III. UN DIALOGUE POLITIQUE AVEC LA COMMISSION EUROPÉENNE QUI RESTE ENCORE SANS DOUTE TROP FORMEL

Le dialogue politique est complémentaire des résolutions de l'article 88-4 de la Constitution qui s'adressent au Gouvernement qui représente la France dans les négociations au Conseil. Il permet en effet de faire connaître directement la position du Sénat aux institutions européennes, à la Commission européenne, à laquelle les avis politiques sont adressés, mais aussi au Parlement européen, également destinataire de ces avis.

La Commission dispose en principe d'un délai de trois mois pour répondre aux observations formulées dans l'avis politique de la commission des affaires européennes. Ces réponses sont directement adressées au président de la commission des affaires européennes, avec copie à M. le Président du Sénat. Elles peuvent aussi parfois être directement adressées à celui-ci. Jusqu'alors, elles étaient généralement signées par M. Frans Timmermans, Premier vice-président de la Commission élue en 2014, chargé de l'amélioration de la législation, des relations inter-institutionnelles, de l'État de droit et de la Charte des droits fondamentaux, et cosignées dans la grande majorité des cas par le commissaire européen en charge du secteur sur lequel porte l'avis politique.

Parmi les 19 avis politiques adoptés par la commission des affaires européennes entre le 1 er octobre 2018 et le 30 septembre 2019, tous ont reçu une réponse de la Commission. Le rapporteur se félicite de cette situation qui, comme l'année dernière, illustre le dialogue nourri et régulier instauré avec Bruxelles. Il réitère également son appréciation d'une qualité globalement satisfaisante des réponses apportées par la Commission dans le cadre du dialogue politique, et souhaite que les efforts entrepris soient étendus à l'ensemble de ses réponses et poursuivis par la nouvelle Commission, afin de réduire au maximum le caractère encore sans doute trop formel de cet exercice.

• Dans la majorité des cas, les réponses de la Commission veillent, au moins partiellement, à prendre en compte les différents aspects abordés dans l'avis politique de la commission des affaires européennes.

L'avis politique portant sur l'extraterritorialité des sanctions américaines a reçu une réponse complète et argumentée de la part de la Commission, même si celle-ci ne partage pas nécessairement l'ensemble des positions de la commission des affaires européennes.

La Commission rappelle d'abord que « l'Union européenne est déterminée à atténuer l'impact des sanctions américaines à l'égard des entreprises européennes et à préserver les relations économiques et commerciales entre l'Union et l'Iran ». Puis elle répond à chacune des rubriques de l'avis politique : mesures juridiques et financières de blocage ou de neutralisation des sanctions extraterritoriales, décisions visant à renforcer le rôle international de l'euro et démarches politiques en soutien des positions européennes sur l'extraterritorialité des sanctions.

Sur le premier point, la Commission « soutient les efforts de certains États membres de l'Union relatifs à la création d'une plateforme autonome permettant de comptabiliser les produits d'échanges commerciaux entre l'Iran ou d'autres pays sous sanctions non-européennes et les utilisateurs de cette plateforme », comme le demandait la commission des affaires européennes. Elle rappelle ses propositions visant à renforcer le « règlement de blocage » de 1996, actualisé par le règlement délégué 2018/1100, et dont la mise en oeuvre de l'article 5 a fait l'objet du règlement d'exécution 2018/1101. Rappelons que l'article 5 du « règlement de blocage » prévoit la possibilité pour la Commission d'autoriser les opérateurs européens à se conformer aux sanctions américaines visées par ce règlement dans la mesure où le non-respect de celles-ci léserait gravement leurs intérêts ou ceux de l'Union. La Commission indique avoir reçu à ce titre plusieurs demandes adressées par des entreprises européennes, « qui sont en train d'être examinées. Sur cette base, la Commission est en train d'évaluer l'application du « règlement de blocage » et prend note avec intérêt des suggestions de modifications faites par le Sénat ».

Sur la proposition de la commission des affaires européennes de maintenir la connexion des banques iraniennes au réseau SWIFT, la Commission reste prudente et indique seulement que cette demande « a été relayée à de nombreuses reprises aux différents interlocuteurs concernés », sans donner davantage de précisions.

L'avis politique demande également la création d'un organisme chargé de la mise en oeuvre des mesures restrictives de l'Union, de négocier avec les autorités américaines et d'apporter une expertise juridique aux entreprises européennes. La Commission, sur différents fondements juridiques qu'elle indique, rappelle ses compétences en matière de bonne mise en oeuvre de la législation européenne et de sanctions. Elle fait également observer qu'elle « entretient un dialogue permanent et structuré sous diverses formes sur la mise en oeuvre concrète des mesures restrictives de l'Union et du « règlement de blocage » au sein du Conseil de l'Union européenne et avec les États membres individuellement. Avec les autres services compétents de l'Union et dans la limite de ses compétences, la Commission participe aux échanges avec les États tiers en matière de sanctions. Toute initiative visant à faciliter l'accomplissement de ces tâches est bienvenue en tenant compte de la coopération loyale des États membres ».

Pour ce qui concerne les décisions visant à renforcer le rôle international de l'euro, la Commission rappelle sa feuille de route de décembre 2017 sur l'approfondissement de l'Union économique et monétaire (UEM), qui comporte la proposition d'établir un mécanisme de stabilisation visant à maintenir le niveau des investissements en cas de grands chocs asymétriques, reprise dans les négociations sur le cadre financier pluriannuel 2021-2027. Elle expose également les objectifs de sa communication de décembre 2018 sur le rôle international de l'euro, qui « présente des pistes pour continuer à renforcer le rôle de l'euro sur la scène mondiale » : l'achèvement de l'UEM, de l'Union bancaire et de l'Union des marchés des capitaux ; des mesures supplémentaires visant à accroître la profondeur du secteur financier européen ; des initiatives liées au secteur financier international. Ces axes de travail répondent aux préoccupations de la commission des affaires européennes.

La Commission apporte également des réponses précises sur la convergence entre les systèmes de garantie des dépôts nationaux. Selon elle, la directive 2014/49/UE relative aux systèmes de garantie des dépôts comporte déjà un certain nombre de règles pour garantir un niveau de protection des déposants uniforme dans toute l'Union, tout en assurant le même niveau de stabilité desdits systèmes. Elle dit tout mettre en oeuvre, « conformément à la feuille de route pour l'achèvement de l'Union bancaire du 17 juin 2016 », pour « soutenir le Conseil dans son travail au niveau technique visant l'introduction d'un système européen de garantie des dépôts (SEGD). Afin de soutenir l'avancement des négociations en cours, la Commission a proposé, dans sa communication du 11 octobre 2017, des pistes possibles concernant les différentes étapes et le calendrier d'introduction du SEGD ».

La Commission « prend note » de la demande de la commission des affaires européennes relative à la transformation de l'Autorité européenne des marchés financiers (AEMF) en un superviseur unique des marchés de capitaux. Elle « estime également qu'il est nécessaire que la supervision évolue au rythme de l'intégration croissante de ces marchés, un objectif qu'elle poursuit à travers la mise en oeuvre de l'Union des marchés de capitaux » et rappelle que le rapport dit « des cinq Présidents » sur l'achèvement de l'UEM de juin 2015 visait déjà, à terme, une autorité européenne unique de contrôle des marchés de capitaux. Dans son paquet législatif de 2017 relatif à la révision des autorités européennes de surveillance, la Commission avait défini les fondements institutionnels du développement des missions de supervision et de l'expertise de l'AEMF dans des domaines spécifiques. Elle considère que « ceci peut être considéré comme une première étape vers l'instauration d'un superviseur unique. Cependant, comme le démontre la très grande diversité des vues exprimées dans la négociation en cours au Parlement européen et au Conseil, la mise en place d'un superviseur européen unique demeure un projet à plus long terme ».

Enfin, sur le dernier volet de l'avis politique, la Commission répond que « le sujet des sanctions est régulièrement présent à l'agenda du G7 où la Commission - ainsi que les États membres faisant partie du G7 - discute et coordonne avec les partenaires internationaux les actions nécessaires pour la mise en oeuvre des sanctions dans le respect des engagements communautaires et du droit international ». Elle note que « le compromis politique trouvé entre les présidents Juncker et Trump, le 25 juillet 2018, tel que reflété dans la déclaration conjointe a permis d'éviter le risque immédiat de dispute commerciale majeure. Le compromis a donné l'occasion d'engager un dialogue plus positif sur les questions commerciales bilatérales et de travailler en collaboration avec les États-Unis en vue de la réforme de l'Organisation mondiale du commerce. La portée des discussions est limitée par la Déclaration conjointe telle qu'agréée par les deux présidents et ne concerne pas les mesures restrictives de politique étrangère, telles que les sanctions. Néanmoins, les discussions engagées avec les États-Unis sur l'impact extraterritorial des sanctions américaines et sur d'autres aspects de nos politiques respectives de sanctions se poursuivent au-delà de ce cadre ».

La Commission a apporté une réponse détaillée à l'avis politique sur les relations entre les entreprises et les plateformes en ligne .

Cet avis politique approuve les grandes orientations de la proposition de règlement présentée, tout en appelant à des précisions et à un renforcement de certaines dispositions, ainsi, le cas échéant, qu'à des modifications ultérieures, « que l'observation des pratiques permettra d'identifier », dans sept domaines : le champ d'application du règlement, l'encadrement des modalités et conditions des relations entre les entreprises utilisatrices et les plateformes, le classement des offres des entreprises, la maîtrise de ses produits et données par l'entreprise utilisatrice, le traitement des litiges, les codes de conduite et le suivi de la mise en oeuvre du texte.

En réponse, la Commission, après avoir rappelé que sa proposition s'inscrit dans la stratégie pour un marché unique numérique, indique qu'il s'agit de parvenir à « un environnement juridique clair, transparent et stable pour les fournisseurs de services de transactions entre entreprises et consommateurs en ligne ». Son texte, en introduisant davantage de transparence et d'équité dans les pratiques commerciales entre les plateformes et leurs usagers professionnels, contribuerait à un marché unique sans entraves juridiques.

