C. LA COUPE DU MONDE 2019 : UNE OCCASION INÉDITE D'INSCRIRE LA PROMOTION DU FOOTBALL FÉMININ DANS LA DURÉE ET DANS LES TERRITOIRES

1. Un dispositif médiatique sans précédent pour mettre en valeur une compétition méconnue

Les participants à la table ronde du 16 mai 2019, dédiée au rayonnement de la Coupe du monde féminine de football de 2019, ont fait observer que celle-ci bénéficierait d'une couverture médiatique sans précédent , qui se caractérisera par le recours à des supports diversifiés (télévision, radio, presse écrite, y compris médias en ligne) et par des équipes mixtes, dans lesquelles l' expertise de femmes (journalistes, footballeuses et anciennes sportives) sera mise en valeur. En outre, le dispositif prévu ne diffère pas - les personnalités associées à cette table ronde ont insisté sur ce point - de celui qu'avait mobilisé le précédent Mondial.

Il s'agit là d'évolutions favorables, non seulement dans la perspective de l' égalité entre femmes et hommes dans le football, mais aussi en termes de mixité , ce dont la délégation ne peut que se féliciter.

a) La télévision

Le fait que Canal Plus et TF1 , chaînes emblématiques du football, retransmettent tous les matchs de l'équipe de France doit être souligné. Comme l'a indiqué Frédérique Jossinet lors de son audition, le 21 mars 2019, « TF1 étant le partenaire historique du football masculin, c'est dire la révolution qui est en train se produire ! ».

En effet, TF1 a acheté l'intégralité des droits à hauteur de 10 millions d'euros puis en a cédé une part à Canal Plus . Les deux chaînes ont conclu un accord, TF1 diffusant les vingt-cinq meilleures affiches, dont les matchs des Bleues, et Canal Plus retransmettant la totalité des rencontres pour ses abonnés. Le groupe TF1 diffusera également les six huitièmes de finale et l'intégralité de la fin de la compétition sur les antennes de TF1 et TMC .

Lors de la table ronde du 16 mai 2019, la délégation a entendu les directeurs des sports de ces deux diffuseurs.

Le représentant de Canal Plus a assuré que la diffusion des matchs du Mondial se ferait au même titre que toute autre compétition, « avec les méthodes et l'expertise de Canal Plus , à savoir que nous prendrons l'antenne 30 à 45 minutes avant les matchs, puis nous diffuserons le match et nous y reviendrons ensuite dans les émissions dédiées ».

S'agissant de TF1 , le 7 juin 2019, jour de lancement de la compétition, le journal télévisé de 20 heures sera présenté depuis le Parc des Princes par Anne-Claire Coudray avant la cérémonie d'ouverture et le match opposant l'équipe de France à la Corée du Sud. Le directeur des sports de TF1 a fait observer que le groupe avait « mis en place un dispositif aussi ambitieux que pour tous les évènements diffusés nos antennes ». Le fait que l'annonce de la sélection des joueuses de l'équipe de France par Corinne Diacre ait été diffusée lors du journal télévisé du 2 mai, avec une audience de 5 millions de téléspectateurs, a été le signe d'une préoccupation forte en faveur de la visibilité de la Coupe du monde de 2019 et des Bleues.

Par ailleurs, le dispositif prévu par les deux groupes ne se limitera pas à la retransmission des matchs, car des émissions spéciales seront consacrées à la compétition. Les équipes mobilisée par les deux chaînes sont les mêmes que pour les autres événements d'envergure qu'elles diffusent 77 ( * ) , et seront renforcées pour l'occasion par d'anciennes joueuses telles que Laure Boulleau sur Canal Plus et Camille Abily pour TF1 . La mixité de ces équipes doit donc être soulignée comme une évolution très favorable.

De surcroît, les deux groupes diffuseront divers documentaires autour des matchs afin de mettre en valeur les joueuses et leurs parcours. À cet égard, le représentant de TF1 a affirmé la volonté du groupe de « parler des individualités pour que le public puisse s'identifier aux joueuses de l'équipe de France ». L'un des documentaires diffusés par TF1 suivra ainsi les histoires de cinq joueuses qui participeront à la compétition : Amandine Henry, Wendy Renard, Kadidiatou Diani, Viviane Asseyu et Gaëtane Thiney. Le groupe considère qu'« il est important de donner de l'espace à ces personnalités dans des créneaux favorables sur TF1 ». Canal Plus diffusera également plusieurs documentaires autour des Bleues mais aussi de joueuses des autres équipes.

Les représentants des deux groupes ont assuré que l'« engagement envers le sport féminin et le football féminin ne s'arrêtera pas à la Coupe du monde » et que « cette Coupe du monde nous offrira une opportunité de franchir un palier pour le football et pour le sport féminins ». À ce titre, Canal Plus a signé un contrat de cinq ans avec la FFF pour l'obtention des droits de diffusion du Championnat de France féminin de football ( cf. supra ).

b) La radio

Les stations de radio ont également prévu un dispositif particulier pour cette Coupe du monde.

