prérogatives de police judiciaire, devrait permettre, de l'avis de votre rapporteur, de lever l'obstacle constitutionnel jusqu'à présent opposé.

Cette revalorisation des compétences des agents de police municipale devra, en tout état de cause, être accompagnée d'une réflexion d'ensemble sur les modalités de recrutement ainsi que le dispositif de formation des agents de police municipale . À cet égard, il peut être regretté que l'accès au statut de policier municipal ne soit pas conditionné à l'obtention d'une certification, mais seulement au suivi de la formation dispensée par le centre national de la fonction publique territoriale.

Proposition n° 29 : Envisager, à statut constant, un renforcement des prérogatives des agents de police municipale en matière de police judiciaire.

Explorer la possibilité juridique de leur conférer un statut d'agent de police judiciaire, voire, dans des cas limités (code de la route et réglementation municipale), d'officier de police judiciaire, en posant dans la loi un principe clair de subordination au procureur de la République et à l'officier de police judiciaire territorialement compétent.

Adapter, en conséquence, les modalités de recrutement et la formation des agents de police municipale.


* 45 Outre les violences et les insultes régulièrement subies par les agents, les problèmes liés au premier chef au surpeuplement, mais aussi à l'entrée de stupéfiants au sein même des établissements ou encore la problématique des téléphones portables, avec des saisies sans cesse renouvelées mais qui n'empêchent pas les détenus de se rééquiper et des brouilleurs obsolètes, ont été particulièrement mis en avant par les représentants syndicaux auditionnés.

* 46 Décret n° 2018-387 du 24 mai 2018 précisant les conditions d'accès aux informations des traitements de données à caractère personnel relatifs au permis de conduire et à la circulation des véhicules.

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