Sur les demandes de précisions ou remarques formulées dans l'avis politique, la Commission apporte des informations plus techniques dans une fiche annexée à sa réponse. Elle prend le soin d'expliquer et justifier sa démarche générale : « Une politique d'intervention publique dans un domaine économique aussi dynamique se doit d'être responsable et d'avancer « pas à pas » de façon à ce que son potentiel d'innovation et de croissance ne soit pas bridé ». La proposition vise, dans un premier temps, à « cibler des problématiques bien identifiées tout en surveillant les sujets émergents pour lesquels une intervention serait prématurée ». L'observatoire que le texte propose d'instituer a précisément pour objectif de « mieux comprendre les opportunités et défis inhérents à l'économie des plateformes ». Ses travaux pourraient aboutir, dans un deuxième temps, à « une régulation plus poussée mais avant tout réfléchie et adaptée ».

L'annexe reprend chacun des points mis en évidence par l'avis politique de la commission des affaires européennes :

- sur le champ d'application du règlement, la Commission indique avoir retenu une définition fondée sur l'activité d'intermédiation. Elle dit avoir examiné attentivement la question de l'extension du champ de réglementation des moteurs de recherche à l'ensemble des mesures proposées et considère qu'une telle extension serait disproportionnée. Alors que l'avis politique envisageait de laisser aux États membres une plus grande marge de manoeuvre pour réglementer, la Commission rappelle qu'une action européenne avait été estimée nécessaire, « précisément à cause du problème de fragmentation progressive de l'espace juridique dans lequel les plateformes opèrent », tout en précisant que les États membres disposeront d' « une marge non négligeable pour mettre en place des mesures législatives à condition que ces dernières soient compatibles avec le droit de l'Union et restent en dehors du champ d'application du règlement ». Par ailleurs, la Commission considère que les systèmes d'exploitation visés par l'avis politique « sont multiples et de nature différente » ; dès lors, « leur inclusion générale dans le champ du règlement serait infondée et inappropriée ». Dans la mesure où un système d'exploitation répondrait à la définition d'un service d'intermédiation en ligne, il serait couvert par le projet de règlement - ce serait notamment le cas d'Android ou d'IOS ;

- concernant l'encadrement des modalités et conditions relationnelles entre les plateformes et leurs entreprises utilisatrices, la Commission indique que sa proposition de règlement définit un certain nombre de règles, par exemple sur les changements des termes d'un contrat ou son interruption, que les plateformes doivent respecter et dont le non-respect pourrait être considéré comme inéquitable. Elle cherche également à veiller à ce qu'une définition trop générale de ce qui serait inéquitable ne soit pas source d'insécurité juridique. Par ailleurs, elle explique rechercher un équilibre entre moyens de recours efficaces accordés aux utilisateurs professionnels des plateformes et préservation d'un environnement propice à l'innovation et respectueux des modèles d'affaire des intermédiaires en ligne. Un tel équilibre serait atteint grâce à un dispositif progressif (dans un premier temps, transparence et résolution de conflits bilatéraux puis, dans un second temps, suivi poussé des sujets qui pourraient nécessiter une intervention réglementaire) ;

- sur les clauses de parité, la Commission rappelle que seuls quelques États membres ont procédé à leur prohibition et que les études menées par différentes autorités de la concurrence n'ont pas été concluantes quant à leurs effets précis. Elle indique que l'analyse qu'elle a effectuée démontre que les usagers professionnels qui négocient leurs contrats avec les plateformes ont un pouvoir de négociation plus important qui ne justifierait pas une intervention réglementaire, comme c'est le cas avec les termes contractuels imposée de façon unilatérale ;

- la Commission estime que l'extension de l'obligation de transparence à l'information sur la pondération de tous les critères de classement, suggérée par l'avis politique, pourrait être jugée équivalente à une obligation de divulgation de l'algorithme des plateformes, ce qui ne serait pas nécessairement utile aux entreprises qui, pour la plupart, auraient des difficultés à interpréter de telles informations. Elle dit également douter qu'une telle mesure soit compatible avec le secret des affaires ;

- sur la maîtrise par les usagers professionnels de leurs produits et données, la Commission précise notamment que son texte ne prévoit pas de dispositions spécifiques en matière d'accès ou de portabilité des données, mais impose aux intermédiaires en ligne de décrire clairement leurs pratiques de collecte et d'accès aux données à la fois personnelles et non personnelles. Ainsi les plateformes restent-elles libres de décider de leur politique propre d'accès aux données. La Commission estime que « des mesures réglementaires intrusives auraient ainsi des effets incertains sur l'économie d'intermédiation en ligne » : des mesures trop interventionnistes dans les modèles économiques d'intermédiation en ligne risqueraient de réduire la capacité d'innovation du secteur. C'est pourquoi « l'approche de la Commission consiste à ce stade à encourager le partage volontaire des données inter-entreprises plutôt que de le rendre obligatoire » ;

- pour ce qui concerne le traitement des litiges, et alors que l'avis politique avait émis des doutes sur l'indépendance des médiateurs, la Commission indique que « leur inclusion dans les termes du contrat permet aux entreprises utilisatrices, à leurs organisations représentatives ainsi qu'aux autorités publiques de scruter leur éligibilité ». Ces entités ont également la possibilité de faire un recours en justice en cas de doute sur l'indépendance des médiateurs. Par ailleurs, la Commission considère que le risque d'abus par les entreprises utilisatrices du recours en médiation est limité à la fois par le partage des coûts de médiation et par le fait que l'estimation de ces coûts doit se baser sur des éléments tels que la conduite des parties prenantes ou le fond de la demande. Elle précise que le choix du critère des effectifs salariés permet de définir, non pas l'importance des plateformes, mais leur capacité à absorber le coût de l'obligation de mettre en place un mécanisme interne de gestion des conflits ;

- enfin, la Commission rappelle que l'association des entreprises utilisatrices à l'élaboration des codes de conduite, recommandée par l'avis politique, constitue une mesure volontaire laissée à l'appréciation des plateformes, mais fait observer que cette pratique est fréquente. Aussi son texte propose-t-il que cet exercice prenne en considération les caractéristiques des microentreprises, des petites et moyennes entreprises.

À l'avis politique sur le nouveau programme d'investissement pour l'Europe ( InvestEU ) , la Commission, sans dissimuler certaines divergences avec la commission des affaires européennes, apporte des informations utiles au dialogue entre les deux institutions, en les argumentant.

Elle rappelle que le programme InvestEU , conçu pour prendre la suite du plan d'investissement pour l'Europe, dit « plan Juncker », vise, dans le cadre des discussions en cours sur le futur cadre financier pluriannuel, à « continuer de fournir l'appui nécessaire aux efforts déployés en vue de remédier aux défaillances du marché et aux situations d'investissement non optimales dans des secteurs ciblés aux fins de la réalisation des objectifs stratégiques de l'Union ». De façon générale, elle se félicite que la commission des affaires européennes souscrive à l'idée d'un cadre assurant l'égalité d'accès à la garantie de l'Union. Elle estime que « la possibilité d'associer de nouveaux partenaires chargés de la mise en oeuvre en plus de la Banque européenne d'investissement, tels que la Banque européenne pour la reconstruction et le développement, la Banque du Conseil de l'Europe et les banques et institutions nationales de développement, vise à étendre la portée territoriale et à mieux répondre aux spécificités locales, en particulier pour ce qui est, par exemple, des infrastructures sociales et du volet « compétences » », ce qui correspond aux préoccupations sénatoriales.

Alors que l'avis politique exprime des doutes sur la gouvernance du programme et sur le caractère optimal de la répartition des tâches entre la Commission et la BEI, elle souhaite « apporter plusieurs éclaircissements » et se dit « convaincue que ceux-ci apaiseront les craintes du Sénat ».

Sur la gouvernance d' InvestEU , la Commission estime qu'il convient de trouver un juste équilibre entre, d'une part, les fonctions d'orientation stratégique et de supervision du programme dévolues à la Commission, et, d'autre part, les activités bancaires qui pourraient être confiées à la BEI. Elle indique qu'à cette fin, « elle a discuté avec la Banque européenne d'investissement d'un partenariat définissant plusieurs fonctions liées aux activités bancaires, pour lesquelles la Banque européenne d'investissement pourrait assister la Commission, concernant notamment l'appréciation des risques du portefeuille garanti ». Le détail des compétences des différents organes de gouvernance est en cours d'examen. En revanche, elle se garde de se prononcer sur la transposition à InvestEU du système de gouvernance retenu pour le plan Juncker, suggérée dans l'avis politique.

L'avis politique expose un désaccord sur le recours par la Commission aux actes délégués en vue de compléter ou de modifier certains éléments non essentiels du règlement InvestEU . Sur ce point, la réponse de la Commission reste excessivement juridique : elle indique que sa proposition est « pleinement conforme » à l'article 290 du traité sur le fonctionnement de l'Union européenne (TFUE) et qu'elle repose sur « une mise en balance minutieuse de la nature quasi législative des lignes directrices en matière d'investissement, de leur niveau de détail et de la souplesse requise durant les sept années de la période de programmation ».

La proposition émise par l'avis politique de prévoir dans le règlement l'attribution de 75 % de la garantie à la BEI et des 25 % restants aux autres partenaires chargés de la mise en oeuvre « semble être partagée par les colégislateurs et devrait donc figurer dans la base juridique qui doit être adoptée », indique la Commission dans sa réponse.