Le directeur général de RMC Sport a évoqué lors de la table ronde du 16 mai 2019 la place grandissante prise par le football féminin au sein de RMC depuis l'Euro 2017. Il a affirmé, en ce sens, que « nous avons besoin d'avoir des rendez-vous à la radio également. Il est important de faire en sorte que les auditeurs s'approprient les noms des joueuses ». Il a fait observer que la radio entendait « traiter cet événement en y mettant la même énergie que lors de la précédente Coupe du monde masculine ». RMC couvrira donc tous les matchs de l'équipe de France à la radio et sur les supports du groupe, tel que BFMTV , pour assurer à cette compétition une grande visibilité. De surcroît, la « voix du football » de RMC , Jean Rességuié, commentera l'ensemble des matchs disputés par l'équipe de France. Enfin, la radio RMC consacrera des antennes à « la partie sportive mais aussi (aux) coulisses, et en ayant des débats sur le football féminin, sur les joueuses ou sur l'actualité à la radio ».

S'agissant de Radio France , le dispositif dédié à la Coupe du monde mobilisera une vingtaine de personnes durant plus d'un mois pour assurer le suivi de la compétition, auxquelles s'ajouteront quarante-quatre journalistes, techniciens et producteurs au niveau régional.

Radio France entend mobiliser toutes ses antennes pour couvrir cet événement. Ainsi, France Inter présentera des rendez-vous quotidiens, France Info diffusera une série de programmes spéciaux, notamment sous la forme de portraits des joueuses de l'équipe de France, la radio Mouv accentuera notamment ses efforts sur les supports digitaux avec des rendez-vous, des quizz et des portraits ; les réseaux France Bleu s'empareront de l'événement dans ses dimensions « sportives, économiques, politiques et culturelles ». Le directeur des sports de Radio France a ainsi affirmé le souhait d'« agir comme catalyseur du sport féminin ».

Enfin, en matière d'expertise, RMC s'appuiera sur l'expérience de Laure Boulleau, ancienne joueuse 78 ( * ) tandis que Radio France sollicitera Nadia Benmokhtar, consultante et ancienne joueuse du Juvisy-Paris FC .

c) La presse écrite, nationale et régionale

La presse écrite sera également mobilisée de manière inédite autour de la Coupe du monde de 2019 , qu'il s'agisse de la presse nationale ou régionale, du papier ou du numérique.

Le représentant de L'Équipe , entendu lors de la table ronde du 16 mai 2019, a affirmé que pour son journal, « la Coupe du monde féminine 2019 sera un événement phare ». Cet engagement est également partagé par Le Parisien , dont le rédacteur en chef adjoint, chargé du Pôle Sport, a estimé que la Coupe du monde constituait « peut-être l'événement sportif majeur de l'année ».

L'Équipe entend mobiliser des « moyens comparables à ceux dédiés aux grands événements tels que la Coupe du monde masculine, l'Euro de football ou le Mondial de handball ». Un minimum de seize envoyés spéciaux, une dizaine de photographes accrédités et un réseau de correspondants en région seront déployés, soit un dispositif comparable à celui de 2018 en Russie : « lors de la Coupe du monde masculine en Russie, nous avions six envoyés spéciaux auprès de l'Équipe de France au jour le jour. Nous en aurons cinq dans la Coupe du monde féminine ». Les équipes couvriront cinquante des cinquante-deux matchs, chiffre semble-t-il sans précédent pour ce journal. Par ailleurs, les experts mobilisés par L'Equipe pour l'occasion sont Marinette Pichon, ancienne attaquante des Bleues et Patrice Lair, ancien entraîneur des Féminines de l'OL et du PSG, auxquels s'ajoutent certains consultants de matchs masculins comme Paul Le Guen.

Pour Le Parisien , l'existence de longue date de clubs féminins en Île-de-France rend la couverture du football féminin naturelle. Outre l'aspect analytique des matchs, le journal entend approcher cette Coupe du monde sous différents angles : « économiques, sociétaux ou populaires ». À cet effet, vingt journalistes du Pôle Sport seront mobilisés et deux reporters suivront au plus près l'équipe de France. Le représentant du Parisien a également affirmé lors de la table ronde que « l'ensemble des cinquante-deux matchs de la compétition feront l'objet d'un compte-rendu, ce qui n'est pas anodin pour un quotidien généraliste comme Le Parisien ». Dans le même temps, ce journal entend publier des portraits et interviews des joueuses afin de raconter leurs parcours et de faire connaître leurs personnalités.