Sur le « compartiment État membre », la Commission précise qu'il s'agit d'une option facultative : « Les États membres contrôleront pleinement les éléments essentiels des conventions de contribution qu'ils concluraient avec la Commission en vue de contribuer au provisionnement de la garantie de l'Union dans le cadre d' InvestEU en transférant une partie de leur dotation des fonds structurels et d'investissement européens ». La Commission reste prudente, se limitant à en prendre note, sur deux points figurant dans l'avis politique : l'association des autorités régionales compétentes à la mise en oeuvre de cet éventuel « compartiment État membre » et la suppression du délai entre la signature d'un accord de partenariat et la conclusion d'une convention de contribution. En revanche, elle indique que la suppression de l'exigence, pour les partenaires chargés de la mise en oeuvre d' InvestEU , relative à la constitution de partenariats couvrant au moins trois États membres pour accéder à la garantie du programme, « ne devrait pas figurer dans la base juridique finale » car les colégislateurs n'y semblent pas favorables.

Enfin, sur le traitement statistique des contributions des États membres au programme ou des contributions des banques et institutions nationales de développement agissant au nom des États membres, la Commission « tient à rappeler qu'en règle générale, les garanties ou autres passifs éventuels n'ont aucune incidence sur le déficit lorsqu'ils sont émis. Chaque cas doit être analysé individuellement, à la lumière toutefois des dispositions pertinentes du système européen des comptes nationaux et régionaux ».

Même si la Commission a clairement signifié son intention de ne pas donner suite aux positions de l'avis politique relatif à la compatibilité des règles européennes avec le statut des sapeurs-pompiers volontaires , il convient de reconnaître que sa réponse est travaillée, et qu'elle a ainsi cherché à convaincre.

La Commission insiste d'abord sur le fait qu'elle « a pleinement conscience des préoccupations que l'arrêt Matzak [...] a pu susciter en France, où le fonctionnement des services d'incendie et de secours repose pour une large part sur l'engagement des sapeurs-pompiers volontaires », même si elle fait observer que, naturellement, cet arrêt « s'impose à la Commission comme à l'ensemble des parties prenantes ». Les services de la Commission ont immédiatement entamé un dialogue avec des représentants de la France et des autres États membres, tandis que la commissaire alors compétente, Marianne Thyssen, avait rencontré plusieurs parlementaires français, dont notre collègue Catherine Troendlé, par ailleurs présidente du Conseil national des sapeurs-pompiers volontaires.

La Commission rappelle plusieurs points de droit importants pour bien comprendre ce dossier sensible : « L'arrêt Matzak concerne un cas spécifique lié à l'interprétation de la directive 2003/88/CE concernant certains aspects de l'aménagement du temps de travail. Cette directive a pour vocation de protéger la santé des travailleurs et d'assurer leur sécurité au travail, en s'assurant qu'un certain nombre de règles communes minimales s'appliquent dans toute l'Union européenne. Dans cet arrêt, la Cour a confirmé une jurisprudence antérieure sur la notion de travailleur au sens de la directive 2003/88/CE. Elle a également interprété la notion de temps de travail par rapport aux périodes d'astreinte spécifiques en cause dans cette affaire, dont les modalités sont particulièrement contraignantes ». Elle en conclut que « la première priorité consiste par conséquent à vérifier soigneusement si les faits qui ont conduit aux conclusions de la Cour dans l'arrêt Matzak s'appliquent en général à la situation française ».

Elle considère par ailleurs que, dans l'hypothèse où, en raison notamment des modalités d'organisation du travail et des astreintes des sapeurs-pompiers volontaires en France, la directive sur le temps de travail leur serait effectivement applicable, « la directive elle-même offre une certaine flexibilité dans son application ». Ainsi, l'article 17 permet de déroger aux dispositions concernant le repos journalier et hebdomadaire, les temps de pause, la durée du travail de nuit et les périodes de référence, à condition que les périodes travaillées en dérogation à la directive soient suivies d'une période équivalente de repos compensateur. Par ailleurs, la dérogation établie à l'article 22 permet aux travailleurs de dépasser la durée moyenne de 48 heures de travail hebdomadaire s'ils marquent explicitement leur accord. La Commission estime alors que « cette dérogation pourrait être ouverte aux sapeurs-pompiers en France, et des pratiques testées avec succès dans d'autres États membres pourraient servir de référence en la matière ».

Pour autant, la Commission n'est pas d'accord avec la proposition de la commission des affaires européennes de réviser la directive de 2003 ou d'envisager une initiative législative complémentaire visant spécifiquement le volontariat dans l'exercice des missions de sécurité civile. Elle considère cela comme « ni aisé ni opportun ». Elle rappelle en effet que cette directive « offre un cadre protecteur très important pour les travailleurs européens » et qu'elle-même et d'autres parties prenantes « ont pu, dans le passé, chercher à apporter des améliorations à la directive sur certains points », mais qu'il n'en reste pas moins que « les partenaires sociaux et le co-législateur européen, malgré l'impulsion de la Commission ou de certains États membres, ne sont pas parvenus à trouver un accord sur une révision de cette directive au cours des dix dernières années ». De surcroît, quand bien même il y aurait une opportunité politique d'aboutir, « il faudrait également s'assurer que le résultat final, en ajoutant des dérogations, ne vienne pas affaiblir plus généralement le contenu des droits des travailleurs. Par ailleurs, compte tenu des limites juridiques concernant le champ de compétences de l'Union européenne, la base juridique d'une proposition législative ne pourrait être que l'article 153 du TFUE, qui concerne exclusivement la notion de travailleurs ». Dès lors, « étant donné les contraintes et les incertitudes pesant sur l'usage de la voie législative au niveau européen », la Commission indique qu'elle « poursuivra l'analyse de la question, importante pour la France et les autres États membres, des incidences concrètes de l'arrêt Matzak sur l'organisation et le fonctionnement des services d'incendie et de secours, s'agissant en particulier des sapeurs-pompiers volontaires. La Commission continuera également à organiser des échanges d'information entre les autorités de la protection civile et les services d'urgence compétents des États membres concernés dans le cadre du Comité de protection civile. De plus, le dialogue engagé avec les autorités françaises devrait permettre d'apporter à ces questions la solution la plus adaptée ».

La Commission a également apporté une réponse détaillée et argumentée à l'avis politique sur l'adaptation des corridors de transport dans l'Union européenne dans le cadre du Brexit .

Sa proposition de règlement vise à introduire, dans le corridor Mer du Nord - Méditerranée, une liaison maritime spécifique entre, d'une part, deux ports irlandais faisant partie de ce corridor, et, d'autre part, les ports de Zeebrugge, Anvers et Rotterdam, sans toutefois mentionner les ports de Calais ni de Dunkerque. La commission des affaires européennes, après avoir mis en évidence l'insuffisance à la fois de la consultation préalable des parties prenantes, notamment des autorités françaises, et de la réflexion sur les adaptations du réseau de transport européen post-Brexit, a demandé le retrait de la proposition de la Commission en cas de retrait sans accord.

En réponse, celle-ci rappelle d'abord que son objectif « est d'assurer, à très court terme et dans la seule hypothèse d'une sortie du Royaume-Uni sans accord, la continuité du corridor Mer du Nord - Méditerranée entre l'Irlande et la partie continentale de l'Union ». Elle considère que, dans cette hypothèse, aujourd'hui d'ailleurs dépassée, « le corridor serait en effet coupé en deux et n'aurait plus de continuité géographique », ajoutant que « l'évolution des flux de transport dans une Union post-Brexit est à ce jour inconnue et dépendra très largement de la future relation entre le Royaume Uni et l'Irlande ».

La Commission explique avoir choisi de procéder en trois temps.

D'abord, des mesures immédiates pour garantir la continuité du corridor Mer du Nord - Méditerranée, dans le cas d'un Brexit dur : la Commission a proposé uniquement de mettre en évidence des liaisons maritimes existantes dans le seul corridor incluant le Royaume-Uni et l'Irlande, c'est-à-dire sur le corridor Mer du Nord - Méditerranée, sans en modifier l'alignement. Des services maritimes réguliers relient les ports irlandais de Dublin et de Cork, d'une part, et les ports néerlandais de Rotterdam et belges de Zeebrugge et Anvers, d'autre part. Cet ajustement est réalisé dans le règlement sur le mécanisme pour l'interconnexion en Europe (MIE) sur la période 2014-2020. Une telle adaptation n'entrerait en vigueur qu'en cas d'absence d'accord entre l'Union et le Royaume-Uni, et seulement jusqu'à la fin de 2020. Il s'agit donc, selon la Commission, d'une mesure d'urgence au périmètre limité, dont le but est de faire face aux conséquences immédiates d'un Brexit dur, et non de modifier d'autres corridors ou de revoir la logique des réseaux global et central du réseau transeuropéen de transport. C'est pourquoi cette proposition ne prévoit pas d'inclure dans les différents corridors de nouveaux ports français. La Commission précise toutefois que, au cours des négociations, elle ne s'est pas opposée à ce que se trouvent reliés entre eux, dans le contexte du corridor Mer du Nord-Méditerranée, d'autres ports irlandais et continentaux du réseau central. Dès lors, les colégislateurs ont ajouté dans le texte définitif les ports irlandais de Shannon Foynes, français du Havre, Calais et Dunkerque, belge de Gand, ainsi que néerlandais de Terneuzen et Amsterdam. Par ailleurs, l'accord prévoit une nouvelle priorité de financement du Mécanisme pour l'interconnexion en Europe, liée au Brexit et relative au financement des infrastructures nécessaires au contrôle des frontières externes. La Commission indique qu'elle prendra en compte cette priorité dans les nouveaux programmes de travail du MIE pour la période 2019-2020.

Le deuxième temps de sa démarche a consisté en des ajustements des corridors du réseau central dans le cadre du prochain cadre financier pluriannuel 2021-2027. Les négociations en cours sur le futur règlement sur le MIE pour cette période prennent déjà en compte certaines conditions effectives du Brexit : le Conseil et le Parlement européen ont proposé d'ajuster les tracés du corridor Mer du Nord - Méditerranée et du corridor Atlantique, mais aussi la possibilité de financer les ports du réseau global à travers le MIE ou encore les adaptations nécessaires au contrôle aux frontières.

Enfin, le réseau transeuropéen de transport fera l'objet d'une révision au plus tard en 2021. L'article 54 du règlement sur les réseaux transeuropéens de transport prévoit un réexamen du réseau central au plus tard en 2023. Cependant, la Commission s'est engagée à anticiper ce réexamen à 2021. Celui-ci pourra permettre une redéfinition du réseau global et du réseau central, y compris en ce qui concerne les ports français, notamment en fonction de prévisions d'évolution des flux de transport et de l'émergence de nouveaux services maritimes en direction de l'Irlande.

Sur la politique agricole commune (PAC) , à la réforme de laquelle la commission des affaires européennes est très attentive, il convient de rappeler que celle-ci avait considéré que le dialogue politique avec la Commission devait être poursuivi par l'adoption d'un nouvel avis politique, car la réponse apportée à l'avis politique initial, du 12 avril 2018, n'était pas satisfaisante - cette réponse « se borne essentiellement à énoncer une série de généralités, sans répondre de façon argumentée aux axes de réflexion défendus par le Sénat ». Cet exercice a été utile car la Commission a, cette fois, sensiblement mieux développé et argumenté sa réponse, même si les divergences de fond persistent.

La Commission dit avoir pris « très au sérieux » les craintes exprimées sur le nouveau modèle de mise en oeuvre de la politique agricole proposée. Celui-ci « repose sur un équilibre minutieux entre une flexibilité accrue pour les États membres et un cadre réglementaire commun, permettant de concilier l'exigence d'une politique plus performante et mieux adaptée aux contextes locaux, avec la nécessité non seulement de relever les défis économiques, environnementaux et sociaux à l'échelle européenne, mais aussi de préserver le marché unique, évitant ainsi tout risque de renationalisation. [Le nouveau cadre] abandonne les règles contraignantes au profit d'une approche axée sur la performance. Il en résultera une simplification importante pour les agriculteurs et les administrations ».

La Commission considère que le cadre réglementaire commun proposé sera à même d'assurer cet équilibre qui repose sur trois éléments-clefs détaillés dans une annexe à sa réponse.

Les trois éléments-clefs du nouveau cadre réglementaire commun

proposé par la Commission

Ce nouveau cadre réglementaire commun s'appuie sur :

- les exigences de base devant être obligatoirement mises en oeuvre par les États membres, notamment : les éléments essentiels des définitions de base (par exemple, celles de l'activité agricole ou des différentes surfaces agricoles) assurant que les principaux bénéficiaires des aides octroyées au titre de la PAC, et en particulier les paiements directs, restent bien les agriculteurs ; les règles communes relatives à la mise en oeuvre des paiements directs assurant que ces aides rempliront pleinement leur rôle de soutien au revenu des agriculteurs, via , par exemple, l'obligation d'attribution d'un soutien au revenu de base, ainsi que d'un paiement complémentaire redistributif, garantissant un soutien renforcé pour les petites et moyennes exploitations, l'introduction de la dégressivité et du plafonnement des aides directes, ou encore l'encadrement des aides couplées à la production ; le calendrier de versement de toutes les aides à la surface et animales, imposant aux États membres que toutes ces aides soient versées aux agriculteurs, au plus tard, le 30 juin de l'année suivant la demande d'aides ; la nouvelle architecture environnementale et climatique, fondée sur des règles communes de la conditionnalité devant être respectées par tous les agriculteurs percevant un soutien de la PAC, limitant les distorsions de concurrence du fait de contraintes environnementales hétérogènes, la mise en oeuvre obligatoire d'éco-régimes et des mesures environnementales et climatiques dans tous les États membres, un niveau minimum de dépenses égal à 30 % de l'enveloppe nationale du FEADER en faveur d'actions environnementales et climatiques ; un soutien spécifique pour aider les jeunes agriculteurs d'un montant global au moins égal à 2 % de l'enveloppe nationale dédiée aux paiements directs ;

- un système de performance, qui assure que la PAC atteigne ses neuf objectifs spécifiques, définis dans la proposition législative, dans les 27 États membres, soit exécutée, suivie et évaluée sur la base d'une liste commune d'indicateurs de réalisation, de résultat et d'impact et respecte les critères communs définis dans les propositions législatives, incluant la cohérence avec les règles européennes dans les domaines politiques connexes tels que l'eau, le climat et la biodiversité ;

- la supervision de la Commission, par l'intermédiaire de : l'approbation des plans stratégiques relatifs à la PAC établis par les États membres, l'apurement annuel des comptes des performances, vérifiant que les dépenses engagées correspondent aux réalisations et sont conformes aux structures de gouvernance de l'Union européenne et le suivi et l'évaluation de la mise en oeuvre des plans stratégiques à travers un examen annuel de performance, qui permet, en cas de non-atteinte des résultats escomptés, de requérir des plans d'action et, si nécessaire, de suspendre les dépenses.

Source : Commission européenne.

Sur les aspects budgétaires, la Commission considère avoir soumis « une proposition raisonnable et équilibrée » au titre du prochain cadre financier pluriannuel 2021-2027, soit 365 milliards d'euros alloués à la PAC.

S'agissant des modalités de sécurisation du revenu des agriculteurs, en particulier des outils de gestion des risques, la Commission « ne partage pas l'avis du Sénat selon lequel la proposition formulée correspondrait à un statu quo au regard de la situation actuelle telle qu'amendée par le récent règlement « Omnibus 2 ». En effet, les États membres auront la possibilité d'améliorer le fonctionnement et l'efficacité des instruments existants, et seront obligés d'expliquer comment la complémentarité des interventions entre les niveaux national et européen est garantie, afin de construire une architecture intégrée et cohérente du soutien à la gestion des risques ». La Commission rappelle que ses propositions prévoient deux principaux types d'outils de gestion des risques : les primes d'assurance et les fonds de mutualisation, financés par le deuxième pilier de la PAC, couvrant les pertes non seulement de production, mais également de revenus. De surcroît, l'octroi d'un soutien aux outils de gestion des risques devient obligatoire pour les États membres, mais il reviendra à ceux-ci d'en définir les conditions spécifiques et les règles d'éligibilité. Selon la Commission, « cette simplification et cette flexibilité permettront de traiter différents types de risques et de besoins [...] ». Pour assurer que l'agriculteur assume sa part de responsabilité et que l'orientation vers le marché de la PAC soit maintenue, l'intensité maximale de l'aide publique est de 70 %, tandis que le seuil minimal de perte fixé à 20 % est étendu à l'ensemble des interventions. De même, la possibilité de transférer des dotations entre les piliers de la PAC offre la flexibilité nécessaire aux États membres pour financer de manière adéquate ces interventions. Enfin, les États membres et les agriculteurs auront la possibilité de s'appuyer sur une plateforme européenne pour le renforcement des capacités et des échanges entre les acteurs privés et publics dans le but d'offrir de nouvelles possibilités de transfert de connaissances et de partage des meilleures pratiques, tout en facilitant la mise en oeuvre des outils concernés.

Pour ce qui concerne la gestion des crises, une nouvelle réserve agricole serait créée pour faire face aux crises engendrées par des développements imprévisibles des marchés internationaux ou par des chocs spécifiques sur le secteur agricole à la suite d'actions entreprises par des pays tiers. Son fonctionnement devrait être plus simple et plus flexible. Ainsi, pour financer cette réserve, il ne sera plus nécessaire de réduire, chaque année, les paiements directs aux agriculteurs et il sera possible de transférer les montants inutilisés de la réserve d'un exercice budgétaire à l'autre. Cette réserve servira à financer toutes les mesures de stockage, ainsi que toutes les mesures exceptionnelles dans le cadre de l'organisation commune des marchés, qui seront jugées nécessaires et adaptées à la sortie de crise.

Sur les règles de la concurrence, les modifications apportées au règlement « Omnibus » renforcent la position des producteurs dans la chaîne alimentaire : les producteurs peuvent dorénavant déroger aux règles de la concurrence s'ils constituent une organisation économique de producteurs reconnue, concentrée sur l'offre et mettant les produits de leurs membres sur le marché et exerçant véritablement des activités intégrées pour leurs membres, telles que le transport, le stockage, le contrôle de qualité, etc., dans l'objectif de protéger les organisations de producteurs reconnues. D'autres modifications ont également été apportées relatives aux critères de reconnaissance ou à la possibilité pour les agriculteurs et leurs associations de solliciter l'avis de la Commission.

Pour ce qui concerne les accords d'échanges commerciaux, la Commission s'emploie à faire en sorte que l'approvisionnement alimentaire de l'Union soit le plus sûr au monde et que les mêmes normes de sécurité alimentaire s'appliquent à tous les produits, quelle que soit leur origine. Cela signifie que toutes les importations dans l'Union européenne doivent respecter les normes européennes de sécurité alimentaire ou, à tout le moins, des normes équivalentes.

Enfin, sur le calendrier de mise en oeuvre, la Commission estime que « l'ampleur des défis que le secteur agricole européen doit relever dans un avenir proche ne permet pas [...] d'attendre la fin de la période du prochain cadre financier pluriannuel 2021-2027 pour ajuster et amender la politique agricole de l'Union ».

L'avis politique relatif à la politique de concurrence de l'Union européenne , adopté à l'occasion du projet d'acquisition d'Alstom par Siemens, a reçu une réponse relativement complète de la Commission, même si celle-ci réfute les arguments sénatoriaux. Par cet avis, la commission des affaires européennes souhaitait en effet que la fusion d'Alstom et de Siemens soit autorisée « afin de faire de la nouvelle entité un champion industriel européen au niveau mondial ».

La Commission rappelle qu'elle a examiné ce projet d'acquisition en vertu du règlement (CE) n° 139/2004 du Conseil du 20 janvier 2004 relatif au contrôle des concentrations entre entreprises. Elle met en avant quatre séries d'arguments pour étayer son analyse.