Dans le même esprit, l'adjointe au chef du service des Sports du journal Ouest-France , également entendue lors de la table ronde du 16 mai 2019, a assuré que la couverture du sport féminin était une réelle demande des lecteurs, puisque les trois régions couvertes par le journal (Normandie, Bretagne, Pays de la Loire) comprennent des équipes de haut niveau. Le journal suivra particulièrement les matchs se tenant à Rennes et au Havre. Une équipe de deux journalistes suivra les Bleues durant tout leur parcours, un journaliste accompagnant l'équipe américaine lors des grands matchs disputés dans l'ouest. Une page par jour sera également consacrée à la Coupe du monde sur les deux à trois pages quotidiennes destinées aux sports. La partie web du journal couvrira les cinquante-deux matchs en live commenté.

La représentante du journal Ouest-France a conclu que « le football féminin reste sous-représenté dans les médias, comme de nombreux autres sports. Cela évolue, mais il ne faut pas se limiter à une compétition en particulier. Pour pérenniser la couverture médiatique, il convient d'assurer un héritage, qui ne doit pas exister uniquement au sein de la fédération, mais qui devra se poursuivre dans les médias ».

La délégation salue les efforts déployés par les médias pour couvrir le Mondial de 2019. Elle fait toutefois observer que cette médiatisation pourrait être facilitée par le fait que le Mondial de 2019 se tient en France.

Elle espère donc que cet engagement pour valoriser les footballeuses et la Coupe du monde féminine ne prendra pas fin en juillet 2019, mais se poursuivra à l'avenir pour assurer la visibilité d'autres compétitions féminines, y compris lorsqu'elles se déroulent hors de nos frontières.

2. Les collectivités territoriales, des partenaires essentiels pour accompagner la montée en puissance de la pratique féminine dans les territoires après le Mondial

Comme le soulignait en 2011 le rapport précité de la délégation sur L'égalité des femmes et des hommes dans le sport , toute action volontaire en faveur de la féminisation des sports doit « associer les municipalités » 79 ( * ) , tant les communes et leurs groupements sont présents dans l'organisation du sport en France, qu'il s'agisse, entre autres initiatives, du financement d'équipements sportifs, de l'organisation de manifestations sportives, de l'attribution de subventions aux clubs et associations ou encore de la mise à disposition de moyens de transport pour faciliter la participation des équipes locales à des manifestations et compétitions.

Notre collègue Michel Savin, président du groupe d'études du Sénat « Pratiques sportives et grands événements sportifs », a insisté sur ce point lors de l'audition de la ministre des Sports, le 13 décembre 2018 : « La situation du sport féminin en France nous intéresse, car l'essentiel des financements est porté par les collectivités locales, contrairement au sport professionnel masculin qui dispose de nombreux sponsors ». « Il s'agit d'un chantier collectif, que l'État et les collectivités doivent mener ensemble », a-t-il conclu.

Cette contribution des collectivités territoriales est d'autant plus importante pour le football féminin que celui-ci, à la différence du football masculin, ne dispose pas à ce jour des ressources liées aux partenariats et aux droits télévisés (cf. supra).

Le rapport précité, publié par la délégation en 2011, relevait aussi que le libre accès aux infrastructures sportives, privilégié dans le cadre de la politique de la ville, avait involontairement « facilité leur accaparement par les garçons au détriment des filles » 80 ( * ) , et que tous les équipements ne répondaient pas aux exigences de pratique sportive mixte. Ce dernier constat renvoie à la question, récurrente et non anecdotique, des vestiaires et des sanitaires, conçus au départ pour un public masculin et dont l'adaptation à la fréquentation féminine se heurte à la contrainte budgétaire ( cf. supra ).

Michel Savin, président du groupe d'études « Pratiques sportives et grands événements sportifs », a souligné l'importance des collectivités territoriales comme « partenaires de la Coupe du monde » lors de l'audition de Frédérique Jossinet, directrice du football féminin et de la féminisation à la Fédération française de football (FFF), le 21 mars 2019 : « Elles se mobilisent pour mettre à disposition des équipements et développent des politiques au bénéfice du sport féminin », a-t-il fait observer, relevant que « le Mondial participera de cet effort » et que, les collectivités territoriales y jouant un « rôle majeur », elles devaient selon lui « être étroitement associées à l'organisation » afin que les « différents partenaires [du Mondial] travaillent en harmonie ». « Accompagnons en bonne intelligence le football féminin », a-t-il conclu.

La délégation salue l'engagement des collectivités territoriales, et au premier chef des communes, en faveur du football féminin et, plus généralement, de la pratique sportive féminine.

Elle souligne l'importance de leur contribution à la réussite du Mondial 2019, dont elles sont des partenaires indispensables.


* 77 Par exemple, citons Grégoire Margotton et Bixente Lizarazu pour TF1.

* 78 Qui accompagnera l'équipe habituelle, constituée de Christophe Dugarry, Roland Courbis, Emmanuel Petit et Jérôme Rothen.

* 79 Page 114.

* 80 Op. cit., page 115.

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