Premièrement, elle rappelle avoir conclu que « la concentration aurait porté atteinte à la concurrence sur les marchés des systèmes de signalisation ferroviaire et des trains à très grande vitesse, restreignant ainsi le choix des clients, notamment les opérateurs ferroviaires et les gestionnaires d'infrastructure ferroviaire, en termes de fournisseurs et de produits ». Elle est parvenue à cette décision en étudiant l'impact d'une telle concentration non seulement sur le marché européen, mais aussi en prenant en compte les concurrents au niveau mondial, « provenant notamment de Chine, et les perspectives qui se dessinent sur ce marché à moyen terme » La Commission indique avoir reçu plusieurs plaintes « émanant de clients, de concurrents, d'associations professionnelles et de syndicats. Elle a aussi reçu des observations négatives de plusieurs autorités nationales de la concurrence de l'Espace économique européen ». Elle fait observer que, « étant donné que Siemens et Alstom n'étaient pas disposés à proposer des mesures correctives suffisantes pour remédier de manière adéquate à ces préoccupations », et « après un avis positif du Comité consultatif auquel aucun État membre ne s'est opposé », elle a interdit la concentration « afin de protéger la concurrence dans le secteur ferroviaire européen ».

Deuxièmement, la Commission, estimant que « la concurrence est un catalyseur de la compétitivité et non un obstacle », expose sa conception de la concurrence : « Elle incite [...] les consommateurs à « choisir européen », non pas tant parce qu'ils y seraient encouragés par la législation, mais parce que l'offre européenne se révèle bien souvent la plus compétitive ».

Troisièmement, la Commission insiste sur le fait qu'elle « réexamine en permanence ses outils et processus en matière de concurrence, en les réformant ou en les adaptant le cas échéant ». À ce titre, elle note avoir entamé une réflexion sur le problème des petits innovateurs rachetés par des grandes entreprises pour les éliminer du marché. Elle indique également que son évaluation de certains aspects procéduraux et juridictionnels du contrôle des concentrations dans l'Union européenne a mis l'accent sur la possibilité de simplifier davantage les procédures de ce contrôle et sur l'efficacité des seuils juridictionnels actuels. Elle envisage de rationaliser le système de renvoi en vue d'une répartition appropriée des affaires entre la Commission et les autorités nationales. Elle rappelle qu'en 2016, trois experts indépendants ont publié un rapport évaluant la pratique de la Commission en matière de définition du marché géographique en cas de concentration. Enfin, elle note qu'un accord politique a été conclu en novembre 2018 sur un cadre européen pour le filtrage des investissements directs étrangers, point sur lequel insistait l'avis politique.

Quatrièmement, la Commission rappelle que les règles de la concurrence et les objectifs de la politique industrielle coexistent depuis 1958 « sans que cela n'empêche les États membres de poursuivre leurs objectifs industriels » et estime que le contrôle des concentrations n'a posé aucun obstacle à la création d'un certain nombre de puissants acteurs basés en Europe, « lorsque cela ne nuit pas à la concurrence ou lorsque des solutions sont proposées pour équilibrer les problèmes de concurrence, comme en témoignent les autorisations inconditionnelles de la fusion entre Essilor et Luxottica ou les acquisitions d'Opel par Peugeot, de Gamesa par Siemens ou d'AlcatelLucent par Nokia ». Selon elle, « le contrôle des concentrations interdit uniquement les fusions et acquisitions impliquant l'élimination de concurrents et entravant, ce faisant, une concurrence saine dans l'Espace économique européen ». Enfin, la Commission fait observer qu'elle n'intervient pour protéger la concurrence que dans les cas où cela est vraiment nécessaire et rappelle qu'au cours des dix dernières années, elle a autorisé plus de 3 000 fusions et n'en avait interdit que sept jusqu'à aujourd'hui.

La réponse de la Commission à l'avis politique sur les normes sociales européennes applicables au secteur des transports est, elle aussi, complète et argumentée, des précisions étant apportées dans une annexe qui reprend chacune des quatre parties de l'avis politique : le régime de détachement des travailleurs dans le transport routier international de marchandises, le transport aérien, la révision des règlements de coordination de sécurité sociale et l'Autorité européenne du travail et la lutte contre les entreprises dites « boîtes aux lettres ».

Sur le régime du détachement dans le transport routier international de marchandises, la Commission prend note du soutien apporté par la commission des affaires européennes au compromis du Conseil concernant les propositions du « paquet Mobilité I », plus particulièrement sur les règles de cabotage. Pour ce qui est des regrets exprimés dans l'avis politique sur le fait que les normes sociales du pays d'accueil ne s'appliquent pas au travailleur détaché dès le premier jour de livraison internationale, la Commission rappelle « l'importance d'avoir des mesures proportionnées et adaptées aux spécificités du transport routier international et à son caractère extrêmement mobile ». Un compromis a été trouvé, en avril dernier, sur les propositions sociales et celles relatives au marché intérieur du « paquet Mobilité I » ; la Commission « a bon espoir qu'un accord pourra être conclu dans un avenir proche ».

Pour ce qui concerne le transport aérien, et alors que l'avis politique appelle à un encadrement européen du statut d'indépendant pour éviter les fraudes et à la mise en place d'un régime européen du travailleur hautement mobile, la Commission appelle l'attention de la commission des affaires européennes sur son rapport de mars 2019, intitulé Stratégie de l'aviation pour l'Europe : maintenir et promouvoir des normes sociales élevées , dont il ressort que, si le secteur du transport aérien est en effet affecté par des pratiques de nature diverse, le secteur reste, de manière générale, une source d'emploi majeure et très attractive. Par ailleurs, la Commission rappelle l'existence d'un ensemble de règles à la fois européennes et nationales visant à protéger les travailleurs et s'appliquant pleinement au personnel navigant. Enfin, elle considère qu'une mise en oeuvre appropriée des règles existantes par les États membres devrait suffire à éviter des pratiques frauduleuses et illégales et garantir des conditions de concurrence loyale. La Commission cite son même rapport pour répondre au souhait de la commission des affaires européennes que la base d'exploitation soit la référence pour l'application du droit du travail aux salariés des compagnies aériennes : ce rapport précise qu'une étude est en cours et devrait permettre à la Commission d'évaluer la nécessité éventuelle de mesures supplémentaires visant à améliorer le fonctionnement du marché intérieur de l'aviation, afin, en particulier, d'améliorer la sécurité juridique des contrats de travail du personnel navigant hautement mobile. Ces différents aspects sont donc pris en compte.

Sur la révision des règlements de coordination de sécurité sociale, la Commission indique d'abord que sa proposition clarifie les règles actuelles et améliore la coopération entre les États membres. Un certain nombre d'ajustements ciblés ont été introduits afin de renforcer les outils administratifs permettant de garantir que les règles existantes soient rigoureusement appliquées et que les autorités nationales disposent de moyens adéquats pour vérifier le statut de la sécurité sociale des travailleurs qui exercent une activité dans un autre État membre et pour faire face à des pratiques ou abus potentiellement déloyaux. Par exemple, la proposition renforce les obligations des institutions qui délivrent un document portable A1 afin qu'elles évaluent l'exactitude des informations fournies dans ce document. Elle introduit également des délais clairs pour les échanges d'informations entre les autorités nationales. Une nouvelle recommandation a également été adoptée sur la délivrance du document portable A1, en particulier sur les dispositifs d'authentification permettant de prévenir tout risque de falsification. Ensuite, la Commission précise que, bien que sa proposition ne prévoie pas la possibilité pour l'État membre d'accueil de rejeter les documents portables Al falsifiés ou frauduleux, la jurisprudence de la Cour de justice de l'Union européenne dans ce domaine doit être respectée par tous les États membres. Par ailleurs, l'accord provisoire prévoit un retrait ou une rectification rétroactive du document portable Al sans retard, dans les cas où il n'y a aucun doute que le demandeur ait commis une fraude. La Commission fait ensuite observer qu'elle n'a certes pas proposé de créer un numéro de sécurité sociale européen, mais qu'elle poursuit les études concernant diverses solutions techniques et l'évaluation des coûts et avantages d'un numéro de sécurité sociale européen : « Ceci pourrait accélérer et faciliter les échanges entre les personnes et les administrations en situation transfrontalière ». Enfin, elle précise avoir proposé d'améliorer la coopération entre les États membres et de prévoir un calendrier juridiquement contraignant pour les échanges d'informations entre les institutions.

Pour ce qui concerne l'Autorité européenne du travail et la lutte contre les entreprises dites « boites aux lettres », la Commission note que l'Autorité pourra « garantir une mise en oeuvre efficace de l'acquis communautaire dans les domaines de la mobilité du travail et de la coordination de la sécurité sociale ». Elle reconnaît qu'il n'est pas prévu que l'Autorité puisse constituer un registre d'entreprises réalisant des prestations de service au sein de plusieurs États membres afin de mieux cerner les entreprises « boîtes aux lettres », comme le demande l'avis politique, mais estime que ce sujet « est bien présent dans la programme de travail de la plateforme luttant contre le travail non déclaré, laquelle à terme sera placée sous la responsabilité de l'Autorité européenne du travail ».

La Commission s'est efforcée de se montrer convaincante dans sa réponse au dernier avis politique de la commission des affaires européennes relatif à la réforme de la politique agricole commune (PAC) , d'autant plus que, comme il a été expliqué plus haut, les informations initialement délivrées sur ce sujet particulièrement important pour la France, étaient pour le moins de faible valeur ajoutée. Il n'en demeure pas moins que, sur le fond, les positions restent largement divergentes. La Commission indique d'ailleurs avoir déjà répondu à l'ensemble des préoccupations soulevées par la commission des affaires européennes, mais « se réjouit d'avoir ainsi la possibilité d'apporter un certain nombre de précisions complémentaires [...], en particulier sur l'ambition renouvelée et accrue de la prochaine PAC en matière d'environnement et de climat ainsi que sur le gain de simplification apporté par le nouveau modèle de mise en oeuvre proposé ».

Pour ce qui concerne l'environnement et le climat, la Commission développe cinq arguments.

Premièrement, l'environnement et le climat seront directement couverts par l'un des trois objectifs généraux proposés, qui, « pour la première fois », inclura un lien explicite avec les objectifs plus larges de l'Union en la matière. Ils se retrouveront ensuite directement associés à trois des neuf objectifs spécifiques portant sur le changement climatique, l'utilisation efficace des ressources naturelles, la biodiversité et les paysages. Deuxièmement, en étant axé davantage sur les résultats et moins sur le respect de règles détaillées et définies à l'échelon de l'Union européenne, le nouveau modèle de mise en oeuvre permettra d'atteindre efficacement ces objectifs : chaque État membre devra élaborer un plan stratégique national relevant de la PAC, dans lequel il présentera une analyse de la situation sur son territoire, se fixera des cibles quantifiées en lien avec ces objectifs et définira, dans le respect du cadre réglementaire commun, les interventions permettant d'atteindre ces cibles. Troisièmement, la nouvelle « architecture verte » de la future PAC s'appuiera sur un nouveau système de conditionnalités s'appliquant à tous les paiements liés à la surface et à l'animal versés au titre des deux piliers de la PAC. De nouvelles exigences et normes seront ajoutées (eau, utilisation durable des pesticides, protection des zones humides et des tourbières et utilisation de l'outil de gestion des nutriments pour une agriculture durable), des normes actuelles seront renforcées (obligation de rotation des cultures remplaçant l'obligation de leur seule diversification, interdiction de laisser le sol nu pendant les périodes sensibles et exigence de dédier des surfaces non productives à la protection de la biodiversité). Les États membres bénéficieront d'une certaine souplesse dans la mise en oeuvre de la conditionnalité, mais leur approche sera désormais soumise à l'approbation de la Commission dans le cadre de leur plan stratégique PAC. Quatrièmement, au titre du premier pilier de la PAC, les États membres devront mettre en place des « éco-régimes » : il s'agira d'un nouveau moyen, facultatif pour les agriculteurs, d'utiliser le financement des paiements directs pour rémunérer les services environnementaux et climatiques rendus par l'activité agricole, les États membres demeurant libres de déterminer leur contenu. Au titre du second pilier, l'éventail complet des mesures actuelles en matière d'environnement et de climat restera disponible, depuis les paiements liés à la surface et à l'animal et le soutien aux investissements, au renforcement des connaissances, à l'innovation et à la coopération. Les États membres devront consacrer au moins 30 % de leur financement aux objectifs spécifiques de la PAC liés à l'environnement et au climat. Enfin, ils seront explicitement tenus de démontrer, dans leur plan stratégique PAC, une plus grande ambition en matière d'environnement et de climat - c'est le principe dit de « non-régression ».

Pour ce qui concerne la simplification, la Commission rappelle que la complexité de la PAC actuelle « a conduit à repenser fondamentalement la gouvernance de la politique agricole et à proposer, pour cette future PAC, une nouvelle répartition des responsabilités entre l'Union européenne et l'échelon national pour la définition et la mise en oeuvre des règles et des interventions en faveur des agriculteurs ». Selon la Commission, ce nouveau modèle, plus flexible, « favorisera le développement des nouvelles technologies numériques permettant un allégement considérable de la charge administrative liée à la gestion de la PAC, tant pour les agriculteurs que pour les administrations nationales ».

• Sur plusieurs sujets, en revanche, la Commission n'apporte que des réponses trop partielles, voire superficielles aux avis politiques de la commission des affaires européennes.

La Commission a ainsi apporté une réponse excessivement générale à l'avis politique relatif à la responsabilisation partielle des hébergeurs de contenus numériques .

Alors que la commission des affaires européennes avait souligné l'obsolescence du régime de responsabilité allégé institué par la directive 2000/31/CE, dite directive sur le commerce électronique, et réclamé une évolution du cadre légal visant à créer un statut intermédiaire entre celui d'hébergeur et celui d'éditeur, la Commission s'est limitée à réaffirmer sa position initiale, sans guère la justifier. Certes, elle « prend très au sérieux les préoccupations exprimées par le Sénat quant à la nécessité de réviser la directive sur le commerce électronique » - la commission des affaires européennes avait notamment mis en évidence « l'affaiblissement de nos démocraties » illustré par les suspicions d'immixtions étrangères dans le déroulement de plusieurs élections particulièrement importantes. Cependant, la Commission renvoie à sa communication sur les plateformes en ligne et le marché unique numérique de 2016 et indique qu'elle « a choisi de maintenir à ce stade ce régime général de responsabilité ». Ce dernier a certes été « conçu à une époque où les plateformes en ligne n'avaient pas les caractéristiques ni la taille qu'elles présentent aujourd'hui », mais « il a permis de créer un environnement réglementaire technologiquement neutre qui a grandement contribué à leur expansion ». Un tel développement, pour la Commission, « est dû en partie à l'harmonisation des exonérations de responsabilité de certains types de plateformes en ligne en ce qui concerne les contenus ou activités illicites dont elles n'ont ni connaissance ni le contrôle ». La Commission reconnaît certes l'existence de « plusieurs problèmes spécifiques », concernant les contenus et activités en ligne illicites et préjudiciables, les médias audiovisuels, le droit d'auteur ou la loyauté des plateformes. Mais elle n'apporte aucune information sur la façon dont elle entend régler chacun de ces problèmes.

La Commission a apporté une réponse peu satisfaisante, car incomplète, à l'avis politique portant sur le suivi des conclusions de la commission d'enquête du Sénat sur Schengen .

En effet, elle en reste trop souvent au niveau des principes, ne fournit que des informations de nature générale, qui sont déjà largement connues, et passe sous silence plusieurs questions pourtant importantes posées par l'avis politique. Ainsi, elle se félicite du soutien exprimé par la commission des affaires européennes à la zone de libre circulation que constitue l'espace Schengen et se dit « convaincue de la nécessité de modifier les règles applicables à la réintroduction temporaire de contrôles aux frontières intérieures afin de veiller à ce que de tels contrôles soient uniquement instaurés pendant le temps nécessaire et de manière proportionnée. La réintroduction de contrôles aux frontières intérieures devrait être une mesure de dernier recours, à n'utiliser que dès lors que d'autres mesures ne seraient pas aussi efficaces ». Cette position est aussi celle de la commission des affaires européennes, mais la Commission ne donne pas d'indications sur les négociations en cours sur la révision du code frontières Schengen.

La Commission précise que le nouveau mandat renforcé de l'Agence européenne de garde-frontières et de garde-côtes (Frontex) confirme que les dispositions relatives à la souveraineté nationale demeurent inchangées, les États membres pouvant continuer d'effectuer des contrôles aux frontières. En revanche, les moyens de Frontex seront renforcés de manière à soutenir les États membres confrontés à des problèmes à leurs frontières. Il est regrettable que la Commission n'ait pas donné plus de détails sur le renforcement de ces moyens. De même, elle n'évoque pas la question, soulevée dans l'avis politique, d'une future police aux frontières européennes.

La réponse de la Commission sur les deux « paquets asile » illustre le caractère excessivement général des informations apportées. Elle se limite en effet à rappeler que « des progrès notables ont été enregistrés au cours des deux dernières années », et que « cinq des sept propositions présentées par la Commission font l'objet d'un large accord politique » et estime qu' « une forte impulsion politique est nécessaire pour conclure l'ensemble de la réforme, y compris le règlement sur les procédures d'asile et le règlement de Dublin ». Certes... Pour autant, elle ne donne aucune indication sur les pistes envisageables pour aboutir. De même, sur le droit d'asile, elle ne dit rien de la façon de distinguer les réfugiés des migrants obéissant à des considérations économiques. Elle rappelle simplement que, à la suite des conclusions du Conseil européen de juin 2018, elle avait publié un document de réflexion sur les centres contrôlés, qui « ne sont pas la solution unique pour toutes les situations, mais [...] devraient être considérés comme un concept flexible qui, dans la pratique, peut contribuer à améliorer la gestion des flux migratoires mixtes et à limiter les mouvements secondaires ».

La réponse est tout aussi vague sur le lien entre efficacité de la politique migratoire européenne et approfondissement de la coopération avec les pays d'origine et de transit des migrants. Aucune information n'est donnée sur la mise en oeuvre concrète des engagements pris, par exemple à travers le Fonds fiduciaire d'urgence pour l'Afrique ou l'implication de la Banque européenne d'investissement en matière de développement.

La Commission se veut rassurante sur les conséquences de la réforme du code communautaire des visas pour ce qui concerne l'application progressive de mesures restrictives potentielles. En effet, sa proposition offre cette souplesse dans la mesure où, si le mécanisme est déclenché, les mesures précises seront adoptées au moyen d'un acte d'exécution et adaptées à la situation dans des cas particuliers. En revanche, elle indique avoir exclu la possibilité d'un mécanisme de levier positif au bénéfice des États tiers coopératifs en matière de retours de leurs ressortissants, qu'elle considère « comme difficile à gérer ». Elle précise qu' « une majorité d'États membres était favorable à ce choix, d'autant plus que l'application pleine et entière des nouveaux dispositifs proposés constitue une incitation à une bonne coopération en matière de retour ».

Les informations utiles sont également absentes de sa réponse pour ce qui concerne l'interopérabilité des systèmes d'information européens. Elle indique seulement que « l'interopérabilité facilitera mais n'étendra pas l'accès aux données sous-jacentes, notamment en ce qui concerne les agences européennes, qui continuera à être régi par les dispositions des bases juridiques des systèmes sous-jacents » Elle n'évoque pas, en revanche, l'accès d'Europol à ces systèmes d'information.

Enfin, le Commission évoque les négociations en cours sur le prochain cadre financier pluriannuel, sans fournir aucune information chiffrée, même globale, se limitant à faire part de sa volonté « de doter l'Union de meilleurs moyens de répondre aux besoins dans les domaines de la migration et de la sécurité et de faire face à d'éventuels événements imprévisibles ». Elle note que les investissements dans les systèmes informatiques, leur interopérabilité et les réseaux de communication constituent d'importantes priorités dans les domaines de la migration, de la gestion des frontières et de la sécurité. Elle précise également que « certains investissements dans les technologies de l'information peuvent même bénéficier d'un taux de cofinancement supérieur au taux habituel ».

Par ailleurs, la Commission ne mentionne pas la question de la transposition de la directive PNR, ni l'éventuelle extension du champ d'application de cette dernière aux modes de transports autres qu'aérien, pourtant évoquées dans l'avis politique, pas plus que les mesures qu'elle devrait prendre pour mieux informer les parlements nationaux des résultats de l'évaluation de l'acquis de Schengen.

La Commission a donné une réponse dilatoire à l'avis politique sur le taux réduit de TVA pour la filière équine .

Cet avis politique saluait l'initiative visant à rendre plus de liberté aux États membres dans le choix des secteurs pouvant bénéficier d'un taux réduit de TVA, mais exprimait aussi des doutes sur l'obligation de respecter un taux moyen pondéré supérieur à 12 %, en raison de « difficiles arbitrages entre les secteurs susceptibles de bénéficier d'un taux réduit ». Sur ce dernier point, la Commission se contente de prendre note... Elle confirme par ailleurs que la négociation de sa proposition, qui date de 2016, constitue bien une priorité, ce dont on peut douter puisque son entrée en vigueur est prévue pour le 1 er juillet 2022. D'ici là, la Commission indique qu'il convient d'appliquer la directive TVA dans sa rédaction actuelle. Elle rappelle que la Cour de justice de l'Union européenne avait jugé que ces règles actuelles ne permettaient pas à la France d'appliquer un taux réduit aux opérations relatives aux équidés, notamment aux chevaux lorsque ceux-ci ne sont normalement pas destinés à être utilisés dans la préparation des denrées alimentaires ou dans la production agricole, et qu'il reste à notre pays, à l'exemple de l'Irlande, de modifier sa législation pour se conformer aux dispositions de la directive TVA. En revanche, elle ne donne aucune information sur plusieurs points de l'avis politique tels que l'importance de la filière équine comme créatrice de richesses économiques et sociales, participant à ce titre à la vitalité des territoires ruraux, la demande d'évolution de l'interprétation que la Commission donne de certaines dispositions de la directive TVA ou encore l'élargissement de l'interprétation à la notion d'élevage.

La même appréciation peut être portée sur la réponse, trop parcellaire, de la Commission à l'avis politique sur la réforme de l'Autorité européenne de sécurité des aliments .

Elle consacre de longs développements à rappeler les objectifs de sa proposition : améliorer la transparence de l'évaluation des risques dans la chaîne alimentaire en fournissant aux citoyens un accès plus large aux informations communiquées à l'Autorité européenne de sécurité des aliments, faire en sorte que cette dernière puisse consulter un ensemble de données scientifiques pertinentes aussi vaste que possible, assurer la pérennité du système d'évaluation des risques de l'Union, en associant mieux les États membres à la structure de gouvernance et aux groupes scientifiques de l'Autorité. En effet, un bilan de qualité de la législation alimentaire générale avait mis en évidence un certain nombre de préoccupations relatives à la capacité de l'Autorité à maintenir un niveau élevé d'expertise scientifique sur la base du système existant de nomination des experts, l'Autorité éprouvant notamment des difficultés à attirer de nouveaux experts.

La Commission « tient à rassurer le Sénat sur le fait qu'elle est pleinement consciente de l'importance de veiller à l'innovation et à la compétitivité dans la chaîne alimentaire ».

Elle indique ainsi que sa proposition prévoit des garanties spécifiques pour la protection des informations confidentielles dûment justifiées et que les dispositions proposées respectent les droits de propriété intellectuelle existants, les règles relatives à l'exclusivité des données et la protection des données à caractère personnel. La possibilité, demandée par l'avis politique, de publier toutes les études et informations scientifiques étayant les demandes d'autorisation une fois ces dernières considérées comme valables a été examinée de manière plus approfondie au cours des négociations. Un accord a pu être trouvé entre les colégislateurs afin que cette publication ait lieu à un stade peu avancé du processus d'évaluation des risques. La Commission fait également remarquer que sa proposition prévoit en outre des audits et des contrôles par des inspecteurs de l'Union, qui fourniront des assurances supplémentaires sur la qualité et l'objectivité des études utilisées par l'Autorité pour son évaluation des risques.

Sur la gestion des conflits d'intérêts, la Commission indique que l'Autorité « ne cesse de mettre à jour et de renforcer sa politique en matière d'indépendance et de gestion des intérêts concurrents. Sa politique révisée a été adoptée en juin 2017 et est jugée solide et restrictive ». Elle ajoute que la politique d'indépendance de l'Autorité a fait l'objet d'audits de la Cour des comptes européenne et du service d'audit interne de la Commission.

Alors que l'avis politique appelait à une augmentation du budget de l'Autorité, la Commission indique que sa proposition, dans le contexte des négociations du prochain cadre financier pluriannuel, tend à une hausse de 62,5 millions d'euros de ce budget.

En revanche, la Commission ne répond pas à plusieurs préoccupations de la commission des affaires européennes telles que la création d'un registre des études, la mise en place d'une procédure d'appel en cas de désaccord entre l'Autorité et un exploitant du secteur alimentaire sur la confidentialité de certaines données ou encore la publication des évaluations réalisées par l'Autorité des déclarations publiques d'intérêts qui lui sont soumises ni de la publication des résultats de l'évaluation indépendante des règles de conflits d'intérêts en vigueur au sein de l'Autorité.

La réponse donnée par la Commission à l'avis politique sur le futur programme-cadre pour la recherche et l'innovation « Horizon Europe » est, elle aussi, trop lacunaire.

Après avoir rappelé que « Horizon Europe » repose sur trois piliers - science ouverte, défis mondiaux et compétitivité industrielle, innovation ouverte - accompagnés de différentes actions visant à renforcer l'espace européen de la recherche, elle fournit plusieurs précisions dans l'annexe jointe à sa réponse.

Sur la réévaluation de la politique de concurrence visant à l'inscrire dans une véritable stratégie industrielle et permettre un soutien public accru à des filières stratégiques porteuses de croissance économique et de création d'emplois, la Commission, après de longs développements de nature théorique sur les concepts de droit de la concurrence et politique industrielle, qui « ne sont pas incompatibles, mais complémentaires », rappelle qu'elle a engagé une évaluation des règles de la politique d'aides d'État, début 2019, et qu'elle proposera « de nouvelles règles - à travers le règlement général d'exemptions par catégories - qui faciliteront de manière significative les aides d'État accordées pour certains projets de recherche et d'innovation, dont certaines activités sont financées par le programme-cadre ». Elle indique également être « en train de revoir une série de lignes directrices, ainsi que le règlement relatif à certaines catégories d'accords de recherche et de développement ». Il s'agit de veiller à ce que l'application des règles ait un impact positif sur l'innovation.

Sur ce point, la réponse de la Commission illustre, une fois encore, les limites de sa méthode du point de vue des assemblées parlementaires qui l'interpellent, de sa méthode : elle cherche moins à répondre aux questions soulevées qu'à justifier une nouvelle fois sa démarche et ses choix. Ce n'est pas l'objectif du dialogue politique. Au final, la commission des affaires européennes n'a obtenu aucune information nouvelle sur la souplesse demandée dans la gestion d'un programme-cadre de sept ans, ni sur le caractère non limitatif de la liste des missions, ni sur la meilleure prise en compte de la recherche et de l'industrie spatiales dans le programme-cadre, avec la création d'un pôle spatial au sein du second pilier de « Horizon Europe ». Elle n'a pas non plus reçu de réponse sur des sujets plus généraux abordés à titre liminaire par son avis politique, tels que la création du Conseil européen de l'innovation, sur la synergie à accroître avec les autres financements européens, les fonds de cohésion en particulier, ou encore l'ouverture des programmes de recherche aux régions ultrapériphériques.

En revanche, la Commission est plus précise lorsqu'elle indique que « Horizon Europe » renforcera la coopération internationale et que « le programme poursuivra son ouverture générale à la participation, lancera des actions ciblées de coopération internationale d'une ampleur sans précédent et étendra les possibilités d'ouverture d'association des pays tiers ». L'objectif est de faire du programme européen « un programme mondial pour la science ouverte et l'innovation ouverte ». Lorsque les programmes seront officiellement établis, la Commission entamera des discussions avec les pays tiers intéressés afin de négocier un accord couvrant leur participation aux programmes liés à la période 2021-2027 : ainsi, « une fois que le Royaume-Uni sera devenu un pays tiers, il pourrait être éligible à une association avec « Horizon Europe » selon les conditions établies dans l'acte de base », ce qui donne satisfaction à la commission des affaires européennes du Sénat.

À l'interrogation figurant dans l'avis politique sur la non-reconduction du programme relatif à l'éducation à la science dans « Horizon Europe », la Commission apporte une réponse longue, mais convenue. « L'enseignement scientifique constitue la base de la pleine réalisation de l'espace européen de la recherche », écrit-elle... Elle précise toutefois que l'enseignement des sciences constitue bien une priorité pour elle et fait partie des actions de l'Union « dans le contexte du programme-cadre Horizon 2020, en particulier des actions « Science avec et pour la société » (SwafS) et de la recherche et de l'innovation responsables ». Elle cite également les avancées permises sur la base du rapport Rocard de 2007, qui visait à stimuler l'enseignement scientifique dans l'enseignement préscolaire, primaire et secondaire, ou encore le rapport Hazelkorn de 2014 consacré à l'éducation aux sciences pour une citoyenneté responsable, dont les recommandations seraient « reflétées dans l'actuel programme de travail SwafS sous Horizon 2020 ».

Enfin, la Commission omet de répondre aux développements de l'avis politique relatifs à l'effort financier en faveur de la recherche et l'innovation dans l'Union européenne.

Sur l'avis politique relatif à la stratégie européenne pour l'intelligence artificielle , la réponse de la Commission est presque inexistante.

Sur un sujet aussi important, qui vise à augmenter la compétitivité future de l'industrie européenne, la commission des affaires européennes avait évoqué de nombreux aspects et formulé plusieurs suggestions, par exemple au sujet de la création d'espaces européens de données, des actions de formation au numérique et à l'intelligence artificielle, des efforts d'investissement dans un secteur où les États-Unis et la Chine ont de l'avance, de la coopération entre entreprises, laboratoires de recherche et université, ou encore de l'existence de marges de manoeuvre nationales.

La Commission n'apporte de réponse sur aucun de ces sujets, se limitant à souligner une convergence sur le fait qu' « il est nécessaire que l'Union européenne avance de manière coordonnée pour apporter une réponse globale aux défis que posera le développement de l'intelligence artificielle »... Tout juste prend-elle « bonne note de l'appel à la création d'un projet important d'intérêt européen commun pour l'intelligence artificielle ». Elle indique qu'elle « prendra en compte cet appel quand elle engagera les consultations avec les États membres sur les prochaines étapes de l'implémentation de la stratégie pour le développement de l'intelligence artificielle en Europe ».

La Commission a apporté une réponse rapide et dépourvue d'informations utiles à deux avis politiques portant sur les services financiers, sujet pourtant particulièrement sensible dans un contexte marqué à la fois par des perturbations économiques persistantes et par des débats et réformes d'ampleur visant à instaurer une Union des marchés de capitaux et une Union bancaire.

Il s'agit, en premier lieu, de l'avis politique sur la révision du cadre européen applicable aux entreprises d'investissement .

Par cette proposition, la Commission cherche à améliorer le cadre réglementaire applicable aux entreprises d'investissement, notamment en renforçant la stabilité financière et l'efficacité des marchés des capitaux dans l'objectif de finaliser l'Union des marchés des capitaux. Néanmoins, alors que l'avis politique soulève plusieurs difficultés, sur le périmètre du cadre prudentiel européen, sur le régime d'équivalence applicable aux entreprises d'investissement établies dans les pays tiers et sur l'absence d'analyse d'impact, la réponse de la Commission n'est qu'allusive. Ainsi se borne-t-elle à en prendre note et faire observer que « ces sujets ont [...] été débattus en détail au cours des négociations ayant abouti à un accord politique en avril dernier entre la Commission et les colégislateurs » : cet accord élargit le périmètre des entreprises soumises au cadre prudentiel bancaire au-delà des seules entreprises considérées comme d'importance systémique et définit un cadre plus contraignant pour le régime d'équivalence applicable aux pays tiers, sans pour autant fermer les marchés européens. Selon la Commission, ce nouveau cadre devrait inciter les pays tiers à mettre en place des cadres règlementaires convergeant avec le nôtre et assurer des règles de concurrence équitables pour les entreprises européennes. Mais, au-delà de ces généralités, aucune précision n'est apportée sur les dispositions nouvelles ainsi introduites. De même, certaines questions sont ignorées, telles que la sous-traitance hors de l'Union européenne, l'obligation pour une entreprise d'investissement de pays tiers de créer une succursale au sein de l'Union ou encore le processus d'instruction de l'octroi de l'équivalence à un pays tiers. Enfin, les critiques de l'avis politique sur l'absence d'analyse d'impact sont passées sous silence.

Le second avis politique en matière financière faisant l'objet d'une réponse superficielle de la part de la Commission concerne la réforme des autorités européennes de surveillance financière , qui s'inscrit dans le même contexte de développement de l'Union des marchés des capitaux. Ici aussi, la Commission ne va guère plus loin que « prendre note » des remarques formulées par la commission des affaires européennes. Elle considère que, « si l'accord trouvé entre le Parlement européen et le Conseil peut paraître modeste au regard des ambitions initiales de la Commission, notamment en matière de gouvernance et de modalités de financement, il n'en demeure pas moins que le texte agréé contient d'importantes améliorations dans plusieurs domaines, qu'il s'agisse du rôle et des pouvoirs conférés au président de chaque autorité, de la convergence des pratiques de supervision nationale, de leur rôle accru en matière de protection des consommateurs, de la prise en compte des dimensions sociales et environnementales, de leur rôle au plan international ». Elle rappelle aussi être chargée de publier en 2021 un rapport général sur « l'expérience tirée du fonctionnement de chaque autorité et de leur exercice des pouvoirs qui leur sont conférés par les règlements de base », ce qui lui ouvre la possibilité de formuler de nouvelles propositions, le cas échéant, à l'aune des conclusions de ce rapport. Néanmoins, sa réponse à l'avis politique demeure elliptique et ne vise aucun des points précisément mis en évidence.

La réponse de la Commission à l'avis politique portant sur la coopération judiciaire en matière pénale et la mise en oeuvre du Parquet européen peut, elle aussi, être considérée comme très insuffisante, dans la mesure où elle est partielle. Elle n'évoque qu'un seul point du texte de la commission des affaires européennes, celui de l'extension, proposée par la Commission, du champ de compétences du Parquet européen aux infractions terroristes transfrontières, et reste silencieuse sur l'ensemble des autres points.

Ainsi, la Commission estime que « le Parquet européen, en tant que seul organe de l'Union doté du pouvoir de conduire des enquêtes pénales et de poursuivre les auteurs d'infractions pénales, est idéalement adapté à l'établissement d'une approche européenne en matière de lutte antiterroriste, ce qui inclut toutes les étapes, de la phase d'enquête et de poursuite, à la traduction en justice des auteurs d'infractions terroristes ». Si la Commission dit prendre « note des préoccupations exprimées par le Sénat, à savoir la nécessité d'une analyse plus approfondie des conséquences qu'une extension des compétences du Parquet européen pourrait engendrer », elle se borne à reprendre les termes de sa communication : cette extension « se ferait en deux temps. Est requise, d'une part, une décision du Conseil européen modifiant l'article 86 du traité sur le fonctionnement de l'Union européenne, puis, d'autre part, une proposition législative modifiant le règlement (UE) 2017/1939 afin de permettre l'extension des pouvoirs du Parquet européen », étant précisé que « le Conseil européen pourrait choisir d'étendre la compétence du Parquet aux infractions transfrontières autres que le terrorisme ». Aucune de ces informations n'est nouvelle.

Or, l'avis politique avait un champ beaucoup plus large et abordait aussi la coopération judiciaire en matière pénale, le mandat d'arrêt européen - sur la réforme duquel un débat est pourtant en cours -, la formation des praticiens, le choix de la structure décentralisée et collégiale du Parquet européen et les étapes de la mise en place de ce dernier, auquel des moyens suffisants doivent être alloués, les perspectives d'adhésion des États membres non participants au Parquet européen, la coopération étroite à assurer entre ce Parquet et les agences européennes compétentes (notamment l'OLAF, Europol et Eurojust), la sécurisation de leurs moyens de communication ou encore la nécessité de lutter plus efficacement contre le développement de la cybercriminalité. La réponse de la Commission ne donne aucun élément sur ces différents aspects, pourtant essentiels. Le rapporteur regrette qu'elle n'ait pas saisi cette opportunité pour nourrir un vrai dialogue avec le Sénat sur une question aussi importante que la construction d'un espace de liberté, de sécurité et de justice.

Le même constat peut, enfin, être dressé pour ce qui concerne la réponse à l'avis politique sur la politique spatiale de l'Union européenne .

La commission des affaires européennes avait abordé dans son avis politique plusieurs points importants sur la proposition de règlement de la Commission, tels que l'atout que constitue le Centre spatial guyanais, la préférence européenne au bénéfice des lanceurs spatiaux de fabrication européenne, les programmes Galileo, EGNOS et Copernicus, la surveillance de l'espace et le suivi des objets en orbite ou encore la création d'une Agence de l'Union européenne pour le programme spatial qui doit être complémentaire de l'Agence spatiale européenne.

Or, la réponse de la Commission ne reprend quasiment aucun de ces points, pourtant essentiels pour l'avenir de la construction européenne. Elle se limite en effet à des propos excessivement généraux. Elle affirme ainsi que « le secteur spatial offre des opportunités immenses pour l'Union européenne et ses États membres » ou encore qu'elle poursuit l' « ambition de faire de l'Europe un acteur majeur de l'espace ». Elle explique que sa proposition vise un programme spatial unique et cohérent, comprenant quatre volets : la navigation par satellite (Galileo/EGNOS), l'observation de la Terre (Copernicus), la surveillance de l'espace (SSA) et les communications sécurisées par satellite (GOVSATCOM). Elle estime également que « l'accès à l'espace [...] est stratégique pour la sécurité, la défense et les besoins institutionnels de l'Europe » et « prend note » des préoccupations soulevées sur le volet spatial du futur programme-cadre de recherche et d'innovation Horizon Europe, ainsi que sur la nécessité d'efforts supplémentaires pour faire partager l'ambition spatiale européenne à l'opinion publique. Enfin, elle « soutient pleinement l'approche intégrée et proactive de la France concernant la politique spatiale européenne, visant à une autonomie stratégique et une croissance économique durable dans le secteur spatial ».

Le dialogue politique avec la Commission européenne reste ainsi trop souvent formel, n'apportant pas à la commission des affaires européennes du Sénat les réponses qu'elle espère.

Les thèmes associés à ce dossier

Page mise à jour le

Partager cette page